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De l'intégrité territoriale et des conceptions de la territorialité


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J'initie ce fil pour traiter de l'objet territorial, au centre très souvent des conflits armés et/ou différends d'ordre géopolitique. On peut bien sûr s'intéresser aux différentes conceptions de la territorialité, variables selon les espaces et les époques. On peut imaginer traiter des territorialités légales/politiques/administratives (visibles dans les atlas) tout autant que des territorialités opérationnelles (saisissables sur les champs de bataille ou théâtres à plus larges échelles).

Je commence avec cette contribution fort intéressante d'un juriste : https://books.openedition.org/putc/814?lang=fr

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Le 8/8/2018 à 16:41, Skw a dit :

Je commence avec cette contribution fort intéressante d'un juriste : https://books.openedition.org/putc/814?lang=fr

Ce texte qui compile certes une masse d'informations importante, me laisse sur une impression de devoir un peu scolaire. S'il fallait résumer ce texte, j'aurais du mal à identifier le problème posé, et la solution apportée par l'auteur.

Il ne suffit pas de faire un plan pour emporter la conviction :

Les interruptions, les repos, les sections, ne devroient être d’usage que quand on traite des sujets différents, où lorsqu’ayant à parler de choses grandes, épineuses, et disparates, la marche du génie se trouve interrompue par la multiplicité des obstacles, et contrainte par la nécessité des circonstances : autrement le grand nombre de divisions, loin de rendre un ouvrage plus solide, en détruit l’assemblage ; le livre paraît plus clair aux yeux, mais le dessein de l’auteur demeure obscur ; il ne peut faire impression sur l’esprit du lecteur.

Buffon, discours sur le style.

Plus grave, l'auteur multiplie les points de vue contradictoires sans faire de choix, sans indiquer comment il résout la contradiction :

Il décrit l'État tout d'abord comme un quasi-ectoplasme : "être artificiel" et "fiction juridique" qui permet à l'OMC par exemple de détricoter les fonctions non-régaliennes. Plus loin il reprend la définition de Max Weber : l'État comme monopole de la violence physique légitime qui ancre l'État dans le régalien.

L'irrédentisme hongrois est qualifié de « péril », et de « manoeuvre » identitaire, alors que la réunification allemande, n'aurait rien d'un péril, rien d'une manoeuvre, et rien d'identitaire, sans qu'on ne nous explique le secret de ce traitement différentiel. Pourtant l'expression "incorporation d’un territoire qui avait été séparé de l’État incorporant contre son gré" employée pour l'Allemagne pourrait tout aussi bien s'appliquer à la Hongrie et au traité de Trianon.

Parmi les sources qu'il cite, il y a un nom d'auteur qui me dit quelque chose qui est Bertrand Badie dont je n'ai pas lu le livre, mais qui semble avoir une certaine intelligence pour remettre en cause un certain nombre d'idées reçues. Mais je me demande s'il ne faudrait pas citer aussi Régis Debray qui a écrit un livre « éloge des frontières »  en 2010 que je n'ai pas lu non plus mais dont le peu dont j'ai entendu parler me laissait l'impression que c'était stimulant pour la réflexion.

https://www.lejdd.fr/Culture/Livres/Regis-Debray-La-frontiere-c-est-la-paix-interview-233498-3245441 (13 novembre 2010)

Julien Gracq m’a fait comprendre que dans « histoire-géo » le trait d’union était vital et qu’on gagnait à mettre le second terme en premier.

J’ai parcouru le Proche-Orient et vu à quel point la frontière était névralgique, positive, apaisante. La frontière, c’est la paix. Là où il n’y a pas de frontière, il y a un état de guerre.

Ce gymkhana à travers les barbelés que constitue un périple au Proche-Orient nous enseigne que la frontière est quelque chose de vital que nous, Occidentaux, avons refoulé dans l’illusion du "sans-frontiérisme". Il y a un hiatus entre notre sens commun et la réalité du monde. La résurrection des frontières est le grand fait contemporain. Les exemples sont partout. L’Inde et le Pakistan avec le Cachemire ; l’Ethiopie et l’Erythrée ; le Cambodge et la Thaïlande; et, derrière notre porte, la Belgique. Il est toujours pénible de découvrir ce qui est, quand ce qu’on souhaite ou rêve est tellement plus joli.

Modifié par Wallaby
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  • 2 weeks later...

https://www.thedailystar.net/in-focus/ghost-colonial-past-1602058 (9 juillet 2018)

L'auteur aborde le surgissement comme des champignons après la pluie des nouvelles nations issues de la décolonisation au mitan du XXe siècle :

La montée et la propagation du colonialisme découlent essentiellement de la consolidation de l'ordre westphalien européen sur le continent européen d'où il est issu. Mais le processus de colonisation a aussi déclenché un réveil "westphalien" des identités parmi les masses coloniales dominées qui étaient restées longtemps endormies dans une inconscience et un sommeil béats, ainsi que sans sens des limites qui les séparaient. Une fois réveillées, ces différentes identités nouvellement redécouvertes, enchevêtrées et entremêlées depuis aussi longtemps qu'elles avaient été dans un sens de fusion-générique de soi, sont entrées en friction les unes avec les autres d'une manière qui devait s'enflammer et exploser à un certain point. L'effondrement de la puissance coloniale européenne, vidée de sa richesse et de son énergie par deux grandes guerres, a créé le vide dans lequel le désordre néo-westphalien post-colonial s'est précipité comme un ouragan, après la fin de la Deuxième Guerre mondiale, avec une prolifération sans précédent de nouveaux États dans l'histoire, du jour au lendemain. Ce processus s'est considérablement ralenti, mais il semble qu'il ne soit pas encore entièrement terminé.

À mon avis, en rétrospective, ces premiers questionnements introspectifs sur leur identité chez ces premiers individus triés sur le volet, venant d'horizons si divers, et jetés dans ce qui était censé être un creuset de fusion (melting pot) en une seule identité hybride, s'est rapidement répandu dans des pans plus larges des communautés d'où ces différents futurs dirigeants avaient été arrachés, déclenchant en fin de compte des instincts primaires parmi leurs communautés d'origine de masse respectives que ces dirigeants "occidentalisés" formés par les Anglais n'avaient pas vraiment compris ou dont ils n'avaient pas conçu l'existence. Des masses de leurs fidèles, n'ayant pas eu le privilège de puiser dans la source de l'éducation anglaise, mais qui en avaient été simplement aspergés de quelques gouttes en bouteille, comme de l'eau de rose sur une congrégation, ont été galvanisées dans une conscience de soi qui les a conduites à tout sacrifier volontairement et à mourir, ou tuer les autres, pour assurer leur identité respective, leur nouveau sens du "caractère national", leur place légitime au soleil.

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