Tancrède Posté(e) le 10 juillet 2012 Auteur Share Posté(e) le 10 juillet 2012 Tu pêches en ne voulant pas te pencher sur le sens réel des mots que tu emploies: Dupont a été un bon exécutant, cad un bon "capitaine" et meneur d'hommes tant qu'il était dans une armée. Le jour où il a eu un poste à responsabilité, à savoir un vrai commandement autonome, il s'en est révélé incapable, même si tout commandement en Espagne avait de sérieux handicaps de par la façon même dont Napoléon "gérait" ce front, et de par la situation stratégique fondamentale; la question n'est pas d'avoir un corps d'armée, une division ou une brigade, ou même un régiment, la question est d'avoir un commandement opérationnel autonome -cad un niveau réellement stratégique et politique. Dans cet ordre d'idées n'avoir qu'un régiment à peine renforcé mais avec charge pleine, entière et autonome d'une zone de commandement/d'un théâtre, exige un niveau de compétence nettement plus élevé que ce qui est exigé d'un chef de corps dans la Grande Armée sur les plaines d'Allemagne. Celui qui dirige un corps, malgré son importance, n'est qu'un exécutant avec au final une charge qu'on pourrait qualifier de "simplement technique" (quel que soit le niveau de complexité des dites techniques). Avoir un corps ou un régiment en tant que chef au plein sens du terme est infiniment plus difficile et nettement moins "quantifiable" en termes de compétence: c'est le vrai art d'être un chef. Parce que les problématiques sont plus nombreuses, les enjeux plus totaux, la responsabilité plus vaste. Et dans l'armée napoléonienne, y'en a pas eu lourd qui pouvaient faire ça, malgré le nombre immense d'excellents techniciens capables de gérer des corps d'armée voire des pans entiers d'armée (la notion de "corps" a moins de pertinence dans les campagnes de 1812-1813): Lannes, Masséna, Soult, Davout, Bernadotte et peut-être un ou deux autres avaient ce calibre là. Ils ont le pouvoir de commander leurs troupes, en paix comme en guerre, et c'est un énorme pouvoir et une énorme responsabilité! Ce n'est pas du pouvoir, et encore moins une part DU pouvoir avec un grand P, celui par lequel on influe sur la préparation d'une armée, la définition de son champ d'usage et sa conduite opérationnelle en fonction d'objectifs politiques. Oui c'est une lourde responsabilité, pleine de sens et tout et tout, et particulièrement évidemment parce que la vie et la mort sont des enjeux réels. Mais ce n'est qu'une tâche d'exécutant. A ce compte là, tout chef de service dans la fonction public a "du pouvoir". Le Président s'occupe de la gestion stratégique d'un conflit et pas de l'opérationnel et encore moins du tactique J'ai dit à quel moment que le président devait s'occuper de tactique? Le Président est le seul "chef de guerre" en France, c'est comme ça. Et la guerre, c'est plus que les combats simplement, ce qu'apparemment tu ne veux pas comprendre. Et précisément le sujet est sur l'articulation souhaitable du politique au militaire pour un usage pertinent et efficace de la violence de l'Etat, une définition satisfaisante de l'outil, des mécanismes efficaces (sans cesser d'être légaux/légitimes) pour articuler une volonté politique pertinente et moins soumise à la vie politique dite "politicienne" (et donc à une vraie compréhension durable et transpartisane des intérêts de l'Etat) et la conduite des opérations strictement militaires (qui ne sont qu'une partie de la guerre) en continuité et cohérence avec les autres "champs" d'affrontement qu'impliquent une guerre. Entre autre, cela passe par le fait que le militaire ait un mot à dire (légitimité de son expertise, accroissement de son champ de vision hors du strict domaine "technique" de l'art des combats) et qu'il puisse le dire, que les politiques professionnels veuillent l'entendre ou non. Et ça, ça passe par du pouvoir au sens plein, par le fait qu'il y ait un "pouvoir militaire" (et non ce n'est pas une dictature militaire ou ses germes qui sont impliqués par ça). "Une profession fonctionnarisée, routinière et sans pouvoir" tu dis? Pour qui te prends-tu au fait? L'as-tu exercée cette profession avant d'en parler comme cela? Non... "Fonctionnarisés..." C'est effrayant que chaque remarque, tu ne sembles capable que de la prendre au sens le plus étroit du terme, comme si tu partais du principe que nous sommes à un degré de perfection absolue (ou presque) telle que les choses sont maintenant, et que toute pensée autre est par essence une attaque. Comme si j'avais accusé les dits généraux d'être une bande de cégétistes occupés à planquer leur inactivité et leur flemmardise sous des dehors grandiloquents de "protection des serviteurs dévoués de l'Etat". Quand je dis "fonctionnarisés", prête moi 5 minutes le bénéfice du doute (je pense pas avoir jamais donné l'impression d'être antimilitariste) et essaie d'imaginer que je souhaite plus et mieux pour le militaire, sans accuser les personnes qui s'y trouvent en particulier, et plus ce à quoi la profession et l'institution telles qu'elles sont les restreignent: - fonctionnarisé = bonnes petites cases bien définies, métier "régulé" selon des codes surdéfinis, des normes écrites et non écrites astreignantes - fonctionnarisé = des carrières sur-régulées, qui impliquent des champs très balisés avec leurs règles que toute organisation, en interne, finit toujours par utiliser pour son propre usage (les chapelles et les individus) au détriment de logiques d'ensemble, et ce quel que soit le degré de dévouement personnel . En temps de paix pour une armée très régulée, cela veut dire (vérifié dans TOUTE l'histoire) que ceux qui émergent sont les courtisans, les roublards et "paper pushers" experts dans la connaissance interne de l'organisation, et pas les "guerriers". C'est à peine caricatural. - fonctionnarisé = astreint à n'être qu'un exécutant au sens le plus strict, encadré de toute part par des règles, des barrières, des cadres de conduite excessifs nés de l'obsession de décréter à l'avance comment est la réalité. Aucune marge de manoeuvre, aucune initiative, aucune confiance réelle. "Tout militaire qui n'est qu'un soldat est un mauvais militaire" (ou un truc du genre) disait Lyautey, et pour un officier général ou un qui a un commandement autonome, cela veut dire être un politique, à un degré ou un autre. Seulement le système tel qu'il est leur enlève cette possibilité et fait que dans nos démocraties modernes, et notre pays en particulier, il y a un gap ENORME entre le "niveau politique" et le "niveau militaire". J'ai créé ce sujet dans la rubrique historique précisément pour utiliser des exemples passés montrant quelles peuvent être des idées d'alternative. Et même pour le stratégique le Président est-il compétent? Dans la pratique, non aujourd'hui via le désinvestissement de la sphère stratégique en général, et militaire en particulier, par notre classe politique (et aussi le fait que l'Europe est un protectorat de fait), fait qui perdurera tant que le militaire n'aura pas retrouvé une place légitime dans les préoccupations publiques. Mais le fait est, tragiquement, plus simple: que ce soit le cas ou non, il est le seul à avoir la légitimité et les prérogatives pour agir stratégiquement. C'est aussi con que ça, et mon but est d'imaginer comment lui placer un interlocuteur militaire qui ait une marge de manoeuvre par rapport à lui et au domaine politique en général (sans être "irresponsable" vis-à-vis du politique) en échappant à la logique de soumission totale qui, qu'on le veuille ou non, est celle que la Constitution astreint au militaire. Soumission oui, mais pas totale, c'est le principe que j'essaie de défendre. Sinon je ne comprends rien à ta dernière distinction. Je dois être trop con. Non, tu es fermé et rejette en bloc sans essayer de voir ce que je veux dire, en décrétant que je regarde de haut les généraux pour mieux les traiter de crétins sans couilles. Ce qui n'est pas le cas, j'ai déjà expliqué pourquoi. Ma distinction en d'autres mots: apparemment, un chef militaire nommé par le président et ne répondant qu'à lui est la seule façon dont tu conçois la subordination du militaire au civil, ce que je trouve étrange. Le président n'est pas "le pouvoir civil" et il est encore moins "le politique" à lui tout seul. Il n'est que le chef du pouvoir exécutif. Ce que je propose par l'élection implique plusieurs choses: - une subordination claire du CEMA au pouvoir civil, incarné en l'occurrence par le Congrès, par le contrôle parlementaire sur la définition du budget des armées et un tas d'autres mécanismes qu'on peut imaginer (définition des prérogatives exactes....) - une émancipation partielle du CEMA, justement par un statut défini clairement (notamment une durée de mandat et sa non correspondance avec une législature) et une élection du Parlement en séance plénière (et non des Chambres dans le processus législatif habituel) avec sa contrainte de majorité des 3/5ème ou des 2/3: l'émancipation est par rapport à la seule figure présidentielle (implication et contrôle du Parlement), par rapport à un président en particulier et à une majorité en particulier, ce qui rend ce CEMA élu "a-politicien" tout en le laissant sous le contrôle formel, par bien des mécanismes, du "politique", du "pouvoir civil". - une vraie marge de manoeuvre pour être un interlocuteur OBLIGATOIRE pour le président et la majorité, pour ne pas faire de l'armée une variable d'ajustement, pour limiter (pas abolir) l'influence de la politique partisane/de gouvernement et celle d'autres lobbies moins légitimes. Un tel CEMA devient un acteur, et non plus un figurant. Introduire l'élection dans l'Armée c'est la fin des haricots. Pourquoi? Il n'est pas question "d'introduire l'élection dans l'armée", mais de rendre la fonction de CEMA (et celle des CEM) à un processus de nomination par le Parlement au complet (ce qui prend la forme d'une élection dans le pur processus technique vu que ça fait du monde). Je n'ai pas parlé d'élire les officiers à chaque échelon, ou même de rendre le simple grade de général électif (avec qui pour corps électoral?). Juste de donner à la position de CEMA un statut constitutionnel et politique qui reflète ce qu'est réellement cette responsabilité si on la regarde correctement pour ce qu'elle est, à savoir une fonction politique (qui doit donc avoir ses "checks and balances") avec une marge de manoeuvre justifiée par la pérennité de la mission (qui doit être moins asservie aux logiques et à la temporalité politicienne) et l'exigence de l'expertise, et avoir de quoi confronter à la réalité autant les politiciens que l'arène publique qui ont déserté ce champ fondamental qui concourt énormément à définir leur vie en permanence, autorisant, si cette connaissance disparaît du débat public, toutes les démagogies et la mise à disposition de l'armée non aux ordres du "politique" mais aux desideratas du politicien en cours de mandat et cherchant à se faire réélire. Avoir plus de généraux en retraite se présentant aux élections? Pourquoi pas? Pourquoi ne sont-ils pas plus nombreux? Trop de mépris pour le monde politique probablement... Ils ont tort car ils se privent d'un moyen d'influence à l'Assemblée ou au Sénat, J'ai déjà expliqué plus haut pourquoi ça ne changerait rien. A supposer que des généraux puissent être acceptés par des partis qui ont déjà du mal à satisfaire toutes les demandes en interne pour des nominations aux candidatures (et ces demandes viennent de gens qui APPORTENT du poids politique sous diverses formes, donc à qui les chefs de partis doivent quelque chose s'ils veulent gouverner), et à supposer qu'ils soient élus, ce ne seront que des posters boys sans pouvoir et sans influence dans la plupart des cas, révocables à volonté. Des députés comme ça, sans pouvoir, l'Assemblée en est pleine. Le système est-il parfait? Non. Produit-il des officiers généraux exempts de défauts? Non, bien sûr. Aucun système ne le pourrait d'ailleurs Quand on dit ça, on a rien dit et on justifie l'immobilisme. Il faut aller un cran plus loin et voir les systèmes qui ont MOINS de défaut. