Tancrède Posté(e) le 17 janvier 2014 Share Posté(e) le 17 janvier 2014 C'est un sujet large, et assez imprécis, mais il me frappe aujourd'hui via l'évolution de la nature de la violence "légitime" dans le contexte géopolitique, surtout aux USA, et il s'agit en fait ici d'examiner l'impact potentiel de moyen et long terme de l'action armée, telle qu'elle se pratique de plus en plus, sur le domaine politique: pouvoir de l'exécutif proprement dit ou de qui a la prérogative de la violence, contrôle de l'action du gouvernement, comptes à rendre, considérations sur la détermination du futur d'une nation.... Je m'explique: un récent livre américain (je cherche à retrouver la référence) s'attache à remettre en perspective la politique étrangère américaine depuis 45, et surtout sur les 20 et quelques dernières années, via ce qu'on peut légitimement voir dans l'histoire de la démocratie, du pouvoir civil (et de son contrôle sur le militaire), de l'exécutif, de l'élite politique (et économique), comme un accroissement de fait (aux dépends du droit formel) des moyens -et de la prérogative réelle par le pouvoir- d'engager la nation dans des situations pouvant "rapporter des problèmes" à un horizon plus ou moins long, voire dégénérer en guerre, sans qu'un accroissement parallèle des moyens de contrôle (par le droit, les contre pouvoirs, le vote, les corps intermédiaires) n'ait été constaté. De fait, l'auteur pense que l'un des symptômes principaux actuels aux USA, comme en son temps était pointé le désormais fameux "complexe militaro industriel", est le développement continu et exponentiel de l'USSOCOM, des services de renseignement, soit une sphère de l'Etat qui échappe par beaucoup d'aspects au contrôle traditionnel par les institutions et pousse franchement loin l'acceptation du concept de mandat non impératif, soit la confiance en les gouvernants. Cette sphère de moyens d'action clandestins/semi clandestins atteint désormais des proportions énormes et représente des moyens propres très importants: le seul USSOCOM dépasse les 80 000 personnels affectés en propre, sans compter ce qu'il induit comme autres services (disponibilité de matériels, services et unités d'autres branches....) qui ne tiennent pas à ses structures, ressources et budgets propres. Et la particularité de l'USSOCOM, des services de renseignement (et d'action) des forces armées ou non, bien au-delà des comparatifs d'unités (qui a la plus grande) ou du fait de savoir si telle unité est "spéciale" ou non, est bien que son action est "deniable". Fait du prince? Action moins contrôlée par les canaux démocratiques? Capacité d'action pleinement unilatérale de la part de l'exécutif? Le point est que plus les moyens d'agir sans contrôle, ou avec contrôle restreint, augmentent, plus, de fait, l'autorité de décision est autonome du processus démocratique, et moins elle a de comptes à rendre: pour aller vite, elle gagne du pouvoir de façon disproportionnée. Là où ça se complique, évidemment, c'est qu'à la base, le développement de ces moyens "spéciaux" répond à un besoin: la conflictualité change, la capacité d'anticipation est potentiellement meilleure (ou en tout cas plus importante) -et avec elle la tentation d'étouffer dans l'oeuf un danger-, les ennemis sont multiples et polymorphes.... On connaît ces chansons, et il s'agit de problèmes réels. Les armées sont des machines lourdes et lentes à mettre en oeuvre, il faut pouvoir agir vite et bouger tout le temps, l'Etat est plein de "paperasse" et "procédures" inefficaces qui empêchent de suivre ces problèmes et d'y répondre assez vite.... Blablabla, on connaît le topo, on l'a vu et évoqué 1000 fois ici. Et il semble qu'à force d'avoir rendu, via le système international, la guerre entre grands pays quasiment impossible (nucléaire, ONU, scène médiatique mondiale, sécurité collective, droit international, intégration économique dans des circuits mondiaux, fragilité d'une économie mondiale fonctionnant en flux tendus, règles commerciales, moyens de communication et détection donnant une "visibilité" importante, multipolarisation avec une puissance mondiale....) ou en tout cas très difficile, on a multiplié les possibilités et potentiels de nuisance de toute une autre gamme de problèmes sécuritaires qui requièrent, eux, des moyens de traitement (entre autre par la violence) qui n'ont que peu de moyens de contrôle institutionnel. Il faut donc du "souple", du "réactif", de la "liberté de manoeuvre", se "débarrasser des lourdeurs".... Bien peu d'efforts sont consacrés à envisager les problèmes CAUSES par cette façon de voir répétée à l'envi dans les discours politiques et prises de position d'experts, qui présupposent sans même le discuter que cette façon de mener une politique extérieure requiert un degré toujours plus élevé de confiance aveugle dans les décisionnaires qui prennent ensuite, au moindre questionnement, comme une offense personnelle le fait qu'on s'inquiète de leurs prérogatives et moyens toujours croissants; c'est le "on est les gentils, on sait mieux que vous, laissez-nous faire, comment osez vous en douter, vous m'insultez". Personnellement, j'appelle ça la "ligne Hoover", en référence à J Edgard Hoover qui s'offusquait qu'on puisse douter de son honnêteté et de ses intentions quand il s'autorisait lui-même tous les abus, pressurait et manipulait les élus, ne rendait que bien peu de comptes et accumulait un pouvoir personnel et des moyens bien peu démocratiques. On pourrait d'ailleurs ajouter au développement dans nombre d'Etats de tendances et moyens similaires, le développement d'une "sphère privée et semi privée" des moyens de renseignement et d'action contre des situations et problèmes