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les Pictes ,"vainqueurs" face à une armée régulière ,celle des Romains ?


Gibbs le Cajun

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Bonne comparaison: on peut souvent se demander pourquoi de grandes entités politiques laissent à l'occasion des Etats croupions ou domaines très réduits par rapport à eux sur une de leur marge, sans que le dit domaine représente un quelconque intérêt stratégique en en faisant une "marche" ou un Etat client servant de glacis face à un adversaire plus conséquent ou une étendue mal contrôlée. Ecosse et Bretagne sont des exemples de tels "réduits". Donc la question devient: pourquoi les laisser dans son dos? Réponse: leur conquête coûte plus qu'elle ne rapporte. C'est d'autant plus vrai quand il s'agit de domaines à faible concentration politique/économique/urbaine, à terrain difficile, à économie faiblement à moyennement développée (et surtout faiblement monétarisée, soit une concentration de capital "saisissable" et rapportant d'abord et avant tout à court terme, celui de la conquête).

Autre exemple: il a fallu aux Romains très longtemps pour réellement "prendre" la Provincia (Provence-Languedoc-Roussillon) alors qu'ils avaient pris l'Espagne bien avant et la développaient et la colonisaient à marche forcée. La Provincia était pourtant potentiellement riche, disposait de quelques centres urbains portuaires conséquents (Marseille en tête), et surtout constituait un passage terrestre obligé vers l'Espagne, et autrement plus sûr et économique que le transport maritime (plus rapide toutefois). La perception de son utilité était donc nettement plus disputée, contestée et contestable, et l'investissement n'était pas forcément considéré par tous comme valant les retours immédiats ou ultérieurs. S'ajoutaient à ces considérations l'éventuelle reluctance politique romaine à trop conquérir et trop créer de provinces qui constituent autant de marchepieds de pouvoir pour les ambitieux, de réserve de puissance hors du contrôle direct et facile de Rome en tant que ville.... Et le souci plus stratégiquement légitime d'offrir un flanc au nord de la Provincia à d'autres peuples: non que les Romains en aient peur, mais ça veut dire des emmerdes, des calculs politiques plus compliqués, plus d'incertitude, l'idée de pouvoir se retrouver embrungué dans des guerres pas forcément voulues en raison d'alliances nécessaires plus nombreuses.... Malgré l'expansionnisme qui caractérise la république tardive (aussi culturel que politiquement et économiquement nécessaire vus les déséquilibres internes croissants), l'absence de scrupules et le sentiment de supériorité romains, la faction conservatrice (les optimates) et les modérés ont pas mal de scrupules à l'idée de nouvelles conquêtes fermes:

- qui "diluent" la puissance politique des clans les plus fermement en place en procurant de nouvelles bases de pouvoir qui risquent d'élargir le jeu et ne tombent pas forcément dans leur escarcelle. Une colonie, c'est une base de moyens, de richesses, d'éloignement de Rome, de réseaux de clientèles nouveaux avec des peuples souvent guerriers....

- qui incitent à lever sans cesse des légions, qui créent autant de réserves de vétérans démobilisés fidèles avant tout à leurs généraux, susceptibles de constituer des armées de réserves aguerries, des électeurs, de la masse hostile dans les rues de Rome....

- qui éloignent Rome d'elle-même, à savoir le "heartland" du latium: multiplication de colonies de vétérans et émigrés, appui croissant sur les élites non romaines dont la puissance n'est pas négligeable, et ce d'autant moins que les colonies sont nombreuses.... Cela donne des armes politiques à d'autres (argument 1) mais cela inclue aussi dans les calculs politiques romains (et donc les contraintes, y compris des gouverneurs et proconsuls optimates et modérés) des logiques et impératifs qui ne ressortent pas de leur intérêt direct (quand on a un client, on a des obligations envers lui et ses intérêts: le clientélisme est un contrat écrit, négocié et spécifique, comme l'alliance).

C'est d'ailleurs ce qui s'est passé: la Narbonnaise une fois devenue province, a aussitôt entraîné Rome dans des réseaux d'alliances toujours plus étendus en Gaule. Face à l'invasion des Cimbres et Teutons, Marius a été envoyé pour s'impliquer lourdement, ce qui a amené les grandes réformes mariennes de l'armée romaine et la constitution d'une faction marienne puissante (dont héritera plus tard César, neveu de Marius) qui motiva elle-même la constitution de la faction opposante autour de Sylla qui l'emportera pendant un temps, après une guerre civile, établira une dictature temporaire et mal vécue à Rome. Mais la vie politique romaine en fut définitivement changée, accélérant les logiques à l'oeuvre dans la République finissante en concentrant richesses et pouvoir, en forçant la constitution d'un fossé politique accentuant brutalement la bipolarisation du Sénat, ce qui mènera à la fuite en avant de César en Gaule et aux Guerres Civiles d'où émergera le Principiat.

C'est donc à l'aune de ce type de calculs de court et long terme qu'il faut envisager la façon dont les décisions de conquête ou non d'une région, aussi mineure soit-elle, sont prises dans une grande entité politique telle que l'empire romain (ou la république avant lui). La conquête doit amener beaucoup pour justifier les emmerdes qu'elle peut créer, en plus de son coût proprement dit en tant que campagne militaire. Parce que ce très court terme existe aussi comme raison: la conquête des Gaules par César a connu des oppositions aussi parce que la rentabilité immédiate des opérations était douteuse: le cours de l'esclave avait baissé depuis longtemps à Rome, vu les masses que représentait l'esclavage en Italie à ce moment (l'un des objectifs du Principiat a d'ailleurs été de réduire la dépendance de l'économie à l'esclavage, pour reprocurer du taf aux Italiens, amoindrir le besoin de conquête permanent que cela implique et réduire les risques de guerre servile), et les Gaules représentaient des concentrations de métaux précieux somme toutes limitées au regard des coûts impliqués par la conquête. C'est d'ailleurs toute la différence entre César et Crassus: Crassus n'a accepté de faire voter l'octroi de quelques légions à César que pour l'éloigner un moment, sans les financer lui-même, qui comptait aller en Orient pour conquérir des zones où l'or et l'argent étaient plus présents, les économies plus développées, la concentration urbaine beaucoup plus importante, et la menace parthe de toute façon à réduire (Crassus avait besoin de gloire militaire face à Pompée ou César, son seul "fait d'arme" étant la réduction de Spartacus, "partagé" avec Pompée).... De ce côté, on sait ce qu'il est advenu, vu les "qualités" militaires d'un Crassus meilleur affairiste et stratège que tacticien.

Il suffit de voir un peu sous cet angle l'affaire irakienne pour les USA: est-on dans un cas si éloigné, au-delà des formes de "conquête"?

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Un autre élément qui souligne la déformation de notre vision par les nationalismes des XIXème-XXème siècles et la prééminence des nations occidentales dont la version de l'histoire a imposé des oeillères à bien des égards sur des réalités plus objectives: si on passe les facteurs de manques de sources, généralisé pour l'histoire de l'empire romain sur des visions détaillées de ses adversaires (et souvent de ses propres dispositifs militaires dans des campagnes particulières) et du nombre de parutions sur tel ou tel sujet, qui n'est qu'un reflet de l'époque récente et non des réalités, on peut commencer à prendre un peu de recul.

Les histoires de "légions perdues", de la sauvage frontière écossaise ou du Teutoburgenwald ont été à ce point montées en épingle par les nationalismes anglais, écossais ou allemand qu'on a une vision déformée de ces fronts, de ces régions pour l'empire romain, avec des délires de "changement stratégique définitif" imposé par tel ou tel à l'empire romain, de "peur" des Romains de tels peuples ou tels autres.... Choses qui ne sont que des délires ethnocentristes exaltés prenant les éléments historiographiques qui les arrangent pour appuyer des "thèses" servant en réalité d'autres objectifs: on sort tout de son contexte réel et on minimise ou fait carrément disparaître les faits et analyses qui ne vont pas avec la thèse.... Et l'histoire récente a foutu tellement de couches de manuels d'histoire, parutions spécialisées en tous genres, reconstitutions "historiques", romans, séries et films ayant peu de rapport avec l'histoire que la culture collective s'est plus que franchement implanté nombre de clichés dans la tronche.