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Jojo67 Posté(e) le 10 juillet 2012 Share Posté(e) le 10 juillet 2012 On atteint là les limites d'un forum. :P Il faudrait y passer un temps fou pour se mettre d'accord sur chaque terme, peser chaque mot en fonction de l'autre, retenir ce que pense un tel ou un tel, etc., temps que je n'ai pas et ne veux pas avoir. Un exemple: dans l'Armée que j'ai connue, le mot fonctionnaire était une insulte ou pas loin... Juste un mot pour terminer: Avoir le droit de commander des hommes au feu, de les envoyer se faire tuer ce n'est pas du pouvoir pour toi, mais "participer à la préparation d'une armée, la définition de son champ d'usage et sa conduite opérationnelle en fonction d'objectifs politique", ça oui c'est le vrai pouvoir selon toi! Laisse moi rire. =) Je crois que tu as trop fait de politique et que tu ne vois plus rien qu'à travers ça. Ton pouvoir c'est un pouvoir de papier, virtuel, de commissions, d'experts, de conflits d'intérêts, de bureaux, de manœuvres de couloirs, etc. C'est une forme de pouvoir effectivement. Le pouvoir de commander sur le terrain c'est le pouvoir d'homme à homme, les yeux dans les yeux, partageant peu ou prou le même danger, un truc qui prend les tripes et laisse des traces indélébiles, certains en sortent grandis, d'autre s'y perdent. C'est une autre forme de pouvoir. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Tancrède Posté(e) le 10 juillet 2012 Auteur Share Posté(e) le 10 juillet 2012 "Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas comprendre".... Le militaire qui "dirige" des hommes, faut vraiment voir par le petit bout de la lorgnette pour croire qu'il a du "pouvoir": il est envoyé pour ça, payé pour ça, il n'a pas d'autre choix, et quelles que soient les circonstances, il le fera qu'il le veuille ou non. Tout ce qu'il peut faire, c'est optimiser l'usage de ces hommes (et donc limiter les possibilités de pertes) à un échelon d'exécution. Ca ressemble de près ou de loin à l'idée que tu te fais "d'avoir du pouvoir"? Le fait que le domaine d'activité concerné implique la mort de soldats n'en fait pas du "pouvoir". Ce à quoi je fais référence, c'est que la responsabilité de cette tâche ait justement une contrepartie, qui est réellement du pouvoir, à savoir dans le fait d'avoir une influence réelle et incontournable dans le processus qui définit les conditions dans lesquelles ces hommes seront employés: quand ils seront engagés, où, si c'est pertinent ou non de le faire, dans quelle mesure, dans quel cadre, comment ils y sont préparés, quels moyens sont à leur disposition, avec quels alliés, avec quelle marge de manoeuvre.... Il s'agit juste de mettre dans le processus politique, en son coeur, et de façon moins facilement contournable ou franchissable par le dirigeant politique, la contrepartie de l'expertise et du souci a-politicien du militaire. Je crois que tu as trop fait de politique et que tu ne vois plus rien qu'à travers ça. Continue à avoir des certitudes toutes faites et des petites cases bien définies pour regarder le monde.... Je suis en train d'écouter une conférence d'un général américain qui parle entre autre de cela (et il est juste le CEMA américain, soit sans doute un abruti qui comprend rien) et qui semble en désaccord avec toi. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Jojo67 Posté(e) le 11 juillet 2012 Share Posté(e) le 11 juillet 2012 "Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas comprendre".... Le militaire qui "dirige" des hommes, faut vraiment voir par le petit bout de la lorgnette pour croire qu'il a du "pouvoir": il est envoyé pour ça, payé pour ça, il n'a pas d'autre choix, et quelles que soient les circonstances, il le fera qu'il le veuille ou non. Tout ce qu'il peut faire, c'est optimiser l'usage de ces hommes (et donc limiter les possibilités de pertes) à un échelon d'exécution. Ca ressemble de près ou de loin à l'idée que tu te fais "d'avoir du pouvoir"? Le fait que le domaine d'activité concerné implique la mort de soldats n'en fait pas du "pouvoir". Ce à quoi je fais référence, c'est que la responsabilité de cette tâche ait justement une contrepartie, qui est réellement du pouvoir, à savoir dans le fait d'avoir une influence réelle et incontournable dans le processus qui définit les conditions dans lesquelles ces hommes seront employés: quand ils seront engagés, où, si c'est pertinent ou non de le faire, dans quelle mesure, dans quel cadre, comment ils y sont préparés, quels moyens sont à leur disposition, avec quels alliés, avec quelle marge de manoeuvre.... Il s'agit juste de mettre dans le processus politique, en son coeur, et de façon moins facilement contournable ou franchissable par le dirigeant politique, la contrepartie de l'expertise et du souci a-politicien du militaire. Continue à avoir des certitudes toutes faites et des petites cases bien définies pour regarder le monde.... Je suis en train d'écouter une conférence d'un général américain qui parle entre autre de cela (et il est juste le CEMA américain, soit sans doute un abruti qui comprend rien) et qui semble en désaccord avec toi. Le politique qui est élu a quel pouvoir? Il a déjà menti pour avoir des voix, puis il lui faut se contorsionner pour faire passer des mesures en contradiction avec ce qu'il a promis, ses copains de parti sont là, le couteau entre les dents, prêts à le frapper dans le dos pour prendre sa place, il doit lutter contre l'inertie des bureaux, qui demeurent, alors que les politiques passent, et au final ton ministre il sera bien content s'il a pu faire passer une loi vraiment utile au pays en 5 ans. Il lui faut veiller à labourer sa circonscription de député pour la récupérer quand il ne sera plus ministre, et donc aller régulièrement flatter le cul des vaches et écouter les doléances de ses électeurs de base, qui croient presque tous que le monde tourne autour de leur nombril. Passionnant... De toutes façons notre ministre ne sera pas 5 ans en place, puisqu'il suffit d'une élection locale perdue par le pouvoir pour qu'on fasse un remaniement dont il peut très bien faire les frais, ce qui fait qu'il peut être content s'il reste ministre deux ans.. Il lui reste la gestion de la parole, le sociétal, domaine où ils sont tous très forts. Continue à tout voir au travers du prisme de la politique si ça te convient... Grand bien te fasse. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Shorr kan Posté(e) le 11 juillet 2012 Share Posté(e) le 11 juillet 2012 Soyons fou –moi en tout cas…-, allons plus loin que le vote pour désigner le CEMA. Dans l’antiquité une autre pratique tout aussi courante avait cour en Grèce ; c’était le tirage au sort. Attrapez jojo les gars :O, il nous fait un malaise :lol: ;) Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Tancrède Posté(e) le 11 juillet 2012 Auteur Share Posté(e) le 11 juillet 2012 Dans l’antiquité une autre pratique tout aussi courante avait cour en Grèce ; c’était le tirage au sort. Où le Strategos d'une cité était-il choisi par tirage au sort ? Parmi tous les citoyens votants ou un pool de candidats limité? A noter aussi que l'éducation de tout grec était, contrairement aux images qu'on peut avoir, extrêmement guerrière, ce qui en faisait quand même des gens un tantinet concernés par la chose. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Shorr kan Posté(e) le 11 juillet 2012 Share Posté(e) le 11 juillet 2012 Où le Strategos d'une cité était-il choisi par tirage au sort ?... Les Stratèges aucun, mais les Archontes si ;). ...Parmi tous les citoyens votants ou un pool de candidats limité? Implicitement ou pas, à partir d’un pool limité de citoyens. Dans le cas grecque, ils sont présenté par leur tribu, et soumis à des examens de compétences. Et in-fine, révocable à n’importe quels moments de leur mandat comme contrepoint de la possibilité à chaque citoyen qui le souhaite, de se porter candidat aux postes de magistrats. Les fonctions issue de ce mode de désignations sont de fait très encadrées et contrôlé par les institutions de la cité. Ce sont donc des techniciens aux prérogatives assez borné, mais bénéficiant d'une relative indépendance. D’ailleurs le CEMA peut être vu comme ça ; même si est un stratège militaire, il tient plus de l’archonte, surtout dans la perspective de subordination aux institutions démocratique auquel tu le soumets. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Tancrède Posté(e) le 11 juillet 2012 Auteur Share Posté(e) le 11 juillet 2012 Faut pas oublier quand même qu'il n'y a pas de modèle général dans l'espace, et surtout pas de modèle permanent dans le temps: les archontes athéniens n'étaient pas choisis par hasard, il me semble, et il faut garder à l'esprit qu'il y en a 9, dont 3 qui comptent vraiment, au 2ème rang desquels est "l'archon polemarchos" (après l'archon eponymos, le magistrat principal), le "roi/magistrat de guerre", soit le chef militaire de campagne, sorte de mélange de CEMA, de connétable et de chef opératif. Mais les réformes/révolutions de Périclès introduisent entre autres les strategoi (un par quartier/Phyle), dont un a le titre de strategoi polemarchos pour le désigner comme "primus inter pares". L'archon polemarchos est à ce stade devenu un rôle symbolique. Tout comme le titre de polémarque à Sparte a cessé d'être celui typiquement du "roi de guerre" (Sparte ayant un roi/magistrat et un roi/magistrat de guerre) pour devenir un pur grade opérationnel désignant le chef d'une mora, équivalent d'un bataillon, plus souvent une task force autonome (accompagnée d'unités alliées/vassales) qu'une subdivision d'une armée de campagne (ça arrive aussi, mais très rarement) étant donné que Sparte n'est capable d'envoyer que très peu de forces de citoyens spartiates au sens plein, vu l'obligation de garder la majorité des troupes à domicile (pour tenir le territoire contre les soulèvements d'hilotes et/ou d'alliés). De fait, ces polémarques, surtout après les guerres du Péloponèse et la tentative d'hegemon spartiate, doivent être aussi des chefs opératifs, des gouverneurs militaires, des négociateurs multi-sujets et des diplomates, soit des politiciens (et non plus de simples exécutants, de haut niveau ou non), comme tout chef militaire ayant un commandement indépendant. A comparer avec Rome, qui voyait de même tout commandement indépendant comme un rôle politique, donc appartenant, dans une subdivision très intelligemment normée, à un commandement supérieur qui n'était pas dévolu au centurionnat (les techniciens/exécutants professionnels du combat) mais à des officiers supérieurs qui étaient aussi des magistrats, cad des politiques: préfets et tribuns angusticlaves (à la fois des rôles d'EM et des rôles de chefs de task forces) sont ainsi les premiers grades/magistratures du cursus honorum pour la classe équestre, tribun laticlave et questeur (impliquant aussi rôles d'EM et commandements détachés) sont les premiers grades de celui de la classe sénatoriale, légat, prêteur/proprêteur et consul/proconsul sont les grades supérieurs réservés uniquement aux sénateurs siégeant. La tendance romaine à mettre des professionnels du combat uniquement date de l'époque de Gallien (années 260 globalement) et correspond surtout à un double besoin qui n'a rien à voir avec l'efficacité opérationnelle:- éloigner les élites des commandements par peur des séditions (ce qui se comprend) en plaçant des exécutants spécialistes à la tête des commandements autonomes qui le deviennent moins puisque la correspondance entre le "niveau impérial" et ces commandements s'accroît, traduisant autant un contrôle plus paranoïaque qu'une relative incompétence en d'autres domaines de cette élite militaire croissante. C'est grosso modo mettre quelques échelons de plus au centurionnat. - faire des économies: c'est sans doute le premier motif de cette tendance sans cesse croissante. Un officier équestre ou sénatorial coûte nettement plus cher dans la "grille salariale" de l'armée romaine qu'un centurion, même de très haut rang (le sommet des centurions, le primus pilus et le préfet de camp -grades "anoblissant" donnant accès à l'ordre équestre- gagnent à peine autant qu'un tribun angusticlave). Dans la crise économique et monétaire du milieu du IIIème siècle, aggravée par le bordel dans l'empire et la réduction du territoire effectivement contrôlé, c'est une mesure nécessaire. La tendance s'était déjà vue, particulièrement sous les Sévère, avec la plus grande faveur accordée à l'ordre équestre au détriment des sénateurs, mais le motif devait en être nettement plus politique que d'économie. Le résultat est cependant d'avoir graduellement dissocié les élites économiques/sociales/politiques des commandements militaires et politiques importants (ce qui accompagne la réduction du rôle politique des sénateurs dans l'administration impériale, transformant graduellement ceux-ci, pour la partie politique de leur rôle, en une classe de magistrats urbains limités à l'administration pratique des grandes villes): c'était se priver des personnels les mieux formés, ceux ayant une compréhension profonde et une implication permanente dans le "grand jeu" total de la politique. Un exemple remontant à la République: on peut examiner la magistrature de Cicéron en Anatolie avant les guerres civiles, et voir que ce grand personnage, qui avait sans doute eu une éducation militaire soignée comme tout sénateur romain, n'était pas un grand tacticien/technicien du combat, mais un remarquable stratège et chef opératif, précisément parce qu'il comprenait que la guerre est une chose totale à ne jamais dissocier de la politique (cette distinction étant en fait totalement artificielle et linguistique) et, en termes pratiques et opératifs, une bonne approche/pensée pour un commandement est le premier, et depuis toujours le plus puissant des multiplicateurs de forces. Sa magistrature fut un succès (si elle ne l'avait pas été, sa carrière ne s'en serait pas remise, étant donné que Cicéron n'était pas un sénateur très riche ou d'un clan puissant) parce qu'il a su comprendre les enjeux de son théâtre d'opération, ses dynamiques, ses adversaires, et où et comment taper, donc comment utiliser les forces à sa disposition. Plus largement, il a compris comment le faire à moindre coût (donc cela suppose de comprendre quels sont les besoins réels pour obtenir le résultat réellement satisfaisant: dans son cas, cela a été de ne pas rechercher de "victoire définitive" sur son théâtre, de ne pas mener de guerre complète ou de grandes opérations) afin de répondre à des objectifs stratégiques plus larges en séparant et fixant les adversaires locaux pour dégager le plus possible de forces disponibles et aller porter assistance à un autre commandement romain dans la province d'à côté, en Syrie/orient, où le rapport de force et la situation puaient franchement. Ce genre de compréhension et de décision, en l'absence de possibilité de débattre avec Rome vu les distances, ne peut être prise que par un "niveau politique", quelqu'un qui comprend les enjeux locaux et les plus larges à la fois et peut prendre ce genre d'initiatives de son propre chef. Il risque beaucoup ce faisant, et engage l'Etat romain à un niveau conséquent, en fonction d'une situation stratégique qui ne pouvait être prévue à l'avance, même vaguement. C'est pas un exécutant/technicien qui peut ou sait faire ça, c'est pas un exécutant qui a le droit/la légitimité de faire ça, c'est pas un éxécutant qui a la marge de manoeuvre/d'autonomie pour faire ça, mais quelqu'un qui saisit les enjeux plus larges, mesure les équilibres politiques, peut être un acteur militaire, politique, financier et diplomatique de haut échelon, et surtout qui peut assumer sa décision après, devant le Sénat, parce que ce sont ses pairs et qu'il leur rend des comptes sur les bases d'une compréhension commune de ce niveau de décision. A cet échelon de décision, tout choix militaire, même un qui n'engage dans les faits que des forces réduites (mais à un endroit et à un moment donné, et dans des circonstances qui font que l'impact est de plus grande portée), est politique et ne peut être pris en charge que par quelqu'un qui maîtrise toutes les données de ce choix ET peut (capacité, légitimité) en assumer les conséquences par sa fonction. Evidemment, "assumer" à Rome, ça peut aussi pouvoir dire, dans les cas extrêmes, avoir à aller prendre un bain tiède avec un couteau très très aiguisé :-[.Le fait est que tout commandement, passé un certain échelon (représenté soit par la taille des forces en jeu dans l'absolu, soit leur importance relativement à une situation/un théâtre), de même que tout niveau de commandement dans l'institution qu'est l'armée (là on parle plus du niveau "fixe" de décision stratégique/opérative et du niveau où le "concept stratégique", le format, la préparation et la forme des armées se décide), ne peut répondre à une définition aisée et facilement définissable de la "fonction militaire". On est à cheval entre ce que nous séparons artificiellement comme "politique" et "militaire", et qui implique en fait une approche plus ou moins complète où diplomatie, politique, administration, justice, négociation, finances, économie, social, sécurité civile, police et opérations militaires proprement dites interviennent dans des proportions variables et totalement inquantifiables. J'ai entendu récemment le CEMA américain dire qu'il voyait émerger la première génération de jeunes officiers trouvant normal d'être en interaction permanente et structurelle avec des interlocuteurs de tous les services fédéraux américains et divers échelons de services d'Etat et d'organisations équivalentes à l'étranger (justice, département d'Etat, finances....) en plus d'avoir à gérer une pensée interarmée présente jusqu'aux plus bas échelons, ce qui renvoyait, à haut niveau, à une pensée stratégique et opérationnelle qui ne peut plus être le fait de seuls militaires, même structurellement intégrés dans des "joint services" interarmées. Ce qui me renvoie au dernier article de Benoît Bihan dans DSI, sur son idée de ce que veut dire le terme de "mobilisation générale" au XXIème siècle, qui pour lui n'a jamais été autant d'actualité ni aussi nécessaire bien qu'il ne s'agisse plus de mobiliser en grand une population à mettre sous les drapeaux pour une durée courte, mais au contraire de mobiliser l'ensemble des capacités de la nation (dans chaque domaine, une contribution réduite et sans énorme impact sur le dit domaine) pour un effort sécuritaire permanent et de longue durée, dont le militaire n'est qu'un aspect même s'il doit couvrir un spectre plus large qui ne peut être réduit aux opérations militaires stricto censu. Une telle approche n'est plus compatible avec la définition que nous avons actuellement du "militaire" et du "civil", ce qui se traduit entre autre par une vision différente de ce "point de jonction" flou et indéfini entre "politique" et "militaire", avec un casse tête auquel il faut répondre pour ce qui concerne les aspects bien pratiques comme la répartition des rôles, l'articulation de la décision, les processus de décision et de choix, les hiérarchies pratiques.... Pour ce qui concerne juste les forces armées, cela appelle entre autre à sérieusement réenvisager ce qu'est un officier général, et plus encore ceux placés aux grands postes, aussi bien les chefs "opératifs"/de théâtre que les grands commandements et fonctions en métropole. Où s'arrête la politique "civile" et où commence la politique "militaire" puisqu'il faut bien une répartition pratique des rôles en terme de buraux, responsabilités et ressources (aussi imparfaites soit-elle)? Où commence l'échelon purement tactique où le militaire est "juste" un technicien permanent du combat et des armées? Comment répartir et encadrer l'autorité, la responsabilité et l'autonomie de décision sachant qu'il faut trouver un juste équilibre entre latitude d'action et responsabilité (ne pas avoir une fonction de décideur, quel que soit l'échelon, qui n'ait que des coups à prendre pour ses choix, ou qui en soit trop exempt)? Le fait est que c'est délicat, c'est très mal définissable, certains facteurs fondamentaux varient dans le temps (comme les actuels désintérêt et méconnaissance de la sphère publique et des gouvernants pour le domaine militaire/sécurité/stratégie), ce n'est jamais une nomenclature parfaite, mais qu'il faut le faire et qu'il y a des répartitions qui sont nettement plus imparfaites que d'autres, comme ce que nous avons actuellement. Je ne préconise pas un retour à Rome, je cite juste Rome en exemple illustrant une forme d'intégration et de continuité entre l'échelon de décision d'Etat et l'implémentation opérative puis tactique, dans une chaîne hiérarchique fondamentalement plus souple, pertinente et adaptable que la nôtre (même si non copiable dans la forme pour des raisons de différence d'époque et de différences dans la forme de l'Etat et certains de ses principes). Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Gibbs le Cajun Posté(e) le 11 juillet 2012 Share Posté(e) le 11 juillet 2012 un truc que j'observe s'est que se qui se faisait dans l'antiquité avec les Romains ,ben s'est peut-être valable dans le sens ou il y a un côté "impérial" ,avec une volonté de s'agrandir et donc un côté guerrier qui était toujours présent avec la politique .les US s'est un peu l'empire Romain de se point de vue et donc sa peu marché que si on a des intérêts expansionnistes ,avec certes pas de colonisation mais "pillage"(s'est chacun pour sa gueule ,s'est comme sa :lol: :P ) des ressources et positionné des pions stratègique par rapport aux autres "gros" de la planète .en France s'est pas le cas ,enfin dans sa politique extérieure .donc s'est sûr qu'il y aura moins de possibilité de rapprochement politique et militaire ,enfin une jonction si on est pas dans l'optique besoin d'expansion/besoins en terme de politique étrangère . Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Tancrède Posté(e) le 11 juillet 2012 Auteur Share Posté(e) le 11 juillet 2012 Attention.... Gibbs je te hais, tu me fais soudain voir que le titre est mal formulé :-X, grrrr.... Quand je dis "la jonction politique-militaire", je ne parle pas du fait que les 2 doivent converger pour être une seule et même chose, je parle plus exactement du "point de jonction" entre domaine "politique" et domaine "militaire" et la façon dont on le traduit en termes d'organisation, d'encadrement civil du militaire, de hiérarchie formelle et de processus de décision (et chaîne de commandement sur le plan le plus concret), de répartition des attributions et prérogatives, de la façon de rendre chaque degré d'une hiérarchie responsable et comptable de ses choix dans une proportion juste et pertinente.... Le tout sous l'angle de savoir comment on obtient un bon niveau de pertinence stratégique et d'efficience de l'organisation. Déjà, si on regarde de près les démocraties occidentales actuelles, on note que ce point de jonction (qu'on peut voir, symboliquement, via le fait de savoir à quel "moment"/niveau on passe du costard à l'uniforme très galonné, et de ce dernier au treillis :lol:) n'est pas le même, que l'encadrement civil ne couvre pas les mêmes champs de compétences, de responsabilités et d'action.... Même s'il y a une similarité apparente et dans les faits une certaines convergence répondant à des conceptions plutôt pas trip éloignées. Mais il n'en est pas de même partout, et surtout, si on regarde l'histoire, et pas que des régimes monarchiques, on peut voir qu'il y a d'autres formes d'organisation, de systèmes de décision et de conduite de l'action, dont on pourrait s'inspirer pour adopter aujourd'hui des façons plus pertinentes d'aborder les problèmes stratégiques/militaires et d'y répondre. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Gibbs le Cajun Posté(e) le 11 juillet 2012 Share Posté(e) le 11 juillet 2012 Attention.... Gibbs je te hais, tu me fais soudain voir que le titre est mal formulé :-X, grrrr.... Quand je dis "la jonction politique-militaire", je ne parle pas du fait que les 2 doivent converger pour être une seule et même chose, je parle plus exactement du "point de jonction" entre domaine "politique" et domaine "militaire" et la façon dont on le traduit en termes d'organisation, d'encadrement civil du militaire, de hiérarchie formelle et de processus de décision (et chaîne de commandement sur le plan le plus concret), de répartition des attributions et prérogatives, de la façon de rendre chaque degré d'une hiérarchie responsable et comptable de ses choix dans une proportion juste et pertinente.... Le tout sous l'angle de savoir comment on obtient un bon niveau de pertinence stratégique et d'efficience de l'organisation. Déjà, si on regarde de près les démocraties occidentales actuelles, on note que ce point de jonction (qu'on peut voir, symboliquement, via le fait de savoir à quel "moment"/niveau on passe du costard à l'uniforme très galonné, et de ce dernier au treillis :lol:) n'est pas le même, que l'encadrement civil ne couvre pas les mêmes champs de compétences, de responsabilités et d'action.... Même s'il y a une similarité apparente et dans les faits une certaines convergence répondant à des conceptions plutôt pas trip éloignées. Mais il n'en est pas de même partout, et surtout, si on regarde l'histoire, et pas que des régimes monarchiques, on peut voir qu'il y a d'autres formes d'organisation, de systèmes de décision et de conduite de l'action, dont on pourrait s'inspirer pour adopter aujourd'hui des façons plus pertinentes d'aborder les problèmes stratégiques/militaires et d'y répondre. oups ,s'est moi qui suit à l'ouest là :-[ désolé . Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Tancrède Posté(e) le 2 août 2012 Auteur Share Posté(e) le 2 août 2012 Parler de la guerre de 1870 sur un autre sujet m'a fait m'intéresser un peu sur cet aspect de jonction politique-militaire et de fonctionnement des hauts niveaux décisionnels, ceux de l'organisation de l'armée comme la décision opérationnelle, sous le Second Empire. C'est terriblement complexe et difficile à simplifier, autant parce que les organisations et leurs domaines d'action sont difficiles à exactement circonscrire que les interactions sont nombreuses et le rôle des individualités et petits groupes (coteries) est grand. De façon amusante, j'avais examiné un peu en détail la façon dont ce processus de décision militaire était né et avait grandi en Israël, posant des problèmes que l'Etat hébreu n'est toujours pas capable de résoudre aujourd'hui. L'organisation militaire du Second Empire est comme souvent au XIXème siècle aussi en grande partie une organisation politique et sociale, et une organisation sécuritaire: son fonctionnement, sa nature, est de force forcée une incarnation du régime, même si d'un régime à l'autre, la plupart des organisations formelles peuvent avoir les mêmes noms et la plupart des mêmes personnels (chefs, cadres et troupes), et fondamentalement être les mêmes en apparence. Ce qui change est plus difficilement visible dans beaucoup de cas: latitude d'action, "pouvoir" (de pression, de résistance aux décisions....) et champ de compétences, position politique de négociation par rapport aux composantes du pouvoir légal, position/image dans la société (dont peuvent dépendre la motivation de la troupe et des officiers, leur loyauté, leur dévouement, la désertion....), composition du corps des officiers et fonctionnements internes (groupes/chapelles, cercles d'amitiés, hostilités/rivalités, voire franches divisions, modes de promotion, éducation....) et ses liens avec les diverses strates de la société civile.... Sous les mêmes apparences formelles, la réalité peut être très diverse et le fonctionnement de la décision en matière militaire, générale comme opérationnelle, peut varier du tout au tout. L'armée du Second Empire est encore fondamentalement celle héritée des réformes de Gouvion St Cyr (et de Soult) sous la Restauration, avec évidemment des changements formels (réformes, innovations militaires) et informels (origines des cadres, nouveaux types de troupes, instauration de "systèmes" de fait, "culture militaire" née des guerres et garnisons, changements de régimes politiques et leurs impacts, constitution/transformation des groupes internes à l'armée) survenus entretemps. La première caractéristique de l'armée est celle de la conscription universelle partielle de fait; terme contradictoire? Pas vraiment. La conscription est officiellement abolie (et la population préfère ça), mais si l'armée choisie est une armée professionnelle, donc de "volontaires", l'insuffisance des vocations amène un système complémentaire fondamentalement lié à la conscription. Il s'agit du fait que tous les hommes en âge de servir sont recensés et examinés, et tous les aptes sont ensuite tirés au sort, avec possibilité, en cas de sélection, d'acheter une dispense (si on peut aussi trouver un remplaçant apte), achat évidemment accessible seulement à certaines catégories sociales. Le but est de combler la différence entre l'effectif fourni par le volontariat et celui fixé comme objectif par le gouvernement. C'est l'armée des "bons" et des "mauvais" numéros (d'où l'expression "tirer le bon numéro"), un système injuste et de plus en plus mal vécu au fil du siècle, qui n'est pas sans impact sur l'armée via un certain enkystement du système et le caractère fondamentalement orienté "ordre" du commandement, que les officiers soient républicains ou monarchistes; ce fait permet aux classes aisées de lutter contre toute évolution du recrutement pour s'épargner une mobilisation de leur jeunesse, et toute protestation violente est étouffée avec le concours d'une armée dont les dirigeants luttent par principe contre le désordre, qu'ils aiment ou non la chose. Mais cet enkystement a aussi une autre conséquence: la constitution de toute autre force, de toute "seconde armée", une "armée" qui aurait donc de la troupe et des cadres, pour disposer de réserves militaires