sécuritaires: organismes de renseignement privés, CMP, grandes entreprises développant des moyens propres de renseignement et/ou d'action (en plus des moyens de pression sur des Etats).... Un exemple des dérives de "l'action spéciale" unilatérale pour les Américains est la guerre du Vietnam: une dizaine d'année de barbouzade, puis d'implication d'unités spéciales, sans le moindre contrôle démocratique, ont débouché sur la guerre qu'on connaît. Mais je place ce sujet dans une perspective historique pour essayer de mieux expliciter ce que j'évoque comme problèmes potentiels: la république Romaine, par exemple, a commencé par une révolution de palais d'une aristocratie avide de pouvoir qui a renversé la monarchie et essayé d'imposer au final bien peu de changements, sinon celui du patron. La plèbe a contesté et imposé des limites et protections pour le plus grand nombre, laissant cependant un domaine propre aux patriciens: la politique extérieure, domaine du Sénat. Et c'est par une politique extérieure aggressive et le recours constant à la guerre que le Sénat, au départ pas l'institution dominante de la scène politique romaine, et via lui l'aristocratie, s'est arrogé assez vite l'essentiel des prérogatives politiques de la République, et a déformé son fonctionnement institutionnel et sa structure socio-économique (prolétarisation de la population romaine, dépendance économique à la guerre et à l'expansion permanente, instabilité croissante, concentration des richesses et du pouvoir jusqu'à une bipolarisation qui, ultimement, emportera la République et imposera le Principiat -ce que nous appelons l'empire). Dans l'histoire longue de la lutte des pouvoirs au sein d'un ensemble politique (dont l'équilibre à un moment donné dans un pays donné est appelé "régime", mais reste transitoire), il me semble que l'on est dans une phase d'évolution peut-être plus rapide qui est susceptible de fausser beaucoup d'équilibres que nous considérons comme acquis parce qu'ils sont écrits en théorie dans une Constitution. Qu'en pensez-vous? Est-ce que je parviens à être clair ou vous ne voyez pas le thème évoqué? Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
TimTR Posté(e) le 17 janvier 2014 Share Posté(e) le 17 janvier 2014 Pour revenir sur les déploiements du SOCOM, il y a beaucoup plus de contrôles que l'on ne peut l'imaginer. Un exemple. Les déploiements des équipes de bérets vert dans le cadre des missions de Foreign Internal Defense est contraint par exemple par le département d'état et donc entre autres par la commission des affaires étrangères du congrès. C'est eux qui décide si l'équipe peut partir, combien de temps elle va rester, ce qu'elle va enseigner et ainsi de suite. D'un point vu purement militaire, leur niveau de contrôle est même contre-productif, et explique en parti certains de leurs échecs (comme au Mali où les restrictions imposées par le Dpt D'état et l'ambassade était franchement ridicule). Donc quand un déploiement est décidé, il doit faire l'objet discussion entre les différents dpt mais aussi avec le congrès et si l'opposition n'en veut pas, elle a possibilité de le dire et si elle est suffisamment représentée dans la commission qui traite le dossier, elle peut faire annuler la mission. Mais à mon avis ta thèse tient toujours par contre.Le trend c'est que les moyens de contrôle ne suivent pas l'augmentation des moyens d'interventions extérieurs. Mais il faut quand même relativiser cela néanmoins. Maintenant, le SOCOM a atteint une telle taille que ça doit donner la possibilité à l’exécutif de noyer certaines choses dans la masse. Mais je pense que c'est pas vraiment de coté là que ça se joue. Je regarderais plutôt le couple JSOC/CIA. De ce qui est sorti de l'attaque de Benghazi, c'est que l'augmentation des missions menées par le JSOC (a priori décidé directement pas le National Security Advisor) en Libye sans coordinations avec la CIA ou le State Dpt. aurait sensiblement accru le risque de retour de bâton. Et comme il y avait pas de coordination ou de partage des infos, ils ont pas vu venir le risque et on connait le résultat. Un autre cas opposé, au Yemen, le JSOC se plaignait semble t-il du trop grand contrôle exercé par le Département d'Etat via l'ambassadeur sur ses missions. ça va pas être facile pour eux de trouver le bon équilibre. Pas de contrôle et des situation comme Benghazi vont se reproduire, trop de contrôle et il se retrouve avec une campagne anti terroriste peu efficiente comme au Yemen. en bonus, un éclairage sur la mission de US au Mali: http://www.wikileaks.ch/cable/2009/12/09BAMAKO815.html ça donne une petite idée des mécanismes en jeu. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Rob1 Posté(e) le 17 janvier 2014 Share Posté(e) le 17 janvier 2014 Je regarderais plutôt le couple JSOC/CIA. De ce qui est sorti de l'attaque de Benghazi, c'est que l'augmentation des missions menées par le JSOC (a priori décidé directement pas le National Security Advisor) en Libye sans coordinations avec la CIA ou le State Dpt. aurait sensiblement accru le risque de retour de bâton. Et comme il y avait pas de coordination ou de partage des infos, ils ont pas vu venir le risque et on connait le résultat. Je n'ai guère suivi l'affaire de Benghazi, que faisait le JSOC en Libye et quel lien avec l'attaque du consulat ? (Ce serait peut-être mieux d'ouvrir un sujet sur cette affaire) Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Rochambeau Posté(e) le 17 janvier 2014 Share Posté(e) le 17 janvier 2014 (modifié) En sommes cela revient a discuter de ce Clemenceau synthétise dans une de ses citations: "La guerre! Est une chose trop grave pour la confier à des militaires". Comme vous le disiez dans