La réalité, par exemple pour l'Ecosse, est que les peuples qui s'y trouvent au moment de la conquête romaine ont été largement et facilement battus et conquis par Rome avec des forces modestes, et n'ont jamais réellement représenté un souci majeur. L'émergence des "Pictes", probablement un nouveau nom pour une confédération de peuples connus mais qui finirent pas plus s'organiser en grand, a été un changement certes, mais qui n'a pas réellement menacé la Bretagne romaine, sauf en temps de troubles internes à l'empire (qui amoindrissaient les financements, rappelaient des unités sur le continent....) qui étaient des occasions de raids de pillage sans plus. Le calme était rétabli quand l'empire retrouvait un peu de stabilité, et, côté tactique, l'armée romaine poutrait vite fait les ambitieux.

Pareil pour les Germains qui, pour une embuscade réussie au Teutoburgenwald, l'ont payé au centuple les années suivantes et n'ont représenté qu'une menace épisodique sur quelques frontières pour un empire qui réfléchit à une autre échelle. Il leur a fallu des siècles pour commencer à avoir des armées suffisantes qualitativement et quantitativement pour rendre leurs défaites plus coûteuses à Rome, un accident mal géré pour installer une "tête de pont" dans l'empire (la crise d'Andrinople), et une crise interne grave en occident pour pouvoir enfin déferler.

Un exemple de cette déformation de notre regard via les nationalismes occidentaux prééminents: l'une des pires menaces de l'histoire de l'empire (pas la république) romain est aujourd'hui aussi oublié que peu étudié. C'est la grande révolte illyrienne, qui marqua la fin du règne d'Auguste infiniment plus que le Teutoburgenwald qui arrive quand elle se conclut. Le soulèvement des peuples de Dalmatie et de Panonnie (côte croate, une partie de la Bosnie et l'actuelle Hongrie) représente pourtant une région pas très grande, et des populations qui, quoiqu'importantes, ne sont pas pour autant aussi nombreuses que les peuples germaniques et pas aussi structurées, développées et organisées que les Parthes (le plus grand adversaire individuel de l'histoire impériale romaine).

Pourtant, cette guerre fut une menace terrible pour Rome qui réagit avec une ampleur comme l'empire n'en a quasiment JAMAIS connue: plus de 100 000 (peut-être jusqu'à 150 000) combattants (auxquels il faut ajouter entre 20% et un tiers de non combattants) furent mobilisés pour ce conflit, dont une dizaine de légions en permanence (avec des pics à 15 légions à la fois sur le théâtre). 2 membres de la famille impériale y furent assignés, Tibère et Germanicus. Tout le trésor impérial y passa et la levée de recrues dut pour la seconde fois (et la dernière dans l'histoire romaine) inclure des esclaves affranchis pour l'occasion, tant même le "tumultus" (la levée en masse des volontaires et conscrits) n'y suffisait pas (à noter cependant qu'il dut y avoir des modalités pour d'importants pans de la société romaine, la démographie des citoyens couvrant largement les totaux impliqués).

Entre 10 et 15 légions, plus de 100 000 combattants dans un théâtre réduit! Même les plus grandes guerres contre les Parthes puis les Perses, en tout cas la plupart d'entre elles, n'ont jamais impliqué de telles mobilisations de ressource. Même les guerres daciques de Trajan n'ont pas impliqué un tel effort. Il ne fallu "que" 4 ans pour vaincre cet adversaire, mais au prix d'une mobilisation brutale et gigantesque, d'un effort terrible et de pertes peu souvent rencontrées dans l'histoire de Rome. L'urgence ressentie n'a trouvé de comparaison dans l'esprit des Romains qu'avec la 2ème Guerre Punique et la panique après le désastre de Cannes face à un Hannibal qui est passé bien près de porter un coup fatal à Rome.

Les tribus illyriennes, panoniennes et dalmates ont toujours eu une réputation guerrière, et une organisation militaire originale et efficace, même si reposant toujours sur une structure politique tribale aléatoire qui n'a jamais laissé émerger de grande entité étatique durable (juste quelques grands souverains rassemblant un "empire" qui leur survivait rarement, tel celui de Bardyllis, finalement vaincu par Philippe de Macédoine). Le terrain souvent très difficile est utilisé efficacement en défense par de nombreuses "armées" locales qui se coordonnent, mais il y a bien des forces de mêlée organisées qui s'y ajoutent, présentant un mélange de tactiques, équipement et organisations locaux et macédoniens, auxquels s'ajoute l'apport romain. Parce qu'outre le fait d'être des voisins de l'Italie (d'où une part de la perception de menace), les Illyriens sont des auxilliaires recherchés par Rome depuis longtemps, et au moment de la grande révolte, une part significative des révoltés est très au fait de l'art romain de la guerre, a servi dans des auxiliats désormais "professionnalisés" par Rome (notamment des auxilliats d'infanterie qui sont des cohortes comme celles de Rome, juste pas regroupées en légions) et dispose de cadres et chefs ayant fait de nombreuses campagnes avec Rome.

Il est étonnant que cet événement majeur soit complètement oublié, au mieux minimisé, alors qu'en terme de menace militaire, il a peu ou pas d'équivalent dans l'histoire impériale: les Pictes et Germains sont des micro-événements "amusants" à côté. Ce qui a sauvé réellement ces régions de la conquête -et donc autorisé les Ecossais, Anglais, Allemands ou autres de délirer sur les raisons de cette non conquête, la transformant en recul ou en échec romain-, c'est leur sous-développement:

- le sous-développement et l'éloignement rendent leur conquête chère, sujette à débat et sans grand espoit de profit. Tout investissement militaire et économique de ces zones ne pourrait amener de bénéfices avant très longtemps. Rappelons qu'il a fallu un siècle de contact, d'alliances et de développement des échanges commerciaux entre tribus bretonnes et Romains, après les expéditions de César, pour que la partie sud de l'île de Bretagne devienne en partie développée et intéressante pour la conquête. Ce simple fait du sous-développement et de l'arriération économique/organisationnelle a plus que largement impacté la motivation romaine, en conjonction avec l'éloignement qui accroît tout coût militaire.

- le même sous-développement dans l'organisation politique et économique joue au niveau tactique, en conjonction avec les distances à couvrir dans ces zones, et la difficulté du terrain: cela rallonge les campagnes et limite la possibilité de victoires décisives durables, ou même de batailles rangées un tant soit peu décisives, les adversaires fuyant ces modes de combat (ils y sont assez inaptes) et se coordonnant mal, techniquement et politiquement (les "armées" sont des rassemblements de tribus qui ne s'aiment pas forcément, n'ont pas la même taille....). Mais fondamentalement, ce sont des pays sans centre: l'urbanisation y est faible et l'agriculture -facteur lié à l'urbanisation- y est inexistante, au mieux lié à de petites surfaces vivrières (petits maraîchages et plantes médicinales). Il n'y a rien à saisir, pas de villes à détruire ou prendre, pas de réserves alimentaires à cibler, pas de concentrations démographiques, peu de monétarisation de "l'économie" (qui n'en est même pas réellement une).... Et pas d'organisation politique de grande échelle qui soit solide, permanente et identifiable. Ces zones sont donc vastes et peu peuplées, habitées par des petites tribus de chasseurs-cueilleurs à culture guerrière (plutôt une mentalité de pillards en fait) pour l'essentiel, qui vivent en semi-nomades itinérants dans des zones plus ou moins circonscrites. Difficile d'y trouver des cibles d'importance permettant de frapper un grand coup ou une série rapide de grands coups, puisqu'en fait ces "peuples" n'en sont pas réellement: ce sont des agglomérats de petites tribus souvent rivales avec des proximités culturelles et géographiques plus affirmées, et des liens parentaux entre les élites d'une zone donnée, qui se rassemblent occasionnellement quand un chef ambitieux parvient à imposer temporairement un début d'autorité rarement durable, même de son vivant.

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Que tancrede soit remercié de son intéressante contribution sur les guerres illyriennes.

En revanche je serais un peu plus nuancé sur la question "picte" ou "calédonienne". En effet, je crois qu'il y a trois indices historiques d'une forte anxiété de Rome sur ce théâtre :

- la concentration constante de troupes impériales en Bretagne (3 légions : II augusta, VI victrix et XX valeria)

- la venue de deux empereurs : Hadrien (qui, c'est vrai à visiter tout l'empire)  et Septime Sévère (qui lui ne se déplaçait pas par simple curiosité)

- la réalisation d'un investissement coûteux (et donc proportiennel à un danger élevé): le mur d'Hadrien.

N'oublions pas en outre que notre principale source sur les Calédoniens me semble être la vie d'Agricola : éloge funèbre prononcé par Tacite qui a peut-être "gonflé" les exploits de son beau-père...