plus vastes en cas de conflit majeur aux frontières, est systématiquement torpillée et sabotée par tous les moyens possibles par le corps des officiers, un cas terrible de résistance institutionnelle qui s'ajoute aux luttes politiques (en lien avec elles) sur ces sujets. Garde Nationale, Garde Mobile et Réserve Militaire en feront toutes les frais: jamais ce problème d'une "force d'urgence", d'une réserve de mobilisation instruite, ne sera résolu, et le conservatisme d'une armée toujours plus professionnelle et méprisante à l'égard de ces unités renforcera toujours un peu plus ce fait (notamment en s'assurant que toute réserve soit mal formée et équipée). Ce qui rejoint la commodité politique: la réserve est impopulaire et coûteuse (infrastructures, équipements, coûts d'entretien, et surtout cadres permanents nombreux), donc elle devient systématiquement une variable d'ajustement budgétaire. Tout au plus permet-elle, selon la conjoncture, de réduire les effectifs d'active à une période où la politique étrangère se veut apaisante. Et le système a aggravé le mécontentement au fur et à mesure de la croissance de taille de l'armée, et ce d'autant plus que le remplacement devient une industrie; des sociétés, associations et agences se créent pour trouver des remplaçants remplissant les critères de l'armée (aptitudes physiques/mentales et le fait d'être déchargé d'obligations militaires), faciliter la signature de contrats de gré à gré, acheminer les remplaçants à travers le pays (vers le département de recrutement).... Avec même des contrats d'assurance contre le "mauvais tirage". Ce secteur économique, condamné par les officiers, a pour effet d'amoindrir largement le volontariat, vu qu'un engagé ne touche pas la prime fournie à un remplaçant. La structuration de ce système en vient à créer des différences accrues entre régions riches (où les dispensés sont nombreux) et régions peu ou pas favorisées (qui fournissent un effort disproportionné de conscrits), entre villes et campagnes (qui fournissent plus de monde), différences qui tranchent et radicalisent encore plus le paysage politique. L'obligation militaire, enfin, était liée à une interdiction de mariage, facteur accroissant le mécontentement: on ne pouvait se marier qu'après le dégagement d'obligations militaires, ce qui renforçait le clivage riches-pauvres, impactait la démographie et empêchait une portion conséquente de la population de "s'établir" et de commencer une vie et une activité avant 27 ans en moyenne. Et la croissance de l'armée passe par deux mesures tout aussi mal vécues: l'accroissement du contingent levé, et l'allongement du service dû (qui passe vite de 6 à 8 ans, plus une période de réserve), avec en plus une élévation constante du prix du remplacement qui mécontente les strates les moins aisées des "classes moyennes" (petits notables, paysans un peu à l'aise....). Si le corps des officiers est contre le système de recrutement, et ce en partie en lien avec les divisions politiques, il ne recoupe pas celles-ci: grosso modo, et c'est ce que les officiers finiront par avoir sous Napoléon III, l'armée renforcera sa professionalisation, donc encourageant le volontariat et un recrutement par tirage plus difficile à éviter (conditions financières et conditions de proximité géographique ou de famille, dissolution des systèmes d'intermédiation). Tout en continuant à épargner les plus riches et à renforcer les clivages régionaux, ce système renforce l'écartement armée-nation en insistant sur le professionalisme, le rempilage et le service de longue durée. Accessoirement ce professionalisme amène aussi un vieillissement du corps des sous-offs et de celui des officiers: un effectif global qui évolue peu et un encouragement au rempilage (et on rempile avec son statut/grade précédent) limitent les perspectives d'évolutions donc accroissent les rivalités et "clans" internes tout en faisant grimper la moyenne d'âge, ce qui encourage le conservatisme et les chapelles permanentes au sein de l'armée. Accessoirement, la troupe restant en majorité faite de conscrits "à mauvais numéros", elle n'est pas toujours très enthousiaste et apprécie inégalement les soldats de métiers, aussi bien les soldats engagés (entre 12 et 20% de la troupe environs) que les sous-officiers (souvent plus âgés et d'autant plus durs qu'ils sont mécontents du peu de perspectives) et officiers (une caste de plus en plus à part). Il est amusant de noter qu'armée (avec la récente armée d'Afrique et la Légion) et marine (qui inclue déjà les troupes de marine et fusilliers marins) doivent compter une moyenne de 100 à 150 000 professionnels engagés volontaires, soit le chiffre que De Gaulle évoque encore dans L'armée de métier en disant qu'il est une relative constante dans l'histoire récente. Une autre conséquence de cet enkystement et de l'évolution du corps des officiers en petit monde en soi (fait inévitable, mais qui peut prendre beaucoup de chemins) est l'enfermement, alors commun en Europe, dans une certaine culture militaire qu'il est du coup difficile de remettre en cause; survalorisation de la bravoure et de l'élan sur la culture scientifique et "l'intellectualisme" de plus en plus nécessaires (un fait commun en Europe, où la Prusse fait figure d'exception), petit fonctionnement interne népotique et entriste.... L'armée française a cependant la particularité de favoriser un très large recrutement d'officiers issus du rang, ce qui a bien des avantages mais aussi de terribles inconvénients, surtout quand on en arrive aux hauts niveaux de décision et quand ce fait renforce démesurément le travers culturel de "l'opérationnel" vs "l'intellectuel", créant un faux et dommageable fossé entre l'officier combattant et l'officier d'Etat-Major, ce dernier étant culturellement torpillé et rabaissé dans l'armée où il ne pèse rien. Cela se sent dans l'organisation de l'armée où le corps d'EM est minuscule, et pire encore permanent: des officiers qui, après quelques expériences réelles, s'orientent vers le travail d'EM et n'en sortiront jamais plus, et qui sont peu nombreux (une armée microcéphale) et sans grande perspective de carrière passé certains grades. Ajoutons pour la bonne bouche l'interdiction ou la sévère censure (celle de droit et celle de fait) à l'encontre de la réflexion tactique, opérative et stratégique, autant pour des raisons politiques (sujets comme le recrutement, la formation, la vie en caserne -décriée et condamnée par la religion, donc très politique-, la politique extérieure, la colonisation, le "système militaire" à adopter, la condition militaire....) que pour des raisons de culture interne à l'armée. L'anti-"intellectualisme" et la censure se conjuguent donc pour faire en sorte que la pensée militaire s'atrophie, que le conservatisme aveugle et borné s'affirme, qu'une culture militaire "lyrique et nostalgique" s'affirme, que quelques sujets d'applications seulement puissent être sujets d'abondantes publications sans pour autant avoir d'effet sur l'organisation (la médecine militaire en est un exemple tragique, mais aussi les avancées scientifiques, malheureusement cantonnées à des domaines d'application étroitement pensés). L'officier écrit, parfois beaucoup même, mais sur certaines choses seulement qui deviennent des marottes, des obsessions et les sujets auxquels la culture ambiante le cantonnent pathologiquement: histoire militaire sous l'angle lyrique et nostalgique (surtout de l'empire), campagnes coloniales et récits ethnographiques sont la majorité du genre. Et on regarde par le petit bout de la lorgnette, avec de très grosses oeillères: on ne s'est jamais autant intéressé à l'histoire militaire de l'empire, et pourtant ce fut pour n'en retenir que des aspects limités, flattant l'imagination, aucunement pour un regard critique et moderne (travail d'EM, organisation logistique, anticipation, mouvements à grande échelle....). La culture militaire des officiers français évolue alors fortement, le scientisme se limitant beaucoup à certains domaines très précis, incapable de mise en perspective tactico-opérative (sûrement pas stratégique), de réflexion organisationnelle, de lutte contre les mentalités d'armes (chacune a sa culture).... A bien des égards, l'armée française en souffre encore aujourd'hui. L'organisation au sommet Le Ministère de la Guerre au XIXème siècle a en quelque sorte suivi l'évolution vers la professionalisation de l'armée, ce qui se traduit vers une organisation toujours plus poussée vers la spécialisation (ce qui veut dire des chapelles concurrentes toujours plus "féodales"). Les grandes "directions" sont: - les "opérations militaires": bureau du ministre qui régente les mouvements de troupes en métropole, donc une fonction terriblement politisée - "affaires d'Algérie": il s'agit donc d'un rôle aussi politique qu'administratif et militaire, l'Algérie étant une "province" du Ministère de la Guerre - "personnels" - "comptabilité" - "Artillerie" et "Génie", de simples bureaux, deviennent 2 directions autonomes, ce qui traduit autant l'importance (justifiée) de ces domaines que leur constitution en chapelles internes avec moyens permanents, corps d'officiers dédiés (donc des petits mondes en soi), influence au sein du Ministère, monopole de l'information sur leur domaine.... Sous leur égide se trouvent deux simples comités: les fortifications, et surtout (tragiquement), le matériel. Moindre importance, moindres moyens. - le "Dépôt de la Guerre": cartographie, études historiques, veille des autres armées (section "statistiques militaires", en fait le renseignement militaire).... Une direction un peu fourre-tout et dont la faiblesse (budgets, priorités, effectifs) traduit l'isolement des officiers d'EM et la "voie de garage" que leur petit nombre et leur "statut" représentent. - il y a d'autres directions, mais aussi un rôle important joué par les fonctionnaires civils, véritable chapelle interne sans uniforme (la direction "comptabilité" est la seule confiée à un civil cependant). Le point n'est pas d'énumérer l'exacte nomenclature, mais de souligner que le Ministère se segmente en chapelles qui veulent toutes acquérir le statut de directions (il n'y en a que 2 sous la Restauration), ce qui alourdit le système et marque la délimitation de "territoires" internes qui, sous le couvert de leur "expertise", sont en fait des camps retranchés et des enjeux de pouvoirs et de carrière, des petits ministères en soi. Une direction, cela veut dire des moyens propres, des prérogatives légales, un statut