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Survie de l'Empire romain d'Occident au détriment de l'Empire romain d'Orient


Revan

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Dernièrement je réfléchissais à des idées d'uchronie sur une éventuelle survie de l'Empire romain. Après Silverberg et son "Roma Aeterna" dans lequel les Hébreux n'ont jamais quitté l'Egypte, je vous propose de vous attarder sur la fin de l'Empire romain. Souvenez vous qu'à la bataille d'Andrinople, les Goths écrasaient l'armée de Valens. Que se serait-il passé si les Goths et les autres peuplades barbares s'en étaient pris à l'Orient plutôt qu'à l'Occident ? Si Alaric n'avait pas pris Rome mais Constantinople ? 

 

Qu'est ce qui aurait pu conduire l'Occident à survivre au détriment de l'Orient ? Et comment peut-on envisager l'Histoire avec une éventuelle survie de l'Empire romain d'Occident ?

 

Aurait-on assisté à un déclin de l'Empire romain d'Occident comme celui de l'Empire byzantin ? Ou alors, sans la pression des Perses, des Arabes puis des Turcs, l'Empire romain d'Occident aurait pu survivre et garder "une forme romaine" ? Quel impact également sur un Orient hellénisé mais fragmenté en différents royaumes barbares ?  

 

Bref, beaucoup de questions, et je vous propose d'en débattre. D'abord sur les causes de ce changement géographique, puis sur les conséquences (sur le court terme mais également sur le long terme).

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L'Uchronie commence quand ?

 

-Juste après Andrinople et on part du principe que Théodose ne parvient pas à refiler (normalement Andrinople c'est sa zone) la patate chaude des goths aux occidentaux ?

 

 

Globalement faut se rendre compte que l'Empire d'occident a une base fiscale plus faible que celui d'Orient du fait d'une décroissance démographique en Gaule et, me semble-t-il, d'une extinctions des filons d'or en Ibérie.

Modifié par Chronos
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Globalement faut se rendre compte que l'Empire d'occident a une base fiscale plus faible que celui d'Orient du fait d'une décroissance démographique en Gaule et, me semble-t-il, d'une extinctions des filons d'or en Ibérie.

 

Y'a ca mais de manière générale l'Empire d'occident est moins peuplé que celui d'Orient, a des provinces plus pauvres ou coutant plus cher à tenir au pas (Albion, les franges Germaniques et la Panonie pour ne pas les citer), s'est épuisé en de multiples guerres civiles et a été bouffé par une/des épidémies dont plusieurs de peste

 

L'empire d'Orient lui est plus peuplé, tourne sur des provinces globalement plus riches (l'Egypte notamment grenier a blé principal de l'Empire unifié) est plus stable (relativement parlant grace à un système de clientélisme et d'élimination discrète des geneurs) que l'Empire d'Occident, subit moins de guerres civiles (même s'il y'a des desordres ponctuels) même s'il s'épuise (mais à plus long terme) avec ses guerres contre les Perses et les épidémies que lui aussi subi (mais dont il se relève plus facilement que l'Empire d'Occident)

 

De plus l'EROrient a fait une revolution fiscale que n'a pas fait l'EROccid ce qui lui donne une stabilité monétaire et de trésorerie qui va manquer à Rome tout en avantageant Constantinople qui jouera là encore du clientélisme pour envoyer les barbares aller jouer ailleurs (genre "prend ce sac d'or et va voir à Rome si j'y suis")

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On peut partir dans un premier temps de la défaite d'Andrinople, mais pour les besoins du scénario, on peut partir d'une période antérieure pour éliminer certains problèmes, comme la crise économique qui a frappé l'Empire romain à la même époque. 

 

Pour ce qui est de la démographie de l'Empire romain, je sais en effet qu'il y avait une crise en Occident.

Cependant, la chute de l'Empire romain d'Occident est due à plusieurs causes qui conjuguées eurent raison de lui : crise économique, pression barbare, incompétence des politiques.

Pourtant, l'Empire romain d'Occident a une frontière beaucoup moins difficile à défendre. Quand on regarde une carte, l'Orient doit faire face le long du Danube mais également en Asie Mineure, en Syrie et en Palestine, face à un adversaire bien plus organisé que les Germains : les Perses sassanides. Si l'incompétence politique avait été du côté de l'Orient (mort prématurée de Théodose par exemple), alliée à une poussée germanique vers le Sud et non vers l'Ouest, l'Empire romain d'Orient aurait-il été capable de résister ?

Et inversement, avec une pression barbare amoindrie (rien que les Goths en moins), des choix et des décisions plus pertinents (et un leader politique comme Julien ou Constantin), l'Occident aurait-il été capable de repousser les Germains et de garder leur territoire inviolable ? Et à partir de là, comment aurait évolué un Empire romain d'Occident ?

Modifié par Revan
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Pour la note: Stilicon est tué en 408, alors qu'il était pressé par une invasion de l'Italie par des bandes de germains (suèves et vandales surtout), encore en délicatesse avec Alaric qu'il venait de vaincre et de rallier, en tension avec l'orient post-Théodose (risque de guerre entre les 2 empires, sous forme de "guerre civile" pour la domination: on rêve encore de direction unifiée dans certains cercles).... Et évidemment par l'arrivée massive d'envahisseurs via le Rhin, ce qui suscitait tout un tas de nouveaux problèmes en Gaule (invasion, et soulèvements locaux/régionaux contre le centre qui n'aidait pas). Beaucoup de sollicitation au mauvais moment, équilibre instable au centre du pouvoir occidental, et là-dessus, Stilicon se fait buter.... Le système de prise de décision à la tête de l'empire d'occident disparaît dans les faits pour quelques temps.... Au pire des moments.

on peut partir d'une période antérieure pour éliminer certains problèmes, comme la crise économique qui a frappé l'Empire romain à la même époque.

 

 

Y'a pas tant une crise économique qu'une crise fiscale soudaine qui s'ajoute aux problèmes fiscaux récurrents et structurels (régions ponctuellement pillées/envahies ne paient pas d'impôts pendant un temps, autonomismes antifiscal des élites provinciales).... Elle tout simplement au fait que de nombreuses régions sont aux abonnés absents, principalement pour cause de présence hostile, genre étrangère, sur leur sol. Combine ça avec des finances impériales en flux tendus (généralement le cas pour tout Etat, surtout quand l'équilibre politique du pouvoir est délicat -cad qu'il faut distribuer à tous), et ça résume vite la chose.
Maintenant, si la crise économique mise en cause est celle du IIIème siècle, difficile de la dégager du paysage: c'est le grand creuset de l'histoire romaine de l'antiquité tardive, et elle résulte de la structure même de la dépense publique et de l'économie romaines du Haut Empire. C'était une crise inflationniste inévitable (parce que l'inflation n'était pas un phénomène analysé) en raison de la croissance constante, mais surtout irrégulière et disproportionnée (par rapport à l'économie et à son assise dans la population "fiscalisée", en réduction par polarisation des richesses) de la dépense militaire et publique, et de la part ponctionnée par les élites.

Tout le IIIème siècle et la réfondation de l'Empire par Aurélien, Dioclétien et Constantin en découlent, avec le passage au "Dominat" (le type de régime qu'est l'empire de la fin du IIIème siècle au Vème siècle en occident, et plus en Orient).

 

l'Empire romain d'Occident a une frontière beaucoup moins difficile à défendre. Quand on regarde une carte, l'Orient doit faire face le long du Danube mais également en Asie Mineure, en Syrie et en Palestine, face à un adversaire bien plus organisé que les Germains : les Perses sassanides

 

C'est principalement une "illusion de carte": la frontière orientale est de fait plus facile à défendre (sous réserve d'avoir à demeure les effectifs pour, ce que généralement l'empire a eu), et il a fallu la conjonction exceptionnelle de causes structurelles et ponctuelles nombreuses pour rendre possible les désastres du court épisode des années 260 (défaite et capture de Valérien, razzias sur la Syrie et le sud de l'Asie Mineure). Et même dans ces désastres, on a vu les limites des capacités de l'Empire Perse même sous l'apogée de Shapur Ier:

- l'empire perse ne peut frapper loin: toujours une entité féodale et à l'élite centrale de culture nomade/cavalière, la nature de son pouvoir empêche le souverain de s'éloigner longtemps du centre

- l'armée perse a un besoin logistique fort (consommables pour hommes et chevaux en grand nombre, flèches....) et aucun moyen d'appro naturel au MO, et les moyens d'acheminement sont peu souples et ont une capacité limitée (les Romains sont bien meilleurs là-dessus), tout comme les possibilités de stockage sont très inférieures à celles des Romains.

- l'Orient romain est très urbanisé: beaucoup trop de villes à prendre (donc avec des sièges lents et bouffeurs de moyens) pour une armée perse peu "segmentables" en sous-entités chacune capables de prendre une ville (de fait, ils ne peuvent mener plus de 2 sièges à la fois). Et ils ne peuvent se permettre de laisser de centres urbains/logistiques derrière eux, autant parce qu'ils en ont besoin que parce que les Romains en profiteraient. Malgré l'urbanisation, la ville reste "rare" en orient, relativement au terrain entre les villes, qui ne peut soutenir aucune troupe (sauf en Mésopotamie, qui fut comme par hasard la seule zone réellement disputée -sur le terrain- entre les 2 empires): la concentration des stocks alimentaires y est donc d'une importance relative infiniment plus grande qu'ailleurs.

- au-delà de la Mésopotamie, le terrain est difficile pour les Perses: leur armée est avant tout cavalière (même si une infanterie naît sous Shapur), et sa force reste centrée dessus. Hors, passé l'espace désert, on n'a que du terrain accidenté, puis montagneux. Les défenses de l'Orient romain (hors Mésopotamie) sont réellement là: quelques passes seulement ouvrent la porte de la Méditerranée, et elles sont facilement défendables contre des Perses qui, par ailleurs, même s'ils passaient, ne pourraient pas exploiter leur victoire (lignes de communication fragiles et surétendues, incapacité à soutenir l'effort, trop grand nombre de villes à contrôler sur la côte).

L'histoire ultérieure des guerres perso-byzantines le démontre d'ailleurs. Et l'histoire de l'invasion arabe le rappelle: il a fallu que l'empire byzantin soit exténué (et le perse aussi) à s'être frité le perse pendant des siècles, qu'il ne puisse plus remplacer ses pertes, pour que la conquête musulmane puisse prendre le MO, avec en plus le fait que cette conquête aurait été dix fois plus dure pour les Rashidun s'il avait réellement fallu conquérir les régions et villes. Tel que c'était, l'essentiel des populations se sont ralliées par ras le bol des guerres perso-byzantines et leurs conséquences.

 

A l'inverse, la frontière rhéno-danubienne est un cauchemar à défendre pour Rome, passé le Ier siècle:

- poussée démographique constante, accrue par l'arrivée de nouveaux acteurs migrants dans la région au IIIème siècle

- organisation des adversaires existants et des nouveaux en fédérations de peuples, les faisant changer d'échelle dans l'organisation, la taille et la fréquence des offensives armées (et avec la poussée démographique, la fréquence est encore accrue.... Et sur toute la longueur de la frontière)

- insuffisance des effectifs pour couvrir toute la distance ET disposer de suffisamment de troupes d'intervention concentrées capables de taper fort (en préventif, en interception ou en représailles), surtout de taper fort des adversaires plus nombreux (et surtout des adversaires de grande taille plus nombreux: là où, au Ier siècle, il n'y a eu que peu de menaces atteignant "l'échelon" armée, au IIIème, il y en a plusieurs en permanence et plusieurs attaquant en simultané en divers points du limès)

- permanence des raids de petite à moyenne envergure, avec une intensité croissante, sur toute la frontière: là aussi la sollicitation est énorme pour l'effectif militaire qui a aussi d'autres impératifs (y compris les guerres civiles, soulèvements et grandes expéditions). Quand les moyens viennent à manquer au IIIème siècle, l'effet est radical

- la frontière rhéno-danubienne concentre la grande majorité des effectifs romains, même si la menace perse est celle qui a, pour elle seule, le plus de moyens attribués en propre (la frontière rhéno danubienne représente beaucoup d'adversaires, dont le nombre et l'effectif individuel croissent sans cesse): elle est pourtant assez peu densément occupée, ce qui rappelle qu'il s'agit d'une zone très difficile à défendre. Les distances, le relief et l'absence de profondeur stratégique (les zones habitées commencent souvent pas loin du limès, voire dessus; en face, il n'y a pas de "visibilité" autre qu'immédiate, entre autres en raison de la couverture boisée, et le renseignement ne peut qu'être parcellaire et irrégulier, malgré l'entretien de royaumes clients, l'espionnage/diplomatie et les reconnaissances). Le monde dit "germanique" a été "assombri" par l'historiographie romaine pas parce que l'adversaire en lui-même était si menaçant, mais parce que cet espace était peu "connaissable" (trop grand, pas de sédentarisation, "politique" interne bordélique et mouvante, pas de défrichement....).

 

 

Souvenez vous qu'à la bataille d'Andrinople, les Goths écrasaient l'armée de Valens. Que se serait-il passé si les Goths et les autres peuplades barbares s'en étaient pris à l'Orient plutôt qu'à l'Occident ? Si Alaric n'avait pas pris Rome mais Constantinople ?

 

Entre Andrinople et Alaric, y'a beaucoup de temps et de changements fondamentaux qui s'opèrent. Et il faut dimensionner les choses: Valens, empereur d'orient, est tué, et son petit corps expéditionnaire improvisé (d'ailleurs une "joint venture" de forces d'orient et d'occident, ce qui limite l'impact relatif sur les deux armées) est bousillé, mais au lendemain d'Andrinople, les armées d'occident et d'orient restent importantes, les empires en place, et les "Goths" ne sont alors pas capables de représenter une menace lourde: capables de menacer une ville, voire un diocèse ou deux, voire un peu plus, oui, mais guère plus (et encore, ils n'ont pas de machines de siège). Ce qu'ils sont alors est un petit "proto peuple" nomade se baladant dans les frontières d'un Empire qui n'a ponctuellement plus de marge de manoeuvre militaire: les troupes du Danube, en flux tendus, ne peuvent dégager de réserves d'intervention (elles en ont déjà perdu trop rapidement dans les années 376-378 dans cette histoire), et l'essentiel des comitatus, palatins et scholes disponibles en orient sont vers la frontière perse, puisque c'est là que Valens les avait concentrées (pour aller taper le perse) avant d'avoir à revenir faire de l'ordre dans les Balkans (et on sait ce qui lui est arrivé) avec ce qu'il avait pu grapiller. Ce qui a été démoli, c'est essentiellement le comitatus des provinces balkaniques, et c'est cette région qui n'a plus de réserves à fournir dans l'immédiat (avec la perte momentanée de centres d'entraînement et de production d'armements dans ce coin).

 

Les "Goths des Balkans", cette petite partie de l'ensemble qu'on appelle "Goths" (et qui ne sont pas un peuple) et qui est arrivée à l'occasion de cette crise de 376-378, devient du coup, dans ce contexte, une pièce dans l'échiquier intérieur du "double empire romain", et on pourrait dire la cause du divorce entre les deux entités jumelles, la "pomme de discorde", en somme, et ce principalement à cause de Théodose et de la grande réaction antibarbare qui suit les lendemains d'Andrinople. Passé un immédiat de compromissions (on les paie pour qu'ils pillent pas et se tiennent un peu calmes, on en recrute en unités constituées et dans des unités romaines -en individuel, là- et on leur alloue une région des Balkans), l'empire d'Orient (entendre en fait: la scène politique intérieure, donc de fait les quelques grandes villes du "centre" plus quelques autres incontournables comme Antioche ou Alexandrie) opère une purge en réponse à l'hostilité croissante de populations plus "pro actives". Théodose a donc pu ainsi gagner le temps pour reformer des troupes et retrouver de la marge de manoeuvre. Résultat, il change leur région d'implantation plusieurs fois, toujours "un peu plus à l'ouest" comme dirait l'autre.