un autre topic, une démocratie fonctionne par essence de manière lente avec une plus grande bureaucratie et une juridiction plus lourde. Tandis qu'une opération militaire exigence assez souvent une prise de décision arbitraire, qui franchement ne respecte pas forcément l'état d'esprit de la majorité des politiques. A prendre comme exemples nos différentes interventions à l’extérieur, qui par la seule décision du président de la République va déployer des troupes hors de France. Dans un régime comme la Cinquième République doit on aussi réduire les prérogatives du chef de l'Etat ? Un exemple des dérives de "l'action spéciale" unilatérale pour les Américains est la guerre du Vietnam: une dizaine d'année de barbouzade, puis d'implication d'unités spéciales, sans le moindre contrôle démocratique, ont débouché sur la guerre qu'on connaît. Certaines de ces missions étaient dirigées par des politiques, on ne peut donc pas dire qu'il y a eu une perte de contrôle ? Alors que les évènements qui se sont produits durant la Guerre d'Algérie ou les politiques ont laissé les militaires dans leur merde tout en exigeant des résultats, amèneront ces derniers à faire un putsch. N'est ce pas là un cas plus approprié pour cette discussion ? Modifié le 17 janvier 2014 par Rochambeau Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Tancrède Posté(e) le 17 janvier 2014 Auteur Share Posté(e) le 17 janvier 2014 (modifié) Alors que les évènements qui se sont produits durant la Guerre d'Algérie ou les politiques ont laissé les militaires dans leur merde tout en exigeant des résultats, amèneront ces derniers à faire un putsch. N'est ce pas là un cas plus approprié pour cette discussion ? Pas forcément: l'Algérie est un cas particulier. On peut énumérer les différences, mais je prendrais peut-être la plus concrètement "cynique", mais réaliste: contrairement au VN pré 1965, l'Algérie était un sujet d'actualité en France impliquant une bonne partie de la population ou, à défaut, l'opinion publique. les politiques étaient plus ou moins jugés en fonction de leur position sur l'Algérie, ce qui amène une autre part de dérive, et la population, ou au moins celle activement impliquée dans l'histoire, a sa part de faute. C'est moins une affaire de manque de contrôle que celui de l'incompétence du personnel politique (et/ou de sa lâcheté/de son hypocrisie) et des limites de la démocratie (ou franchement de toute politique et de tout régime) dans ce qu'elle peut amener comme production de gouvernance et d'efficacité. Le VN s'est fait essentiellement "dans le dos" de l'opinion américaine qui n'en savait rien et s'en foutait. Je dirais que le cas algérien est aussi une somme de problèmes, mais pas les mêmes. Certaines de ces missions étaient dirigées par des politiques, on ne peut donc pas dire qu'il y a eu une perte de contrôle ? Des politiques mais redevables à qui et devant qui? On peut faire jouer ici aussi le "complexe militaro industriel" en tant que sphère de référence de nombre des décideurs influents de ce processus, étant donné que beaucoup d'entre eux étaient des politiques mais n'étaient pas des élus (nommés), que beaucoup étaient des politiques "de facto" mais étaient censés n'être "que" des experts (consultants, hauts fonctionnaires), et qu'un grand nombre d'élus, non élus et "experts" étaient, à des degrés divers, plus redevables à et/ou contraints par le dit "complexe militaro industriel" en tant que puissance de lobbying (carrières post gouvernement, fonds de campagne, pressions diverses....), qu'ils n'étaient contraints par les comptes à rendre à l'électorat et à la nation. Au final, on peut aller jusqu'à retomber sur le débat classique entre les experts et les élus, entre la légalité/légitimité et l'efficacité, le "gouvernement des meilleurs et le meilleur gouvernement".... Un classique dans l'histoire des idées politiques, mais j'essaie de centrer sur cet aspect particulier, moins de la décision stratégique en tant que telle que sur les tentations et dérivent qu'amènent le simple développement des outils disponibles. Un peu tout le débat sur la NSA: plus les ricains développent de joujoux, plus ils savent de trucs (mais ils savent pas forcément mieux), plus ils voient de dangers, plus ils paniquent, plus ils développent de joujoux.... Et ceux qui font les joujoux et ceux qui les utilisent sont de plus en plus ceux qui décident de quoi il faut avoir peur et combien il faut de joujoux pour calmer ces peurs (et en développer d'autres): une course sans fin et sans cesse à rythme accéléré (et insoutenable, ne serait-ce que financièrement) dictée par ceux qui ont l'expertise "tactique" et l'intérêt. C'est un peu le syndrôme de "la tête dans le guidon": plus tu regardes de près, plus tu vois de micro problèmes, et à moins de parvenir à prendre du recul, tu te perds à essayer de t'attaquer à chaque petit problème pour un rendement global (des ressources allouées) décroissant.... Et une perte totale de vue du niveau "stratégique". Au niveau d'une guerre, pour illustrer autrement la chose, c'est le moment où la guerre peut "prendre une vie propre", et où un belligérant (ou les deux) perd de vue la raison pour laquelle il fait la guerre et sacrifie tout ce qu'il a et tout ce qu'il est pour la victoire tactique. C'est un cas où le militaire sur le terrain voit et comprend mieux son problème et sa situation que ces cons de décideurs.... Mais où les décideurs voient mieux le pourquoi et l'importance relative des dits problèmes et situation de ce par rapport à l'ensemble de ce qu'il faut faire, détruire et préserver. Là, il est vrai que, dans les aspects purement pratiques, l'exemple algérien est le bon: sacrifier toute possibilité de garder une Algérie pro-française.... Pour gagner le combat contre l'appareil militaire du FLN. Modifié le 17 janvier 2014 par Tancrède Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