pour son patron, des cercles et pyramides d'alliés, d'obligés et d'affiliés, un accès à l'information et des moyens pour la filtrer.... Soit des moyens propres pour ralentir et orienter le processus de décision. Plus il y a de directions, plus il y a nécessité de tractations, débats, négos, concessions, délais.... Ca fait autant de clientèles à satisfaire, de guéguerres à subir, de querelles d'ambitions, d'idées et d'intérêts, de lobbies internes.... Et donc plus de difficultés à diriger, ou au moins à coordonner, mais plus encore à penser. Comment un ministre peut s'imposer face à de tels camps retranchés, chacun un monde en soi, fermement lié et tenu par des règles avant tout non écrites qui s'imposent aux écrites, qui suivent leur ligne interne, leur intérêt, leurs organisations et dynamiques internes. Fixer des règles théoriques est une chose, les imposer en est une autre, qui sera toujours aléatoire: plus on donne des moyens propres à une organisation (nécessaire pour faire un travail correctement), plus on lui donne la latitude pour constituer un pôle de pouvoir interne ("pouvoir" en général et/ou "pouvoir" dans sa branche d'activité), que les règles théoriques le permettent ou non. Et on n'obéira pas au ministre et au président parce qu'il faut obéir au ministre ou au président: il y a mille et un moyens de n'obéir qu'en apparence en dénaturant l'ordre si on ne l'approuve pas ou qu'on souhaite lui apporter des modifications plus ou moins drastiques. Et quand on n'est pas dans une dictature, il y a en plus plein d'autres gens et organismes à aller voir et avec qui négocier pour faire un peu plus ce qu'on veut. Plus grave encore dans la France du XIXème, le Ministre n'a pas développé de services propres centralisant la réflexion et les choix, quelque chose pour avoir un tableau clair, pour organiser planification, prospective militaire, réflexion, renseignement, pour concevoir des plans, coordonner l'activité des directions.... Vu que les directions étaient censées être ça à la base avant de croître en entités importantes et rivales, donc à part. Et l'absence d'une formation militaire supérieure (condition d'un corps d'EM important) maintient les écarts culturels de chapelle. Suite au prochain numéro.... Dédié à l'EM et aux commandements. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Tancrède Posté(e) le 3 août 2012 Auteur Share Posté(e) le 3 août 2012 Seconde partie pour ceux que l'armée française du XIXème siècle intéresse.... Parler de l'articulation politique-militaire et du haut commandement à cette époque, c'est parler avant tout des officiers. Et parler des officiers à cette période qui couvre grosso modo les années allant de 1815 à 1870, c'est parler avant tout des sous-officiers. Pourquoi? Un chiffre simple: les 2/3 du corps des officiers en moyenne viennent du rang, et on n'explique ni le fonctionnement en général du commandement, de son articulation avec le politique, de ses profondes divisions internes (au sein du corps des officiers, entre les grands chefs, entre les armes; divisions qui remonte jusqu'à l'organisation de l'armée et la relation au politique) et de ses échecs plus ou moins spectaculaires, mais aussi des divisions internes de l'armée en général, sans examiner cette composition assez unique en Europe (seule l'armée russe a alors un certain pourcentage, très limité, d'officiers issus du rang). Avant toute chose, on peut remarquer un point particulier: la figure du militaire, mais surtout de l'officier, n'est pas forcément très populaire sur cette période en France, ce que peut indiquer le faible taux d'engagés volontaires dans une armée qui est de fait une armée de métier. Cela varie avec les périodes, mais entre les années 1820 et les années 1850, l'officier n'est pas vraiment très considéré socialement, ni populaire (avec entre autre effet un vrai problème de recrutement de qualité), ce qui a pu avoir tendance à favoriser une impression de déclassement, accru par la composition aux 2/3 "populaire" du corps (= stigma social), à laquelle le corps a réagi par un certain isolement culturel méprisant à l'égard de la société civile (notamment caricaturée par la vision d'une société fondée sur le seul argent, très en phase avec la période de la monarchie de juillet). Divisions entre les officiers issus du rang et ceux issus des Ecoles (essentiellement St Cyr et Polytechnique, plus les écoles d'application du Génie, de l'artillerie et de l'EM, les 3 seules écoles d'application d'alors) qui viennent en immense majorité des classes aisées, divisions entre les grandes figures du haut commandement (mais existant en fait aussi à tous échelons où les places et promotions sont chères dans une armée de carrière "surpeuplée" et dont la moyenne d'âge augmente), divisions politiques entre monarchistes légitimistes, monarchistes constitutionnels, bonapartistes, républicains et "socialisant", divisions sociales (nobles, bourgeois et couches populaires), divisions entre religieux et anticléricaux (majoritaires: l'armée est alors très peu religieuse, souvent décrite comme "voltairienne", les aumôniers y sont rarissimes et interdits dans la plupart des unités), divisions entre régions d'origines, divisions entre armes et corps.... Les clivages ne manquent pas dans l'armée française d'alors, en tout cas dans sa partie "permanente", principalement le corps des officiers. Les officiers généraux A la restauration, conséquence de la période précédente, le pays se retrouve avec 446 officiers généraux de haut rang (dont 3 colonels généraux et 10 maréchaux!); sous Louis-Philippe, ce chiffre est encore de 283, ce qui reste surdimensionné par rapport à la taille des armées. Et surtout dans une armée professionnelle, cela entraîne très tôt une concurrence accrue pour les postes et l'influence, des luttes déchirantes sur tous les sujets, donc la constitution de clans, la "fortification" de petits domaines féodaux dont la croissance du nombre des directions sous le Ministre témoigne. Gouvion St Cyr créera un corps d'EM permanent, avec son école d'application, dès 1818, mais la réforme est mutilée très tôt et continuellement si bien que les 2 ans de stages en unité de combat qui vont dans la formation des officiers.... Sont les seuls de leur carrière où ils auront à commander des hommes. Le corps forme avant tout des ordonnances et des rédacteurs dans les EM et les directions centrales, puis reprend les tâches du corps des ingénieurs géographes en 1831, pour dresser ce qui devient les "cartes d'Etat Major".... Sans que ces cartes répondent à des spécifications militaires (ils les font pour tous les services de l'Etat) vu leur connaissance quasi inexistante des besoins pratiques des unités combattantes. Le corps d'EM est donc de fait.... Une chapelle pure et dure, fonctionnant en circuit fermé. Recrutement L'armée française post-1815 doit faire avec une foultitude d'héritages, y compris dans ce domaine: 25 ans de changements ont constitué un corps d'officiers aux recrutements très variés, voire bordéliques dans l'ensemble, et s'y greffe le retour d'émigrés et de fils d'émigrés et de royalistes. Une phase d'épuration éloigne les trop compromis et trop militants, ainsi qu'un peu de trop plein, mais c'est à partir de ce corps initialement divisé que tout va se composer, dans une France qui cherchera pendant 55 ans sa stabilité politique, avec toutes les divisions internes que cette situation suppose. Dès la réforme de 1818, il est prévu qu'un tiers des places de sous-lieutenants soit réservé aux sous-officiers (2 ans de service comme sous-off), les 2/3 restants étant "alloués" aux diplômés des Ecoles spéciales militaires. Les promotions sont aux 2/3 à l'ancienneté et 1/3 au "choix du roi" (plutôt donc du ministère, donc on imagine le processus et ses biais internes) jusqu'au grade de lieutenant-colonel; au-dessus, c'est entièrement un processus de "choix du roi". Quel que soit le régime, cela changera peu, Soult ne faisant qu'aménager le système sous Louis-Philippe, en 1832 (1 an de service comme sous-off suffit désormais). Ce système crée déjà des tensions politiques extrêmes, les monarchistes ultras et conservateurs hurlant dessus. En interne, on crée dès l'abord une concurrence dure entre officiers issus du rang et ceux des Ecoles, qui de fait à cette époque est une concurrence sociale entre les couches populaires et les classes aisées. Par ailleurs, Soult sécurise la fonction d'officier pour éviter les épurations politiques suite à un changement de régime ou de majorité: les officiers ont un statut très protégé (qui deviendra ensuite celui de la fonction publique) qui durera jusqu'en 1974! De fait salutaire à une période de changements politiques brutaux, cette disposition crée aussi potentiellement (et dans pas mal de cas effectivement) des effets catastrophiques, surtout quand elle se joint au vieillissement des militaires de carrière (qu'elle encourage) et à la relative stagnation de la taille de l'armée. Pour les officiers issus du rang, notamment, c'est une sécurité de l'emploi inespérée, un vrai enjeu de vie qui explique leur présence et leur constitution en lobby interne. Malgré les proportions fixées, le corps est vite constitué aux 2/3 d'officiers issus du rang, et ce de façon très stable sur toute la période. Il s'agit de l'effectif global cependant: les armes savantes sont à plus des 2/3 encadrées par des officiers issus des Ecoles, de même que l'intendance (entre 80 et 90%) et évidemment le corps d'EM, à 100% fait d'officiers diplômés. En revanche, l'infanterie a 50% d'officiers issus du rang, la cavalerie 70% (chiffre le plus étonnant dans cette "arme noble" dont la réputation d'esprit "bourrin" vient peut-être de là :lol:), la gendarmerie plus de 80% et l'infanterie de marine 85%. Pourquoi? Simplement par la taille des armées, cad le niveau de besoin: les écoles restent relativement petites et leurs promotions sont limitées, bon nombre en plus des diplômés atteignant plus souvent de hauts postes sont victimes d'épurations, les accroissements d'effectifs des troupes lors de crise obligent à recruter dans le rang (une promotion de grande école ne s'accroît pas rapidement: elle est peu élastique à la demande), mais il faut aussi noter le problème de la vocation dans les élites. Les Ecoles sont de haut niveau, et on est à une époque où le Bac est déjà un diplôme de haut niveau: les effectifs de volontaires, au regard de la taille des besoins de l'armée, sont faibles. Politiquement en plus, les changements politiques provoquent épuration