Et un peu plus à l'ouest, ben ça emmerde la cour de Ravenne quand ça devient "sur la ligne de démarcation". Du jour au lendemain, l'empire d'occident, tout aussi en flux tendus militaires que l'orient, a une frontière de plus à défendre, au nord est de l'Italie, et pas vraiment de réserves pour le faire (ou pas les moyens d'en lever assez), alors même que:

- la sollicitation sur le Danube, le Rhin et en Ecosse est au beau fixe: ça bouge de partout, tout le temps, en grande quantité

- nombre de peuples se sont mis aux raids maritimes longue distance (Saxons sur la côte est de l'Angleterre, Francs en Gaule et Hispanie) 4 siècles avant les Vikings

- les temps de réponse accrus aux menaces (moyens en flux tendus) accroissent les véléités autonomistes des élites provinciales qui asseoient leur domination sur leurs zones: les contestations, voire soulèvements/tentatives de coups d'Etat locaux, sont plus nombreuses, ou coûtent plus cher à étouffer dans l'oeuf ou à contenir/punir

- tout ce climat n'aide pas à retrouver des marges de manoeuvre militaires et financières. L'impôt rentre moins régulièrement, et surtout moins souvent à plein régime: y'a toujours quelques zones qui font défaut -contestations-ou peuvent moins payer -parce qu'envahies, ou en crise- voire qui paient moins par cause de grapille accrue -corruption, triche, rétention. Et ça, l'empire peut beaucoup moins se le permettre qu'avant vu sa "sollicitation" plus grande

- conséquence de tout cela et de causes plus "internes" au pouvoir: la direction politique de l'empire est plus dure. Plus de factions plus antagonistes, plus d'avidité et des moyens étatiques stationnaires ou en régression (surtout relative par rapport aux besoins).... Trouver des compromis est plus dur, plus long, plus cher; conquérir le pouvoir est plus dur, et le garder longtemps encore plus. Autrement dit: INSTABILITE. En soi rien d'inhabituel dans l'histoire romaine, si ce n'est que Rome n'a jamais couvert autant d'espace à défendre face à autant d'adversaires siignificatifs à la fois: elle n'a jamais eu si peu droit à l'erreur.

 

Or, quand on regarde Orient et Occident à ce moment, on voit que l'Orient a plus de marge de manoeuvre: sa frontière orientale disputée en Mésopotamie est en fait solide et tenable plus à l'ouest, ses ressources fiscales sont à ce moment plus importantes, ses ressources démographiques plus vastes, ses "morceaux" plus autonomes les uns des autres (Lybie et Egypte sont encore très facilement tenables, hors d'atteinte et rapportent pas mal par exemple).... Les Balkans sont assez vite redressés: on s'aperçoit que cette région n'a jamais pu être entièrement menacée par les "barbares". C'est toujours une sous-région à la fois. Et c'est une zone très peuplée et productive, qui fournit beaucoup de contingents, de ressources et d'armements (elle n'est jamais complètement "hors service"): sa segmentation en plusieurs sous-entités cloisonnées par la géographie montagneuse a beaucoup aidé, de même que la faible capacité de siège des peuples germains (qui rançonnent ou monnaient leur départ plus qu'ils ne pillent: ils ne peuvent piller que des villages et petits bourgs, ou des "latifundiae").

Ce que Théodose a fait, c'est accélérer le rétablissement de l'orient en s'appuyant sur sa résilience plus grande (plus de ressources, plus de zones "hors de danger", donc plus de capacité à retrouver des forces et à concentrer des moyens, surtout militaires, sans dégarnir les frontières) et en négociant avec la nuisance relativement mineure que sont les Goths des Balkans (même s'ils ont commencé à faire venir des copains d'au-delà du Danube, à enrôler des esclaves et colons/serfs romains, ou des citoyens mécontents), pour gagner du temps et les forcer à déménager toujours plus un cran à l'ouest.
De fait, il a choisi l'empire d'orient au détriment de la conception de l'orbis romain en général: et ça, l'occident n'en avait pas les moyens à ce moment là, par absence de marge de manoeuvre (sollicitation intérieure et extérieure constante) et par paralysie politique au sommet (l'un et l'autre s'entretenant mutuellement: genre la poule et l'oeuf).

 

 

Je minimise les arguments de "dépopulation" de l'empire d'occident cependant: même s'il a connu une baisse relative, on estime la population des 2 empires entre 55 millions (estimation moyenne jusqu'il y a peu, aujourd'hui c'est l'estimation basse, voire très basse) et 80-90 millions d'habitants, avec une répartition 55-45 ou 60-40 entre orient et occident. Ca laisse de quoi faire, surtout quand on évalue les plus grandes "hordes" de peuples migrants à des maximum de 100 000 individus (tout compris, donc autour de 20 000 combattants de tous types et valeur, au maximum). Le problème, comme mentionné plus haut, est plus la base fiscale, laquelle s'est réduite par la concentration des richesses qui accompagne la provincialisation économique de l'empire (les élites locales, comme l'élite romaine de la fin de la république, ont concentré le fric et appauvri la paysannerie -par ailleurs asservie- et les "classes moyennes" urbaines); y'a moins à prélever sur la grande partie de la population, et les concentrations de fric sont politiquement moins "atteignables", alors même que ces élites, comme les élites impériales, demandent toujours plus (avantages, fric....) et coûtent plus cher à avoir dans sa fouille. Par ailleurs, la polarisation de cette structure socio-économique rend la société plus instable: maintenir l'ordre coûte plus cher partout, la contestation est plus importante et plus fréquente, l'effort "citoyen" (service dans les milices, volontariat, "corvées"....) est plus dur à obtenir....

Un autre moment important pour l'Occident : l’assassinat de Stilichon en 416 et la mobilisation des réserves stratégiques à des massacres de barbares/immigrés au lieu d'affronter l'ennemi

 

 

Rappelons quand même que ces "immigrés" sont armés et en unités constituées (avec leurs familles/"civils"), en garnison un peu partout en Italie, et que par ailleurs, même quand une partie est en Italie pour faire ça, il faut toujours en plus avoir des troupes à la frontière italie/balkans vu que d'autres groupes menaçant y sont encore, soit une frontière de plus que le cahier des charges, et une garnison qui doit être prélevée sur les seules troupes disponibles: les troupes palatines (pas de comitatus en Italie), déjà en nombre limité par rapport aux besoins (estimation maximale: environs 30 000 palatins et Scholes présents en Italie à la fin du IVème siècle, probablement moins, sans compter les "indisponibilités" structurelles de toutes troupes, par essence jamais à son effectif/disponibilité maximal). Celles qui restent en Italie ont beaucoup à faire: tenir la péninsule, appuyer les milices côtières, sécuriser les lignes intérieures (communications, carrefours commerciaux) collecter l'impôt, faire la police (en soutien d'autres corps locaux, généralement liés aux institutions urbaines), patrouiller le nord.... ET garder un certain niveau de concentration pour servir le but premier de "réserve impériale"..... Seulement l'Italie elle-même, à ce moment, a désormais aussi besoin d'un éventuel soutien de cette réserve impériale, si bien que quand arrive la grande invasion de 406 sur le Rhin, la sollicitation (effective et potentielle) est déjà telle que Ravenne doit choisir entre remplir le devoir impérial en Italie ou en Gaule, les 2 ensembles étant impossibles vu que tenir la frontière italo-balkanique ET tenir l'Italie face aux éventuelles tentatives des Germains qui s'y trouvent accapare tout le monde disponible. Ironiquement, à ce moment, la frontière danubienne dans sa portion occidentale (pas en repos, attention) est celle qui ne pose pas de problème (y'a les troupes qu'il faut).

 

Dernier point sur cet aspect "quantitatif/orbat/opérationnel": des années 380 aux années 400, l'activité des troupes réglées romaines, et plus encore des troupes de réserve, est très importante, et cette activité est souvent meurtrière pour elles, moins face aux "barbares" que.... Face à d'autres troupes romaines. Entre les expédition de Théodose en occident (une fois forcé d'intervenir face à l'inertie de la cour de Milan/Ravenne, une fois intervenu par ambition/volonté de maîtrise du monde romain, une fois en réaction face à un général soulevé), les accrochages avec les Goths en interne (qui coûtent en fait plus de Goths -enrôlés pour l'occasion- que de Romains), et les affrontements de Stilichon avec les Goths, des insurgés et d'autres, y'a du boulot en plus des sollicitations "traditionnelles" aux frontières, pour des armées qui sont en flux tendus. Les combats entre armées romaines ont ceci de particulier qu'ils sont nettement plus meurtriers, et se font souvent, puisqu'il s'agit d'affrontement de puissants ambitieux, avec les meilleures troupes qui connaissent donc des saignées ponctuelles malvenues pour le maintien du niveau moyen d'expérience/aguerrissement d'un grand nombre d'unités. Rapprochés dans le temps, ces événements fragilisent l'armée romaine: même si c'est pas au point de rupture (les possibilités de reconstituer demeurent), le rythme est quand même trop rapide alors que les menaces sont plus nombreuses, plus importantes et de meilleure qualité. La marge de supériorité romaine s'affaiblit en même temps que la capacité de l'empire à être partout se réduit encore plus. Et c'est beaucoup plus vrai en occident qu'en orient: la bataille du Frigidus (la dernière de Théodose) contre un "usurpateur" romain coûte un maximum de troupes d'intervention, que l'occident peut moins supporter de perdre (et ça s'ajoute au décompte continu déjà engagé avant): l'usure opérationnelle est trop rapide par rapport à la capacité de renouvellement: il s'agit, encore une fois, moins d'un supposé "long déclin" que d'une crise de court terme qui n'a pas pu être surmontée en raison de l'enchaînement des événements.

C'est tolérable en orient, surtout avec un empereur compétent (Théodose sur toute la période, puis les ministres successifs du faible Arcadius, et plus tard, Marcien, après le long épisode de Théodose II -que l'empire d'orient a quand même pu se payer sans trop de casse), ça ne l'est pas dans un occident trop pressé de partout. Même le caractère exceptionnel de Stilicon n'aurait pu faire face à tout ça, ce qui est d'ailleurs d'une ironie cruelle, puisque Théodose a passé la deuxième partie de son règne à essayer de réparer le bordel qu'il avait créé en occident pour relever rapidement l'orient, et a "passé la mission" à son pote Stilicon qui a lui aussi peiné à avaler ce sandwich au caca.

 

C'est couillon quand même. Quand à savoir ce qu'aurait fait Stilicon.... Il pouvait pas chier des troupes nouvelles, et sa marge politique a été bouffée par l'invasion de 406. Mais il aurait au moins pris des décisions.

Cependant, les événements montrent que Théodose avait eu les moyens d'une réaction antibarbare après Andrinople (et de l'exploiter) là où l'occident ne les avait pas: ça rappelle à quel point la menace Rhéno-Danubienne, non à cause d'un ennemi particulier mais par sa "taille" en général, était énorme au regard des moyens disponibles (avec en plus la Bretagne, l'Afrique), et devint ingérable avec l'arrivée d'une nouvelle "frontière" entre Italie et Balkans, et le surnombre (aux frontières puis aussi à l'intérieur -Gaule, Hispanie et Afrique) créé lors du passage du Rhin de 406 par les Vandales, les Alamans et d'autres.

Modifié par Tancrède
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Que se serait-il passé si les Goths et les autres peuplades barbares s'en étaient pris à l'Orient plutôt qu'à l'Occident ? Si Alaric n'avait pas pris Rome mais Constantinople ? 

 

Qu'est ce qui aurait pu conduire l'Occident à survivre au détriment de l'Orient ? Et comment peut-on envisager l'Histoire avec une éventuelle survie de l'Empire romain d'Occident ?

Constantinople, et ses murailles, sont beaucoup plus difficile à attaquer que Rome. Et au niveau géostratégique, l'Empire romain d'orient est un peu moins vulnérable que sa consoeur occidentale. 

Mais cela n'empêchera pas les Wisigoths, puis les Huns, de ravager toute la partie européenne de l'empire d'orient après la défaite romaine Andrinople.

 

D'une certaine façon, la civilisation romaine d'occident n'a pas disparu puisque les babares se sont finalement plus ou moins "romanisés" (c'est pour cela que la période post chute de Rome est souvent appelée: "l'antiquité tardive").

Si l'authorité politique de l'empire romain a disparu, il subsitste toujours son authorité morale et religieuse via le pape à Rome... jusqu'à aujourd'hui (les empereurs romains étaient aussi les représentant des dieux, puis de Dieu, sur terre).

 

Pour ce qui est de la démographie de l'Empire romain, je sais en effet qu'il y avait une crise en Occident.

Cependant, la chute de l'Empire romain d'Occident est due à plusieurs causes qui conjuguées eurent raison de lui : crise économique, pression barbare, incompétence des politiques.

 

Et inversement, avec une pression barbare amoindrie (rien que les Goths en moins), des choix et des décisions plus pertinents (et un leader politique comme Julien ou Constantin), l'Occident aurait-il été capable de repousser les Germains et de garder leur territoire inviolable ? Et à partir de là, comment aurait évolué un Empire romain d'Occident ?

La chute de l'empire d'occident à aussi des origines démographiques, les pestes antonine et cyprienne font de gros ravage dans la population. La peste antonine (fin II°siècle), par exemple, cause la perte d'entre 10 et 30% (selon les estimations) de la population de l'empire.

La peste cyprienne fait aussi d'énormes dégats, mi-III°siècle. Rien qu'a Rome, la population passe, de plus de 500 milles habitants, à la moitié seulement !.

 

Certains y voit une des cause principale de la chute de l'empire d'occident:

 

http://www.michelgurfinkiel.com/articles/436-Demographie-Limplosion-de-lEmpire-romain.html

 

Chacune de ces mortalités est le point de départ d’un « cycle vicieux », d’un enchaînement d’effets pervers qui, à son tour, provoque de nouveaux effondrements démographiques : le dépeuplement des villes entraîne la disparition d’un personnel capable de maintenir en état les acquis matériels du passé, comme le système routier, l’acheminement de l’eau potable sur de longues distances, l’irrigation, les moulins hydrauliques ; celui  des campagnes entraîne une réduction de la production agricole ;  la diminution des ressources en eau et en vivres aggrave la vulnérabilité devant la maladie ou une émigration vers des régions préservées. Enfin le déclin général diminue les capacités militaires ou sécuritaires de l’Empire : à partir de l’an 200, Rome ne peut plus mener de guerre de conquête et doit, au contraire, se défaire de certains territoires, la Dacie, la Mésopotamie, la Bretagne ; dans de nombreuses provinces, il n’est plus possible d’assurer la paix publique ou une administration régulière, ou de mettre les survivants à l’abri d’invasions …

 

L’Empire comptait une soixantaine de millions d’habitants sous Auguste, en l’an zéro, et était resté à ce niveau, au-delà de quelques oscillations, pendant les cent cinquante premières années de l’ère chrétienne. A partir de 165, la population diminue de manière abrupte :  un quart des habitants disparaissent entre 200 et 400, puis un quart de la population restante entre 400 et 600. Les provinces occidentales, qui parlent latin, sont plus touchées que l’Orient, qui parle grec. La Gaule passe de 7,5 millions d’habitants en 200 à 5 millions en 600.

Il faut mettre en parallèle cette chute démographique de l'un, avec la hausse démographique des Germains.

 

A cela se rajoute au tarissement des mines d'or d'Espagne, qui mine les finances, et qui occasione des restrictions budgétaire qui touche, notament, l'armée, dont l'équipement, devenu trop cher, s'allège progressivement. Ainsi les légions se battants à Andrinople n'ont plus rien à voir, en puissance et armement, avec les légions de César.

On peut y rajouter le syndrome "ligne maginot": les armées romaine sont dispersés et "immobilisés" sur les systèmes défensifs aux frontières, les limes, au détriment de la manoeuvre et des offensives (et contre-offensives). Dès que le Limes est enfoncé, il leur est très difficile de parer un raid barbare.

 

Il y a aussi les guerres civiles incéssantes, grace à des armées romaines devenues peu fiables, "vénales", promptes à nommer des usurpateurs et à "déserter" les limes pour marcher sur Rome, dès qu'une bonne occasion se présente.

 

Mais la liste est longues d'autres causes, plus ou moins importantes, qui ont minés l'empire d'occident.

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Mais cela n'empêchera pas les Wisigoths, puis les Huns, de ravager toute la partie européenne de l'empire d'orient après la défaite romaine Andrinople

 

Pas vraiment: ils ont rançonné certaines villes, dans le sens de se faire payer pour partir parce qu'ils ne pouvaient pas les prendre (les villes romaines se sont fortifiées à partir du IIème siècle et des guerres marcomaniques, et même avant en fait; avec le IIIème siècle, c'est systématique même pour les villes moyennes très à l'intérieur des frontières) et pouvaient juste parasiter les échanges et ravager les campagnes. On a de mauvaises images en tête de villes en feu, pillées et ravagées jusqu'au sol, parsemées de pyramides de crânes et de colonnes de citoyens réduits en esclavage. C'est pour l'essentiel de l'imagerie de cinéma. Oui, il a du y avoir des scènes comme ça en pagaille, mais à l'échelle de l'empire, ou même de la seule région des Balkans, ça concerne des pans de population très réduits, voire statistiquement anecdotiques. Et à part quelques exemples rares et hauts en couleur, ce genre de scène a plus été réservées à des villages isolés, ou de petits bourgs insuffisamment importants pour être fortifiés, et à des "pagi", cad des centres de très grandes propriétés agricoles, de fait des petits groupes de villages/hameaux centrés autour de la villa d'un grand proprio:  le pagus (d'où vient le mot "pays") est l'unité administrative, fiscale, économique, politique et géographique de base, et il survivra à l'empire pour trouver sa place dans le système féodal, évoluant ensuite vers le "manoir" comme unité de compte essentielle.

