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Il y a 8 heures, Bechar06 a dit :

« Une nouvelle géographie industrielle de la France a émergé »

Dans la performance des territoires, la part qui revient au capital social, à savoir l’esprit entrepreneurial et les liens locaux de solidarité, est essentielle, soulignent, dans une tribune au « Monde », Pierre-André de Chalendar et Louis Gallois, coprésidents du laboratoire d’idées La Fabrique de l’industrie.

A u niveau macroéconomique, en France et dans de nombreux pays similaires, on observe, depuis le milieu des années 1970, une diminution de la part de l’emploi industriel dans l’emploi total. Le rebond de l’emploi manufacturier observé entre 2016 et 2024 s’est traduit par une quasi-stagnation de cet indicateur, autour de 10 %, depuis lors. Dans certains territoires, l’industrie n’a jamais cessé d’être dynamique ; d’autres, en revanche, ont perdu leur industrie, voire leur attractivité. Une nouvelle géographie industrielle de la France a émergé ; c’est sur elle qu’il convient de s’appuyer désormais.

Autrefois fers de lance de l’industrie française, une partie du Nord et une autre de la Lorraine ont commencé à perdre de leur dynamisme au mitan des années 1970, début de la désindustrialisation française. Certains territoires, dans les Hauts-de-France, en Alsace ou dans l’ancienne région Rhône-Alpes, sont parvenus à se renouveler et à garder une place de premier rang parmi les sites industriels français. Les nouvelles régions dynamiques sont la Bretagne, les Pays de la Loire, la Normandie. Durant la période 2016-2024, où la France a constaté un rebond de l’emploi industriel, ces territoires dynamiques ont connu une création nette d’emplois quasi continue. Pour d’autres, le rebond a été plus tardif ou plus fluctuant.

A un niveau territorial encore plus fin, on s’aperçoit que la géographie industrielle est dominée par les villes de taille moyenne et les petites villes très spécialisées. Les Herbiers (Vendée), Vitré (Ille-et-Vilaine) ou encore la vallée de l’Arve (Haute-Savoie) sont autant de territoires dynamiques marqués par un chômage faible. A leurs côtés, de grandes zones métropolitaines se démarquent également, comme Grand Orly Seine Bièvre, qui compte pas loin de 17 000 emplois industriels, ou Lyon, qui affiche clairement sa volonté de devenir « la ville fabricante de demain » (dans le rapport de recherche « Lyon, métropole fabricante de demain ? », cosigné notamment par Patricia Lejoux et Rachel Linossier, Ecole nationale des travaux publics de l’Etat, 96 pages).

Créatrice d’emplois indirects

Il n’y a pas de déterminisme aux trajectoires industrielles. Certes, un territoire spécialisé dans un secteur industriel très dynamique a plus de chances de réaliser de bonnes performances. Cette spécialisation est le résultat de « conditions de base », c’est-à-dire de son histoire (politique ou industrielle), de sa géographie (localisation frontalière, dotations naturelles…), de son environnement socio-économique (politiques de rééquilibrage territorial) ou encore de son capital social (esprit entrepreneurial, liens locaux de solidarité).

Toutefois, les bonnes performances ne sauraient être expliquées uniquement par la spécialisation : les stratégies mises en place par les acteurs locaux comptent également. C’est d’autant plus vrai que les entreprises industrielles contribuent doublement à l’emploi, directement et à travers les effets d’entraînement que leur activité génère sur le tissu local. Elles participent aussi, comme d’autres acteurs locaux, tels que les élus, les centres de formation ou encore les habitants salariés, à la mise à profit (ou « activation ») des ressources du territoire et à leur renouvellement, primordial pour pérenniser sa performance. Cette activation se constate lorsque les acteurs sont mobilisés autour d’un objectif commun : l’industrie. La performance des territoires s’explique donc par des « recettes » très différentes, dépendant des conditions héritées et de l’engagement des acteurs locaux, et dont les ingrédients mêlent compétences, foncier, innovation, attractivité, mise en réseau, disponibilité et qualité des infrastructures, et financement.