mais aussi démissions parfois massives: la noblesse légitimiste quitte l'armée en très grand nombre en 1830, et même la noblesse en général, quoique sur-représentée par rapport à sa population, ne représente que moins de 10% du corps. Mais pour les élites en général, l'armée n'est pas vraiment la voie royale: les démissionnaires en cours de carrière sont fréquents, l'armée dans bien des cas étant une passade de jeunesse, une situation d'attente (pour hériter, épouser ou trouver un travail en se faisant des relations). Et les écoles sont chères et exigeantes: seules les classes aisées peuvent se les offrir et ont le background éducatif pour les réussir, mais ces avantages les orientent vers d'autres débouchés, même si elles prennent initialement cette voie (ce qui s'observe dans l'histoire des promos de l'X). Il n'y a que pour les couches populaires que devenir officier est une promotion sociale. Et pour les Ecoles, les bourses n'ont qu'un effet très limité pour les formations pointues, de même que le financement total des études par l'Etat dans ces filières après 1848. Seule St Cyr voit la part des boursiers issus des classes populaires grimper à de hauts niveaux. A noter aussi que selon le grade, la proportion d'officiers issus du rang varie, mais 75% des sous-lieutenants en viennent en moyenne. Les hauts grades présentent des proportions inverses, et quand on arrive en haut, les officiers issus du rang sont l'exception qui confirme la règle (Bazaine en est l'archétype, mais même 5% des colonels et lieutenants colonels seulement viennent du rang). Quoiqu'il en soit, cela crée deux groupes d'officiers dans ce qui est censé être un corps, et cela se voie notamment dans la formation, l'éducation, qui forme la base de 2 écoles de pensée radicalement différentes, et donc opposées. Les diverses politiques d'instruction des officiers issus du rang ne seront pas très réussie: si l'armée permet, surtout à partir des années 1830 avec les premiers grands systèmes scolaires, d'alphabêtiser et instruire la troupe à grande échelle (écoles régimentaires), aucun système satisfaisant ne pourra être créé pour donner aux officiers issus du rang une vraie formation d'officier (manques de budget, absence de vrai corps enseignant adapté à cette tâche particulière, peu de matériels et livres, et surtout déplacements constants: changements de garnisons des unités -déjà "l'aménagement du territoire"-, mobilité des officiers et surtout campagnes extérieures). Ajoutée à la division interne du corps et aux certitudes acquises "sur le tas" par ces officiers, avec en plus un niveau politique qui ne veut pas trop voir les officiers réfléchir à de grandes questions d'organisation (très vite politique) ou s'habituer à savoir critiquer, on comprend mieux le mépris anti-"intellectualiste" de cette masse immense du corps des officiers. Ajoutons-y l'isolement du corps d'Etat-Major (issu uniquement des Ecoles, mais en plus "à part" au milieu des officiers issus des écoles en général, et à part dans l'armée) dont l'enseignement d'application est purement théorique et la carrière sans commandement effectif d'unités de combat, et qui pourtant est le premier fournisseur d'officiers généraux (les 3/4 d'entre eux en viennent; en Crimée, plus de 80% des généraux en viennent), et on peut imaginer que le corps des officiers ne pense pas vraiment de la même façon. Ajoutons les querelles de personnes, chapelles et ambitions pour le haut niveau, et on peut dire "la bonne ambiance". Sur le plan opérationnel, entre les corps savants à écoles d'application parfois trop théoriques, et les corps "pratiques" aux officiers peu éduqués, le haut commandement isolé dans ses étoiles gagnées en EM et les querelles d'origines et de schémas de pensée différents, l'idée d'un "combat interarme" est tout aussi extra-terrestre que celle d'une camaraderie quelconque ou d'une pensée pertinente de l'armée en général. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
aqva Posté(e) le 6 août 2012 Share Posté(e) le 6 août 2012 ce qui se traduit vers une organisation toujours plus poussée vers la spécialisation (ce qui veut dire des chapelles concurrentes toujours plus "féodales"). Pour la note, c'est pareil à la fin XIXème - début XXème siècle. L'armée se divise en: - Un ministre de la guerre qui change tous les ans en moyenne, ce qui ne lui laisse pas le temps d'agir (sans compter que les considérations politiciennes qui lui prennent le plus clair de son temps). - Directions du ministère de la guerre dont le nombre augmente avec le temps, qui sont très autonomes et techniciennes dans leur approche, sur lesquelles le ministre ne peut pas grand chose. - Corps d'infanterie provinciaux (tenus par des anciens de 1870 qui sont les héritiers de l'anti-intellectualisme de second empire). - Vice-président du conseil supérieur de la guerre, virtuellement chef du groupe principal en temps de guerre. - Etat major des armées composé d'officiers brevetés. Jusqu'en 1912 le vice-président du CSG n'a aucune capacité d'action sur celui ci. - Une "école de guerre" sans pouvoir pour faire appliquer sa doctrine et dont l'autorité est purement morale. L'armée française de 1914 démarre le conflit sans doctrine, autre que les "modes" du moment (comme l'offensive à outrance) plus ou moins suivies et l'impact de la personnalité du commandant. La suite plus tard. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
aqva Posté(e) le 20 août 2012 Share Posté(e) le 20 août 2012 Au même moment (après 1870 et jusqu'en 1940), le principal débat sur l'organisation de l'armée porte sur le choix entre une armée profesionnalisée peu nombreuse avec un temps de service long pour les conscrits (proche de celle du second empire l'universalité en plus), et une armée de masse avec un service court et des réservistes maintenus à niveau régulièrement (on peut prendre comme exemple la milice suisse). La sujet est sorti notamment pendant sur le débat la loi des trois ans, avec le livre visionnaire "l'armée nouvelle" de jaurès en faveur d'une armée de masse qui prédit très bien la guerre à venir. La première solution préférée des militaires et des politiques - radicaux et de droite - a fini par l'emporter, un choix malheureux l'armée française ayant failli être défaite en 1914 par son mépris des réservistes allemands (et du réserviste en général), conduisant à une sous-estimation de 20 corps d'armée de l'armée allemande. Le rejet du plan XVI (avec démission forcée du général Michel du CSG) prévoyant de mettre le point fort sur la Belgique a été aussi motivé par ce choix: pour avoir les effectifs pour porter le combat en Belgique, il était obligatoire de mettre en première ligne les réservistes, ce qui était inconcevable pour la plupart des généraux d'alors. Puis l'armée française a subi des pertes colossales du fait de l'instruction insuffisante des officiers de réserve (en plus du déficit d'artillerie lourde et de mitrailleuses), la doctrine française étant loin d'être stupide ou erronnée en tant que telle (Grandmaison a été un très bon chef pendant la guerre), mais mal appliquée par les éxécutants aux bas échelons et sous une forme très simplifiée donc qui caricature la pensée de son auteur ("prendre l'ascendant moral sur les barbelés"). Avec par ailleurs une armée "pro" très vite bouffée par l'attrition des combats. Au delà du débat techicien, le choix entre armée profesionnalisée et armée de masse est surtout un sujet politique: la gauche française soutient une armée citoyenne basée d'une part sur une accès large à l'armée (d'où une forme de contrôle de l'armée par le peuple) et d'autre part sur un service militaire court pour ne pas voir se développer un endoctrinement et une solidarité profesionnelle remplaçant la solidarité citoyenne. La droite tient la position inverse, pour des raisons de contrôle social: une armée de milice composée massivement des couches populaires fait peur, et une armée où le temps de service est long donne confiance à la capacité du commandement à forcer l'obéissance des conscrits et maintenir l'ordre social. Après la première guerre mondiale, le service militaire sera réduit à un an en 1928 consacrant la victoire de l'armée de masse de la gauche. Mais la résistance culturelle de l'armée va flinguer le processus: pour la grande majorité des généraux français de l'entre deux guerre, il est inconcevable de mener des opérations complexes, donc des guerres offensives, avec une armée de réservistes à service court. L'armée française va donc se tourner vers une guerre purement défensive, retranchée aux maximum derrière le béton et la cuirasse pour compenser une troupe vue comme insuffisante. Ce dès la fin des années 20, bien avant l'arrivée d'Hitler au pouvoir et à un moment où le territoire n'est pas menacé! La pensée de De Gaulle dans "vers l'armée de métier" est caratéristique de cet a priori: l'armée offensive mécanisée qu'il souhaite est obligatoirement une armée profesionnelle avec au moins 6 ans de service. Autant dire inacceptable pour la gauche (le projet a été également rejeté par la droite pour des raisons financières, éviter une nouvelle dévaluation du franc). La défaite de 40 sera due à une armée française très défensive et timorée, où la décision est extrêmement centralisée aux hauts échelons, du fait de la méfiance institutionnelle envers le bas de la hiérarchie des officiers. Les cours complémentaires pour les officiers de réserve seront mal suivis et peu efficaces, le statut étant peu valorisé. Le pire est que cet a priori comme quoi un conscrit de moins de 2 ou 3 ans est impossible à former à une tâche réellement militaire est un fait purement culturel: l'armée allemande a employé des réservistes en première ligne dans des guerres offensives en 1870, 1914 et 1940, avec une doctrine très aggressive leur confiant beaucoup de responsabilités en 1940. Et ce fait culturel dans l'armée a couté deux guerres à la France (1870, 1940) et a failli en couter une troisième (1914)! :P On voit dans cette évolution la grande continuité des institutions, tant certaines similitudes culturelles entre l'armée du second empire et celle de la IIIème république sont flagrantes (à commencer par le mépris de la réserve, le fractionnement en chapelles (voir le post au dessus), les divisions politiques, etc.). Biblio: voir Elizabeth Kier pour