TimTR Posté(e) le 18 janvier 2014 Share Posté(e) le 18 janvier 2014 (modifié) Je n'ai guère suivi l'affaire de Benghazi, que faisait le JSOC en Libye et quel lien avec l'attaque du consulat ? (Ce serait peut-être mieux d'ouvrir un sujet sur cette affaire) Y aurait matière effectivement. Pour rester dans le cadre de ce sujet, la thèse à laquelle je faisais référence est celle de SOFREP. Ils ont publié un ebook sur l'attaque du "consulat". Et d'après eux le JSOC a mené plusieurs opérations visant un certain Al-Suri et un groupe nommé Ansar Al Sharia dans les mois précédant l'attaque, mais ces opérations étaient décidés directement par le national security counsil (présidé par Brennan à l'époque) sans consultation avec qui que ce soit. A force de faire monter la pression, ces opérations auraient fini par provoquer Ansar Al Sharia à riposter. Leur point de vue, c'est que si la CIA et le State Departement avait été au courant, ils auraient fait beaucoup plus attention à leur sécurité dans Benghazi. S'ils ont raison, je trouve que ça illustre plutôt bien le phénomène dont parlait Tancrède. Accessoirement la CIA semble avoir plutôt consacrer ses efforts à la recherche et destruction des stocks d'armes "à risque" (manpad, armes chimiques, etc.) alors que le JSOC chassait lui les différents groupes affiliés à Al-Qaida. Pour info le titre du livre c'est "Benghazi: the definitive report". Ils citent pas vraiment leurs sources mais l'un des 2 SEAL/CIA contractor tué ce jour était l'ami d'un des auteurs, donc ils doivent connaitre du monde parmi ceux présent dans le compound de la CIA. Leur narration des événements est probablement la plus précise et proche de la vérité, par contre pour le reste, difficile de dire, mais leurs explications ont l'air de tenir. Modifié le 18 janvier 2014 par TimTR Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
aqva Posté(e) le 18 janvier 2014 Share Posté(e) le 18 janvier 2014 (modifié) En introduction, je suis globalement d'accord sur les problèmes de gouvernance évoqués, qui peuvent se résumer au fait que ceux qui évaluent l'ampleur des menaces sont souvent les mêmes que ceux qui manipulent les budgets dépensés pour contrer les menaces ou sont en position d'instrumentaliser les menaces à fins de politiques intérieure. Evidemment, il y'a toujours quelque part un immense cataclysme imminent qui va se produire si on ne brûle pas un maximum de pognon très vite et qu'on augmente pas les pouvoirs de certaines personnes/organismes. Les exemples abondent dans l'Histoire, notamment "la guerre contre le terrorisme" qui aurait du susciter des éclats de rire immédiats. En égard à la profonde stupidité du concept (on ne peut se battre contre une tactique qui restera toujours à un niveau résiduel non nul et pose une menace insignifiante à l'échelle d'un pays - tout reposant un accident rarissime et non reproductible). Au fait que les sommes dépensées et inconvénients crées sont bien supérieurs aux couts de la menace "évitée" (syndrôme du remède pire que la maladie). Au fait que la menace aurait pu être contrée au moins aussi efficacement pour beaucoup moins cher (vraiment beaucoup: de plusieurs ordres de grandeur). De fait, un grand nombre de guerres (la plupart?) ont été déclenchées avec une très grande part d'esbrouffe à des fins de politique intérieure de la part d'au moins un belligérant (les autres réagissant à cela), après quoi la montée des tensions et la paranoia crée par le réarmement donne raison a posteriori à ceux qui ont lancé le cercle vicieux. Rome et la guerre du VN ne sont que deux exemples parmi une foultitude, dont la description donnée par Tancrède est là pour mieux faire comprendre l'idée. Après cette introduction, je suis également d'accord pour constater un certain déséquilibre du système politico-militaire américain, où le premier problème se pose dans le discours politique public américain dont le changement est le préalable à tout action sérieuse pour jeter un regard critique sur les personnes ou organismes qui accumulent du pouvoir et leur mettre des contrepoids et des limites. Beaucoup de choses sont vues par un grand nombre comme des évidences alors qu'elles ne le sont pas: le terrorisme érigé en croquemitaine, l'exagération autour de la Chine (qui pourrait bien créer les problèmes qu'elle est supposée combattre), le niveau colossal de dépenses militaires (40% du total mondial, dont la majorité du restant est le fait d'alliés!), les accusations bidon de manque de patriotisme (venant des républicains contre les démocrates), le fait que Snowden soit un ignoble traître, l'existence même d'un organisme aussi puissant que la NSA (c'est juste une parenthèse, mais ses données auraient une très forte valeur économique pour des boites privées), les polices locales sur-militarisées, la persistance de fausses polémiques comme sur la Libye, etc. Ceci dit, le même type de problèmes existait à l'époque où le communisme jouait le rôle du croquemitaine, avec le maccartysme, la crise des missiles de Cuba, la guerre du VN, les coups d'état organisés secrètement dans les pays étrangers, les abus de Hoover, etc. Encore avant, on pourrait parler de la guerre hispano-américaine ou de l'intervention aux Phillipines. Au final les Etats-Unis s'en sont toujours sortis avant que les dérives atteignent un point gravissime. Peu de systèmes politiques ont duré aussi longtemps que le système américain avec son équilibre unique et complexe de pouvoirs et contre-pouvoirs qui obligent les gouvernants à rechercher