Si les ravages avaient été si importants, cette zone n'aurait pas continué à produire des soldats, des armes et des impôts, à concourir à l'économie de l'empire (ce qui fut pourtant le cas, et rapidement), à être prioritaire dans les impératifs de reconquête (ou de pillage).... Or, c'est précisément tout ce qu'elle est et reste, parce que les bandes dont on parle, ou les "peuples" (les plus grands groupes, très peu nombreux, comptent 100 ou 200 000 individus au maxi: plus ne serait pas soutenable pour des groupes en mouvement) ne sont pas des groupes humains gigantesques, tandis que là on parle de centaines de milliers de kilomètres carrés et de millions d'habitants, répartis dans des réseaux urbains importants et fortifiés fonctionnant en réseaux économiques et sociaux. Il y a des disruptions ponctuelles, pas destruction.

 

Même si l'empire ne s'était pas défendu du tout, ce qui ne fut pas le cas, les groupes concernés n'auraient simplement pas eu la possibilité physique de "ravager" les Balkans, surtout tant que l'entité politique romaine tenait et garantissait le maintien d'un ensemble. Ce n'est qu'après le début de l'effondrement de l'occident, soit à partir des années 410, que les disruptions deviennent durable et que la fragmentation politique amène une fragmentation économique qui elle cause des ravages, assortie de pillages plus fréquents en occident: les bandes et peuples ne peuvent plus être enrôlés ou soudoyés, les moyens manquent, la solidarité au-delà du niveau régional n'existe plus, le centre impérial ou préfectoral n'est plus là pour payer ou envoyer des troupes, l'impôt ne rentre plus au-delà d'un niveau géographique réduit, les synergies (économiques, fiscales, sociales, militaires, administratives....) créées par l'unité impériale s'effondrent.... Et les populations locales tout comme les peuples et groupes barbares ont faim, ont moins à se partager (ce qui rend les compromis politiques plus durs: chez les barbares, ça veut dire des querelles et affrontements ou du pillage plus fréquent.... Ou les deux).

Mais post Andrinople, la disruption est mineure et absorbable par un empire romain dont les fondements sont toujours solides: une entité économique, démographique, sociale et politique de cette taille ne s'effondre pas pour ça, surtout quand le pouvoir est rapidement repris en main par une bonne direction.

 

Si les Goths, Hérules, Suèves, Huns et autres acceptaient de se faire acheter, c'est parce qu'ils savaient qu'ils ne pouvaient pas conquérir ça, ou même prendre des grandes villes (sauf situations exceptionnelles et cas particuliers): même Attila a négocié avec l'Orient et n'a jamais réellement tenté de le menacer.... Parce qu'il ne le pouvait pas réellement. Il pouvait juste être une nuisance, et c'est ça qu'il a monnayé face à une Constantinople qui préférait acheter la certitude d'un départ rapide d'un adversaire que payer de longues campagnes accaparant trop de ressources financières et militaires pendant trop longtemps, alors que les sollicitations étaient nombreuses le long de trop de frontières, et qu'il y a toujours une guerre à livrer aux Perses, sorte de passe temps continuel.

Certains y voit une des cause principale de la chute de l'empire d'occident:

 

 

 

Ce gars, qui n'est ni spécialiste de Rome ni même historien (mais plutôt un polémiste aux opinions plus idéologiques que scientifiques), a des infos qui datent, reprend des clichés anciens qui ont été largement dissipés par l'historiographie, et s'en sert surtout pour faire un parallèle historique douteux, bref, une "thèse" pour donner une apparence de substance à ses opinions et à son lyrisme d'écrivain.

 

Tout comme l'idée d'un long "déclin" de l'empire romain n'est aujourd'hui plus réellement une vision historique sérieuse, la démographie romaine a été beaucoup revue et réévaluée. La fourchette de population de l'empire semble avoir oscillé entre 70 (estimation basse: jadis, c'était l'estimation haute) et 120 millions d'habitants au IIème siècle (avec 60 à 70% de la population à l'ouest), et 60 à 100 au IVème siècle, avec une relative équivalence entre les deux parties de l'empire (les chiffres que le type cité évoque sont des estimations du XIXème siècle, recitées sans cesse par les historiens jusqu'aux années 60, sans beaucoup de nouveau matériel d'étude ou moyens d'analyse changés). Soit une "moyenne" de 95 millions au IIème siècle, et de 80 au IVème. Ca remet quelques patates au fond du sac, quand on y ajoute le facteur de concentrations de populations versus zones vides, la densité des réseaux urbains dans certains pans de l'empire (les Balkans, par exemple, très mis en valeur, surtout dans les zones comme la Grèce, la Dalmatie, l'Ilyrie et la Panonnie)....

Tout comme l'approche de la démographie a radicalement changé ces dernières décennies, l'étude de celle du passé lointain a énormément évolué, changeant de beaucoup ce qu'on croyait savoir. Dommage que le logiciel de ceux qui s'en servent pour faire de grandes théories n'ait pas encore beaucoup suivi. Le décalage entre ce qu'on sait désormais et ce que les gens comme ça déduisent de ce qu'ils croient savoir rend leurs élucubrations invraisemblables (encore plus quand c'est pour essayer des pseudos parallèles qui font cultivé dans les salons).

L'évaluation de la population de la seule Italie (la zone la mieux connue et pour laquelle subsistent le plus de matériel d'analyse) a doublé depuis les comptages du XIXème siècle: les historiens sur lesquels ce monsieur se fonde (souvenirs de sa jeunesse sans doute) évaluaient cette population autour de 6 millions d'habitants, alors qu'on tourne autour d'une évaluation oscillant entre 10 et 14 millions, le chiffre de 10 étant un seuil relativement consensuel.

A

cela se rajoute au tarissement des mines d'or d'Espagne, qui mine les finances, et qui occasione des restrictions budgétaire

 

Le budget romain ne dépendait pas de l'extraction annuelle de nouvelles ressources d'or: ça aide, mais une économie de cette taille n'est plus affectée par le tarissement d'une production aussi réduite de métal précieux (quelques tonnes par an), relativement à la masse monétaire existante à ce stade de l'histoire romaine. La contraction économique du IIIème siècle est avant tout le produit de la crise inflationniste amenée par le IIème siècle, et de la concentration croissante des richesses, sur lesquelles se sont greffées les crises intérieures de ce même siècle. L'économie s'est rétablie, retrouvant un niveau important, mais jamais évidemment celui qu'elle avait eu avant: le commerce longue et moyenne distance, moins vaste (que l'érchéologie évalue via les datations, localisations, typologisation et quantifications d'épaves et restes de "conteneurs" comme les amphores), en est le révélateur principal (il indique en fait une "relocalisation" partielle de l'économie et un affaiblissement de la demande).

La dépense militaire proprement dite n'a pas tellement changé, au contraire: ce qui a changé, c'est son poids dans le PIB romain, qui a quasiment doublé (d'environs 2 à 4% du PIB estimé de Rome), indiquant une pression fiscale accrue et une plus grande "rareté relative" de la ressource (chaque denier dépensé est deux fois plus précieux qu'avant): le budget de l'Etat romain est nettement plus "militarisé" au IVème siècle qu'au IIème, laissant moins pour d'autres dépenses (et donc de la marge de manoeuvre politique) excepté certaines au moins aussi importantes (administration -poste relativement réduit-, communications -la majorité des routes ressortent des budgets locaux et de coûts non monétaires- et Anone non militaire-l'autre budget maousse).

restrictions budgétaire qui touche, notament, l'armée, dont l'équipement, devenu trop cher, s'allège progressivement. Ainsi les légions se battants à Andrinople n'ont plus rien à voir, en puissance et armement, avec les légions de César.

On peut y rajouter le syndrome "ligne maginot": les armées romaine sont dispersés et "immobilisés" sur les systèmes défensifs aux frontières, les limes, au détriment de la manoeuvre et des offensives (et contre-offensives). Dès que le Limes est enfoncé, il leur est très difficile de parer un raid barbare.

 

Là, désolé, mais c'est assez à côté de la réalité:

- aucun syndrôme ligne Maginot, je sais pas d'où ça sort; l'armée post IIIème siècle est justement moins sur les frontières et le système défensif romain est nettement plus complexe que cette image fausse qu'on a souvent d'un "limès" assimilé à un mur sur la frontière (il n'y a de mur qu'en quelques endroits: "coude" Rhin-Danube autour de la frontière germano-suisse, et Mur d'Hadrien -qui est moins un ouvrage défensif face à des armées qu'un outil de "filtrage" destiné à réduire les raids nombreux et de petite ampleur; à lutter contre la contrebande et à dégager des effectifs). L'armée romaine n'a jamais cessé d'être une armée recherchant avant tout la manoeuvre stratégique et opérative offensive (au niveau tactique, c'est ce qui a changé un peu plus selon les périodes)

- la réalité du limès est surtout qu'il s'agit d'une zone de défense, pas d'une fortification: une zone de profondeur plus ou moins vaste particulièrement irriguée d'axes de communications (routes, fleuves, itinéraires reconnus, balisés, aménagés et patrouillés, parsemés de réseaux de forts et de tours de guet, où l'info circule vite). Derrière cette profondeur opérative/stratégique, il y a les villes fortifiées de l'intérieur, qui abritent les concentrations de troupes d'intervention. L'armée romaine tardive, et encore plus quand on l'observe dans son système militaire global, est la plus ajustée pour la manoeuvre que Rome ait jamais eu.

- le propre de l'armée post IIIème siècle est justement une plus grande recherche de concentration de théâtre, ce qui est une poursuite de la culture stratégique romaine de concentrer rapidement les troupes pour aller rechercher la bataille le plus tôt possible dans une campagne, de prendre l'initiative. Cette posture est encore accrue après le IIIème siècle vu l'accroissement des menaces, la chereté croissante de la ressource militaire et le niveau de sollicitation permanent: c'est pourquoi Dioclétien a même établi la tétrarchie (qui ne durera pas) et structuré une organisation militaire opérationnelle moins centralisée (qui elle durera).

- enfin pour la qualité et l'armement des troupes.... Y'a un topic là-dessus, et une bibliographie dedans. L'équipement n'a jamais été aussi sophistiqué et l'organisation des unités aussi poussée (l'interarme de niveau centurie en est un exemple): les légions d'Andrinople n'ont plus rien à voir avec celles de César tout connement parce que l'organisation militaire romaine a évolué en 4 siècles. L'armée tardive est une "armée de bataillons" de diverses armes, et d'Etat Majors rôdés utilisant des mix de forces ad hoc pour une campagne (à Andrinople, Valens, un empereur non soldat, a improvisé rapidos un mauvais mix de forces qu'il a ensuite très mal commandé). Le terme "légion" n'est plus qu'un nom de tradition pour les unités d'infanterie de ligne des Palatins (les unités d'intervention de "niveau impérial"), de la taille d'une cohorte milliaire, et pour les unités d'infanterie des "limitaneis", les troupes de frontières. D'autres noms et types d'unités existent désormais, issus de l'évolution de la pratique militaire depuis le Principiat. Et l'efficacité comme la qualité de l'équipement n'ont pas décliné.

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...

 

A l'inverse, la frontière rhéno-danubienne est un cauchemar à défendre pour Rome, passé le Ier siècle:

- poussée démographique constante, accrue par l'arrivée de nouveaux acteurs migrants dans la région au IIIème siècle

- organisation des adversaires existants et des nouveaux en fédérations de peuples, les faisant changer d'échelle dans l'organisation, la taille et la fréquence des offensives armées (et avec la poussée démographique, la fréquence est encore accrue.... Et sur toute la longueur de la frontière)

- insuffisance des effectifs pour couvrir toute la distance ET disposer de suffisamment de troupes d'intervention concentrées capables de taper fort (en préventif, en interception ou en représailles), surtout de taper fort des adversaires plus nombreux (et surtout des adversaires de grande taille plus nombreux: là où, au Ier siècle, il n'y a eu que peu de menaces atteignant "l'échelon" armée, au IIIème, il y en a plusieurs en permanence et plusieurs attaquant en simultané en divers points du limès)

- permanence des raids de petite à moyenne envergure, avec une intensité croissante, sur toute la frontière: là aussi la sollicitation est énorme pour l'effectif militaire qui a aussi d'autres impératifs (y compris les guerres civiles, soulèvements et grandes expéditions). Quand les moyens viennent à manquer au IIIème siècle, l'effet est radical

- la frontière rhéno-danubienne concentre la grande majorité des effectifs romains, même si la menace perse est celle qui a, pour elle seule, le plus de moyens attribués en propre (la frontière rhéno danubienne représente beaucoup d'adversaires, dont le nombre et l'effectif individuel croissent sans cesse): elle est pourtant assez peu densément occupée, ce qui rappelle qu'il s'agit d'une zone très difficile à défendre. Les distances, le relief et l'absence de profondeur stratégique (les zones habitées commencent souvent pas loin du limès, voire dessus; en face, il n'y a pas de "visibilité" autre qu'immédiate, entre autres en raison de la couverture boisée, et le renseignement ne peut qu'être parcellaire et irrégulier, malgré l'entretien de royaumes clients, l'espionnage/diplomatie et les reconnaissances). Le monde dit "germanique" a été "assombri" par l'historiographie romaine pas parce que l'adversaire en lui-même était si menaçant, mais parce que cet espace était peu "connaissable" (trop grand, pas de sédentarisation, "politique" interne bordélique et mouvante, pas de défrichement....).

...

 

 

Un peu HS, mais je saisis la balle au bond ; est-ce que c’est vrai qu’Auguste avait pour projet de poser la frontière sur l’Elbe – plus défendable en elle-même et comme partie du système défensif en jonction avec le Danube par le carré bohémien – et non le Rhin, avant de renoncer ? On exagère souvent la défaite de Teutoburger Wald, mais même en comptant les raids de représailles, s’être retiré de la zone n’est-il pas un échec stratégique romain et surtout de la rationalisation de sa défense dans cette zone ?

 

 

Sinon Tancrède, il faut que tu te trouves une copine :-X …ça deviens urgent :-[ . Il faut que tu trouves à t’occuper autrement, c’est pas possible de passer son temps à lire des livres qui font pas moins de 500 pages :'( .

Modifié par Shorr kan
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Sinon Tancrède, il faut que tu te trouves une copine :-X …ça deviens urgent :-[ . Il faut que tu trouves à t’occuper autrement, c’est pas possible de passer son à lire des livres qui font pas moins de 500 pages :'(

 

Elle veut me forcer à lire 50 shades of Grey ou, "au choix" ??? , un truc sur la sophrologie..... Les bouquins d'histoire de plus de 500 pages, c'est un peu une "safe zone" dans ces situations.... Mais là vous payez tous mes ch'tits problèmes de cou et de genoux: pas de sport ce WE, ça a libéré quelques heures.

 

 

est-ce que c’est vrai qu’Auguste avait pour projet de poser la frontière occidental sur l’Elbe – plus défendable en elle-même et comme partie du système défensif en jonction avec le Danube par le carré bohémien – et non le Rhin, avant de renoncer ? On exagère souvent la défaite de Teutoburger Wald, mais même en comptant les raids de représailles, s’être retiré de la zone n’est-il pas un échec stratégique romain et surtout de la rationalisation de sa défense dans cette zone ?

 

Ca a été traité dans un des topic historique, mais je sais plus lequel. Le projet de l'Elbe n'était pas un projet particulièrement lié à Auguste, mais à la nature de l'avance romaine: s'appuyer sur un fleuve donnait un objectif "matériel" et aidait à définir un espace clair, et un fleuve en particulier avait la préférence des Romains moins pour son aspect de "rempart" que pour son aspect logistique. Un fleuve ne rend pas tellement une frontière plus défendable par lui-même quand le défenseur n'a pas les effectifs pour garnir toute la longueur, et encore moins quand, comme dans le cas germain, il n'a en face que de la forêt dense qui limite la visibilité et contribue à rendre le terrain impropre à la (grande) manoeuvre, à la faible "circulabilité" et "connaissabilité" (j'avais envie de faire des barbarismes: on parle de la Germanie, merde!) du territoire. Et c'est encore plus vrai quand on parle de populations très peu sédentarisées: de fait, la plupart des peuples dits "germaniques" sont alors des chasseurs-cueilleurs semi nomades, sans urbanisation, vivant en petites unités démographiques déménageant avec les saisons. Difficile d'avoir un suivi exhaustif là-dessus.

Ca encourage les Romains à définir des espaces avec des axes naturels de communication, parce que l'espace germain est recouvert de forêt primaire (imagine la Forêt Noire, mais sur toute l'Allemagne).

