Ciders Posté(e) le 2 février Share Posté(e) le 2 février Pendant que la France... semble ne rien faire, le nouveau dirigeant syrien est en visite officiel en Arabie Saoudite. C'est sa première sortie du pays depuis la chute du régime Assad. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
gustave Posté(e) le 2 février Share Posté(e) le 2 février Il y a 6 heures, Ciders a dit : Pendant que la France... semble ne rien faire, le nouveau dirigeant syrien est en visite officiel en Arabie Saoudite. C'est sa première sortie du pays depuis la chute du régime Assad. Pas vraiment étonnant. Il a déja reçu les ministres occidentaux, avec pour objectif la levée des sanctions, ce qui a été fait, maintenant il lui faut rassurer les pays du Golfe pas vraiment copains avec ses soutiens les plus naturels (Qatar, Turquie) pour obtenir reconnaissance et argent... Quant à la France elle organise un sommet mi février sur ce sujet, après avoir été une des premières à envoyer un ministre d'Etat à Damas, sans parler de tout ce qu'on ne voit pas. 1 3 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
fraisedesbois Posté(e) le 4 février Share Posté(e) le 4 février #retournement Je trouve cela éclairant. Avait-ce été relevé ici? " (...) peu avant l’attaque du 7 octobre 2023, Assad, Nasrallah et Mohammad Reza Zahedi – le commandant en chef du Corps des gardiens de la révolution islamique (IRGC) au Levant – se sont rencontrés pour des pourparlers. La réunion, qui a été la dernière session réunissant le trio, a été très tendue. Assad a demandé le redéploiement des forces iraniennes et libanaises en Syrie et leur retrait de plusieurs gouvernorats clés, dont Alep, Hama et Homs." [source "politique libanaise" anonyme, pour amwaj-media le 07.01.25] https://amwaj.media/article/inside-story-hezbollah-debates-stronger-lebanese-identity-as-iran-resists-change Bon, à part ça les Hurras al Din, ie: la franchise locale d'al Qaida, déclare officiellement sa cessation d'activité: 29.01.2025 La « branche syrienne » d'Al-Qaïda se dissout après l'éviction d'Assad, mais ses partisans sont priés de rester armés https://www.newarab.com/news/al-qaedas-syria-wing-dissolves-following-assad-ouster Pour autant les gars n'envisagent pas leur reconversion dans la création d'une franchise de stands de crêpes, non: "(...) « L’idée semble plutôt être que ses membres devraient être prêts à se déplacer sur d’autres fronts si nécessaire ou peut-être participer aux efforts aux côtés des sunnites de Syrie pour combattre les menaces extérieures », a déclaré Tamimi, spécialiste de la guerre civile syrienne. Dans sa déclaration, Hurras al-Din a fait une référence implicite à la récente saisie par Israël du territoire syrien dans le sud et a conseillé aux sunnites « de ne pas déposer les armes ». On verra. Et "les nôtres"? Les Firqat al-Ghouraba d'Omar Diaby/Omsen, a-t-on des nouvelles plus récentes que ce papier du Monde? [18.10.2023] Petite infographie d'époque, pour mémoire Citation _________________________________ De la GOUVERNANCE du HTC ou, "le troisième paradigme" djihadiste (après AQ et OEI) « (…) l’appareil civil de Hayat Tahrir al Cham – le gouvernement du salut syrien – gère son projet de gouvernance comme un hybride entre la politique ottomane des notables et un État technocratique autoritaire* moderne » Policy Focus n°180: Jihadist Governance and Statecraft Devorah Margolin and Aaron Y. Zelin Editors Washington Institute For Near East Policy, Juillet.2024 “Nos hommes aiment leurs chefs, c’est la tradition. (…) Mais nous ne voulons obéir qu’à un chef qui nous connaisse, qui sache nos habitudes et nos traditions. De lui nous accepterons toutes décisions et la paix et le contentement seront sur le pays [Dhâm, chef des guerriers Chammars]”. Joseph Kessel, En Syrie [à Der-Es-Zor], c. 1925 * ils sont quand-même fortiches au Wash.Institute de ne pas mentionner l’Islam [un mot qui fâche ?] … Perso, à la place d’”autoritaire”, j’aurais écrit: “islamiste conservateur”. Donc: un hybride entre la politique des notables et un état technocratico-islamo_conservateur… “Moderne”, heu, si l’on veut. J’imagine que l’adjectif est associé au substantif “techno”. La politique ottomane des chefs et des notables. La quoi? Explication: " Située en marge des étendues cultivées de la Syrie historique (Bilad al-Cham), la Jazîra [ie: la région du moyen-Euphrate, la wilaya Raqqa] est demeurée du xive au xixe siècles une région de parcours pastoral, contrôlée à partir du xviie siècle par les tribus nomades bédouines Anaza et Chammar. (…) À partir de 1860, le contexte de développement du commerce international par le rail et la vapeur revalorise l’isthme mésopotamien entre Méditerranée et golfe Persique. L’Empire ottoman lance alors plusieurs campagnes de contrôle de la Jazîra. Une double politique est adoptée : celle de la force, avec envoi de troupes armées et construction d’une série de fortins le long de l’Euphrate ; et celle «des chefs» qui consiste à doter les principaux chefs de tribus en terres, titres et salaires. La « politique des chefs », développée par l’Empire ottoman puis le Mandat en #Jazîra, a eu pour versant urbain les « politiques des notables » des citadins d’Alep et des nouveaux habitants de Raqqa soucieux