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la concentration constante de troupes impériales en Bretagne (3 légions : II augusta, VI victrix et XX valeria)

C'est pas énorme pour tout le territoire de l'île, en considérant en plus qu'il s'agit précisément d'une île qui plus est éloignée des grandes concentrations navales de l'empire (essentiellement les 2 flottes prétoriennes toutes deux basées en Italie), donc ne pouvant recevoir de renforts aussi rapidement qu'un autre point du territoire romain. Faut pas oublier que les légions et auxilliaires assurent d'autres tâches:

- ordre public (il y a aussi les milices locales, mais c'est pas des permanents et sont limitées en capacité et en aires d'action)

- recouvrement de l'impôt: un rôle primordial

- travaux publics et génie civil: ils n'y sont pas seuls, mais les plus grands sont toujours de leur fait, notamment les routes

- inspection douanière et prélèvement des droits de douane

- surveillance des côtes, une tâche demandeuse de main d'oeuvre en Bretagne

- aide en cas de catastrophe naturelle

- la messagerie impériale

Les services publics romains, notamment la police, les pompiers.... Ne reposent qu'en partie sur des forces miliciennes, et seules quelques grandes villes bénéficient de professionnels permanents dédiés à ces tâches.

Pour une île comme la Bretagne, 3 légions et l'équivalent en auxilliaires, c'est pas énorme, considérant en plus qu'elle doit "s'autosuffire" en la matière. Faut pas se représenter les 3 légions de Bretagne comme postées sur le Mur d'Hadrien: quelques cohortes y étaient stationnées, peut être l'équivalent d'un peu plus d'une légion en tout plus quelques éléments de la marine aux extrêmités.

la réalisation d'un investissement coûteux (et donc proportiennel à un danger élevé): le mur d'Hadrien

C'est pas un investissement énorme, justement; on se le représente comme tel, mais ce n'est pas le cas, c'est une vision déformante parce que ce truc nous apparaît comme un chantier pharaonique, ce qui n'est pas le cas malgré ce que veut en dire l'historiographie anglo-écossaise. C'est une solution justement rentable pour économiser du monde plutôt que de répartir un pourcentage trop élevé de l'effectif limité de Bretagne pour surveiller une vaste surface qui garderait quand même des trous pour des petites troupes de pillards. Et plus encore, il permet de contrôler le commerce et de percevoir les droits de douane sans trop se faire frauder. Au final, c'est nettement moins coûteux que d'entretenir des légions entières pour quadriller au visuel un espace grand, accidenté et peu densément peuplé, en laissant pour tout le reste de l'île trop peu de troupes pour assurer tout ce que l'armée doit faire dans une province.

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Un exemple de cette déformation de notre regard via les nationalismes occidentaux prééminents: l'une des pires menaces de l'histoire de l'empire (pas la république) romain est aujourd'hui aussi oublié que peu étudié. C'est la grande révolte illyrienne, qui marqua la fin du règne d'Auguste infiniment plus que le Teutoburgenwald qui arrive quand elle se conclut. Le soulèvement des peuples de Dalmatie et de Panonnie (côte croate, une partie de la Bosnie et l'actuelle Hongrie) représente pourtant une région pas très grande, et des populations qui, quoiqu'importantes, ne sont pas pour autant aussi nombreuses que les peuples germaniques et pas aussi structurées, développées et organisées que les Parthes (le plus grand adversaire individuel de l'histoire impériale romaine).

Pourtant, cette guerre fut une menace terrible pour Rome qui réagit avec une ampleur comme l'empire n'en a quasiment JAMAIS connue: plus de 100 000 (peut-être jusqu'à 150 000) combattants (auxquels il faut ajouter entre 20% et un tiers de non combattants) furent mobilisés pour ce conflit, dont une dizaine de légions en permanence (avec des pics à 15 légions à la fois sur le théâtre). 2 membres de la famille impériale y furent assignés, Tibère et Germanicus. Tout le trésor impérial y passa et la levée de recrues dut pour la seconde fois (et la dernière dans l'histoire romaine) inclure des esclaves affranchis pour l'occasion, tant même le "tumultus" (la levée en masse des volontaires et conscrits) n'y suffisait pas (à noter cependant qu'il dut y avoir des modalités pour d'importants pans de la société romaine, la démographie des citoyens couvrant largement les totaux impliqués).

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Est-ce qu’il y a un lien de causalité quelconque entre ces événements et les  « Illyriens » et les « pannoniens ». Ces empereurs à poignes « à la main plus râpeuse que le gant qui la protège » ?

Au pif, un effort de romanisation particulier, une mise à profit des aptitudes militaires apparemment exceptionnelles de ces peuples ?   

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Est-ce qu’il y a un lien de causalité quelconque entre ces événements et les  « Illyriens » et les « pannoniens ». Ces empereurs à poignes « à la main plus râpeuse que le gant qui la protège » ?

:rolleyes: Désolé, j'ai du mal à comprendre la question :-[....

Les empereurs illyriens-panonniens ne commencent à arriver que vers la deuxième moitié du IIIème siècle, la "star" étant en la matière Dioclétien, qui rétablit réellement l'empire sur ses bases et met fin à la "crise" du IIIème siècle (prolongé en cela par Constantin). Leur émergence correspond en fait à deux phénomènes:

- la militarisation de la monarchie, qui commence en fait réellement avec Pertinax et Septime Sévère à la fin du IIème siècle et au début du IIIème, suite aux guerres de succession qui accompagnent la fin du règne de Commode et avec lui la stabilité de la période des Antonins. Le principiat devient "dominat", mais il s'agit surtout d'empereurs devant bâtir une légitimité et plus encore une marge de manoeuvre politique face à une compétition accrue pour le trône, alors même que les menaces aux frontières s'accélèrent et grandissent (en qualité et en quantité), se succédant plus rapidement dans le temps, ce qui est sensible à partir des règnes de Caracalla et Sévère Alexandre.

- l'affirmation du "lobby" des Illyriens-Panonniens (auxquels on peut ajouter les Thraces) dans l'armée: les armées des Balkans pèsent lourd militairement et politiquement. Outre la défense d'une bonne partie du Danube, donc le maintien d'un grand nombre de légions dans une zone somme toute resserrée (plusieurs provinces de ce coin sont des provinces "à 3 légions", donc très sensibles politiquement pour les affectations), les armées de la zone ont aussi la charge de constituer la ligne de défense du "heartland" italien (même en interne de l'empire, surtout après les invasions du règne de Marc Aurèle, il y a des lignes de quadrillage et verrouillage), ce qui les rend politiquement importante et donc leurs officiers très présents.

De fait, les Illyriens et Panonniens resteront toujours des populations de "provinces frontières" sensibles comme les Gaulois (en tout cas du nord et de l'est des Gaules) ou les Anatoliens: le recrutement y restera donc important, les provinces frontières ne perdant pas la conscience des menaces comme les provinces centrales, surtout celles des frontières sensibles (face aux Parthes, aux tribus germaniques, aux Iazygues et Sarmates). Et comme ce sont les zones où les concentrations militaires sont les plus importantes (les frontières Rhin-Danube et celles avec les Parthes concentrent l'immense majorité de l'armée romaine), le poids des effectifs issus de ces provinces est démesuré dans l'armée romaine, et ce d'autant plus que les unités qui se trouvent sur ses frontières sont les meilleures et pèsent politiquement plus lourd par l'aspect plus "sensible" politiquement de leur commandement (plus nombreuses en un endroit, meilleures, plus prestigieuses, face à des adversaires majeurs.... Leur commandement fait l'objet d'une sélection poussée). La proximité avec l'Italie accroît la capacité de lobbying interne des Illyriens-Panonniens par rapport à des armées d'orient plus éloignées (la création de Constantinople comme 2ème capitale leur offrira "leur" zone) ou des armées de Gaule et Bretagne qui pèsent et jouent un rôle politique mais ont en même temps une "zone" bien à elles politiquement. C'est d'ailleurs Dioclétien qui actera ce fonctionnement de fait en séparant l'empire en 2 grandes zones de gestion (orient et occident), chacune elles-mêmes divisées en 2 sous-aires nommées préfectures, et toutes les 4 dirigées par un "César" (mais il n'y a qu'un seul "Auguste").

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:rolleyes: Désolé, j'ai du mal à comprendre la question :-[....