Mais cette avance était prévue parce que les Romains ne prévoyaient pas autre chose que l'avance dans leurs plans, et l'assujettissement de tout ce qu'ils connaissent et qui s'agitent devant chez eux. C'est pas tellement de la volonté qu'un réflexe mécanique: ça va sans dire. S'ajoute à cela la commodité politique du moment: pour avoir du "capital politique", un grand nom romain a besoin de faire une campagne victorieuse: s'ajouter un "germanicus", "britannicus", "parthicus", "dacius" au nom, plus un truc genre "vainqueur de la Weser" ou "de l'Elbe" (comme César s'est fait "vainqueur du Rhin", mais aussi de la Manche et de l'Atlantique, en allant taper les Bretons et les Vénètes), ça le fait bien. Mais il y a aussi tous ceux qu'il amène avec lui, promeut, fidélise, clientélise.... Y compris les ennemis vaincus (qui sont butés, réduits en esclavages ou qui signent un traité faisant d'eux des clients de l'empereur ou du général -qui est dans ces cas là de la famille).

 

La conquête de l'espace Rhin-Elbe, ils n'y tenaient pas plus que ça, mais c'était, on va dire, dans "l'inertie" de l'avance romaine, et vu ce que rapporte une conquête en capital politique (pas tellement en fric: y'a rien à grapiller en Germanie, et pas vraiment de base taxable), ils avançaient tant que c'était facile et commençaient à faire des calculs (du genre: est-ce que ça vaut l'effort?) si ça devenait dur. Les Romains ne regardent pas une carte comme nous, vu qu'ils ont pas les mêmes cartes, et que la cartographie a moins d'importance pour eux que pour nous: ils regardent plus les populations, les ressources, les axes de circulation (potentiels et effectifs) et les positions défensives existantes.

Pour la cohérence du dispositif défensif, ils ont pris les Champs Décumates sous Vespasien, afin de bloquer les axes de pénétration entre Rhin, Main, Neckar et Danube; c'est la région la plus densément fortifiée de toutes les frontières romaines, précisément parce qu'elle n'est pas dans l'axe des fleuves mais dans celui des pénétrations potentielles. C'est un espace plus modeste et surtout plus cohérent qui a lui été pris pour des objectifs de rationalisation défensive du dispositif: acquérir de la profondeur pour les défenses du Rhin, optimiser la visibilité et la capacité d'encaisser dans les axes de pénétration de cette zone et surtout, raccourcir les lignes de communication. A cause du relief, "'l'angle" au nord de la Suisse (province de Rhétie) fait que les troupes ne peuvent venir que de l'ouest (donc venir du Rhin) ou du Sud (Rhétie d'avant la conquête, ou carrément Norique -l'Autriche), sans communication directe entre les deux: donc ils prennent cet espace moins montagneux d'Allemagne du sud ouest et l'aménagent un max, avec un réseau très dense de fortifications, garnisons et tours de guet, mais surtout beaucoup de routes. Ca, c'est une conquête à but de défense, de rationalisation/planification stratégique, quasiment l'une des seules de toute l'histoire impériale romaine (sous la République, ce genre de conception n'aurait même pas été envisagé).

 

Les Romains ne conquièrent pas des territoires, sinon: ils soumettent des peuples et, éventuellement, ils visent des ressources (mais il faut là que ce soit une mine d'or ou d'argent célèbre, une capitale commerciale incontournable....). Leur calcul passe par là, pas par une "visualisation" de l'espace qu'ils connaissent mal et représentent peu sur carte. Et, dans le cas mentionné, si un fleuve est évoqué, c'est comme repère anticipé pour délimiter l'avance par un obstacle naturel: c'est commode (surtout dans le cas d'un territoire qu'est juste une grosse forêt).

 

Donc non, Auguste ne tablait pas particulièrement sur l'Elbe comme "nouvelle frontière" dont l'Empire dépendrait: l'avance était dans la mécanique consciente et semi-consciente des choses (ajouter des esclaves au marché pour maintenir les prix bas, faire un peu de butin et pressurer des populations -même si c'est des crèves la dalle-, faire de la pub, avoir un prétexte à festivités, servir l'orgueil "national" et poursuivre par habitude), et c'était un bon moyen pour que ses héritiers potentiels (notamment Tibère, Drusus et Germanicus) se fassent ou accroissent leur nom (enfin s'en ajoutent un), mais aussi soient tous sur les rangs (ils n'avaient pas le même degré de réussite). Si j'avançais une façon de voir, je dirais que pour eux, c'était "dans la logique des choses": on avance parce que ça résiste pas en face, que ça coûte pas beaucoup plus cher et parce qu'on est romains dont c'est ce qu'on fait. Sous l'angle plus concret, on peut surtout deviner le "lobbying" de certains (les héritiers putatifs qui doivent se faire un nom, les ambitieux qui ont besoin de la case "guerre" sur leur cursus honorum) auprès d'Auguste. Ca devient son intérêt si ce lobbying devient une faction qui met son poids politique dans le mix: il attribue la charge de la conquête (et donc postes, troupes, titres, avantages) en échange d'autre chose (soutiens de divers types, obéissance....). Et s'ils perdent, c'est plus sur eux que sur lui, sauf en cas de désastre lourd parce que là c'est de la perte sèche importante de troupes (et là, ça peut l'emmerder lui). Dans ce registre, la cible elle-même (l'espace Rhin-Elbe) est secondaire, voire carrément abstrait, pour ces décideurs. Ils veulent une conquête, peu importe quoi. Ca ou la Patagonie (si elle avait été atteignable) ils s'en tapent. Un empire est souvent par nature expansionniste, principalement pour des raisons de politique intérieure: accroître le gâteau pour avoir plus de parts à distribuer aux ambitieux et factions dangereuses, pour occuper ces personnages et groupes (voir les mettre en danger d'échec ou de mort).... Même si les terres conquises valent rien, c'est toujours du butin et des esclaves, du capital politique et surtout ça occupe les emmerdeurs potentiels. Ca gagne du temps: faut pas chercher de "vision de long terme" (ça commencera plus à venir un peu avec le temps et l'ébitude de l'empire), mais des calculs plus individuels, de l'échelle d'une vie humaine, et un arbitrage politique par l'empereur qui jongle à tout moment entre factions dangereuses, ennemis et alliés intérieurs, avec plus ou moins de marge.

 

Donc non, le Teutoburgenwald n'est pas un échec stratégique, ou la marque que les Germains ne sont pas conquérables; ça, ce sont des conneries nationalistes du XIXème siècle. Il y a une blessure d'orgueil, c'est sûr (moins par la défaite ou la perte de troupes que par la prise des aigles et emblèmes des légions.... Récupérés assez vite, comme d'ailleurs ceux de Carrhae, quasiment à la même période), et c'est cette blessure qui est vengée dans les terribles campagnes de représailles menées dans les années suivantes. Et il ne faut pas surestimer la lourdeur des pertes ou le danger de cet événement: les tribus unies par Arminius ne l'étaient pas solidement, le Rhin n'était pas sérieusement menacé et si la perte de 3 légions et des auxilliaires afférents a été durement ressentie, c'était plus en raison du besoin pressant du moment: on est, en 9 apr JC, encore dans le contexte de la grande révolte illyrienne, une guerre d'une toute autre ampleur que le soulèvement d'Arminius, qui a beaucoup demandé à l'Etat romain. Dans les arbitrages stratégiques de cette époque, la Germanie n'est pas vraiment un souci de grande importance, surtout juste après la grande peur de la révolte illyrienne (le "tumultus", la mobilisation générale, a été déclenché par Auguste: événement rarissime dans l'histoire romaine).

 

L'événement a juste forcé Rome à évaluer l'importance stratégique de la conquête: tant que c'était facile, ça pouvait être un outil de politique intérieure commode, qui coûtait pas beaucoup plus cher (à l'arrêt ou en mouvement, les troupes, faut les payer et les nourrir pareil). Si ça devenait coûteux, fallait regarder si la conquête vallait la peine: et là, la Germanie, ben c'est juste un espace vide, difficile à conquérir parce que sous-développé (=pas de villes et territoires/peuples sédentarisés à prendre: c'est pas clausewitzien, quoi), sans valeur et recouvert de forêt (donc difficile d'accès, dur à contrôler, et réclamant des investissements lourds pour une mise en valeur lente et aléatoire). Du coup, conquérir est un truc lourd, sérieux et de longue haleine, et surtout cher et en plus sans grand prestige (y'a quel mérite à trucider des sous-développés?): alors on punit parce qu'après l'événement, y'a pas le choix, on récupère les aigles, on "fait le vide" (chaque mort romain a été payé au centuple par les coalisés d'Arminius), on montre qui c'est Raoul et pourquoi il a la plus grosse, on garde les quelques alliés existants (notamment près du limes et en Frise et près des bouches de l'Elbe, soit des régions atteignables par voie maritime/fluviale) et on en fait des royaumes clients offrant pour pas cher un premier "rideau défensif" avant le limès. Ca c'est de la stratégie calculée rationnellement.

Après, si les Germains avaient eu des territoires organisés, des villes, des concentrations de stocks alimentaires et de métaux précieux, un début d'économie, voire des mines.... Là, y'aurait pas beaucoup eu de question et les territoires de l'Elbe seraient aujourd'hui de culture latine.

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Tout comme l'idée d'un long "déclin" de l'empire romain n'est aujourd'hui plus réellement une vision historique sérieuse, la démographie romaine a été beaucoup revue et réévaluée. La fourchette de population de l'empire semble avoir oscillé entre 70 (estimation basse: jadis, c'était l'estimation haute) et 120 millions d'habitants au IIème siècle (avec 60 à 70% de la population à l'ouest), et 60 à 100 au IVème siècle, avec une relative équivalence entre les deux parties de l'empire

Je ne me lancerais pas dans une bataille de chiffres qui restent, essentiellement, des estimations (qui varient selon les auteurs), mon propos est d'appuyer sur le fait que les pestes ont fait de très gros dégats démographique qui ont eut une influence certaine sur le destin de l'empire romain d'occident.

 

- aucun syndrôme ligne Maginot, je sais pas d'où ça sort; l'armée post IIIème siècle est justement moins sur les frontières et le système défensif romain est nettement plus complexe que cette image fausse qu'on a souvent d'un "limès" assimilé à un mur sur la frontière (il n'y a de mur qu'en quelques endroits: "coude" Rhin-Danube autour de la frontière germano-suisse, et Mur d'Hadrien  

 

 L'armée romaine n'a jamais cessé d'être une armée recherchant avant tout la manoeuvre stratégique et opérative offensive (au niveau tactique, c'est ce qui a changé un peu plus selon les périodes)

C'est ce que l'on croyait il y a encore quelques années. Les photos aériennes et les fouilles récentes ont démontrés que les limes couvraient tout le Rhin et le Danube.

 

Le soldat romain d'occident "type" du III°/ IV° siècle est un Limentanei,( comme en 1940 le soldat "type" était dans les fortifs Maginots). Certe, l'armée romaine a des unités de manoeuvre mais le gros des légions est le long des Limes: dans les tours de gardes ou en garnison à côté, dans les Castellum(ou l'on retrouve des "reserves mobiles").

 

De plus l'armée romaine, est peu mobile et manque de cavalerie. En face, les barbares fuient les combats, se dispersent dans le pays attaqué.

 

Fondamentalement, l'armée romaine est en position défensive, ont est loin de Teutoburg, où, Arminius paya très cher sa victoire, son pays fut largement ravagé et vengé de l'affront fait à l'empire. Les romains auront calmé les germains pendant plus d'un siècle...

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Pas vraiment: ils ont rançonné certaines villes, dans le sens de se faire payer pour partir parce qu'ils ne pouvaient pas les prendre (les villes romaines se sont fortifiées à partir du IIème siècle et des guerres marcomaniques, et même avant en fait; avec le IIIème siècle, c'est systématique même pour les villes moyennes très à l'intérieur des frontières) et pouvaient juste parasiter les échanges et ravager les campagnes. On a de mauvaises images en tête de villes en feu, pillées et ravagées jusqu'au sol, parsemées de pyramides de crânes et de colonnes de citoyens réduits en esclavage. C'est pour l'essentiel de l'imagerie de cinéma.

Je ne sais pas si c'est du cinéma, mais Alaric ravage la Thrace, le péloponèse, la grèce met à sac de nombreuses villes grèques dont Athène, Sparte... et, selon les chroniques, repart avec de très nombreux esclaves (le pays est très peuplé à l'époque), jusqu'a ce que Stilicon arrive à le faire partir.

 

Pour les huns c'est pareil: après la défaite romaine d'Utus il pillent et ravagent toute la mésie, la macédoine et la Thrace, mais ne peuvent (et n'essayent pas) de prendre Constantinople.

 

Les résultats sont assez comparable à ce qu'avait fait Hannibal ou Spartacus, les zones rurales sont ravagés (et mettront du temps avant de s'en remettre) mais, c'est vrai, les très grosse villes sont plutôt épargnés.... enfin, jusqu'au sac de Rome.

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J'ai lu vos interventions avec un certain plaisir ! Ca me rappelle ce fil sur l'armée romaine tardive (où Tancrède intervenait notamment), et j'ai vraiment beaucoup appris et cassé pas mal de préjugés sur la fin de l'Empire romain. Ce sujet prend la même direction (et tant mieux !).

 

Tancrède, tu estimes donc que les Romains n'auraient jamais "annexé" la Germanie ? Auguste avait pourtant comme projet de conquérir la Germanie (sans doute pour marcher dans les pas de César avec "la Guerre des Gaules"). Sans la grande révolte illyrienne qui mobilisa une grande partie des légions (et même les meilleurs généraux romains comme Germanicus) et sans ce désastre de Varus (Auguste aurait tout de même eu une crise de rage en apprenant la perte des trois légions), les Romains auraient pu s'emparer de la Germanie ? Je vais raisonner par rapport aux cartes même si les Romains ne le faisaient pas, mais la frontière au niveau du Rhin n'était pas vraiment aisée à défendre, avec un "creux" entre le Rhin et les Alpes. N'aurait-il pas été dans l'intérêt de Rome de déplacer la frontière vers l'Elbe ? Non seulement, on choisit une meilleure position défensive, une frontière moins longue, mais on élimine une menace qui pèsera de plus en plus. La pression des Germains reprend au siècle suivant, avec les guerres marcomanes avec Marc Aurèle.

 

Pour ce qui est des attaques des Goths puis des Huns dans les Balkans et en Grèce, d'accord. Mais qu'est-ce qui les a empêché de traverser la Mer Égée pour piller l'Asie Mineure (comme ont fait les Saxons et les Angles pour la province de Britannie) ? L'Empire romain d'Orient est bien plus riche que celui d'Occident, et même si Constantinople résiste, il est toujours possible de la contourner, non ? 

 

Pour ce qui est de la peste antonine, il me semble qu'elle a d'abord frappé l'Orient (après la retraite des Romains de Mésopotamie), affectant très durement l'Egypte notamment. Pourtant, l'Orient a mieux résisté que l'Occident au final, avec une population apparemment plus faible que celle de son voisin occidental. 

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Je ne me lancerais pas dans une bataille de chiffres qui restent, essentiellement, des estimations (qui varient selon les auteurs),

 

Sauf qu'il y a des fourchettes de consensus, et que ces fourchettes ont radicalement évolué ces 40 dernières années: les chiffres auxquels le type que tu cites fait référence datent des années 1880 aux années 40-50. Ils sont dépassés.

 

C'est ce que l'on croyait il y a encore quelques années. Les photos aériennes et les fouilles récentes ont démontrés que les limes couvraient tout le Rhin et le Danube.

 

Le "limes" n'est pas une chose monobloc, et certainement pas un mur: c'est une zone allant parfois jusqu'à 200km de profondeur à l'intérieur des terres romaines, et dont l'organisation et la stratégie défensive dépendent de la zone: il n'y a de mur continu qu'en Ecosse, et sur "l'angle" Rhin/Main/Neckar/Danube (là ou il y a un "creux" et où les cours supérieurs du Danube et du Rhin sont facilement franchissables, avec des axes de pénétration nombreux et rapprochés. Ailleurs, ce sont des réseaux de fortins et tours de guets, avec des garnisons importantes réparties selon la géographie et les effectifs disponibles, et qui ont tendance à reculer à l'intérieur des frontières avec le temps et les changements organisationnels de l'armée.

 

La stratégie du Limes n'a jamais été de défendre aux frontières, mais de savoir ce qui se passe et d'agir au plus tôt de façon concentrée et offensive, en recherchant le contact décisif: c'est la base de l'organisation militaire du Haut Empire et la cause de la répartition aux frontières d'un empire et d'une culture romaine qui n'ont jamais pensé autrement que de façon offensive au plan opératif, et en gardant ouverte (et considérée comme souhaitable) la possibilité de conquête.