l'entre-deux-guerre, https://docs.google.com/viewer?a=v&q=cache:pQwb7rWvvMYJ:people.reed.edu/~ahm/Courses/Reed-POL-359-2011-S3_WTW/Syllabus/EReadings/02.1/02.1.Katzenstein1996The-Culture186-215.pdf+kier+french+army&hl=fr&gl=fr&pid=bl&srcid=ADGEEShHPKz3ov7jE-AZj48NESAYUg-a6I5I5ZRnBTN2CNstPWvaIeXMNXLrJYwrxtUt4OOZ3p0FEd4DG-5XawWpC2nQUnXRpB4ibFawzeN9D-sCsO0jIvwXOreHCbAYoAZVwAgNKeou&sig=AHIEtbT5TMYfVG2Xi2esHjriMLeohsQBiA Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Tancrède Posté(e) le 20 août 2012 Auteur Share Posté(e) le 20 août 2012 Le pire est que cet a priori comme quoi un conscrit de moins de 2 ou 3 ans est impossible à former à une tâche réellement militaire est un fait purement culturel: l'armée allemande a employé des réservistes en première ligne dans des guerres offensives en 1870, 1914 et 1940, avec une doctrine très aggressive leur confiant beaucoup de responsabilités en 1940. Et ce fait culturel dans l'armée a couté deux guerres à la France (1870, 1940) et a failli en couter une troisième (1914)! N'exagérons rien, il y a d'autres facteurs: - le faible taux d'encadrement dans l'armée française par rapport à l'armée allemande (de l'ordre de 1 cadre en France pour 4 en Allemagne, à effectif égal): l'Allemagne formait plus de cadres, permettant cette décentralisation du commandement. Il y a bien sûr aussi la mentalité/culture et la qualité de la formation des cadres qui jouent aussi (mais c'est au global réduit comme différentiel pour les bas niveaux: les cadres français ne sont pas mauvais), mais dans l'ensemble, l'armée allemande est nettement plus articulable et décentralisable dans la pratique - les ressources: les Allemands peuvent dépenser pour ça. Outre la moindre nécessité de dépenser pour la marine, il y a la taille et le dynamisme des économies. La France a plus été contrainte d'arbitrer, et le choix de 1914 pour le nombre plus que pour la qualité a sans doute été payant - quoiqu'on en dise, 1 an n'est pas suffisant pour faire un bon conscrit employable dans des opérations complexes. La formation individuelle va vite, mais plus on pousse la manoeuvre à grande échelle, plus on cherche à autonomiser la troupe et à lui laisser des marges d'initiative, plus il faut du troufion, et surtout des sous-offs et officiers très au point, et des unités rôdées. Possible avec des conscrits d'un an encore dans l'active, pas possible avec des réservistes avant un bon moment de réacclimatation. Faut pas oublier quand même que les réservistes, ce sont aussi les sous-offs et officiers, et la complexité de leur tâche dans des opérations de vastes armées cherchant à manoeuvrer de façon coordonnée, croît exponentiellement avec le grade, allongeant la période de réacclimatation/reformation. Surtout que dans le cas de la France vs l'Allemagne par rapport à d'autres pays, il y a peu de temps pour réagir: peu de recul stratégique, une grande infériorité démographique, des moyens matériels et financiers plus limités, ça laisse peu de marge d'erreur. Un conscrit en temps que tel est largement formé en un an, ce n'est pas idéologique; mais une unité de conscrits, et plus encore des grandes unités de manoeuvres, c'est nettement plus dur et long. Avec des réservistes, et à moins de mettre une proportion plus grande de cadres, y compris un fort volant de cadres permanents, c'est nettement plus rude. L'armée allemande a quelques avantages, outre le nombre: un avantage marginal dans le fait d'une meilleure formation de la troupe, un plus grand avec une réserve mieux maintenue à niveau (question de ressources aussi), et surtout un avantage énorme dans le temps et l'argent consacrés à former une proportion de sous-offs et officiers nettement plus importante. Là est le secret. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
aqva Posté(e) le 27 août 2012 Share Posté(e) le 27 août 2012 les ressources: les Allemands peuvent dépenser pour ça Tu t'imagines trop une armée allemande surentrainée et disposant de ressources humaines illimitées en 1940. - A 150 divisions pour 70 millions d'habitants, on a un ratio meilleur mais pas énormément mieux que les 100 divisions françaises pour 40 millions (en soustrayant la contribution de l'empire). Par la suite l'Allemagne montera à 200-250 divisions sans devoir renoncer pour autant à une doctrine exigeante. - La France n'a pas subi les restrictions du traité de versailles, en Allemagne le service militaire n'est revenu qu'en 1935. En dépit des structures "para" militaires pour contourner le traité, était loin des 39 000 officiers d'active et 90 000 de réserve français, avec en plus 4 millions d'hommes des classes 1901-1913 n'ayant pas connu le service - je cite frieser. - D'après Frieser encore, la moitié de l'armée n'avait au mieux que quelques mois d'entrainement. Tu peux mutplier les postes de cadres, si ils sont aussi à peine moins bleus que ceux sous leurs ordres, cela ne sert à rien. Seules les vagues 1 et 2 étaient complètement entrainées (60 divisions ce qui est égal à leur équivalent l'effectif "d'active" allié). Les vagues 3 et 4 avaient 2 à 3 mois d'entrainement. Les vagues 5 à 9 quelques semaines. Pour la 10ème vague cela tombait à deux semaines après quoi elle aurait été envoyée directement jouer la chair à canon si le conflit avait duré. :O Cette structure a été décrite comme une lance à la pointe acérée mais au manche d'autant plus pourri qu'il est long. Le plus dont a bénéficié l'armée allemande est un bon retex de la campagne de pologne et une bien meilleure utilisation de la drôle de guerre pour se perfectionner, surtout dans sa meilleure composante. Il n'y a pas eu de repli sur une doctrine prudente et ultra défensive par peur des fantomes, malgré de nombreuses carences dans l'entrainement. La particularité de l'armée française est 1940 est de décourager énormément les initiatives à bas niveau, au point de mettre 15 jours d'arrêt à un lieutenant pour avoir osé ordonner un entrainement de tir anti-char, qui ne laisse aucune initiative aux bas officiers (strictement rien ne peut être fait en dessous du grade de lieutenant colonel malgré toute la bonne volonté du monde, ce qu'a très bien décrit marc bloch) et est très centralisée. Beaucoup de ces bas officiers voire les officiers moyens se réfugient par réaction dans l'inaction et la pulsanimité pour ne pas être sanctionnés (d'autant plus que l'action est manifestement inutile), les problèmes étant non résolus ou cachés. C'est aussi une armée trop économe des mauvais bouts de chandelles, où l'entrainement est faible par économie de munitions et de temps (passé à construire des bunkers voire aux travaux agricoles). Tout cela a miné l'efficacité de la préparation pendant la drôle de guerre. En 1870 les bas officiers sont encore des serres files napoléoniens, et la proportion d'active est nettement plus importante dans l'armée française. En 1914 je veux bien admettre une avantage qualitatif allemand. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Tancrède Posté(e) le 27 août 2012 Auteur Share Posté(e) le 27 août 2012 Je ne parlais que de 1914 (et ça vaut aussi en partie pour 1870). Et pour les ressources, je parle surtout de budget: l'Allemagne de 1914 a un PIB/tête beaucoup plus élevé. Pour 40, tu ne contredis pas ce que j'ai dit ;). En 1870 les bas officiers sont encore des serres files napoléoniens C'est ce qui tiens les rangs, faut pas les sous-estimer parce que ça nous semble bête et méchant: c'est de là que vient la différence entre une unité qui tient et une qui lâche. la proportion d'active est nettement plus importante dans l'armée française Mais le nombre est tellement en faveur des Allemands, même en ne comparant que l'active.... Surtout que eux, leurs réserves (Landwehr comprise) sont correctement entraînés, contrairement aux françaises, et la France souffre pour le coup d'un manque de cadres très grave (sans compter leur mentalité/culture, le problème de la chaîne de commandement, des chapelles....): ça va pour articuler l'active, mais après, nib.... Et le système de mobilisation est tellement merdique que moins des 3/4 de l'active peuvent être mobilisés sur le front, aggravant encore plus le déséquilibre. Sans compter évidemment le haut commandement des deux côtés, dont le différentiel limite les défauts allemands (concentrations rapides, avance au son du canon, bonne perception, initiative.... La formation en paquets denses bien tenus fonctionne pour eux).... Et accroît les français. Et la France n'a que l'active, et une active spécifique à un système de conscription pourri: service long pour une minorité tirée au sort, servant avec des pros. Le tout pour un effectif trop limité par rapport à ce que les Allemands peuvent balancer. La particularité de l'armée française est 1940 est de décourager énormément les initiatives à bas niveau, au point de mettre 15 jours d'arrêt à un lieutenant pour avoir osé ordonner un entrainement de tir anti-char, qui ne laisse aucune initiative aux bas officiers (strictement rien ne peut être fait en dessous du grade de lieutenant colonel malgré toute la bonne volonté du monde, ce qu'a très bien décrit marc bloch) et est très centralisée. Beaucoup de ces bas officiers voire les officiers moyens se réfugient par réaction dans l'inaction et la pulsanimité pour ne pas être sanctionnés (d'autant plus que l'action est manifestement inutile), les problèmes étant non résolus ou cachés. C'est aussi une armée trop économe des mauvais bouts de chandelles, où l'entrainement est faible par économie de munitions et de temps (passé à construire des bunkers voire aux travaux agricoles). Tout cela a miné l'efficacité de la préparation pendant la drôle de guerre. La particularité de l'armée française est 1940 est de décourager énormément les initiatives à bas niveau, au point de mettre 15 jours d'arrêt à un lieutenant pour avoir osé ordonner un entrainement de tir anti-char, qui ne laisse aucune initiative aux bas officiers (strictement rien ne peut être fait en dessous du grade de lieutenant colonel malgré toute la bonne volonté du monde, ce qu'a très bien décrit marc bloch) et est très centralisée. Beaucoup de ces bas officiers voire les officiers moyens se réfugient par réaction dans l'inaction et la pulsanimité pour ne pas être sanctionnés (d'autant plus que l'action est manifestement inutile), les problèmes étant non résolus ou cachés. C'est aussi une armée trop économe des mauvais bouts de chandelles, où l'entrainement est faible par économie de munitions et de temps (passé à construire des bunkers voire aux travaux agricoles). Tout cela a miné l'efficacité de la préparation pendant la drôle de guerre. Yep. Tout caca :-[. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
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