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J’étais juste intrigué par l’existence ou non d’un lien entre ces prestigieuses successions d’empereurs qui trouvent leurs origines dans des régions particulièrement séditieuses, donc théoriquement pas très fiables politiquement à première vu. J’ai supposé qu’un un moment ou à un autre les romains avec leur capacité d’intégration culturel unique en son genre doublé d’un investissement, d’un intérêt particulier avait « fiabilisé » la zone et ses habitants.

Mais tu réponds à ma curiosité ici, merci, je comprends mieux le processus ;).

...

De fait, les Illyriens et Panonniens resteront toujours des populations de "provinces frontières" sensibles comme les Gaulois (en tout cas du nord et de l'est des Gaules) ou les Anatoliens: le recrutement y restera donc important, les provinces frontières ne perdant pas la conscience des menaces comme les provinces centrales, surtout celles des frontières sensibles (face aux Parthes, aux tribus germaniques, aux Iazygues et Sarmates). Et comme ce sont les zones où les concentrations militaires sont les plus importantes (les frontières Rhin-Danube et celles avec les Parthes concentrent l'immense majorité de l'armée romaine), le poids des effectifs issus de ces provinces est démesuré dans l'armée romaine, et ce d'autant plus que les unités qui se trouvent sur ses frontières sont les meilleures et pèsent politiquement plus lourd par l'aspect plus "sensible" politiquement de leur commandement (plus nombreuses en un endroit, meilleures, plus prestigieuses, face à des adversaires majeurs.... Leur commandement fait l'objet d'une sélection poussée). La proximité avec l'Italie accroît la capacité de lobbying interne des Illyriens-Panonniens par rapport à des armées d'orient plus éloignées (la création de Constantinople comme 2ème capitale leur offrira "leur" zone) ou des armées de Gaule et Bretagne qui pèsent et jouent un rôle politique mais ont en même temps une "zone" bien à elles politiquement...

Autre chose,

... C'est d'ailleurs Dioclétien qui actera ce fonctionnement de fait en séparant l'empire en 2 grandes zones de gestion (orient et occident), chacune elles-mêmes divisées en 2 sous-aires nommées préfectures, et toutes les 4 dirigées par un "César" (mais il n'y a qu'un seul "Auguste").

Il n’y a jamais de solidarité entre les deux parties de l’empire ? Un envoi de troupes par exemple –d’argent, je sais qu’il y en a eu- autrement que quand c’est la fin des haricots : je pense très fort aux difficultés de l’empire d’occident qui n’a pu compter sur l’orient que très tard pour sauver les meubles italiens il me semble, et c’était plus un patronage qu’un rapport entre égaux ?

Les deux entités étaient à ce point autonome l’une de l’autre, indifférentes surtout ? Enfin, y a –t-il eu rivalité entre eux ? Si oui, jusqu’à quelle point. Des unités pouvaient se friter sur la frontière par exemple ?

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L'empire n'a été définitivement scindé dans les faits que vers la fin du IVème siècle, après la crise d'Andrinople. Certes, le fait qu'il devienne systématique d'avoir un empire d'orient et un d'occident fait lentement naître des logiques géopolitiques propres qui dépassent sans qu'on s'en aperçoive les antagonismes précédents qui étaient surtout des querelles d'ambitieux pour être empereur. Mais les 2 parties sont encore "l'empire romain" et se soutiennent. A partir de la crise d'Andrinople et de ses lendemains, il y a 2 phénomènes concurrents qui montent en quelques années:

- la réaction en orient (affaibli par la crise d'Andrinople): mouvement antibarbare, avènement d'un souverain très fort en la personne de Théodose, reprise en main de l'armée, prospérité.... Mais Théodose est le premier empereur à jouer avant tout la carte de l'empire d'orient seul en poussant lentement les Goths établis dans les Balkans (héritage forcé d'Andrinople) vers la frontière italienne.

- l'affaiblissement de la direction politique en occident, au début du Vème siècle: succession rapide d'empereurs sans marge politique, et une réaction antibarbare qui nuit au personnage qui était en mesure (et commençait à le faire) de redresser la barre en disposant d'un pouvoir fort, à savoir Stilicon. Son assassinat déclenche une crise au mauvais moment, celui du fameux gel qui permet une invasion massive d'Alamans sur le Rhin en 406, alors même qu'e le problème des Goths en Vénétie est une affaire permanente (à cause de Théodose), et que la "débarbarisation" de l'armée n'est pas achevée sur territoire italien. A cause de la politique de Théodose (peut-être n'avait-il pas le choix) mais surtout à cause d'une direction politique momentanément faible, l'empire d'occident ne peut utiliser ses ressources militaires sur 2 fronts extérieurs et un intérieur (les garnisons d'unités de fédérés barbares, remuantes) simultanément. Les unités fédérées sont trucidées, les Goths relativement contenus (mais pas vaincus: ils tiennent désormais une entité à la jonction des 2 empires), mais les Alamans (puis les Alains et Vandales) peuvent déferler sur des Gaules qui se méfient désormais de l'Italie et pensent pour elles-mêmes. En quelques années de crise, l'empire d'occident passe de superpuissance à coquille de plus en plus vide.

J’étais juste intrigué par l’existence ou non d’un lien entre ces prestigieuses successions d’empereurs qui trouvent leurs origines dans des régions particulièrement séditieuses

Pas particulièrement séditieuses: le processus de provincialisation-romanisation est aussi dur que celui de conquête, et il est mal vécu par les locaux à ce moment (il est dur dans l'absolu, mais il peut être aussi mal opéré par des gouverneurs maladroits et surtout avides). Passé quelques générations, les choses se normalisent et ces provinces deviennent pleinement romaines. Il est à noter aussi que comme dans d'autres cas, des régions au relief difficile (comme les Balkans) donnent à des populations des mentalités plus farouches (mentalités de vallées isolées, mentalité de montagnards) et surtout rendent les opérations militaires toujours plus longues et exigeantes (1 kilomètre carré de plaine et 1 de montagne ne demandent pas le même nombre d'hommes, ni la même organisation tactique, ni la même temporalité).

Sinon, juste un truc pour terminer sur le thème du Mur d'Hadrien: il n'est pas un investissement pharaonique pour l'empire, surtout au moment où il est fait (sous Hadrien), et il n'est pas une exception: le limes germanicus qui couvre les provinces de Germania Superior (territoires à l'est du Rhin) et de Rhétie (Suisse) est en quasi totalité une fortification continue, dont une bonne moitié en pierre. C'est le fameux "mur du diable", qui avait les mêmes fonctions que le mur d'Hadrien. Et contrairement à un raisonnement instinctif, ce type de fortification n'a aucunement pour but d'empêcher une invasion: il sert en fait au contraire contre les petits raids et expéditions réduites, qui peuvent être contrées sans mobilisation particulière, et surtout, il dissuade le gros du volume de ces petits raids locaux qui empoisonnent la vie des grandes armées à longueur de temps, coûtent cher par leur fréquence.... Et il sert à réguler le commerce et contrôler les trafics. Pour les grandes expéditions, il sert à gagner du temps pour la mobilisation: les Romains savent trop bien que des fortifications ne sont qu'une question de temps face à un adversaire décidé et suffisamment nombreux, et eux-mêmes n'ont JAMAIS été par nature des défenseurs. Les romains ont une compréhension profondément offensive de la tactique, et pour eux, toute affaire doit se terminer par une bataille rangée vers laquelle il faut aller au plus vite, surtout quand l'adversaire est concentré, ce qui est pour Rome le schéma souhaité.

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Il suffit de voir un peu sous cet angle l'affaire irakienne pour les USA: est-on dans un cas si éloigné, au-delà des formes de "conquête"?

Bonne question, qui mériterait un sujet à lui tout seul (comme la guerre en Libye).  :lol: Les explications officielles n'ont strictement aucune crédibilité dans ce cas de figure, ce qui laisse imaginer ce que l'on veut...

Plutôt que le pétrole, qui aurait pu être obtenu bien plus facilement par pression diplomatique, les "affaires" Haliburton et autres, affaires où on recherche avant tout la discrétion donc pour laquelle une guerre n'est pas le meilleur moyen, Bush avait sans doute besoin d'une victoire pour laver le 11 septembre, qui soit plus claire qu'en Afghanistan (où même l'objectif de prendre ben laden a échoué) contre un ennemi facile à vaincre et qui puisse faire aisément l'unanimité contre lui. Là où le patriotisme est nettement plus fort qu'en Europe, l'idée un peu messianique de la superpuissance américaine est une évidence pour certains courants d'opinion (particulièrement dans les appuis de Bush et de par les politiques de cour en interne à l'administration bush). Ceci reste une hypothèse, je n'ai pas de preuves pour la confirmer.