un certain consensus bipartisan et une base de soutien large. Pourquoi cela serait il pire cette fois ci? Les inégalités de richesse (au niveau de celles de 1900) et le financement massif de la vie politique par le privé est un problème récent et important, mais à part ça? Modifié le 18 janvier 2014 par aqva Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Akhilleus Posté(e) le 18 janvier 2014 Share Posté(e) le 18 janvier 2014 Qu'en pensez-vous? Est-ce que je parviens à être clair ou vous ne voyez pas le thème évoqué? Si Et d'ailleurs ce glissement vers une militarisation grise de certaines opérations fait déjà débat depuis quelques temps aux USA eux mêmes (vu que ce sont les premiers consommateurs) Le débat sur la légalité des frappes de drones (actes de guerre, pas actes de guerre, assasinats ou opérations militaires, controle hors boucle du Pentagone mais sous l'égide de la CIA) pose déjà des jalons qui montre que le flou artistique est devenu un peu pesant Ajoute la dessus le role tout aussi flou des PMCs (engagements de combat au coté de forces régulières) Ajoute la para militarisation des forces de police/sécurité intérieure (toujours aux USA) et * les militaires ont de plus en plus l'impression de perdre la main * les citoyens ont de plus en plus l'impression que le monopole de la violence par l'état a glissé vers des offices grises (privées ou étatiques mais non militaires) * les citoyens ont de plus en plus l'impression que leur sécurité interne s'est tranformée non plus en problème de police mais en problème de police sur (trop) armée à la limite entre le mercenariat et des forces armées, là aussi sans aucun controle centrale C'est un problème très américano centré et je mélange à dessein plusieurs soucis actuels mais qui montre le glissement de l'état US vers un controle de la violence qui n'entre plus dans les marges/bordures que l'on avait coutume de voir dans le monde occidental Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Chronos Posté(e) le 18 janvier 2014 Share Posté(e) le 18 janvier 2014 (modifié) Si Et d'ailleurs ce glissement vers une militarisation grise de certaines opérations fait déjà débat depuis quelques temps aux USA eux mêmes (vu que ce sont les premiers consommateurs) Le débat sur la légalité des frappes de drones (actes de guerre, pas actes de guerre, assasinats ou opérations militaires, controle hors boucle du Pentagone mais sous l'égide de la CIA) pose déjà des jalons qui montre que le flou artistique est devenu un peu pesant Ajoute la dessus le role tout aussi flou des PMCs (engagements de combat au coté de forces régulières) Ajoute la para militarisation des forces de police/sécurité intérieure (toujours aux USA) et * les militaires ont de plus en plus l'impression de perdre la main * les citoyens ont de plus en plus l'impression que le monopole de la violence par l'état a glissé vers des offices grises (privées ou étatiques mais non militaires) * les citoyens ont de plus en plus l'impression que leur sécurité interne s'est tranformée non plus en problème de police mais en problème de police sur (trop) armée à la limite entre le mercenariat et des forces armées, là aussi sans aucun controle centrale C'est un problème très américano centré et je mélange à dessein plusieurs soucis actuels mais qui montre le glissement de l'état US vers un controle de la violence qui n'entre plus dans les marges/bordures que l'on avait coutume de voir dans le monde occidental Vraiment très américain du coup. Parce qu'en Europe c'est plutot l'inverse. Se sont les forces militaires qui cessent peu à peu de faire la police dans nos Etats (disparition de la gendarmerie en Belgique, passage au Ministère de l'intérieur en France...) bien que d'autres Etats continuent à en conserver (garde civile espagnole, carabiniers italiens, je sais pas trop ou caser la police grecque...). Ce qui peut par contre être observé est l'importation de critères américains (sur pression d'outre atlantique (?) pour l'adoption de normes dans le cadre de coopération sécuritaire) visant à assurer plus de sécurité et aboutissant à un lent accroissement des compétences des forces de l'ordre voir même d'autres services (la nouvelle LPM française est assez révélatrice du problème du domaine réservé républicain, aboutissant à une confiscation progressive du pouvoir et une décrédibilisation de l'Assemblée et du Sénat). Plus généralement ne verrait-on pas plutôt une perte de savoir-faire/compréhension des questions de défense et internationales au sein des pouvoirs législatifs ? Cette perte de maîtrise ne serait-elle pas à la foi une cause et une conséquence d'une prise de pouvoir de la part d'un exécutif qui occuperait le vide dont la nature a tant horreur ? La discipline de vote en assemblées aidant à faire passer l'affaire ? Modifié le 18 janvier 2014 par Chronos Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Kiriyama Posté(e) le 21 janvier 2014 Share Posté(e) le 21 janvier 2014 (modifié) C'est un problème très américano centré et je mélange à dessein plusieurs soucis actuels mais qui montre le glissement de l'état US vers un controle de la violence qui n'entre plus dans les marges/bordures que l'on avait coutume de voir dans le monde occidental. Mais est-ce la population américaine est dérangée par ça, seulement ? Parce qu'elle fait toujours de la lutte contre le terrorisme une priorité (alors que la crise économique et son cortège d'inégalités fait bien plus de ravage sur la population que Al Qaida & Associés). Finalement la passivité de la population américaine à cet égard ouvre la route à une militarisation de la police et une mainmise des services de renseignements. Pour l'Europe le cas est différent ! Les