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Témoignage: la guerre d'un "Français comme les autres"


Rochambeau

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Voici un commentaire interessant sur la vision de certain français à cette époque:

Je vous livre ici le témoignage de mon grand-père (98 ans) sur sa campagne de mai-juin 40, recueilli cette semaine (je n'ai pas insisté des heures, malgré sa gentillesse, car ces efforts de mémoire sont aussi pour lui une fatigue; peut-être aurais-je l'occasion de compléter ultérieurement).

Sa situation est un peu particulière: né en Egypte (baptisé en Grèce) d'une mère française et d'un père tchèque, il a vécu en France à partir de l'âge de 6 ans (orphelin de son père, mon arrière-grand père ayant décédé en 1914).

Lorsque la guerre éclate en 1939, il a 29 ans et voit tous ses camarades Français partir pour le front. Lui n'est pas Français à ce moment-là (on ne devenait pas Français comme cela à l'époque) et n'est donc pas tenu de partir pour la guerre. Il décide néanmoins de faire son devoir comme les copains et espère ainsi pouvoir acquérir cette nationalité française. D'abord refusé car très maigre pour sa taille et son âge, il finit par être incorporé à la seconde tentative. Quelle n'est pas alors sa déception quand on lui annonce son versement dans les régiments de volontaires tchèques!

Heureusement, il aura de nombreux camarades bilingues dans son régiment. Anecdotes croustillantes de mon grand-père, qui ne comprenait pas un traître mot des ordres que les officiers tchèques lui donnaient en hurlant ("ils étaient plus boches que les boches"!); il ne comprenait même pas son nom avec la prononciation tchèque lors des appels!!! Ca lui a valu quelques désagréments...

Autre souvenir: la formation se passe à Agde, dans le Sud de la France; l'entraînement est pépère, pas l'impression d'être en guerre, plutôt en vacances.

Toute la drôle de guerre se passe là-bas. Puis les choses sérieuses commencent après le 10 mai. L'entraînement est accéléré. Les officiers tchèques donnent la consigne d'achever les camarades blessés au combat, la Tchécoslovaquie étant occupée par les Allemands et ceux-ci considérant donc les Tchèques comme des traîtres (pas de prisonniers, pas de pitié): idéal pour donner le moral aux combattants qu'on envoie au casse-pipe!!!

Mon grand-père ne participe pas aux premiers combats. Mais un beau jour, rassemblement général. Son régiment est acheminé en train vers le Nord de la France. Il ne peut hélas se souvenir de la date ni de la destination exactes car, me dit-il, on les fait descendre de train en rase campagne, pas dans une gare. Le régiment se dirige alors à pied à la rencontre de l'ennemi. Les hommes atteignent un vallon, dont ils dévalent une des pentes, lorsque, à quelques kilomètres en face d'eux sur la pente opposée surgit une colonne motorisée allemande. Mon grand-père m'explique: "on les a vus venir, de loin, avec leurs side-cars, leurs voitures blindées...en une seconde, j'ai pu saisir le fossé qui existait entre eux et nous, en une seconde, le mythe de la puissance de l'armée française s'est écroulé".

Les Allemands ont commencé à les canarder de loin à la mitrailleuse. Comme ses camarades, mon grand-père est resté cloué le nez dans l'herbe sur cette pente, avec son vieux fusil Lebel à un coup et ses bandes molletières qui lui faisaient mal aux jambes. Un groupe proche de lui disposait d'une vieille mitrailleuse Hotchkiss de la 1ère GM dont les servants ne purent jamais sortir la moindre rafale...

Il se souvient particulièrement du "sifflement affreux" que font les balles quand elles passent près, le petit jet de terre quand elles touchent le sol, et le terrifiant bruit mat quand elles touchent leur cible humaine. Combien d'heures ainsi, il ne peut le dire mais cela lui parut très long. Puis un officier est venu et leur a ordonné de décrocher. Au cours du décrochage, la cohésion du régiment est devenue plus lâche; il s'est retrouvé isolé, comme tant d'autres, avec un petit groupe de copains. Pas d'ordre, pas d'officier, les Allemands sur les talons et à chaque carrefour la gendarmerie "Dégagez, dégagez!!!" Il a ainsi "dégagé" sur plusieurs centaines de kms, échappant par miracle à l'encerclement, voyant nombre de ses camarades tomber d'épuisement sur le bord de la route. Noyé dans le flot des réfugiés, il a réussi à passer la Loire sans être pris. Et sa guerre s'est achevée ainsi.

Revivant un peu tout cela en me le racontant, il a conclu: "pas un de mes camarades de combat ne s'est comporté en lâche, pas un n'a faibli sous le feu ennemi, pas un n'a manqué à son devoir et c'est aussi le cas pour l'écrasante majorité des combattants français de mai-juin 40". "Mais, poursuit-il, le matériel français était un mythe; nous n'avions rien pour nous battre correctement". Et 67 ans après il ne comprend toujours pas ces "dégagez, dégagez" à chaque carrefour, cette absence de reprise en main, cette liquéfaction de l'autorité.

En vrac quelques convictions bien arrêtées:

* "Les Anglais on ne les aimait pas beaucoup: ils n'ont pas envoyé grand monde et au premier coup dur ils ont détalé comme des lapins"

* "Les communistes appelaient ouvertement à la désertion et au sabotage, pendant que leurs copains soviétiques se partageaient la Pologne avec les nazis.

* "Pétain a été traîté de lâche et même de traître après coup: lors de l'armistice, pas une seule personne autour de moi n'y a rien trouvé à redire; face au rouleau compresseur allemand, c'était la seule chose à faire pour éviter un massacre".

Voilà.

Il put néanmoins grâce à cet épisode tragique obtenir la nationalité française, dont toute sa vie il restera très fier.

http://batailles-1939-1940.historyboard.net/la-debacle-f51/temoignage-la-guerre-d-un-francais-comme-les-autresq-t1501.htm#7679

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Pour cela, il fallait lancer ou continuer un vrai programme militaire aprés la Grande Guerre.

Et puis c'est facile pour nous de juger, nous la troisième ou quatrième génération qui n'a pas connu la guerre sur son sol(chose rare dans notre pays) et bientot qui verront le centenaire du début de la Der des Der.

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