Les lignes de communication et de circulation logistique, routières et fluviales, sont la partie la plus essentielle de ce dispositif, qui lui donne sa rationalité, en ce qu'elles constituent les moyens d'approvisionnement, de renforts décidés "d'en haut", de concentrations plus importantes que de niveau "régional/provincial", de soutien mutuel entre zones.... C'est pourquoi les zones de "limes" sont des zones ou l'essentiel des travaux effectués ne le sont pas en fortifications, mais en routes, itinéraires aménagés, défrichements et dispositifs de guet.

Et la majorité des fortifications continue quand il y en a (sauf évidemment les casernements de troupes) n'ont pas de but de combat tactique, et certainement pas de fonction globale d'arrêt:

- ce sont des filtres visant à dissuader les petites expéditions et les raids fréquents des divers barbares (Pictes, Germains....)

- ce sont des barrières pour la taxation dans les zones d'échanges, visant à lutter contre la contrebande

- ce sont des "ralentisseurs" face aux expéditions importantes et armées adverses, donnant un peu plus de temps pour opérer les concentrations

- ce sont des multiplicateurs tactiques de forces dont le but est d'économiser des troupes utilisables ailleurs: moins de monde peut surveiller la frontière et jouer le rôle militaire que les Romains assignent aux fortifications de frontière en case de "guerre" avec un adversaire conséquent: reconnaissance, alerte et ralentissement

 

S'ils avaient compté sur les fortifications pour rendre la frontière "impénétrable" ou chercher à le faire, ils l'auraient fait partout ainsi, et auraient surtout fait ça en Orient (où existait le seul adversaire organisé et de taille), soit en Mésopotamie, soit sur les zones montagneuses de Syrie/Palestine/Est-Anatolienne. Ils ne l'ont pas fait et n'ont pas envisagé une seconde de le faire.

Ils l'ont fait dans ces endroits précis parce que les possibilités de pénétration (surtout celles petites, constantes et nombreuses) étaient grandes et la possibilité de quadrillage du territoire faible à moins d'avoir un nombre énorme de soldats. Et ils l'ont fait dans ces zones parce qu'en plus, c'était pas cher (contrairement à ce qu'on pense, ces fortifications ne coûtent pas grand chose: juste du temps de main d'oeuvre.... Et la main d'oeuvre, ce sont les soldats, qui sont payés de toute façon, pour l'extraction et le transport des ressources locales, et pour la construction). Ailleurs sur le Rhin et Danube, pas besoin de construction continue: le fleuve est là (comme ralentisseur ET axe de circulation), doublé par le défrichement, la disposition des garnisons (elles fortifiées), des routes parallèles à la flotte et des tours de guets. Eventuellement, ici et là, selon les probabilités de pénétration (dans des axes comme les affluents de fleuves) et les ressources localement disponibles, on dispose des réseaux de pièges et de positions préparées. Avoir des fortifications continues serait impossible à maintenir sur de telles distances, et disperserait en permanence les ressources militaires jusqu'au point d'inutilité complète. Pour un Empire qui a toujours été sous-militarisé au regard de sa taille (par extrême économie sous le principiat, puis par contrainte économique sous le dominat, après la crise du IIIème siècle), ce genre de stratégie n'a jamais été envisagé et ne correspond à aucun moment de l'histoire de la culture romaine.

Le seul endroit où ont fait des fortifications destinées à être tenues.... Ce sont les villes, et éventuellement certaines forteresses importantes (généralement aussi des villes, nées des garnisons). Parce qu'il n'y a pas le choix et que la ville est le centre de la pensée et des intérêts romains.

 

 soldat romain d'occident "type" du III°/ IV° siècle est un Limentanei,( comme en 1940 le soldat "type" était dans les fortifs Maginots). Certe, l'armée romaine a des unités de manoeuvre mais le gros des légions est le long des Limes: dans les tours de gardes ou en garnison à côté, dans les Castellum(ou l'on retrouve des "reserves mobiles").

 

De plus l'armée romaine, est peu mobile et manque de cavalerie. En face, les barbares fuient les combats, se dispersent dans le pays attaqué.

 

 

 

Pas vraiment: les Limitanei pèsent, selon la période, entre la moitié et les deux tiers de l'effectif, avec une portion importante d'entre eux (sinon tous) concentrables (et entraînés comme tels) en unités de campagnes (appelées du coup "pseudocomitatenses"). Au sein des Limitanei, ensuite, il faut faire une nomenclature entre les unités faisant de fait la patrouille aux frontières et y tenant les tours de guets, fortins et éventuelles portions de fortifications continues (quoique le limes fortifié de la zone Rhin/Main/Neckar/Danube a été abandonné pendant le IIIème siècle, au profit d'une frontière non fortifiée plus en retrait en Rhétie), et les troupes concentrées dans des garnisons plus en retrait (et en unités plus conséquentes) dans la zone du limes, dans des casernes pouvant fournir des troupes d'intervention d'échelon local (au niveau d'un diocèse ou de plusieurs) rapidement en plusieurs points de la frontière. Plus loin vers l'arrière, dans les diocèses "intérieurs" se trouvent les troupes d'intervention proprement dites, le comitatus local, plus concentré en permanence.

 

Les Limitanei ne sont en aucun cas entièrement dispersés le long de la frontière: ils ont une zone d'opération sur une profondeur importante du dispositif, et ont leur premier "échelon" d'intervention propre, ce qui se constate en regardant les dispositions des casernements militaires d'une même période, et leur importance graduelle (au fur et à mesure qu'on s'éloigne de la frontière jusqu'à plusieurs dizaines, voire plus d'une centaine, de kilomètres).

 

Ce n'est pas le "soldat type", et ce d'autant plus qu'il n'y a pas un "limitanei type". La mobilité locale est importante pour eux, si bien que les dotations en chevaux peuvent avoir représenté jusqu'à la moitié de l'effectif, quoiqu'on ne sache pas quelle proportion d'unités étaient de la cavalerie proprement dite (les estimations varient, mais on table généralement sur une proportion allant de 15 à 30% suivant les lieux: la cavalerie est peu utile sur le Rhin-Danube, terrain segmenté, peu ouvert, souvent marécageux et très boisé, et fondamentale en Orient). De même, l'importance des moyens de transport fluviaux est énorme, pour cette même raison. Ensuite, les "légions" de Limitanei sont des noms de tradition pour une réalité d'unités très différentes, avec des unités d'infanterie aptes au combat en ligne et de l'infanterie légère, et une grande polyvalence étant donné l'importance de l'entraînement et surtout la longueur des carrières (le passage, dans certaines régions, à des limitaneis faits de soldats paysans ou miliciens/temps partiel n'est arrivé que dans certaines régions, surtout en occident, au cours du Vème siècle).

Il ne faut pas confondre le ROLE, auquel on assigne une unité, et la NATURE de l'unité, ou encore le STATUT de l'unité, et son EFFICACITE: les unités auxilliaires romaines, d'Auguste à la crise du IIIème siècle, étaient moins payées et de statut inférieur, alors qu'elles étaient tout aussi efficaces que les légions, même quand on ne regarde que les cohortes d'infanterie lourde auxilliaires, au même métier que les cohortes légionnaires (les unités auxilliaires -désormais uniquement de statut palatin ou comitatus- acquèreront un statut d'élite par la suite). Ainsi, les Limitanei sont dans des fonctions assimilables à l'infanterie légère la plupart du temps, en raison de leur dispersion en petites sous-unités et de leur mode d'opération dominant (observation, raids punitifs, combats de petite échelle, "commandos"....), mais une partie d'entre eux reste concentrée en unités plus grandes, en retrait (réserve locale), et ils restent entraînés pour accompagner une armée "comitatus" en campagne "classique".

La chose est plus aisée avec des cycles opérationnels organisés (propre d'une armée réglée) et surtout des soldats à carrière longue (plus de 20 ans).

 

L'armée romaine reste la plus mobile de son temps, précisément par sa logistique incomparable, sa capacité de transport fluviale et son ordre de marche inexorable. Ce fondamental n'a jamais changé. C'est la mobilité stratégique et opérative, et rien ne se compare à elle, de même que c'est celle qui peut porter le combat le plus loin et le plus longtemps pour ces mêmes raisons. Tactiquement, ça évolue, mais la cavalerie a beaucoup progressé, allant jusqu'à représenter environs un quart des effectifs au IVème siècle. Et cette proportion obère le fait que l'armée romaine est une armée qui "thinks global but acts local": la majorité de la cavalerie est en Orient. Les groupements opérationnels romains sont très différents suivant les régions:

- l'Orient concentre plus des 3/4 des unités de cavalerie de choc (cataphractaires/clibanaires), et une large majorité des unités de cavalerie légère et "médiane" (la cavalerie de mêlée standard qui représente la majorité des effectifs montés). Les armées d'orient ont une proportion de cavalerie importante, tournant généralement autour d'un tiers des effectifs

- les unités d'Afrique fonctionnent suivant ce genre de proportions, avec moins d'insistance sur la cavalerie lourde ou médiane, et plus sur la légère

- les unités Rhin Danube ont peu de cavalerie, parce qu'elle sert moins, voire encombre, et n'a d'utilité que ponctuellement en bataille, face à des adversaires peu montés et sur un terrain généralement impropre à la charge ou à la manoeuvre de cavalerie.

 

Autre critère de répartition: les troupes ont des proportions de cavalerie variant selon leur type. Ainsi:

- les scholes sont uniquement de la cavalerie: c'est l'échelon le plus mobile, qui doit potentiellement aller partout

- les palatins (moitié des troupes dites "mobiles", ou plutôt "de réserve", mais d'échelon "impérial") ont une proportion élevée de cavaliers (1/3 environs)

- les comitatenses (troupes de réserve d'échelon "régional", au niveau des anciennes préfectures puis un peu plus subdivisées après) ont aussi une proportion supérieure de cavaliers

- les limtanei: vu plus haut. Dur à évaluer, mais la proportion de cavaliers, variable selon les endroits, est largement suppléée par une large dotation en chevaux (pour monter l'infanterie) pour les rôles de patrouille, de logistique et de mobilité opérative

- les fédérés et mercenaires: dépend totalement du lieu et du peuple concerné

- les milices locales: fixes, il s'agit essentiellement de formations liées à une ville. Pas de cavalerie

 

'Fin bon: l'armée romaine tardive, c'est un sujet long, et y'a une bibliographie dessus.

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Par rapport à la Germanie qui si j'ai bien compris n'a pas été conquise du fait de sa pauvreté, ça aurait pas été possible dans ce cas de créer une confédération germanique avant l'heure? Je parle pas de l'installation de colons/soldats germaniques dans les régions frontalières mais de créer un groupement de peuple barbares (sur le modèle d'états clients) du Rhin à l'Elbe (en éliminant les plus récalcitrant si besoin par alliance avec d'autre tribus) en échange d'un approvisionnement régulier en céréales (ou par la force...) ce qui aurait donné une profondeur stratégique énorme dans cette partie de l'empire, permis d'économiser des hommes et de l'argent pour une guerre quasi continue et de repousser plus facilement les Huns...

Modifié par trfyrktrv
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REVAN :Pour ce qui est des attaques des Goths puis des Huns dans les Balkans et en Grèce, d'accord. Mais qu'est-ce qui les a empêché de traverser la Mer Égée pour piller l'Asie Mineure (comme ont fait les Saxons et les Angles pour la province de Britannie) ?

Les Balkans et notament la grèce, sont très riches et peuplés à la fin du III°s, c'est la raison des raids barbares sur cette région.

Les Huns sont fondamentalement des cavaliers des steppes et les Goths des fantassins, question mer ils y connaissent pas grand chose, et pour passer en asie mineur, il faut traverser la mer, faire de nombreux navires, et forcer le passage face à la flotte romaine (une des plus puissante de l'antiquité). Ou bien faire un très grands détour via le caucase, où il faut passer les montagnes, zone favorable à la défense et défavorable aux Huns.

 

Par contre les saxons, les angles vivent sur le bord de la mer du Nord et sont donc plus familiers des questions maritimes.

 

Le "limes" n'est pas une chose monobloc, et certainement pas un mur:

Techniquement parlant, le Limes est plus une sorte de palissade en bois ou un simple mur en pierre (selon les ressources locales) avec des tours de guet tous les 150/200 mètres, qui suit a peu près la frontière. Cela ressemble souvent à ça:

 

220px-Taunusstein_-_Limes_Wachturm.jpg

 

En arrière de cette palissade ont touve les Castellums, pardon, les castella tous les 10Km (environ).

 

280px-Saalburg_-_Haupteingang_2009.jpg

 

Là se trouve les parties mobiles des légions romaines: les vexillatio

 

http://germanie.wikidot.com/limes

 

Les Limes Rhénanes en sont ainsi l’exemple le plus pertinent.

On y aurait compté plus de 900 fortins espacés à portée de vue par les vigies ou de voix au cas où le temps et la nuit ne permettaient pas d’autres communications. Tous les 10 Km une place forte venait coordonner l’ensemble des fortins, chacune de ses structures accueillant au moins 500 Légionnaires selon les sources !

Et quand on sait que ces places fortes étaient au nombre d’une soixantaine on peut au bas mot dénombrer pas moins de 600 Km de Limes (en ôtant les parties géographiques naturellement infranchissables). Enfin de grandes citadelles ou cités venaient renforcer cet astucieux maillage. Elles accueillaient de grandes cohortes de Légions et reliaient par larges chemins ou voies pavés la plupart des Limes.

L’une des plus célèbres est la fameuse Colonia Claudia Ara Agrippinensium sur le Rhin faisant face aux plus belliqueux Germains. D’ailleurs on situe la première tour de guet des Limes Rhénanes toute proche de cette cité…

Enfin les Limes Danubiennes ne différent pas de celles Rhénanes si ce n’est qu’ils étaient moins pavés et plus distendus. Toutefois toute une série de petits ports fluviaux assuraient des patrouilles navales incessantes sur le large Danube !

 

Sur une cinquantaine de légions, il y en a une grosse trentaine affecté aux limes dans l'empire romain.

 

Certes, la proportion entre vexillatio et limentanei va varier selon les réformes impériale (en faveur des Vexillatio), mais leur tache principale (et leur zones de déploiement) reste bien la défense du Limes.

 

http://antique.mrugala.net/Rome/Armee/L%27armee%20romaine%20sous%20l%27empire%202.htm

Les causes de l'impuissance face aux invasions

Il devient clair, à partir du règne de Alexandre Sévère, que Rome n'est pas en état de mener des opérations d'envergure sur deux fronts à la fois. Cette impuissance est due à plusieurs causes :

  • L'insuffisance des effectifs : les 400 000 hommes que compte l'armée, toutes formations comprises, sont insuffisants pour défendre les 9 000 kilomètres de frontières terrestres, sans parler de l'intérieur du territoire.

  • Le coût énorme de l'armée : c'est une charge énorme, qu'on ne pourrait augmenter sans une réforme complète du système économique et en particulier de la fiscalité, déjà très lourde selon les critères du temps. Caracalla semble y avoir songé, et ces velléités suffisent à expliquer son impopularité dans les milieux sénatoriaux.

  • L'inadaptation de la stratégie axée sur la défensive, malgré des phases ponctuelles d'offensive tactique. La conception qui prévaut est celle du limes. Hors de la zone frontière, large de quelques dizaines de kilomètres, même si les routes stratégiques sont régulièrement patrouillées et entretenues, il n'y a virtuellement plus de protection et les villes ne sont pour la plupart pas ceintes de remparts. Cette conception linéaire de la défense convient à une époque paisible. Les invasions germaniques de l'époque de Marc-Aurèle en avaient fait apparaître les limites, sans toutefois que la stratégie ait été repensée en conséquence.

  • La difficulté de rassembler de gros effectifs pour une expédition de grande envergure. Les empereurs tentent d'y parvenir en prélevant sur chaque légion des vexillations (vexillationes), qui sont des détachements ou «bataillons de marche», formés des soldats les plus aguerris, 1 000 à 2 000 par légion. Leur réunion, pour la durée d'une campagne, permet la constitution d'un corps d'armée, dont la direction est confiée à un officier nommé spécifiquement pour cette mission avec le titre de praepositus (équestre pour les auxiliaires) ou de dux (sénatorial pour les légionnaires).

  • Des carences tactiques : les soldats sont lourdement armés. Leur qualité principale est en revanche la discipline, l'aptitude à manoeuvrer, entretenue par l'exercice quotidien. Une armée romaine peut affronter victorieusement n'importe quel adversaire en bataille rangée, et excelle également dans les opérations de siège.