forces armées étant réduites au minimum syndical (c.f. Belgique puis que l'on en parle), il est clair que seule la police peut prendre le relais. Modifié le 21 janvier 2014 par Kiriyama Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Akhilleus Posté(e) le 22 janvier 2014 Share Posté(e) le 22 janvier 2014 Les forces armées étant réduites au minimum syndical (c.f. Belgique puis que l'on en parle), il est clair que seule la police peut prendre le relais. De toute façon ce n'est pas le role des FA qu'elles soient pléthoriques ou pas Mais est-ce la population américaine est dérangée par ça, seulement ? Oh oui Pour différentes raisons : les "ceusse de gauche" qui y voient un durcissement contre les droits du citoyen mais on y retrouve les "ceusse de droite" qui y voient une atteinte glissante sur leurs libertés individuelles avec une police toute puissante Et donc un risque d'état totalitaire (et son corollaire de conspirations avec saisie des armes, camps de la mort de la FEMA et casques noirs de l'ONU venant faire des raffles au petit matin ....) Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Kiriyama Posté(e) le 22 janvier 2014 Share Posté(e) le 22 janvier 2014 De toute façon ce n'est pas le role des FA qu'elles soient pléthoriques ou pas L'armée ne peut pas participer à la surveillance du territoire ? Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Akhilleus Posté(e) le 22 janvier 2014 Share Posté(e) le 22 janvier 2014 L'armée ne peut pas participer à la surveillance du territoire ? En théorie l'armée n'a pas le droit (loi du Posse Comitatus) En pratique elle peut sur demande d'une agence fédérale fournir un appui en cas de besoin (catastrophe naturelle, surveillance par drones tant que les agences concernées n'en ont pas ....) La garde nationale (qui n'est pas l'armée) elle peux Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Kuznetsov Posté(e) le 23 janvier 2014 Share Posté(e) le 23 janvier 2014 La garde nationale (qui n'est pas l'armée) elle peux Alors pourquoi ils sont en Afgha? National Guard, c'est la réserve, non? Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Akhilleus Posté(e) le 23 janvier 2014 Share Posté(e) le 23 janvier 2014 Alors pourquoi ils sont en Afgha? National Guard, c'est la réserve, non? Qui ne dépend pas du DoD US mais des états (et de leurs gouverneurs) par contre elle est tout à fait rappelable en cas de conflit ouvert USA-n'importe qui d'autres C'est donc effectivement une reserve mais plus civilo-militaire que militaire pure du point de vue de la chaine de commandement Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Kuznetsov Posté(e) le 23 janvier 2014 Share Posté(e) le 23 janvier 2014 (modifié) C'est donc effectivement une reserve mais plus civilo-militaire que militaire pure du point de vue de la chaine de commandement C'est-a-dire? Moi je croyais que l'army national guard (par exemple) faisait partie de l'US army, en tant que réserve... Modifié le 23 janvier 2014 par Kuznetsov Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Rob1 Posté(e) le 23 janvier 2014 Share Posté(e) le 23 janvier 2014 (modifié) C'est-a-dire? Moi je croyais que l'army national guard (par exemple) faisait partie de l'US army, en tant que réserve... En temps de paix, ils sont sous les ordres du gouverneur de l'Etat dans lequel l'unité se trouve (d'où le fait qu'on précise souvent l'Etat : Utah National Guard, Oklahoma National Guard etc.). Pas sous les ordres de l'armée d'active, ni du ministre de la Défense, ni du Président des Etats-Unis. Evidemment, ces unités font aussi partie de l'US Army/Air Force qui doivent gêrer leur formation et entraînement. Quand le gouvernement fédéral en a besoin, il "fédéralise" ces forces, c'est à dire il les active et les faits passer sous ses ordres. Modifié le 23 janvier 2014 par Rob1 1 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Kuznetsov Posté(e) le 23 janvier 2014 Share Posté(e) le 23 janvier 2014 En temps de paix, ils sont sous les ordres du gouverneur de l'Etat dans lequel l'unité se trouve (d'où le fait qu'on précise souvent l'Etat : Utah National Guard, Oklahoma National Guard etc.). Pas sous les ordres de l'armée d'active, ni du ministre de la Défense, ni du Président des Etats-Unis. Evidemment, ces unités font aussi partie de l'US Army/Air Force qui doivent gêrer leur formation et entraînement. Quand le gouvernement fédéral en a besoin, il "fédéralise" ces forces, c'est à dire il les active et les faits passer sous ses ordres. Très clair, merci. Pour revenir au sujet des US, c'est le nombre de différent départements qui ont tous un role de défense du territoire: les polices aux frontières, dept. of homeland security, la police elle-meme, les FBI... Tous ont des capacités quasi-militaires (homeland security a des MRAP, les SWAT ils ont des véhicules blindés de l'armée, la police aussi: http://0-media-cdn.foolz.us/ffuuka/board/tg/image/1382/56/1382561903575.jpg par exemple... les gardes frontières ont des Blackhawks) Donc je me demande si c'est: 1. vraiment nécessaire? 2. Si ca sera, vu la diversité des différents 'departments' vraiment utile et pratique en cas de vrai pepin? Franchement ca me semble une fantaisie à l'américaine, du genre fusils partout.... 1 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
