Quelques réflexions personnelles tirées d'un vécu ancien... 30 ans déjà...
La dissuasion nucléaire française "élargie" à l'Europe est un vieux sujet, qui butte depuis les années 1990 (je commençais juste dans le métier !) sur trois obstacles : la peur viscérale du nucléaire dans l'opinion publique de certains de nos voisins (on ne les entend pas aujourd'hui mais qu'en sera t'il demain ?), la préférence donnée envers le parapluie US plus crédible et politiquement aussi plus acceptable car... nous même Français sommes perçus comme voulant en profiter pour prendre le leadership européen... étonnant non ?
Pour nous Français, l'élargissement de notre dissuasion nucléaire est d'abord déclaratoire, à l'instar de De Gaulle envisageant le BENELUX et la RFA comme nos intérêts vitaux, elle repose sur le fait d'introduire un doute supplémentaire chez l'assaillant possible. Cette détermination peut s'accompagner du déploiement au sol de forces françaises, en mer du groupe aéronaval "nucléarisé", voire de Rafale des FAS "potentiellement" dotés d'ASMP. Notre crédibilité doit d'abord s'accompagner d'une remontée en puissance, autour principalement de l'armement pré stratégique, celui dit de l'Ultime Avertissement", qui dans un cadre d'extension à des États européens alliés se doit à nouveau d'être réaffirmé.
Mais toute évolution en la matière doit accompagner l'expression d'une nouvelle solidarité européenne, à travers un pacte de défense européen renouvelé, auquel s'agrégeraient les États volontaires, autour d'une clause de défense mutuelle explicite, prévoyant un engagement ferme et automatique, renforçant la crédibilité dissuasive face à des menaces comme la Russie, sans dépendre de l’OTAN ou des États-Unis. Bref pour les anciens une "UEO" réinventée. Le Royaume-Uni pourrait être associé via un partenariat spécial. Politiquement et c'est fondamental, les décisions seraient prises par un vote à la majorité simple ou qualifiée entre membres, évitant la recherche permanente du consensus qui paralyse de l’UE ainsi que le procès d'intention à l'encontre de Paris... Le nucléaire ne peut en revanche que rester du ressort de l'autorité nationale concernée, la conduite des opérations militaires relèverait d'un état-major européen véritablement opérationnel s'appuyant sur les normes/standards OTAN existantes, Cette nouvelle alliance pourrait politiquement parler d'une voix unique dans les forums internationaux et régionaux de sécurité, voire soyons fous au sein de certaines institutions atlantiques afin d'instaurer un nouveau rapport de force au sein de l'OTAN..
Pour bâtir et être pris au sérieux en la matière, il faut combiner engagement français unilatéral et démarche politique collective d'alliance militaire revigorée et opérationnelle.