  • L'insuffisance de la cavalerie : les 120 cavaliers que compte une légion ne peuvent remplir que des missions de liaison ou d'escorte. Les ailes de cavalerie auxiliaire y suppléent imparfaitement, bien que les empereurs aient cherché à développer des unités de spécialistes : archers palmyréniens et osrhoéniens, «acontistes» (lanceurs de javelot) maures, et, à l'imitation des Sarmates et des Parthes, cavalerie lourde de lanciers (contarii) ou de cuirassiers cataphractaires.

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mais de créer un groupement de peuple barbares (sur le modèle d'états clients) du Rhin à l'Elbe (en éliminant les plus récalcitrant si besoin par alliance avec d'autre tribus) en échange d'un approvisionnement régulier en céréales (ou par la force...) ce qui aurait donné une profondeur stratégique énorme dans cette partie de l'empire, permis d'économiser des hommes et de l'argent pour une guerre quasi continue et de repousser plus facilement les Huns...         

 

C'est ce qui a été fait avec DES Etats clients, pas un Etat unifié: pourquoi se constituer un ennemi potentiel en faisant pour lui le travail que seuls des siècles d'évolution sociale/civilisationnelle ont produit pour Rome et d'autres? C'est un des grands avantages de Rome que d'être une grande entité étatique: pourquoi ils investiraient du fric à faire ça pour des voisins qui, devenus puissants, seraient plus un emmerdement qu'autre chose?

L'anone, l'armée et le trésor, de même que le régime des "invités"/otages, sont les moyens de cette "politique barbare": l'anone, en concentrant et gérant l'approvisionnement (constitution, acheminement) des réserves étatiques de céréales, permet une allocation pour la diplomatie (les autres grands postes étant l'appro de Rome et Constantinople, des apports pour d'autres villes, des réserves stratégiques, et l'armée), les réserves numéraires permettent diverses formes de "cadeaux/rétributions" aux "alliés" ("socii", "letii") et fédérés ("foederati"), de sommes remises directement à des salaires pour mercenariat d'unités ou fourniture de recrues, et l'armée permet de soutenir les uns aux dépends des autres dans les querelles de voisinages de ces peuples. Le régime des invités et otages, assez traditionnel dans les sociétés antiques, consiste, lorsqu'un traité est établi, de gré à gré ou par force, en un prélèvement de gages de respect du traité "en nature" (c'est pas le seul), sous la forme d'échanges d'individus (ambassadeurs notamment, surtout du côté romain), ou plutôt de contribution unilatérale (Rome conclue rarement des traités d'égal à égal et ne les reconnaît jamais comme tels): les fils de l'élite "barbare" sont emmenés et éduqués à Rome pendant une durée fixée, et feront souvent carrière comme officiers romains ensuite, dans des ailes de cavalerie généralement (c'est ce qui s'est passé pour Arminius, par exemple, suite au traité conclu par Drusus avec les Chérusques). Avec le temps, beaucoup de peuples (ou plutôt les entités organisées) le long du limès sont devenues dépendantes de l'aide romaine (par exemple par croissance démographique au-delà des possibilités de production alimentaire de leur sol, ou par besoin de l'appui romain pour leurs équilibres politiques intérieurs et extérieurs), et même les populations appelées "Goths" qui sont accueillies en 376 et causeront Andrinople, étaient dans ce cas.

Mais les peuples sont ra

 

Mais pour constituer une "entité germanique" de grande taille? Aucun intérêt, voire que du danger pour Rome. En plus, il faut du temps et beaucoup de ressources pour ça, et c'est dur à constituer sans une occupation permanente: il suffit de voir la conquête des Gaules (quelques années), et surtout l'établissement d'un contrôle réel de ce territoire (plus d'un siècle pour qu'on puisse réellement commencer à voir des Gaules pacifiées), alors qu'il s'agit, quand César envahit, d'un territoire plus mis en valeur, plus défriché, plus proche de Rome, plus développé, plus peuplé, avec plus d'axes de communication et surtout, dans la plupart des régions, une structuration bien plus avancée des populations, y compris des zones développées selon des critères romains (sédentarisation, insertion dans le grand commerce gréco-latin, phénomène urbain largement engagé, plusieurs niveaux de structuration politique en grandes entités: "nations" sujettes et nations "fédérantes" -comme les héduens et les Arvernes), principalement dans la zone plus tard organisée en province de Gaule Lugdunaise.

C'est une zone de conquête intéressante (valant l'investissement soutenu) et c'est une zone conquérable: des adversaires fixes, au territoire organisé, avec des centres fixes et des zones de récolte dont il dépend, et une organisation militaire de type "développé" -cad pas des forces de guérillas comme les germains- qui n'est pas encore au niveau de Rome. Du coup, un adversaire de ce type peut être pris et pacifié; ce fut plus dur en Gaule Acquitaine et en Gaule Belgique (et dans les zones dites de Germanie supérieure et inférieures), zones peu développées comparables à la Germanie d'outre Rhin (mais comme c'était dans l'espace de sécurité défini par la conquête, et à proximité, l'effort de conquête et colonisation a été fait). La 2ème moitié du Ier siècle av JC et quasiment tout le Ier siècle après JC ont été une longue campagne de contre-insurrection et de nation building (pas au profit des locaux) dans ces zones des Gaules: ça fait long et cher, 150 piges (mais nous, à cause des livres d'histoire, on a l'impression d'une conquête pliée et finalisée par César en quelques années). Les troupes ont largement payé le prix pour ça, mais aussi, et surtout, ont beaucoup recouru aux nations gauloises alliées à Rome, ce qui a représenté un important effectif militaire et des affrontements permanents entre tribus celtes.

Mais ça n'a été possible que parce que Rome entendait occuper cet espace, et donc y était en permanence: cela seul a permis la structuration du territoire des Gaules et a rendu l'effort souhaitable, parce que personne d'autre ne pouvait en profiter.

Constituer une "Germanie", à moins d'en faire un territoire romain, réclamerait le même genre d'effort de très longue durée (en fait plus grand encore vu la faible densité de population, la lenteur de circulation à cause du relief et de la couverture boisée, la plus grande division des entités politiques....): la question devient de savoir si ça vaut le coup, surtout pour les individus (pas pour une supposée "stratégie" de longue haleine, intemporelle) qui seraient appelés à prendre ces décisions. La Germanie vaut-elle le coup et le coût? Rome peut-elle se permettre de consacrer autant de ressources pendant si longtemps pour si peu de retours?

 

Mieux valait multiplier les Etats clients.... Et puis, on ne peut que voir les décisions prises à l'échelle des êtres humains -mortels: on va pas leur présupposer la prescience de savoir que les Huns arriveront en masse 1 siècle ou même 50 piges à l'avance. Et les Huns n'ont réellement été autre chose qu'une nuisance que pendant l'épisode d'Attila, soit entre les années 430 et 450, quand l'empire d'occident est déjà de toute façon en mort clinique.

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Sur une cinquantaine de légions, il y en a une grosse trentaine affecté aux limes dans l'empire romain.

 

Une cinquantaine de légions? Il y en a eu une moyenne de 28 pendant l'essentiel du principiat (cad d'Auguste aux Sévères, des années 30 av JC jusqu'aux années 200 ap JC), avec un pic bref à 33 sous les deux premiers Sévères (création par Septime Sévère des 3 légions dites "Parthiques" qui, pour la première fois, ne sont pas aux frontières mais à disposition du centre, en plus de la réserve prétorienne); et pour l'armée post-Dioclétien, on recense 189 unités qualifiées de "légions" (dont 47 sont des limitanei strictement aux frontières et 47 sont des limitanei avec statut "pseudocomitatenses", plus concentrées dans des garnisons plus en profondeur dans la zone du limes), mais qui n'ont évidemment plus rien à voir avec les légions précédentes vu l'évolution du modèle militaire: c'est dans la Notitia Dignitatum, le SEUL document recensant l'orbat romain tardif à un moment donné dont on dispose, et il n'est pas complet et compile des données de plusieurs périodes différentes (entre les années 390 et 420, soit en plus pas le moment le plus exemplaire pour l'occident).

 

Faut lire des ouvrages plus fouillés que des sites internet d'amateurs (rien qu'en Français, lire Richardot et Le Bohec est un préalable nécessaire): ils ont des bonnes infos, d'autres qui datent, et d'autres sont un poil fantaisistes. L'idée d'un mur, ou même d'une palissade continue, sur toute la longueur, a depuis un bail été battue en brèche.

 

Parce que là, en plus, le résumé que tu en fais nie un peu l'évolution de l'armée romaine: l'énumération des soi-disant faiblesses sont plus une collection de clichés anciens et se trouve être complètement atemporelle, combinant plusieurs époques et situations différentes pour essayer de faire un tableau général, et commettant, outre des erreurs pures et simples, des amalgames coupables pour l'analyse, notamment en mélangeant les modèles d'armées pré et post crise du IIIème siècle, ce qui est absurde.

Exemples:

L'inadaptation de la stratégie axée sur la défensive, malgré des phases ponctuelles d'offensive tactique. La conception qui prévaut est celle du limes. Hors de la zone frontière, large de quelques dizaines de kilomètres, même si les routes stratégiques sont régulièrement patrouillées et entretenues, il n'y a virtuellement plus de protection et les villes ne sont pour la plupart pas ceintes de remparts. Cette conception linéaire de la défense convient à une époque paisible. Les invasions germaniques de l'époque de Marc-Aurèle en avaient fait apparaître les limites, sans toutefois que la stratégie ait été repensée en conséquence.

 

Le débat sur l'idée d'une "grande stratégie" de l'empire romain est une patate chaude, mais parmi les choses consensuelles, l'idée d'une "stratégie défensive" a été largement écartée, autant par l'absence de conceptualisation générale (l'idée d'une "stratégie impériale" est très douteuse) que par l'incompatibilité de la défensive avec la mentalité romaine, et que par la conception des dispositifs de frontière, qui sont moins des défenses que des dispositifs d'alerte, de filtrage et de retardeme, et surtout des marques des limites du monde romain. Par ailleurs, l'armée romaine, dans sa structuration (conception des armées, conception des unités, équipement....), n'est pas faite pour la défensive, mais pour rechercher le contact en rase campagne et la victoire rapide et décisive. Ensuite, les fortifications des villes loin à l'intérieur des terres ont commencé dès Marc Aurèle (et même avant, sous les Flaviens, dans beaucoup de provinces), précisément suite aux guerres marcomaniques et avec les Quades.

Cette "idée" d'une "défense linéaire" et d'une frontière paisible, c'est dans l'histoire à grand papa: un simplifisme pour les manuels d'école, comme dire (ce qui a été le cas pendant un moment) que les Allemands ont percé en 40 parce qu'ils avaient des tanks (et supposément pas les Français) et que les Français se sont pas battus, ou dire que c'est le canon Krupp qui a causé la victoire allemande de 1870.

Le coût énorme de l'armée : c'est une charge énorme, qu'on ne pourrait augmenter sans une réforme complète du système économique et en particulier de la fiscalité, déjà très lourde selon les critères du temps. Caracalla semble y avoir songé, et ces velléités suffisent à expliquer son impopularité dans les milieux sénatoriaux.

 

Les Sévères ont rendu le coût insupportable, et causé une inflation rapide qui l'a rendu encore plus lourd. Avant cela, ça s'est très bien passé aux Ier et IIème siècles, merci pour Rome.

La difficulté de rassembler de gros effectifs pour une expédition de grande envergure

 

Gné? Ca sort d'où?

Des carences tactiques : les soldats sont lourdement armés. Leur qualité principale est en revanche la discipline, l'aptitude à manoeuvrer, entretenue par l'exercice quotidien. Une armée romaine peut affronter victorieusement n'importe quel adversaire en bataille rangée, et excelle également dans les opérations de siège.

 

Où sont les carences? L'armement lourd? Pour les légionnaires peut-être, qui ne constituent que moins de la moitié de l'armée de terre par rapport à l'auxiliat, et puis peut-être les cohortes auxilliaires d'infanterie lourde, et les cohortes mixtes (infanterie/cavalerie) qui se développent dès le Ier siècle.... Sauf que les légionnaires comme les auxilliaires opèrent aussi bien en équipement complet que allégés, avec la traîne logistique que sans. L'avantage de professionnels engagés pour 16, puis 20, puis 24 ans, c'est qu'ils sont un tantinet versatiles et salement aguerris. Ce genre de commentaires rappelle vraiment les visions artificielles de gens confondant assimilant automatiquement "infanterie lourde" avec l'image d'un fantassin surchargé apte uniquement au combat en masse (le terme "infanterie de ligne" est bien plus adapté): l'infanterie de ligne romaine (légionnaire et auxilliaire) n'a pas eu la même évolution que l'infanterie de ligne macédonienne (les phalangistes) en allant vers la mono activité et des schémas tactiques rigides.

L'insuffisance de la cavalerie : les 120 cavaliers que compte une légion ne peuvent remplir que des missions de liaison ou d'escorte. Les ailes de cavalerie auxiliaire y suppléent imparfaitement, bien que les empereurs aient cherché à développer des unités de spécialistes : archers palmyréniens et osrhoéniens, «acontistes» (lanceurs de javelot) maures, et, à l'imitation des Sarmates et des Parthes, cavalerie lourde de lanciers (contarii) ou de cuirassiers cataphractaires

 

.Oui, la cavalerie a toujours été un manquement romain.... Mais un manquement qui n'en fut un QUE face à un seul adversaire; les Perses, et encore, uniquement dans les expéditions pour aller les taper chez eux (parce que contre la défense de l'orient romain, c'est l'armée perse qui était inadaptée). Contre le reste, Rome n'a pas trop souffert de ne pas avoir un tiers de son armée en cavalerie; 20% ont largement suffi, et la cavalerie romaine était excellente. Pour la note, la cavalerie légionnaire (les 120 à 240 cavaliers -ça varie- recensés dans une légion type du Haut Empire) n'a jamais été faite pour autre chose que la messagerie, la reconnaissance et l'escorte (c'est dans ses effectifs que se trouvent les 10 Speculatores d'un Légat, par exemple, mais aussi les Singulares, les gardes du corps du Légat); elle n'est apte au combat de cavalerie que pour l'échelon de la turme (30h), soit pour des petits accrochages et du harcèlement. La dernière fois que la cavalerie organique d'une légion a été faite pour être de la cavalerie, c'était pendant la première guerre punique, quand les armées consulaires étaient encore fondées sur la conscription et l'attribution des rôles selon la fortune (et les equites/chevaliers étaient ceux qui pouvaient équiper un cheval sur leurs deniers). La cavalerie des socii (campaniens et numides, puis ibères, celtes et ubiens) a pallié ces "manques" plutôt pas mal pendant la République, et la formation de l'auxiliat professionnel sous Auguste a doté l'armée romaine d'une importante cavalerie professionnelle. Cette idée d'un "manque" est une mauvaise extrapolation des problèmes avec les Perses (deux modèles d'armées qui n'ont jamais réellement trouvé un moyen de s'affronter, se posant mutuellement des problèmes insurmontables, et deux pays ne pouvant se comprendre et donc se conquérir).

 

Face aux peuples migrants, même les quelques entités de peuples cavaliers (Huns, Sarmates/tauroscythes, Alains), ça n'a pas posé de problèmes tactiques, surtout que ces groupes, rarement très grands (faut de la place fertile pour nourrir des troupeaux de chevaux avec une moyenne de 15 chevaux pour un homme dans un peuple cavalier: on estime que la plaine hongroise à cette époque n'aurait pas pu soutenir une armée hunnique de plus de 15-20 000h tous groupes confondus), pour atteindre des effectifs menaçants, formaient toujours des rassemblements assez hétéroclites aboutissant à des armées où la cavalerie n'était pas la donne fondamentale (l'armée d'Attila n'a par exemple jamais eu une majorité de Huns).

Et faut pas mélanger les époques et foutre des Huns (qui se sont lâchés dans un empire d'occident qui n'existait plus qu'en théorie) avec les événements de la crise du IIIème siècle, et trouver des causes communes à ce qui s'est passé à ces deux périodes: les multiples invasions du IIIème siècle sont avant tout dues à la conjonction de divisions politiques internes sévères (soulèvements/rebellions/sécessions nombreuses), de menaces externes nombreuses et simultanées et d'un affaiblissement militaire temporaire (parce que les troupes romaines sont utilisées dans les guerres civiles, s'usent vite, sont soudain sous-financées et donc non remplacées en nombre et surtout en qualité), le tout ayant pour cause principale une crise monétaire puis économique. Sur ce fond se greffent donc l'arrivée de nouvelles ligues d'anciens peuples (Pictes, Francs, Saxons et Alamans ne sont pas des nouveaux venus: juste les peuples qui ont toujours été là et se sont organisés à plus grande échelle) et une menace perse plus dangereuse (les sassanides sont un groupe ayant plus de pouvoir que la dynastie parthe). Les attaques extérieures sont plus fréquentes, plus nombreuses, plus importantes, alors que Rome se déchire. Bref, la "crise du IIIème siècle", en fait surtout une période dure entre les années 230 et 260, c'est un cas particulier dont il ne faut pas généraliser les caractéristiques pour parler d'autres moments. Le redressement monétaire, économique, fiscal, politique et militaire qui arrive dans les années 250-260 avec Aurélien puis Dioclétien est l'occasion d'une grande reprise en main de l'armée romaine qui généralise sa mue (y'a pas de vraie "rupture" nette; l'évolution est continue, même si la crise a accéléré l'évolution, pour la partie des troupes qui pouvait être réellement financée et utilisée) et retrouve ses standards. La réforme semble s'achever sous Constantin, dans les années 310.