TimTR Posté(e) le 27 janvier 2014 Share Posté(e) le 27 janvier 2014 Dans le même genre, la SWAT team d'Ohio State (créé l'année dernière si je m'abuse) s'est offert un MRAP. D'après une amie dans cette université, ils l'ont eu gratuit ou presque. Quand on peut le faire, pourquoi s'en priver... j'imagine. C'est le bousin en question parait-il: Accessoirement, UNC Charlotte, Berkeley et quelques autres ont aussi leurs équipes SWAT. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Tancrède Posté(e) le 27 janvier 2014 Auteur Share Posté(e) le 27 janvier 2014 (modifié) On l'a déjà vu sur un autre topic: nombres de forces de l'ordre (agences fédérales, Police et Sheriffs Departments, Polices d'Etat....) ont bénéficié de l'après 11 septembre qui a vu un gigantesque plan de financement au nom de "la guerre contre le terrorisme", qui a été essentiellement un immense arrosage de fric pour acquérir du matériel et des services d'ordre sécuritaire (tendance très militarisée), et booster les effectifs, soit en fait surtout gagner de l'influence politique localement. On peut voir la continuation de cette mentalité dans l'actuel plan -et la lutte politique qui va avec- concernant la frontière mexicaine: elle n'est plus réellement un problème (le nombre de clandestins la passant est risible, et on sait que la fortification d'une frontière de cette taille marche peu et mal), mais les dizaines de milliards vont continuer à affluer massivement dans les années à venir, pour des trucs hallucinants (drones, fortifications, réseaux de capteurs pléthoriques, effectifs dantesques, surarmement....) qui sont surtout un moyen pour les conservateurs des Etats frontaliers (en fait surtout Arizona et Texas) d'injecter des masses de fric dans les canaux qui leur rapportent politiquement, et satisfaire leur base électorale (les plus radicaux) qu'ils ont passé des années à cultiver en jouant de l'alarmisme le plus absurde. Modifié le 27 janvier 2014 par Tancrède Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Kiriyama Posté(e) le 28 janvier 2014 Share Posté(e) le 28 janvier 2014 En fait cette militarisation des forces de l'ordre américaines c'est une forme de "corruption" et de clientélisme (s'attacher les votes des électeurs les plus "radicaux" et des membres des forces de l'ordre). Comme dans certains régimes autoritaires (Russie, Ukraine, Biélorussie, Asie centrale...) ? Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Tancrède Posté(e) le 28 janvier 2014 Auteur Share Posté(e) le 28 janvier 2014 Pas vraiment; ça va avec la chose, et il y a certainement une forme de culture de la "force" et des trucs virils qui va dans la part de l'establishment conservateur qui encourage ces deals, mais ce n'est pas la raison première. Dans l'ensemble, c'est pas un complot, ou une volonté agissante de renforcer l'exécutif et l'appareil sécuritaire pour établir une autorité dure (surtout quand on connaît la structure des forces de l'ordre aux USA, très peu centralisée): c'est une tendance générale qui résulte du cumul des arrangements locaux, des deals politiques, du flux des intérêts (par exemple, les sociétés de sécurité encouragent et financent les politiques qui les favorisent, évidemment). On distingue cette tendance sur des années, parce qu'elle accumule les deals de cette sorte, mais ce n'est pas un truc planifié. De l'autre côté, l'exécutif a tendance, comme les autres pouvoirs, à essayer de maximiser ses moyens pour remplir sa tâche au jour le jour, ou se rendre la vie plus facile/moins dure (quand on voit à quel point c'est devenu dur de passer une loi ou une décision sur quoi que ce soit), ou simplement obtenir des résultats visibles/vendables pour la prochaine élection, en plus d'y être amené par les divers groupes de pression et intérêts économiques et politiques en jeu (plus le lobbying interne des dits organismes de sécurité, en partie au nom de leur expertise qu'ils savent vendre et utiliser pour tout justifier, en partie par pression des empires bureaucratiques internes qui concourent pleinement des luttes politiques). La militarisation proprement dite pour les forces de polices locales, étatiques et fédérales, au plan strictement pratique (méthodes, mentalités, matériels) n'est pas un absolu non plus, même si c'est une tendance marquée, et elle résulte de nombreux facteurs, dont: - l'évolution post 11 septembre qui a renforcé, voire pendant un temps cristallisé le domaine militaire/renseignement comme l'absolue référence, l'antiterrorisme allant au-delà de la seule logique policière et devenant un domaine "attrape tout". - l'énorme disponibilité des matériels militaires/militaires-like a largement favorisé l'évolution, surtout au plan visuel/culturel - il y a, depuis les années 70 (et l'apparition du domaine antiterrorisme comme partie intégrante du job des forces de l'ordre), une évolution culturelle interne vers un certain degré de militarisation dans les modes opératoires, qui a "atteint" graduellement la mentalité policière générale. C'est particulièrement présent aux USA, pour diverses raisons et évolutions: depuis l'émergence des groupes SWAT (devenus référence, exemple à suivre....) en passant par la militarisation des grands problèmes aux USA (dès qu'il y en a un, c'est la "war on drugs", "war on crime".... On appelle tout "guerre", ce qui reflète plus que du simple vocabulaire). 1 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Kuznetsov Posté(e) le 29 janvier 2014 Share Posté(e) le 29 janvier 2014 (modifié) En fait cette militarisation des forces de l'ordre américaines c'est une forme de "corruption" et de clientélisme (s'attacher les votes des électeurs les plus "radicaux" et des membres des forces de l'ordre). Comme dans certains régimes autoritaires (Russie, Ukraine, Biélorussie, Asie centrale...) ? A mon avis je pense pas que le gouvernement essaie de se rafler des votes. Je pense plutôt que ça reflète la mentalité très pro-armée des USA. C'est leur façon de faire les choses. Mais on peut dire que vu le manque de centralisation, ça risque de créer plus de problèmes, si un vrai conflit intérieur se développerait. Trop d'unités, trop de personnes, commandant de différentes choses. Ils ne se compliquent la tache. Mais le parallèle avec la Russia, Ukraine, etc je vois pas...tu m'expliques? Modifié le 29 janvier 2014 par Kuznetsov Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