Si il y'a une constante certaine, avec le cas romain et d'autres (comme les empires coloniaux), c'est que la conquête s'explique toujours pour des raisons de politique intérieure, aucune entité politique ne fait d'un empire un but en soi, les "partis" politiques ne s'intéressant à la conquête que du moment où ce leur est utile pour progresser en interne.

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aucune entité politique ne fait d'un empire un but en soi, les "partis" politiques ne s'intéressant à la conquête que du moment où ce leur est utile pour progresser en interne.

Vrai et faux à mon sens: il y a toujours un moment ou une logique impériale finit par se créer dans une entité politique en expansion, donc se projetant à plus long terme que le simple "coup" d'opportunité d'une conquête particulière motivée par des intérêts privés ou d'un intérêt public secondaire (genre une opération mineure pour améliorer le tracé d'une frontière en particulier: logique de défense). Elle ne devient pas nécessairement absolument dominante, mais elle devient un lobby plus ou moins puissant en interne, voire s'assortit d'une dimension réellement messianique (et il arrive aussi qu'elle soit à certains moments en accord avec les autres groupes d'intérêts "internes").

Il faut faire attention avec l'explication systématique par des raisons de "politique intérieure", parce que précisément beaucoup de forces politiques intérieures peuvent avoir une "vision" et/ou un intérêt à l'expansionnisme. De même que beaucoup de groupes ayant ces propensions peuvent aussi avoir une perception réaliste des choses et/ou une conscience du "bien public" raisonné plus ou moins affirmée, et tempérer d'eux-mêmes leurs velléités expansionnistes pour diverses raisons (coût des opérations et de l'occupation, capacité réaliste à tenir la conquête si elle est éloignée....). Ce n'était pas forcément vrai à Rome car il ne faut pas croire qu'ils avaient si souvent une "vision de long terme" pas vraiment dans la mentalité ou les capacités d'analyses matérielles du temps: une conquête se mesurait avant tout au pillage/butin/tribut immédiat et à l'importance à court terme de l'exploitation de la conquête et/ou des traités de commerce qui vont avec. L'horizon politique d'une puissance en expansion est en fait généralement assez court, parce que la conquête est à la fois une cause et une conséquence: quand on devient structurellement expansionniste, c'est parce que la conquête nourrit la conquête et la provoque, comme une fuite en avant contrainte par ses seuls coûts, mais aussi par la surenchère politique qu'elle implique (telle faction a conquis telle zone, donc a une masse de fric et "d'aura" politique, mais elle doit payer beaucoup de monde et de choses, et surtout les autres factions doivent faire une conquête équivalente sous peine de se faire écraser). Là, on retombe sur des logiques de guéguerre interne.

Mais il ne faut pas minimiser non plus le facteur de menace et de perception de la menace externe: la plupart des opérations de conquête romaine aux IIème et Ier siècles avant JC et dans les 2 premiers siècle du Principiat répondent aussi, et sans doute la plupart du temps avant tout, à un intérêt général très présent: plus de frontières = plus d'ennemis = plus de risques, plus d'implication avec des alliés locaux qui ont eux-mêmes leurs menaces et leurs intérêts.... Et plus les frontières sont éloignées du centre, plus elles sont inquiétantes, chères à parer, mais aussi dangereuses parce que réagir depuis le centre est long (délais de transmissions, délais de transfert de forces....).

Crassus a tenté le coup contre les Parthes pas seulement parce qu'il voulait de l'or et le titre d'imperator, mais aussi et surtout parce que les Romains savaient qu'il fallait régler la question parthe qui leur posait nombre de problèmes.

Sinon, un autre exemple propre à minimiser les nationalismes allemands et anglais-écossais: la révolte batave, juste après la mort de Néron et pendant la transition vers les Flaviens.... Petite province avec une charge militaire énorme (près de 50% des hommes en âge de servir étaient envoyés dans les auxilliaires), elle s'est soulevée de la même façon que les Illyriens: beaucoup de vétérans, et plus grave encore, des unités auxilliaires entières, ont rallié l'étendard de la révolte, entraînant aussi une bonne partie de la Gaule Belgique et de la Germanie Inférieure. Dans cette histoire, Rome a du mobiliser en tout 12 légions (et plus que l'équivalent en auxilliaires), dont 8 en une seule task force, pour régler la question. Dans l'histoire, Rome a perdu l'équivalent de 3 légions, avec en plus 2 qui ont été de fait tenues en "otages" (assiégées) ce qui fut une grande humiliation publique à ce moment.... Encore une fois, le Teutoburgenwald ou les Pictes sont pas grand-chose à côté.

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  • 2 weeks later...

Un dernier point sur le thème des Pictes et du Mur d'Hadrien, juste histoire de....

Le fait de voir le Mur d'Hadrien comme un investissement exceptionnel est, je l'ai déjà précisé, un mythe. Pour être franc, le mur n'a pas du coûter grand-chose à l'empire, sinon même, osons le dire, presque rien du tout par rapport aux dépenses ordinaires. C'est un sujet que j'aborderais sans doute un jour sur l'armée romaine, mais elle ne coûte en fait réellement, sous le Haut Empire, que la paie des soldats, ou tout du moins ce poste de dépense représente 85 à 90% des dépenses militaires. Le reste vient du travail des légionnaires eux-mêmes. Et ainsi pour le mur qui ne représente rien de plus qu'une décision initiale et ensuite 6 ans de labeur de 3 légions (en fait seule la partie d'entre elles qui n'est pas dispensée des travaux lourds, soit environs 3000h par légion, plus des experts encadrant l'activité) et éventuellement des esclaves et/ou de la main d'oeuvre locale mobilisée pour l'occasion mais pas contre paiement en argent:

- l'argile, coeur du remblais au centre du mur, vient directement de la terre qu'on mouille, clarifie, densifie et fait sécher avant de construire par dessus. On l'utilise aussi pour faire les tuiles recouvrant tours de guets et fortins

- le bois est abondant partout dans le coin: y'a juste à le couper et le tailler selon les besoins: charpente essentiellement, mais aussi pieux défensifs et autres composantes de pièges, ainsi que pièces d'artillerie

- la pierre est un grès local qu'on trouve sur presque toute la longueur du mur: seule la partie extrême occidentale a du imposer des déplacements de pierres taillées sur des distances inférieures à 50 bornes

- la courtine est recouverte de mottes de tourbe séchée découpées à la bêche.... Qui va dire que la tourbe coûte quelque chose ou qu'elle est dure à trouver en Ecosse ou dans le nord de l'Angleterre :lol:?

- le déboisement devant et derrière le mur ne coûte aussi que des jours de travail des légionnaires, et a de toute façon aussi servi à construire le mur

- le fossé, 9m de largeur pour 2-3m de profondeur, a servi à fournir la masse de terre du remblai, et ne coûte aussi que de la sueur

Voilà la totalité de ce qu'a coûté le mur d'Hadrien: je doute que le budget romain ait été affecté en quoi que ce soit. On peut dire qu'il a coûté ZERO as, sesterces, denari et aurei. Même un éventuel surcoût représentant les outils abîmés plus vite qu'à l'ordinaire n'en est pas un, vu que la légion répare elle-même toutes ses fournitures, la ferronerie n'étant pas du tout un problème (ou le treillage des paniers qui servent de pelle, ou le retissage/reprisage des tuniques abîmées....).

Les Américains avec leur mur-frontière sur le Rio Grande devraient en prendre de la graine :lol:. Coût d'une structure qui fait encore dire beaucoup de bêtises: ZERO!

Le Mur lui-même avait une "garnison" de moins de 12 000h:

- 16 forts pouvant abriter une unité auxilliaire (une cohorte, soit 480h)

- un fortin tous les miles romains, pour des turmes (une trentaine de cavaliers) ou des demi-centuries (une quarantaine d'hommes). Chaque fortin arme les 2 tours de guet qui le séparent du fortin suivant

Pour presque 120km, on arrive grosso merdo à un grand maximum de 100h par kilomètre, sachant qu'ils se relaient évidemment. Ce qui confirme le fait qu'il ne s'agit que d'une structure de filtrage et de surveillance, rien d'autre. Certainement pas d'un repli peureux derrière un mur par crainte des méchants guerriers pictes.