 

Les Huns sont fondamentalement des cavaliers des steppes et les Goths des fantassins, question mer ils y connaissent pas grand chose, et pour passer en asie mineur, il faut traverser la mer, faire de nombreux navires, et forcer le passage face à la flotte romaine (une des plus puissante de l'antiquité). Ou bien faire un très grands détour via le caucase, où il faut passer les montagnes, zone favorable à la défense et défavorable aux Huns.

 

Pourtant, nombre d'expéditions maritimes sur l'Asie Mineure (côtes nord, est et sud, y compris à Chypre) et la Grèce, ont été celles de Goths, parfois appelés "Scythes" (un nom sorti du fond des âges). Les visions monolithiques de ces entités qu'on appelle "peuples germaniques" sont à éviter: ensembles et sous ensembles que les manuels d'histoire nous ont foutu dans le crâne sont des constructions a posteriori. Les "Goths" ne sont en aucun cas un peuple au sens ethnique (y'a du "germain" -terme à relativiser-, du celte, de l'iranien, du thrace, du dace, du romain, même) ou politique (ce sont des "fédérations" de groupes et tribus existants, voire des "confédérations" de plusieurs "fédérations" de ce type); et il n'y a pas un ou deux groupes de "Goths" unis, mais beaucoup à qui on a attribué l'appellation. Déjà deux sous ensembles des Goths "canal historique" (cad avant les migrations du IIIème siècle) sont des repères imparfaits et un peu artificiels pour retracer ces peuples, et on y voit déjà de fortes différenciations, avec les Greuthungi cavaliers (dont on aime faire descendre les "Ostrogoths") et les Thervingi fantassins (auxquels on rattache par facilité les futurs Wisigoths). La réalité est plus complexe et plus mouvante, et éloignée de l'idée de "peuples" tels que nous le concevons (on paie encore les nationalismes du XIXème siècle et leur historiographie, avec ces oeillères mentales): on a là des entités multi-ethniques et multi culturelles, sans unité politique autre que temporaire, pour une expédition ou une campagne longue, qui rassemble une partie de ces groupes et d'autres (ces mots que sont "Goths" ou "Vandales" devraient en fait plus être comparés à des entreprises privées ou des joint ventures). Et ils ont peu d'attachement culturel à une arme ou à une autre: ils ont démontré des qualités d'adaptation fréquentes, des Goths, mais aussi Saxons et Francs (deux autre ligues de nombreux peuples anciens ayant toujours vécu près du Limes) se faisant raiders maritimes au IIIème siècle.

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Merci de ta réponse tres developpée Tancrede. J'ai une autre question: comment l'infanterie lourde Romaine faisait elle pour vaincre des archers montés (en particulier les sassanides)? Si il est clair que la cavalerie va forcément avoir du mal à mener un siège en revanche en combat en rase campagne j'ai l'impression que c'est un no match même malgré les 20% de cavalerie romaine orientales... Pourquoi est ce que les Perses n'arrivent pas à ré-obtenir une bataille de Carhes?Vu leur mobilité ça doit pas être bien dur de provoquer une bataille en plaine/désert non? Avec la puissance de leur arcs composites (sans commune mesure avec les archers crétois ou des baléares je crois et surpassant nettement la porté des javelots...) couplée à leur haute mobilité permettrai en théorie un harcèlement épouvantable ,( mentalement c'est encore pire je présume) qui malgré la puissance de la discipline romaine va pas manquer de rendre la troupe fébrile et à la moindre erreur les cataphractaires pourraient balayer l'infanterie (je dirais que c'est même optionnel, les romains ne pouvant resister à un harcelement qui s'eternise...) La cavalerie légère peut également s'en prendre aux ravitaillement non?

Modifié par trfyrktrv
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On n'est plus vraiment dans le sujet, là: faut aller dans les sujets dédiés à l'armée romaine (en général) ou celui de l'armée tardive (particulier).

Pourquoi est ce que les Perses n'arrivent pas à ré-obtenir une bataille de Carhes

 

Comme souvent dans l'histoire, la défaite de Carrhes est due à un ensemble de facteurs peu reproductibles: les Perses n'ont pas reproduit un Suréna si facilement (c'est le seul nom sous lequel on connaît ce général, et c'est un titre ou un grade, pas un nom; un peu comme "Vercingétorix" -"roi des guerriers"-, dont le nom était Celtill, ou Brennus -"chef"-, le leader Sénon qui a pris Rome au IVème siècle avJC, dont le nom était Ambigat), et la situation même dont a bénéficié ce Suréna est difficilement reproductible (confiance -momentanée- d'un leader parthe fort qui lui donne les moyens et carte blanche, bonne situation qui permet d'avoir de larges ressources logistiques, consensus politique dans la délicate scène politique féodale parthe....). En plus, difficile d'avoir en même temps un leader romain aussi incompétent et mal inspiré que Crassus.

Mais Carrhae a été reproduit une fois quand même au IIIème siècle, avec des circonstances relativement comparables, avec la victoire d'Edesse en 260, où Shapur Ier vainquit et captura l'empereur Valérien (seul cas d'un souverain romain capturé par l'ennemi), dans une campagne à peu près aussi mal conçue et menée que celle de Crassus. Un désastre assez monumental, mais comme Carrhes, sans grands lendemains stratégiques.

 

 

Mais la question de l'affrontement romano-perse en termes tactiques demeure. Faut pas oublier cependant que la puissance de feu parthe/perse a une contrepartie: elle est gourmande en projectiles, et les cavaliers ne peuvent emporter le quart du dixième des flèches nécessaires à un truc comme Carrhae sur eux. Faut donc des animaux de bât et des chariots en grand nombre, et ce d'autant plus qu'une armée de cavaliers est infiniment plus gourmande qu'une armée de fantassins, dès lors qu'on ne se balade pas dans une steppe pleine d'herbe et de cours d'eau (comme les Mongols). Et le MO, bien qu'il ne s'agisse pas d'un désert de sable, n'offre pas d'itinéraire continu permettant cet appro, sauf si on longe les fleuves qui vont pas dans le bon sens pour une invasion des territoires romains (sauf dans l'est anatolien et les confins arméniens, mais là le relief est trop dur et les points de passages rares et très défendus). Les Parthes/Perses sont des peuples cavaliers dont la base démographique (humaine et équine) se trouve sur de hauts plateaux plus ou moins fertiles beaucoup plus à l'est de la Mésopotamie. Envahir et s'établir dans la plaine iranienne, ça c'était possible et à portée. Menacer la Mésopotamie, voire la prendre et la tenir, c'est leur limite, dès lors qu'il y a un adversaire qui tient la prochaine zone pouvant supporter des armées importantes, à savoir la côte méditerranéenne et la Syrie ancienne. Entre les deux, c'est pas fertile, et l'avantage de l'offensive va donc à celui qui a la meilleure logistique, cad Rome. Et de toute façon, Rome a établi sa ligne de défense de Mésopotamie, donc la ligne d'affrontement des deux empires, le premier: s'avancer vers la Mésopotamie depuis l'Iran, c'est un saut logistique important et une exposition militaire si on n'a pas de bases à l'arrivée et de lignes sécurisées (c'est donc une expédition lourde à monter, chère et demandeuse en logistique).

 

Les Romains savent qu'il vaut mieux éviter la bataille en espace dégagé avec les Perses, donc ils se prémunissent généralement contre (reco importante, secret et surprise sur les itinéraires, points d'appuis fortifiés, mouvements rapides, diversions....) sur les quelques zones vraiment dangereuses, cad entre les passes de Syrie/Palestine et les forteresses de l'Euphrate. C'est pas si évident de baliser un si grand espace.
Pendant longtemps en plus, les Parthes ne savent pas prendre des villes et fortifications: ce n'est qu'avec les Sassanides qu'ils développent cette capacité, et vu la taille des points importants au MO (et la sophistication de la polyorcétique romaine), ça veut généralement dire des sièges longs, immobilisant des armées un bon moment (dur pour une armée perse faite pour bouger). Et les armées perses, concentrées, ne peuvent en mener plus de 2 de suite à l'échelle du théâtre: ça veut dire que les campagnes se passent LEEENNNNTEMENT à partir du IIIème siècle.

Pour la défense, fortifications et vide logistique sont donc deux des grands multiplicateurs de force romains. Pour la défense de la côte méditerranéenne, c'est le relief: montagnes partout pour qui vient de l'est, relief accidenté et segmenté favorable à la défense tactique et, à l'arrivée, les passes sont tenues et fortifiées pour des parthes/perses réussissant à venir jusque là. Sans compter évidemment que les Romains ont mis du monde en Orient, notamment une composante de cavalerie qui ne cesse de croître. Si elle ne sera jamais suffisante pour l'hypothèse d'une grande bataille rangée entre deux armées majeures sur un terrain ouvert et favorable aux Parthes (déjà beaucoup de conditions dures à réunir), elle est suffisante pour les tenir en respect (l'archerie se développe beaucoup à Rome, et la combinaison archers montés et archers à pied produit du feu), avoir de la réserve de punch en contre offensives localisées (les cataphractaires romains sont qualitativement équivalents aux perses).

Plus simplement, les Romains évitent cette configuration pour ce qui est de grande bataille: il est plus simple de faire des "colonnes mobiles" de cavalerie et d'infanterie montée qui agissent indépendamment du corps principal de l'armée pour patrouiller et démolir tout ce qui peut ressembler à une base ou un convoi logistique parthe/perse (dont eux aussi, la cavalerie est en mouvement): c'est ce que Cassius fera aux lendemains de Carrhes, de même que le délégué de Marc Antoine (j'ai un trou pour le nom, mais il a rétabli la situation orientale avec peu de moyens, ce qu'Antoine appréciera peu), et c'est ce que nombre de chefs romains feront ensuite. Ne pas laisser une armée de cavaliers disposer de la réserve idéale de flèches, de bouffe et d'eau dans les confins syriens, c'est bouleverser ses calculs et la forcer à changer sa stratégie de campagne. De fait, c'est lui tronçonner les pattes.

 

En bref, les Romains ont appris à tout faire pour ne pas se placer dans une situation tactique comme celle de Carrhes: on agit en amont, on accroît la cavalerie, on prépare le terrain quand on peut, on mise sur le renseignement et le secret, on rameute des alliés adaptés quand on peut (notamment les Arméniens, à la forte et nombreuse cavalerie reposant aussi sur un duo archers/cataphractes), on fait des colonnes mobiles.... Et même s'il faut en venir là, une troupe de cavaliers perses rencontrant une troupe de fantassins romains mais sans avoir son soutien logistique (réserve de flèches abondante) n'adopte pas la même tactique et ne peut faire du "hit and run" et du déni de contact comme à Carrhes.

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L'idée d'un mur, ou même d'une palissade continue, sur toute la longueur, a depuis un bail été battue en brèche.

Les fortins avec palissades (ou fossés en afrique), les castella... correspondent à une réalité qui avait trait surtout au II°s et début III°s pour une période de paix, mais qui va se révéler peu utile pour parer les raids barbares.

Tu as raison de dire qu'a partir de la fin du III°s et surtout après, au IV°s, l'armée romaine s'éloigne du limes à proprement parler et se transforme (je ne le nie pas du tout), mais (j'en reviens à mes propos) les légions restent bien dans le même secteur frontalier, immobilisés en position défensive (pour diverses raisons pas toujours militaire d'ailleur)

 

Pour plus de détails:

 

 http://www.liberation.fr/cahier-special/2006/08/14/a-la-barbe-des-barbares_48388

Question pour un archéologue : combien d'années faut-il à un pieu planté en terre pour pourrir ? «Je ne crois pas qu'ils aient pu tenir cent cinquante ans, c'est trop long», assure Egon Schallmayer, le directeur du musée de Saalburg, en prenant son visiteur à témoin. La question semble saugrenue, mais elle porte en germe la remise en cause d'un mythe solidement ancré (...). Et, plus précisément, de la palissade de 550 km qui coupait en deux la Germanie pour protéger Rome des invasions barbares

...

Egon Schallmayer ne croit plus à ce scénario. Selon lui, à force de consommer des quantités astronomiques de bois pour les constructions et surtout pour le chauffage des thermes, les Romains se seraient retrouvés, à partir de 180, à court de bois. Et donc incapables de remplacer les pieux. Car, si les troncs pourris avaient été changés au fur et à mesure, les datations dendrochronologiques n'auraient pas toutes donné cette fichue année 120. «Alors, poursuit Schallmayer, la palissade a commencé à s'abîmer et les Romains ont décidé de construire les remblais.» Pour la remplacer, non pour la doubler. Du rafistolage, en somme.

Dangereux confins d'empire

«Le limes germanique était la frontière la plus minable de l'Empire, s'amuse Joëlle Napoli. La plus vulnérable. Une palissade, ça brûle facilement. Si les Romains ne l'ont pas remplacée par un mur de pierre, comme en Rhétie, c'est qu'ici ils avaient le sentiment d'être en paix avec leurs voisins Alors se détricote toute la mythologie du mur infranchissable. Certes, la palissade servait à éviter la petite guérilla. Mais l'Empire se croyait investi d'une mission pacificatrice ­ la pax romana ­ et entretenait des relations de bon voisinage avec les Alamans. S'il fallait mener bataille, c'était bien au-delà du limes, en terres barbares, où les Romains avaient leurs repères, leurs alliés, leurs affidés. Certaines tribus s'étaient ménagé des droits d'entrée permanents dans l'Empire et y faisaient du commerce. On a retrouvé en Thuringe, à plusieurs centaines de kilomètres à l'est du limes germanique, un four à poterie typiquement romain.

...

«Les troupes romaines étaient des troupes d'occupation, mais elles étaient composées essentiellement de soldats germains, souligne Egon Schallmayer. Ceux-ci ne se sentaient pas occupants, mais habitants. Même les postes de commandement ont progressivement été confiés à des Germains Les familles vivaient à côté du camp. A Saalburg, on peut voir les restes des maisons à côté de l'enceinte. «Sauf quand il était de veille, le soldat devait rentrer chez lui le soir.» Le camp servait aussi de banque centrale : les soldes alimentaient l'économie locale en argent frais. Et si les bras venaient à manquer pour exploiter les immenses friches de l'Empire, par exemple lors des pestes de 160-180, les Romains ouvraient grand les portes aux colons germains.

Aussi, loin d'être un outil militaire, le «mur de sécurité» servait-il surtout à réguler le passage des personnes et des biens vers les points de contrôle et de taxe : «Comme les frontières de l'Union européenne aujourd'hui», sourit le docteur Schallmayer.

...

En 235, Sévère Alexandre vient à Mayence pour emmener la Xe légion, composée en grande partie de Germains, faire la guerre sur une autre frontière, à l'autre bout de l'Empire, vers l'actuel Irak, pour repousser les assauts des Sassanides. les légionnaires se sont révoltés et l'ont tué.

 

http://www.clio.fr/BIBLIOTHEQUE/la_germanie_des_romains_des_provinces_de_circonstance.asp

La Germanie des Romains : des provinces de circonstance

Une zone de prospérité…

La présence de l'armée en Rhénanie transforma profondément la région, d'abord dans le domaine économique. En effet, les soldats touchaient une solde relativement élevée, ce qui en faisait des privilégiés. De plus, ils comptaient au nombre des rares salariés de l'Antiquité. Leur présence attirait des civils, femmes en quête de maris ou commerçants à la recherche de clients.

...

La présence de l'armée se concrétisa aussi dans le paysage, avec l'élaboration de cet ensemble architectural que les archéologues appellent le limes. Les soldats construisirent de grands camps pour des légions, à Xanten et Bonn sur le Rhin inférieur, à Strasbourg et Mayence sur le Rhin supérieur. Ils ajoutaient dans les intervalles des forts plus petits et des tours. Ils tracèrent aussi un réseau routier, longeant le fleuve ou allant soit vers l'avant, en territoire ennemi, soit vers l'arrière, vers Rome, le centre du pouvoir. Là où ils pouvaient appuyer leur défense sur le cours du Rhin, au nord, ils s'en contentèrent ; au sud, entre Mayence et le Danube, ils élaborèrent une longue palissade de bois, sur 382 km, un ensemble si impressionnant que les Allemands, au Moyen Âge, l'ont appelé « le Mur du Diable ». La sécurité paraissant assurée, les effectifs diminuèrent et passèrent de huit légions à quatre au début du IIe siècle

...