TimTR Posté(e) le 29 janvier 2014 Share Posté(e) le 29 janvier 2014 (modifié) On l'a déjà vu sur un autre topic: nombres de forces de l'ordre (agences fédérales, Police et Sheriffs Departments, Polices d'Etat....) ont bénéficié de l'après 11 septembre qui a vu un gigantesque plan de financement au nom de "la guerre contre le terrorisme", qui a été essentiellement un immense arrosage de fric pour acquérir du matériel et des services d'ordre sécuritaire (tendance très militarisée), et booster les effectifs, soit en fait surtout gagner de l'influence politique localement. On peut voir la continuation de cette mentalité dans l'actuel plan -et la lutte politique qui va avec- concernant la frontière mexicaine: elle n'est plus réellement un problème (le nombre de clandestins la passant est risible, et on sait que la fortification d'une frontière de cette taille marche peu et mal), mais les dizaines de milliards vont continuer à affluer massivement dans les années à venir, pour des trucs hallucinants (drones, fortifications, réseaux de capteurs pléthoriques, effectifs dantesques, surarmement....) qui sont surtout un moyen pour les conservateurs des Etats frontaliers (en fait surtout Arizona et Texas) d'injecter des masses de fric dans les canaux qui leur rapportent politiquement, et satisfaire leur base électorale (les plus radicaux) qu'ils ont passé des années à cultiver en jouant de l'alarmisme le plus absurde. A mon avis je pense pas que le gouvernement essaie de se rafler des votes. Je pense plutôt que ça reflète la mentalité très pro-armée des USA. C'est leur façon de faire les choses. Mais on peut dire que vu le manque de centralisation, ça risque de créer plus de problèmes, si un vrai conflit intérieur se développerait. Trop d'unités, trop de personnes, commandant de différentes choses. Ils ne se compliquent la tache. C'est pas nécessairement une question de voix, c'est plus large que ça. Quand un sherif (élue aux USA) ou Maire décide de créer une unité SWAT, ça peut faire plaisir à son électorat, aux policiers de son département potentiellement et donc rapporter des voix mais aussi indirectement tisser des liens plus étroits avec l'industrie de la sécurité au sens large qui emploi énormément de monde au USA. Donc plus tard quand il aura besoin de financement pour sa campagne électorale suivante, ça pourra aider. Par contre, c'est aussi un mouvement de société plus large que ça, et qui se limite pas qu'à séduction de l’électorat de droite. Car on pourrait pas par exemple qualifier l'université de Berkeley de bastion du conservatisme pourtant ils ont leur propre unité SWAT. C'est vraiment les 3 points qu'évoque Tancrède dans son dernier post: 9/11, la dispo des matériels et personnels et la militarisation des façons de faire qui transparaît dans la vie civile (des athlètes qui répondent "roger that" à leur coach par exemple, ça m'avait fait sourire). A ça je rajouterais une chose, c'est les différentes fusillades de ces dernières années. ça commence à leur peser dessus bien plus qu'une vague menace terroriste. Et ça sert à justifier toutes les dépenses et types de réponses au nom du better safe than sorry. Dans mon université, l'une des histoires favorites c'était celle de l'umbrella man. Un étudiant se baladait un jour sur le campus avec un objet ressemblant à une arme dépassant de son sac à dos. Il a été repéré via les caméras de surveillance (y en a partout sur le campus). Immédiatement, l'alerte est donnée, les professeurs reçoivent la consigne de verrouiller leurs classes, un mail et des sms d'alertes sont envoyés à tous les étudiants, ils font des annonces dans les hauts-parleurs, la police de l'université se met en chasse, des renforts arrivent du reste du comté, ils fouillent les bâtiments pièces par pièces, les snipers sur les toits, un hélico, les dortoirs universitaires sont verrouillés, etc. Idem dans les écoles des alentours. En fait c'était juste un étudiant avec un parapluie qui dépassait de son sac... Mais les différents officiels étaient tous absolument ravis de la réponse apportée, et il y a pas eu une ounce de remise en question. Pour la difficulté de gérer des crises avec autant d'acteurs, tu as raisons. Rien que dans le cas que j'évoquais, c'est de mémoire au moins 4 agences (police de l'uni, de la ville, du comté et l'hélico de la highway patrol) différentes qui ont été impliquées. Dans le cas de l'attentat de Boston, c'est plusieurs dizaines. Modifié le 29 janvier 2014 par TimTR Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Kuznetsov Posté(e) le 29 janvier 2014 Share Posté(e) le 29 janvier 2014 (modifié) C'est le meme genre de phénomène partout ou vont les US, notamment l'Afgha: le nombre d'unités spéciales à capacité militaire, c'est juste trop. De mémoire, il y a: Afghan local police, Afghan national police, Afghan Army (dont les forces spéciales sont quasi-indépendantes, en plus de nombreuses petites divisions) Afghan Border Police ...ca n'en finit pas. Typique des ricains. EDIT: Après avoir recherché, l'ANP elle-même est divisée (les districts ressemblent a des états américains, maintenant): Afghan Civil order police, Highway police, afghan uniform police etc... Ca existe pas une police pour tout? On le fait en France. http://en.wikipedia.org/wiki/Afghan_National_Police Modifié le 29 janvier 2014 par Kuznetsov Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
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