Les 3 légions de Bretagne sont loin derrières (la plus proche est à Yorck, les autres à Chester, au NE du Pays de Galles, et à Caerleon, au sud du Pays de Galles), capables de venir appuyer le mur en cas de mouvement massif de l'adversaire, ou plutôt d'aller le chercher pour lui rentrer dedans, mais ayant surtout à faire DANS l'espace romain de l'île.

Enfin pour un empire sur la "défensive" craintive, l'empire romain se comporte bizarrement en lançant la construction du mur d'Antonin, plus au nord.... En fait, ce mur là correspond vraisemblablement à une volonté de "rationaliser" le dispositif militaire romain en Bretagne.... En résumé, à compresser les coûts (ce qui correspond mal à la perception d'un ennemi réellement craint). Le Mur d'Antonin se situe sur une ligne mieux choisie encore: il réduit la distance à couvrir à 58km (contre 117 exactement au Mur d'Hadrien) tout en densifiant le dispositif défensif de fortins et forts attachés au mur.... Ce mur là est plus haut, plus large, avec un fossé plus grand et plus de forts au kilomètre (20 au total, de tailles diverses), mais beaucoup moins d'hommes en compte total. Cependant, il arrive à un mauvais moment: le règne qui suit, celui de Marc Aurèle, est extrêmement guerrier et voit à un moment l'empire dans un grand caca qui nécessite de décréter le tumultum, le recrutement massif et peu discriminé de tous les hommes qu'on peut racler rapidement, face aux invasions quades et marcomanes qui menacent à un moment donner l'Italie même.

Résultat, le Mur d'Antonin, dont la construction avait sévèrement énervé les tribus locales (Selgovae, Novantae et les éternels Brigantes qui se sont beaucoup fritées avec Rome) qui s'étaient faites piquer de vastes territoires, est sans cesse attaqué alors même que Rome a du prélever pas mal de troupes en Bretagne.... Avec à l'arrivée un retrait probable sur le Mur d'Hadrien et un retour à leurs proprios des terres prises entre les 2 murs. A noter que le mur d'Hadrien avait déjà marché sur les pieds de quelques tribus dont le territoire avait été sévèrement amputé, notamment celui des toujours emmerdants Brigantes qui avait été proprement coupé en 2 (laissant leur partie nord affaiblie et isolée entre d'autres tribus) par la structure.

A noter que les tribus mentionnées font toutes parties de ce qu'on appelle les "Pictes", confédération née ultérieurement et seulement mentionnée pour la première fois à la toute fin du IIIème siècle, et centrée autour des Calédoniens (déjà avant cela la tribu phare de l'opposition à Rome en Ecosse, la plus vaste et sans doute elle-même une condédération de clans et tribus) et des Maetae. A noter aussi que les Pictes s'opposent aussi bien aux Romains qu'aux Scots (quand ils ne se tapent pas dessus entre eux), une tribu irlandaise faisant des raids en Ecosse depuis un bail et qui s'installent aux IIIème-IVème siècle, et aux Saxons dont les raids maritimes commencent au IVème siècle (et contre lesquels Rome bâtit une fortification côtière dans l'est et un réseau de tours de guet et d'alarme).

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Un dernier point sur le thème des Pictes et du Mur d'Hadrien, juste histoire de....

Le fait de voir le Mur d'Hadrien comme un investissement exceptionnel est, je l'ai déjà précisé, un mythe. Pour être franc, le mur n'a pas du coûter grand-chose à l'empire, sinon même, osons le dire, presque rien du tout par rapport aux dépenses ordinaires. C'est un sujet que j'aborderais sans doute un jour sur l'armée romaine, mais elle ne coûte en fait réellement, sous le Haut Empire, que la paie des soldats, ou tout du moins ce poste de dépense représente 85 à 90% des dépenses militaires. Le reste vient du travail des légionnaires eux-mêmes. Et ainsi pour le mur qui ne représente rien de plus qu'une décision initiale et ensuite 6 ans de labeur de 3 légions (en fait seule la partie d'entre elles qui n'est pas dispensée des travaux lourds, soit environs 3000h par légion, plus des experts encadrant l'activité) et éventuellement des esclaves et/ou de la main d'oeuvre locale mobilisée pour l'occasion mais pas contre paiement en argent:

- l'argile, coeur du remblais au centre du mur, vient directement de la terre qu'on mouille, clarifie, densifie et fait sécher avant de construire par dessus. On l'utilise aussi pour faire les tuiles recouvrant tours de guets et fortins

- le bois est abondant partout dans le coin: y'a juste à le couper et le tailler selon les besoins: charpente essentiellement, mais aussi pieux défensifs et autres composantes de pièges, ainsi que pièces d'artillerie

- la pierre est un grès local qu'on trouve sur presque toute la longueur du mur: seule la partie extrême occidentale a du imposer des déplacements de pierres taillées sur des distances inférieures à 50 bornes

- la courtine est recouverte de mottes de tourbe séchée découpées à la bêche.... Qui va dire que la tourbe coûte quelque chose ou qu'elle est dure à trouver en Ecosse ou dans le nord de l'Angleterre :lol:?

- le déboisement devant et derrière le mur ne coûte aussi que des jours de travail des légionnaires, et a de toute façon aussi servi à construire le mur

- le fossé, 9m de largeur pour 2-3m de profondeur, a servi à fournir la masse de terre du remblai, et ne coûte aussi que de la sueur

Voilà la totalité de ce qu'a coûté le mur d'Hadrien: je doute que le budget romain ait été affecté en quoi que ce soit. On peut dire qu'il a coûté ZERO as, sesterces, denari et aurei. Même un éventuel surcoût représentant les outils abîmés plus vite qu'à l'ordinaire n'en est pas un, vu que la légion répare elle-même toutes ses fournitures, la ferronerie n'étant pas du tout un problème (ou le treillage des paniers qui servent de pelle, ou le retissage/reprisage des tuniques abîmées....).

Les Américains avec leur mur-frontière sur le Rio Grande devraient en prendre de la graine :lol:. Coût d'une structure qui fait encore dire beaucoup de bêtises: ZERO!

Le Mur lui-même avait une "garnison" de moins de 12 000h:

- 16 forts pouvant abriter une unité auxilliaire (une cohorte, soit 480h)

- un fortin tous les miles romains, pour des turmes (une trentaine de cavaliers) ou des demi-centuries (une quarantaine d'hommes). Chaque fortin arme les 2 tours de guet qui le séparent du fortin suivant

Pour presque 120km, on arrive grosso merdo à un grand maximum de 100h par kilomètre, sachant qu'ils se relaient évidemment. Ce qui confirme le fait qu'il ne s'agit que d'une structure de filtrage et de surveillance, rien d'autre. Certainement pas d'un repli peureux derrière un mur par crainte des méchants guerriers pictes.

Les 3 légions de Bretagne sont loin derrières (la plus proche est à Yorck, les autres à Chester, au NE du Pays de Galles, et à Caerleon, au sud du Pays de Galles), capables de venir appuyer le mur en cas de mouvement massif de l'adversaire, ou plutôt d'aller le chercher pour lui rentrer dedans, mais ayant surtout à faire DANS l'espace romain de l'île.

Enfin pour un empire sur la "défensive" craintive, l'empire romain se comporte bizarrement en lançant la construction du mur d'Antonin, plus au nord.... En fait, ce mur là correspond vraisemblablement à une volonté de "rationaliser" le dispositif militaire romain en Bretagne.... En résumé, à compresser les coûts (ce qui correspond mal à la perception d'un ennemi réellement craint). Le Mur d'Antonin se situe sur une ligne mieux choisie encore: il réduit la distance à couvrir à 58km (contre 117 exactement au Mur d'Hadrien) tout en densifiant le dispositif défensif de fortins et forts attachés au mur.... Ce mur là est plus haut, plus large, avec un fossé plus grand et plus de forts au kilomètre (20 au total, de tailles diverses), mais beaucoup moins d'hommes en compte total. Cependant, il arrive à un mauvais moment: le règne qui suit, celui de Marc Aurèle, est extrêmement guerrier et voit à un moment l'empire dans un grand caca qui nécessite de décréter le tumultum, le recrutement massif et peu discriminé de tous les hommes qu'on peut racler rapidement, face aux invasions quades et marcomanes qui menacent à un moment donner l'Italie même.