Le limes rhénan, une frontière bientôt précaire

La situation se dégrada vers 175, quand les Chauques provoquèrent une guerre. Au même moment, la peste frappa tout l'empire et des brigands se répandirent dans les campagnes. Puis tout rentra dans l'ordre jusqu'au début des années 230. Les Francs attaquèrent le Rhin inférieur et les Alamans le Rhin supérieur. Ils pillaient, emportaient comme esclaves les personnes capables de travailler, et détruisaient ce qu'ils ne pouvaient pas emporter. L'empereur se montrant impuissant, des chefs romains locaux prirent une forte autonomie à défaut d'indépendance, tel Postumus. Au début du IVe siècle, quand l'ordre revint dans l'empire, la rive gauche du Rhin était devenue un vrai désert. Elle fut partagée entre trois provinces, Germanie Première, Germanie Seconde et Séquanie, intégrées au diocèse des Gaules. Toutes les cités, appelées civitates, furent alignées sur le même modèle. Une nouvelle armée fut créée, avec des unités plus petites et uniformisées, placées loin du limes pour être à l'abri des coups de main et pour faciliter l'approvisionnement.

  Désolé, je n'ai pas le temps de poursuivre... je reposterai plus tard !

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Les fortins avec palissades (ou fossés en afrique), les castella... correspondent à une réalité qui avait trait surtout au II°s et début III°s pour une période de paix, mais qui va se révéler peu utile pour parer les raids barbares.

 

Parce qu'ils n'ont jamais été conçus pour ça, tout connement parce que les Romains:

- n'ont pas la mentalité défensive

- sont simplement pragmatiques: défendre une frontière d'une telle longueur sur une position fixe requèrerait des effectifs infiniment supérieurs à ce dont ils disposent, ou une vitesse de concentration sur le ou les points attaqués complètement hors de portée d'armées se déplaçant à pied, même avec le système d'alerte et de circulation mis en place par Rome.

- assignent comme principale utilité à une frontière matérielle (cad sur une ligne précise) des fonctions plus "civiles" et "civilisationnelles": contrôle des entrées et sorties, filtre des petits raids (presque une fonction "douanière/policière"), prélèvements de taxes douanières, surveillance de la contrebande, marque du monde romain.... La fonction de frontière militaire au sens d'un système de défense contre des invasions et raids importants, ressort d'une autre logique et d'une autre organisation, nettement plus souple et en profondeur, reposant sur la conception offensive qu'ont les romains de la campagne et du combat: sauf pour les villes et les garnisons, l'idée même de combattre une invasion depuis des remparts leur est étrangère.... Parce qu'elle est stupide et suppose de connaître avec certitude où l'adversaire va passer (ou de pouvoir installer des fortifications ENORMES partout: et des fortifications de défense pour les Romains, c'est pas le mur d'Hadrien, mais les murailles de Rome, de Constantinople, Doura Europos ou celles d'un camp légionnaire en dur -pas un camp de marche).

 

 

Et comme le texte que tu cites le signale, le mur continu n'existe pas sur la frontière: il n'y a de continuité que sur quelques portions précises, notamment le limès de Rhétie, entre Rhin/Main/Neckar/Danube (essentiellement l'articulation entre rive droite du Rhin sur son cours supérieur (au niveau du Bade-Wurtemberg, puis plus tard de l'Alsace, plus à l'ouest, et la rive gauche du Danube aussi sur son cours supérieur, au niveau du Bodensee, à l'ouest de la frontière de la province de Norique). Cet axe a eu 3 périodes: celle du Ier siècle, où la frontière (non fortifiée) est sur les contreforts nord de la Suisse, celle du IIème siècle avec la conquête des Champs Décumates, puis celle du IIIème siècle et après, sur une nouvelle ligne (moins) fortifiée (mais plus "dynamique": guet et circulation renforcés) un peu entre les deux précédentes.

 

Si on s'est mal compris initialement, c'est une chose

 

au sud, entre Mayence et le Danube, ils élaborèrent une longue palissade de bois, sur 382 km, un ensemble si impressionnant que les Allemands, au Moyen Âge, l'ont appelé « le Mur du Diable ». La sécurité paraissant assurée, les effectifs diminuèrent et passèrent de huit légions à quatre au début du IIe siècle

 

Tout comme cela a été le cas avec le Mur d'Hadrien en Ecosse, qui a libéré l'équivalent en effectifs de près de 3 légions et a donc permis de rapatrier des troupes de Bretagne, de démobiliser un peu, et d'en utiliser une plus grande portion à policer l'île. Ce sont les deux zones ou une fortification continue (mais pas à but réellement militaire) en bâti plus ou moins systématique (cad plus que juste une ligne faite d'un vallum et d'un ager, éventuellement agrémenté de pieux par périodes) ont été employées.

 

Pour l'anecdote, il y a un autre "mur du diable" dans la zone Hongrie/Transylvanie, partie d'un des anciens Limès de Dacie (celui là est le limes sarmatiae.... Pour défendre les Iazygues, un peuple sarmate, contre les Goths et Gépides), essentiellement un valum (fossé) plus ou moins continu (avec on suppose un ager -le mur lui-même, fait de la levée de terre creusée) le long des crêtes des Carpathes: le bouzin démarre à la hauteur de Budapest, va 200 bornes à l'est, puis descend jusqu'à l'est de Belgrade, définissant un vaste quadrilatère protégé (avec la boucle du Danube formant les 2 autres côtés).

L'un des problèmes est aussi qu'il existe quantité de telles lignes romaines, correspondant à des ouvrages défensifs temporaires, à des travaux de longue haleine plus ou moins près du Limès, à des lignes de circonvallation faites dans des campagnes (à un échelon opératique, cad plus que même les colossaux travaux réalisés pour assiéger une ville comme Alésia, avec ses 30km de double circonvallation), des lignes de défense protégeant les flancs d'une avance ou étagées dans certaines zones (par exemple entre 2 fleuves) face à des axes d'attaque prévisibles (ou anticipés dans une campagne).... Quand une armée importante était rassemblée, les Romains pouvaient produire des ouvrages titanesques: c'est particulièrement flagrant dans cette zone de Dacie où les campagnes ont été multiples, longues et dures, et où la nature de l'endroit (au-delà du Danube, exposé sur plusieurs fronts) a impliqué une histoire militaire particulièrement active.

les légions restent bien dans le même secteur frontalier, immobilisés en position défensive (pour diverses raisons pas toujours militaire d'ailleur)

 

Là par contre, c'est faux post crise du IIIème siècle: l'évolution entamée de façon lente avant la crise (fortification des villes, début de garnisons de "réserves" centrales) s'accélère pendant la confusion, et se trouve entérinée dans un nouveau "système mis au point d'Aurélien à Constantin (le 2ème auteur que tu cites, Le Bohec, qui est l'un des deux grands spécialistes francophones de l'armée romaine, le souligne lui-même).

D'abord, il n'y a plus de légions au sens où on l'entend, cad une unité permanente organique d'échelon opératif centrant autour d'elle un certain nombre d'unités dites "d'auxilliaires" (mais qui sont tout aussi professionnelles depuis la réorganisation militaire d'Auguste après les guerres civiles, et sont désormais faites de citoyens depuis les réformes graduelles qui s'achèvent en 212 avec l'Edit de Caracalla, qui, de fait, abolit le statut de pérégrin), formant des "armées de province" plus ou moins standard (une légion plus ses auxilliaires spécialisés -cavaleries, troupes de missiles et infanterie légère-, soit autour de 12-15 000h) qui étaient, en temps normal, disséminées dans leur zones d'affectation (avec la légion restant généralement en majorité concentrée, en réserve, n'affectant qu'une part de son effectif à des garnisons séparées) pour une couverture maximale de la surface allouée. Ce dispositif se révèle vite insuffisant, et c'est pourquoi on voit beaucoup d'unités auxilliaires d'infanterie lourde (comme les légions) se constituer (taille "bataillonnaire" ou "régimentaire": cohortes quingénaires -standard- ou milliaires -de 800 ou 1000h), augmentées d'unités spécialisées (cavalerie, fantassins légers, missiles), de même que des unités mixtes (cohors equitata), pour couvrir les espaces entre les plus grandes garnisons (reproduisant ainsi le modèle "1 légion + ses auxilliaires" en plus petit.

L'usage devint, pour l'offensive stratégique, de prélever des task forces sur les légions en garnisons pour constituer des armées de campagne pour de grandes expéditions (on utilise les légions de l'endroit où on attaque plus les renforts prélevés ailleurs) sans dégarnir les frontières (avec, pour les légions ponctionnées, charge de reformer les effectifs); mais s'y ajouta aussi l'évolution du combat romain autorisé par le professionnalisme de longue durée (généralisé dans les légions et l'auxilliat) et la pratique, le modèle militaire romain devient un combat plus fluide, agressif et mobile qu'à la période césarienne qui reste encore celle des grands alignements et des lignes de bataille lourdes et lentes tactiquement (César entama l'innovation avec son usage accru de cohortes de réserves comme forces de mouvement). Composer des troupes selon la mission, et utiliser des task forces et armées de campagne plus "modulaires", souples d'emploi et mobiles (que des légions monolithiques à 10 sous-ensembles tactiques), devint une évolution naturelle du modèle militaire romain, résolument ancré dans la guerre mobile (plus que dans la période Marius-César).

 

Avec la "restructuration" essentiellement faite sous la Tétrarchie et finalisée sous Constantin, on n'a plus de "légions"; juste des unités dont certaines gardent par tradition l'appellation, aussi bien dans les troupes "mobiles/de réserve/d'intervention" de tous échelons, que dans les troupes placées en zone de frontière ou aux avant-postes de la frontière elle-même. Les "légions" palatines et comitatenses (des bataillons milliaire d'infanterie de ligne -l'infanterie de ligne de l'armée tardive repose sur des centuries "interarmes") sont près du centre d'une préfecture (en petit nombre) ou d'une zone "comtale" (ou se trouve un "comites", ou comte, cad le commandant d'une armée d'intervention), et la majorité des légions palatines sont près d'une capitale impériale (Rome, puis Milan et Ravenne à l'ouest, et Constantinople à l'est -qui a deux armées palatines).

 

Pour schématiser:

- on a entre 50 et 60% de l'armée romaine qui se trouve dans une zone (ce qu'est vraiment le limès au sens militaire) d'une profondeur pouvant aller jusqu'à 300km depuis la ligne frontière proprement dite; ce sont les limitaneis. Une portion variable de cet effectif, et d'ailleurs de celui de la Marine (les flottes fluviales, très importantes), tient les dispositifs de filtrage et d'alerte, une autre (au degré de concentration supérieur, sans doute en unités essentielles -cad cohorte/bataillon- vu la taille des fortifications de ce niveau) est en deuxième échelon dans des points d'appui fortifiés, à des distances variant selon l'endroit, la géographie et les possibilités (les facteurs dominants étant le temps d'intervention et la qualité de la position). Enfin une troisième portion est concentrée dans des garnisons plus conséquente, dans la plus grande profondeur de cette "zone du limès" (pas rare que la garnison soit dans des villes importantes, ou à proximité d'elles), avec pour mission "assignée" soit d'intervenir pour une portion donnée de front (échelle de la province "nouvelle version" ou du diocèse), soit de rejoindre une armée d'intervention directement en tant que "pseudocomitatenses". Les groupements de limitaneis correspondent à des provinces frontières, commandées par des "Dux" ("duc", "chef") qui sont les subordonnés des magister militum des grands commandements (disposant d'armées d'intervention), ou dans certains cas d'un "comes" (comte, ou "compagnon", cad quelqu'un directement rattaché à l'empereur, qu'il "accompagne", ce que désigne le terme "comitatus"). Les Dux ont les commandements les moins standardisés, dépendant de leur province d'affectation, de sa géographie, de la menace qui pèse sur elle....

 

- entre 20 et 25% sont des comitatenses, soit des armées d'intervention/de réserve régionales qui se trouvent en retrait de la zone du limes, concentrées à disposition de grands officiers de l'empire (magister militum) près de grands centres urbains (capitales de diocèses) ou dans de grandes bases, et couvrant un ou plusieurs diocèse, ou carrément une préfecture. Une armée comitatenses tourne généralement autour de 15-20 000h, soit précisément dans les mêmes eaux qu'une ancienne armée légionnaire, ce qui souligne la formule de combat mobile préférée par les Romains avec le temps (difficile de commander efficacement plus dans des campagnes mobiles et rapides: ça se voit dès Trajan où la conquête de la Dacie s'opère avec une grande armée répartie en "colonnes" autonomes de cette échelle). Surtout que ces armées ont une proportion de cavalerie plus élevée que ce qu'ont eu les Romains aux périodes précédentes.  

 

- les 20 à 25% restants, ce sont les armées palatines et les Scholes, concentrées autour des capitales impériales, la réserve "stratégique" la plus mobile (au sens d'une mobilité réellement "impériale", cad faite pour rayonner dans tout l'empire). On en compte 3 ou 4 selon les façons de voir: 2 à Constantinople (l'usage a établi qu'il y en avait une de chaque côté du Bosphore) et 1 en Italie (Rome, puis Milan et Ravenne). La 4ème "éventuelle" (pas de jure, mais de facto) serait celle de la préfecture des Gaules, difficile à réellement évaluer dans sa composition: on détermine une armée "palatine" à la proportion d'unités de statut palatin dedans (les 3 mentionnées sont SURTOUT faites d'unités palatines: il y a d'autres unités palatines réparties dans les armées comitatenses, en plus petite proportion, et des unités comitatenses réparties près des limitaneis "pseudocomitatenses"). Celle des Gaules semble avoir eu une proportion importante de palatins, sans doute en raison de sa position plus cruciale: vu les distances, c'est de facto cette armée qui va soutenir le Rhin, l'Espagne ou la Bretagne si besoin est. Les armées palatines sont dirigées par les plus hauts officiers de l'empire: les "magister militum praesentalis" (maîtres des soldats en présence de l'empereur"). Les armées palatines tournent autour de 30 000h (pouvant donc former 2 "colonnes"/"divisions" autonomes, ou garder un effectif d'intervention majeur ET allouer des ressources moins concentrées ailleurs), auxquels ont peut ajouter les Scholes directement sous contrôle impérial, soit des unités de cavalerie d'élite (autour de 3000h à l'est et 3000h à l'ouest).

Modifié par Tancrède
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Merci pour vos réponses ! 

 

D'accord, qu'est-ce qui a donc fait que les Goths puis les Huns se dirigent vers l'Occident plutôt que vers l'Orient ? Les Goths ont longtemps résidé en Ukraine, près de la Crimée. Ils ont dû développer une certaine capacité maritime. Pourquoi se lancer vers l'Occident alors qu'il était peut-être plus simple de franchir la mer pour arriver en Asie Mineure, qui regroupe des provinces romaines parmi les plus riches ? Pourquoi accepter l'Illyrie alors que les Goths ont ravagé la Grèce et les Balkans, prenant même Athènes ? 

Est-ce seulement dû à la politique des Empereurs d'Orient, Théodose en tête ? Ou alors le fait que l'Empire d'Occident chute n'est qu'une malchance, résultante de diverses causes insignifiantes si elles n'avaient pas été réunies ? La crise fiscale, la pression germanique, la barbarisation de l'armée et les tensions que cela entraîne dans l'Empire romain, l'incapacité des dirigeants à redresser la barre, ça commence à faire beaucoup. Surtout si le voisin et frère romain lui refile ses problèmes à gérer. 

 

Ensuite, partons du principe que les Goths franchissent la Mer Egée ou la Mer Noire et ravagent l'Asie Mineure. Les Vandales poussés par les Huns font de même, et les Huns aussi arrivent dans l'Empire romain d'Orient, épargnant l'Occident qui peut donc se remettre des divers maux qui l'accablent. Ces peuples barbares ont-ils la capacité de mettre à bas cette partie de l'Empire ? Certes, les "Byzantins" sont plus riches (et donc plus de soldats), ont des frontières moins difficiles à défendre, mais est-ce que cela suffit ? Voit-on l'émergence de royaumes barbares en Grèce, en Thrace, en Syrie et globalement dans les anciens territoires helléniques ? La fin de la présence romaine en Egypte ? Ou alors, les Romains parviennent à les repousser puisque justement l'Empire d'Orient part avec moins d'handicaps que son voisin occidental ?

 

Bref, beaucoup de questions, je le conçois, mais je vous remercie d'avance de votre participation à ce topic :)

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