Parce que l’industrie est localisée dans des zones périurbaines et rurales, elle est vecteur de cohésion sociale. Rappelons qu’elle est indirectement créatrice d’emplois dans l’ensemble du tissu économique local. Une partie de ces emplois indirects est liée à la sous-traitance et aux activités de services achetées par l’industrie. Deuxièmement, des emplois appelés « induits » sont également créés lorsque la demande adressée aux industriels leur permet d’accroître les salaires, ce qui entraîne une hausse des dépenses des habitants dans des services locaux comme les restaurants ou les coiffeurs. Enfin, d’autres emplois encore peuvent provenir d’effets de proximité, à la suite de l’accroissement de productivité et de compétitivité des firmes permis par leur localisation dans un même voisinage.

Nouvelles formes de collaboration

Dans son ouvrage Comment l’industrie crée de l’emploi aujourd’hui ? (Presses des Mines, 116 pages, 22 euros), l’économiste Diana Karachanski mesure ainsi, sur la période 2007-2023, que l’apparition de 100 emplois exposés à la concurrence (manufacturiers, agricoles ou tertiaires) a indirectement suscité la création de 134 emplois dans les secteurs abrités. Le programme « Territoires d’industrie », lancé en novembre 2018, peut être considéré comme un début de politique industrielle menée à une échelle locale. Les montants alloués (1,7 milliard d’euros), surtout si on les compare aux 54 milliards du plan d’investissement France 2030 sur une période de cinq ans, ne permettaient sans doute pas d’en faire un levier majeur de réindustrialisation.

Toujours est-il qu’il a mis les acteurs locaux « au cœur du réacteur ». Ce sont en effet les intercommunalités et les industriels qui, ensemble, ont dû construire leur feuille de route locale pour l’industrie (modernisation d’une ligne de production d’une entreprise, création d’un fab lab, d’une école de production, etc.). Celle-ci bénéficie de l’accompagnement d’opérateurs de l’Etat comme la Banque des territoires ou Action Logement. S’il est difficile de dresser un bilan de ce programme en matière d’emplois créés, il est d’ores et déjà possible de reconnaître qu’il a fait émerger un dialogue entre acteurs économiques locaux dans les territoires labellisés. C’est un des résultats, maintes fois confirmé, de l’observatoire des territoires d’industrie, conduit en partenariat par La Fabrique de l’industrie, la Banque des territoires, l’institut pour la recherche de la Caisse des dépôts, l’Agence nationale de la cohésion des territoires, Intercommunalités de France et Régions de France.

Le renouvellement des ressources des territoires, et donc de la géographie industrielle, suppose des activités innovantes. On sait que l’Ile-de-France, l’ancienne région Rhône-Alpes et le bassin toulousain concentrent l’essentiel des activités technologiques. Pourtant, d’autres territoires, à l’instar de l’Alsace, démontrent aussi une capacité à introduire les technologies 4.0 plus forte qu’ailleurs. Cette capacité doit être diffusée à un plus grand nombre de territoires. L’innovation locale peut aussi être organisationnelle et sociale : de nouvelles formes de collaborations peuvent favoriser la redynamisation de territoires. C’est le cas à Romans-sur-Isère (Drôme), capitale historique de la chaussure mais en déclin, où les acteurs du secteur passent des commandes en commun pour distribuer leurs productions à travers une gouvernance et un label spécifiques au territoire.

¶Pierre-André de Chalendar et Louis Gallois sont coprésidents du laboratoire d’idées La Fabrique de l’industrie. Cette tribune a fait l’objet d’une conférence dans le cadre des Journées de l’économie de Lyon, qui se sont tenues du 4 au 6 novembre et dont « Le Monde » est partenaire.

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