Résultat, le Mur d'Antonin, dont la construction avait sévèrement énervé les tribus locales (Selgovae, Novantae et les éternels Brigantes qui se sont beaucoup fritées avec Rome) qui s'étaient faites piquer de vastes territoires, est sans cesse attaqué alors même que Rome a du prélever pas mal de troupes en Bretagne.... Avec à l'arrivée un retrait probable sur le Mur d'Hadrien et un retour à leurs proprios des terres prises entre les 2 murs. A noter que le mur d'Hadrien avait déjà marché sur les pieds de quelques tribus dont le territoire avait été sévèrement amputé, notamment celui des toujours emmerdants Brigantes qui avait été proprement coupé en 2 (laissant leur partie nord affaiblie et isolée entre d'autres tribus) par la structure.

A noter que les tribus mentionnées font toutes parties de ce qu'on appelle les "Pictes", confédération née ultérieurement et seulement mentionnée pour la première fois à la toute fin du IIIème siècle, et centrée autour des Calédoniens (déjà avant cela la tribu phare de l'opposition à Rome en Ecosse, la plus vaste et sans doute elle-même une condédération de clans et tribus) et des Maetae. A noter aussi que les Pictes s'opposent aussi bien aux Romains qu'aux Scots (quand ils ne se tapent pas dessus entre eux), une tribu irlandaise faisant des raids en Ecosse depuis un bail et qui s'installent aux IIIème-IVème siècle, et aux Saxons dont les raids maritimes commencent au IVème siècle (et contre lesquels Rome bâtit une fortification côtière dans l'est et un réseau de tours de guet et d'alarme).

super intéressant et très bien expliqué  =D

sa permet de relativisé pas mal de chose  =)

par contre ,je ne connais pas trop l'histoire des Angles et saxon qui ont déboulé en grande-Bretagne ,quel était leurs origines et d'ou ils venaient ?

comment ont-ils eu de l'intérêt pour celle île ?

à quoi ressemblait leur population ,enfin du point organisation .tribu ,clan ou peuple organisé ?

les angles et saxon sont les ancêtres des anglais actuel ,et donc qui occupé les terres que les anglais actuel "occupent" ?

des tribus celtes ?

les Gallois et Ecossais ont toujours tenu leurs zones enfin réussi à gardé ,et la parti anglaise était disons celle des Brigantes et autres tribus ?

d'ailleurs ,comment s'est passé la transition pour les Gallois avec l'arrivé des Romains ?

ils sont devenu des Gallois-Romain ?

les angles et saxon qui ont déboulé ,en combien de temps ont-ils pu s'imposé (z'ont trucidé les tribus présente ou y a t'il eu mélange de force ) dans cette partie de la Bretagne ?

désolé pour ses questions qui peuvent paraître basique  :P

mais je ne connais que l'anglais qu'à partir du moyen-âge ,ben en faite quand ils ont commencé à venir nous emmerdé chez nous  :P

comment sa se fait que les angles et saxon ont jamais été aimé par les Gallois et écossais ?

le côté envahisseur certes ,mais sa doit-être plus que sa ,la façon d'être ?

donc hormis les écossais qui restait pas romanisé ,des Gallois "romanisé" (je les vois comme les gallo-romains ) ,se sont -ils allié face aux angles et saxon ?

faudrait peut-être que j'ouvre un file sur les angles et saxon ,histoire d'étudié qui ils sont et se qu'ils sont devenu  :lol:

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par contre ,je ne connais pas trop l'histoire des Angles et saxon qui ont déboulé en grande-Bretagne ,quel était leurs origines et d'ou ils venaient ?

comment ont-ils eu de l'intérêt pour celle île ?

à quoi ressemblait leur population ,enfin du point organisation .tribu ,clan ou peuple organisé ?

les angles et saxon sont les ancêtres des anglais actuel ,et donc qui occupé les terres que les anglais actuel "occupent" ?

des tribus celtes ?

Les Angles sont presque anecdotiques dans l'histoire: un "peuple" (ou sans doute une ligue de plus petite ampleur) dont des éléments participent aux raids saxons sur la Bretagne romaine. Ces expéditions sont à comparer en fait aux raids vikings ou aux expéditions "fédératives" de tribus germaniques sur le Rhin et le Danube: des entreprises privées, à l'initiative de chefs de clans un peu plus puissants qui arrivent à s'entendre entre eux, d'aristocrates guerriers en mal d'accumulation de richesses en somme. Ils fédèrent de plus en plus de clans et tribus au fur et à mesure de raids jugés rentables (mais montés par leurs soins en "grandes victoires" immémoriales sur Rome, comme les sagas vikings délirent pas mal sur l'ampleur des réalisations concrètes); ça ramène du monde, et le succès des dites associations incite à garder le nom, la "franchise" en somme, une marque qui gagne :lol:. Au fil du temps, le renom accumulé, les fidélités ainsi acquises, les liens tissés entre les groupes qui reviennent fréquemment font que ces ligues se structurent de façon plus pérennes, sans pour autant devenir des entités politiques totalement permanentes et surtout pas centralisées (cas par exemple des "Goths" ou des Francs dont on voit divers groupes être à l'occasion antagonistes).

Angles et surtout Saxons viennent visiblement de la moitié sud du Danemark et de la côte allemande dans le coin de l'actuelle Hambourg, couvrant peut-être une zone qui va jusqu'à l'embouchure de la Weser, ce qui les met en contact avec les Frisons et Bataves. Ces Saxons doivent donc être une ligue regroupant entre autres des peuples depuis longtemps en contact avec Rome, comme les Chauques, alliés de Rome au temps du soulèvement d'Arminius.

L'intérêt pour la Bretagne? Ben c'est développé, c'est Romain, ils ont besoin de terres, envie de Rome, et les territoires du Rhin sont trustés par les Alamans et les Francs.

Mais faut pas voir les Angles et Saxons comme les ancêtres des Anglais: au final, les migrations qui ont eu lieu n'ont pas concerné des masses d'individus énormes. Il s'agit surtout de raids guerriers (qui ont pu faire après venir leurs familles) qui ont fini par installer des petits royaumes à la place des élites anciennes ou par alliance avec elles (avec une relative acculturation de part et d'autres). Les anciennes élites brito-romaines n'ont pas du en fait tant bouger que ça, et ce sont les résistants qui se sont trouvés, après une longue période de résistance (ou naît la légende arthurienne), acculés vers le Pays de Galles et la Cornouaille, plus quelques îles ainsi qu'une émigration considérable vers la Bretagne armoricaine. Mais les populations saxonnes n'ont pas "remplacé" les habitants: l'essentiel des pégus et citadins de base, eux, n'ont jamais bougé. Ils ont juste changé de patrons. Une étude génétique dans la population anglaise avait révélé que les apports majeurs étaient celtes et plus encore cette "souche européenne" antérieure que l'on trouve partout en Europe occidentale comme base des populations (très comparable aux Basques, Ligures et autres groupes aujourd'hui petits mais qui étaient là avant même les migrations celtiques et d'autres "Indo Européens" au IIème millénaire, qui représentent en fait ce qui représente la base majeure de la population ouest européenne).

Mais bon, là en ce moment je suis plus replongé dans la légion romaine et l'armée romaine: structures, fonctionnement, carrières, équipements, paie, recrutement, bouffe, tactiques.... Pas trop dans le trip barbare (en détail).

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Attention quand même: il a ses a prioris et ses partis pris. Personnellement, je lui trouve à l'occasion de petits "défauts" idéologiques sur son jugement de l'évolution de l'armée romaine et l'armée romaine tardive (il a une lecture gardant un fond de "décadentisme"), ainsi que sur les critères selon lesquels ils jugent les "barbares". Je le trouve un peu facilement exaltant les germains et relativisant trop les Perses, par exemple.

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Les Angles sont presque anecdotiques dans l'histoire: un "peuple" (ou sans doute une ligue de plus petite ampleur) dont des éléments participent aux raids saxons sur la Bretagne romaine. Ces expéditions sont à comparer en fait aux raids vikings ou aux expéditions "fédératives" de tribus germaniques sur le Rhin et le Danube: des entreprises privées, à l'initiative de chefs de clans un peu plus puissants qui arrivent à s'entendre entre eux, d'aristocrates guerriers en mal d'accumulation de richesses en somme. Ils fédèrent de plus en plus de clans et tribus au fur et à mesure de raids jugés rentables (mais montés par leurs soins en "grandes victoires" immémoriales sur Rome, comme les sagas vikings délirent pas mal sur l'ampleur des réalisations concrètes); ça ramène du monde, et le succès des dites associations incite à garder le nom, la "franchise" en somme, une marque qui gagne :lol:. Au fil du temps, le renom accumulé, les fidélités ainsi acquises, les liens tissés entre les groupes qui reviennent fréquemment font que ces ligues se structurent de façon plus pérennes, sans pour autant devenir des entités politiques totalement permanentes et surtout pas centralisées (cas par exemple des "Goths" ou des Francs dont on voit divers groupes être à l'occasion antagonistes).

Angles et surtout Saxons viennent visiblement de la moitié sud du Danemark et de la côte allemande dans le coin de l'actuelle Hambourg, couvrant peut-être une zone qui va jusqu'à l'embouchure de la Weser, ce qui les met en contact avec les Frisons et Bataves. Ces Saxons doivent donc être une ligue regroupant entre autres des peuples depuis longtemps en contact avec Rome, comme les Chauques, alliés de Rome au temps du soulèvement d'Arminius.

L'intérêt pour la Bretagne? Ben c'est développé, c'est Romain, ils ont besoin de terres, envie de Rome, et les territoires du Rhin sont trustés par les Alamans et les Francs.

Mais faut pas voir les Angles et Saxons comme les ancêtres des Anglais: au final, les migrations qui ont eu lieu n'ont pas concerné des masses d'individus énormes. Il s'agit surtout de raids guerriers (qui ont pu faire après venir leurs familles) qui ont fini par installer des petits royaumes à la place des élites anciennes ou par alliance avec elles (avec une relative acculturation de part et d'autres). Les anciennes élites brito-romaines n'ont pas du en fait tant bouger que ça, et ce sont les résistants qui se sont trouvés, après une longue période de résistance (ou naît la légende arthurienne), acculés vers le Pays de Galles et la Cornouaille, plus quelques îles ainsi qu'une émigration considérable vers la Bretagne armoricaine. Mais les populations saxonnes n'ont pas "remplacé" les habitants: l'essentiel des pégus et citadins de base, eux, n'ont jamais bougé. Ils ont juste changé de patrons. Une étude génétique dans la population anglaise avait révélé que les apports majeurs étaient celtes et plus encore cette "souche européenne" antérieure que l'on trouve partout en Europe occidentale comme base des populations (très comparable aux Basques, Ligures et autres groupes aujourd'hui petits mais qui étaient là avant même les migrations celtiques et d'autres "Indo Européens" au IIème millénaire, qui représentent en fait ce qui représente la base majeure de la population ouest européenne).

Mais bon, là en ce moment je suis plus replongé dans la légion romaine et l'armée romaine: structures, fonctionnement, carrières, équipements, paie, recrutement, bouffe, tactiques.... Pas trop dans le trip barbare (en détail).

merci d'avoir pu m'éclairer sur le sujet ,et sa a vraiment éclairer ma lanterne  =)

donc quelque part ,mon intérêt il y a peu pour l'armée Romaine et tombé en plein dans ta période "Légion Romaine et l'Armée Romaine " =D

en gros ,nos ancêtres "franc" ont fait chier question "business" les angles qui ont du allé voir ailleur  ,car pas de place pour eux et les Francs sur le continent :lol:

je me demande si s'était  pas déjà un signe sur nos futurs relation avec les english au moyen-âge  :lol:

merci  ;)

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Attention quand même: il a ses a prioris et ses partis pris. Personnellement, je lui trouve à l'occasion de petits "défauts" idéologiques sur son jugement de l'évolution de l'armée romaine et l'armée romaine tardive (il a une lecture gardant un fond de "décadentisme"), ainsi que sur les critères selon lesquels ils jugent les "barbares". Je le trouve un peu facilement exaltant les germains et relativisant trop les Perses, par exemple.

j'en prends note ! ;)

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Mais faut pas voir les Angles et Saxons comme les ancêtres des Anglais: au final, les migrations qui ont eu lieu n'ont pas concerné des masses d'individus énormes.

Je voudrais d'abord saluer à mon tour les posts de Tancrède qui sont presque toujours instructifs alors que la plupart des forumeurs, moi y compris parfois, se contentent de donner leur opinion sur ceci ou cela.

Cela dit, je nuancerai sur ce point précis : je me souviens d'avoir lu les résultats d'une étude génétique qui montrait, pour faire court, que les conquérants anglo-saxons s'étaient reproduits avec les femmes autochtones et avaient empêché donc les mâles du pays conquis de faire de même (l'étude ne dit pas ce qu'il est advenu de ces derniers : simplement massacrés, émasculés en masse ?...)

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La fameuse étude génétique, régulièrement réactualisée, a plusieurs interprétations, en fait 2 dominantes; ce que tu mentionnes appartient au registre des derniers carrés "d'anglosaxonnistes" qui veulent absolument se rattacher à une "germanité" fantasmée qui expliquerait une évolution différente de l'Angleterre :lol: et un "amour de la liberté" plus grand qu'ailleurs.... Aujourd'hui, à part un noyau de clients fidèles de ce genre "d'histoire" qui fait plus appel à une forme de nationalisme datant de la fin  XIXème siècle, y'a plus beaucoup de scientifiques sérieux qui donnent dans ce genre de trucs. Les idées d'eugénisme à grande échelle, de ségrégation sexuelle ou de massacres raciaux sont des fantasmes et des simplismes de gens voulant trouver des solutions globalisantes et radicales pour justifier leurs vues que les sciences rendent de plus en plus bancales: c'était plus simple au XIXème d'avoir ce genre de discours: une opinion mal éduquée et volontiers nationaliste et donnant dans le simplisme adhérait facilement à des "historiens" -gens doctes et prétentieux en costume- qui se lançaient dans de grandes logorrhées lyriques sans grand fondement solide. Mais ça a profondément imprégné les esprits pour des générations, et l'importance de la "race" pour certains peuples -dont les Anglais- aident à donner un a priori en faveur de telles "thèses".

Les "conquérants" anglo-saxons n'en furent pas tant que ça: ils se sont taillés plein de petits royaumes au milieu d'autres petits royaumes celtes et brito-romains tardifs dans l'éclatement politique qui suit l'évacuation de l'île par Rome. Un certain mouvement migratoire a eu lieu mais il est douteux que les arrivant aient représenté plus de 10% de la population locale. Il faut aussi voir que la Bretagne romaine est un pays "développé" pour l'époque, cad que l'union et la pacification de toute l'île a permis une mise en valeur des terres et une économie de grande échelle, intégrée dans un ensemble romain encore plus vaste. La croissance démographique a donc été au-delà de ce qu'une Bretagne éclatée en petites entités aurait jamais pu totaliser. La fin de cette union et de la stabilité politique interne a accompagné une baisse démographique importante et imposé entre autre des migrations hors de l'île (vers l'Armorique notamment), mais ça restait une île peuplée pour son époque, vers les Vème-VIème siècles.

Qui plus est l'immigration angle et saxonne, et surtout plus tard, danoise (VIIIème siècle) est géographiquement localisée: la façade maritime orientale est la seule où l'impact démographique a été significatif (peut-être jusqu'à 20% de la population locale dans certains endroits: centre est et sud est, ainsi que le nord pour les Danois), et encore ce fait se trouve t-il dans les études génétiques en cumulant les 2 mouvements (angles, saxons et autres aux Vème-VIème siècles, Danois aux VIIIème-IXème siècles). Il faut par ailleurs y ajouter une migration régulière depuis l'Irlande, qui renforce donc l'élément celtique.

Mais même l'élément celtique n'est pas forcément si dominant et il est en partie mixé avec du "germanique": la Bretagne du Ier siècle avant JC a vu des mouvements importants de populations celtes et celto-germaines, principalement venues de Gaule Belgique, qui ont pris le contrôle du sud et du sud est de l'île (le "Camulogène" qui résiste à César notamment, est un chef Casse, une "nation" de Gaule Belgique). L'essentiel de la population de base de l'Angleterre est la même que celle de la majorité du continent européen, sont des souches proches datant du paléolithique. Les histoires de peuples "chassés" ou de fins de "royaumes entiers" ou de "races" sont plutôt à voir comme des figures de style racontant en fait seulement l'histoire des élites dirigeantes, la seule que les chroniqueurs s'attachent à raconter.

Enfin l'idée "d'épuration raciale" et de déplacements massifs de population est un non sens historique: les gens de cette époque ne pensent absolument pas de cette façon, et les ligues de peuples des grandes migrations (dont les Saxons) ne sont pas des ethnies ou des "peuples", et sûrement pas des groupes homogènes (on trouve régulièrement des éléments iraniens dans nombre de ces peuples par exemples). EUx n'ont pas vraiment de conception de "race" telle que nous avons pu en voir se développer aux XIXème-XXème siècles.

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