de tirer profit de la mise en valeur agricole de l’Est syrien. La notion de « politique des notables » a été élaborée à propos des villes du Moyen-Orient par Albert Hourani (Hourani 1968). Elle désigne la capacité d’un patriarcat urbain, assis sur des bases économiques fortes, à exercer un contrôle, coercitif ou symbolique, de la population urbaine, sur la base d’un pouvoir relativement indépendant, toléré comme médiateur entre l’État et la population locale (Picaudou 1996, p. 69). Ces deux politiques ont conduit au développement de structures latifundiaires caractéristiques de la Jazîra à la veille de la réforme agraire de 1958 : en 1951, 40 chefs de tribus et notables citadins possédaient à eux seuls 90 % des superficies agricoles de l’Est syrien (Khader 1984, p.152). (...)" Raqqa: territoires et pratiques sociales d’une ville syrienne Chap.I: « Politique des chefs » en Jazîra et « politique des notables » à Raqqa : la naissance d’une ville de front pionnier (1865-1946) Myriam Ababsa, Presses de l’IFPO, Beyrouth https://books.openedition.org/ifpo/1021 Récemment (17.01.25), Thomas Pierret dans une ITW pour Les Clés du Moyen-Orient, à propos de la gouvernance HTC, évoque lui aussi cette politique des chefs/notables mêlée de technocratisme, menée par al-Charaa: "(…) Selon moi, al-Charaa envisage des élections dans une version similaire au système jordanien: un système électoral qui consiste à favoriser les notables plutôt que les partis politiques. Vu d’Occident, beaucoup sont obnubilés par la question des mœurs (le voile, l’alcool, etc.), mais on oublie d’analyser le système politique qui est en train de se construire. Celui-ci est basé sur une vision conservatrice, unitaire et élitaire, en phase avec la théologie islamique classique. Les partis politiques ne sont pas vus d’un bon œil et les élites sont intégrées à titre consultatif. Cette vision ne permet pas une vraie compétition politique. Ce qu’il se passe à Idlib est très éclairant. Les élections pour élire le conseil consultatif, qui est une sorte d’instance législative sur laquelle était adossé le #gouvernement de salut syrien, sont fortement préparées en amont. Elles servent essentiellement à coopter des notables, parmi lesquels des #chefs tribaux. Par ailleurs, le pouvoir à Idlib est une gouvernance technocratique avec des personnalités plus ou moins alignées sur HTS. (…)" /De la GOUVERNANCE du HTC #toutautrechosequoique De l'itv de Thomas Pierret, je relève par ailleurs ceci à propos des HTC-FDS_U.S.: [cit.] " (…) En l’état des choses, je n’imagine pas une réintégration des FDS dans l’armée syrienne. Washington continue de défendre les FDS, la présence des soldats américains est justifiée par la lutte contre Daesh. Donald Trump sera certainement sur la même ligne, car c’est ce que souhaitent l’armée américaine et Israël. Les régions contrôlées par les FDS resteront donc certainement autonomes par rapport à Damas. D’autant plus que les Turcs ont fait une erreur de calcul. Après la chute de Bachar al-Assad, ils ont lancé une opération contre les FDS à travers l’ANS, avec des moyens insuffisants. Avec l’arrivée de Donald Trump au pouvoir, et la volonté israélienne de soutenir les FDS, la Turquie ne pourra plus agir, le front restera certainement figé. Les Forces démocratiques syriennes ont affirmé qu’elles acceptaient de rejoindre l’armée syrienne, mais en temps qu’entité militaire distincte, pas de manière individuelle. Ce n’est pas acceptable pour Damas [qui souhaite l’inverse: le ralliement d'individuels], mais j’imagine mal le nouveau pouvoir se lancer dans une opération contre les FDS : il n’en a pas les moyens militaires et risque des sanctions américaines élevées. (…) concernant les territoires contrôlés par les FDS : si c’était juste une question kurde, ce ne serait pas un grand problème, car les territoires habités par les Kurdes sont relativement réduits. En revanche, les terres contrôlées par les FDS correspondent à presque un tiers de la Syrie, soit tout ce qui se trouve à l’est de l’Euphrate. C’est considérable. Certains de ces territoires, où sont d’ailleurs les #réserves pétrolières et où #Daesh est présent, sont à majorité arabe. Les FDS veulent une décentralisation sur une base géographique. L’enjeu pour Damas est donc de garder la main sur un tiers du territoire syrien. Ce ne sont pas des considérations ethniques, mais territoriales. [/cit.] C'est tout pour aujourd'hui, merci. 1 2 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Banzinou Posté(e) le 5 février Share Posté(e) le 5 février 1 1 2 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
olivier lsb Posté(e) le 5 février Share Posté(e) le 5 février Le 02/02/2025 à 10:49, Ciders a dit : Pendant que la France... semble ne rien faire, le nouveau dirigeant syrien est en visite officiel en Arabie Saoudite. C'est sa première sortie du pays depuis la chute du régime Assad. Les dettes se paieront. Ca prend parfois un peu de temps, mais ça finit par arriver. Cf le post de Banzinou, et aujourd'hui toujours, un appel de Macron à Ahmad al Chara, qui l'invite en France. Ce dernier a remercié la France pour son soutien continue durant ces 14 dernières années. Comme je le disais il y a quelques pages, on serait bien fou de ne pas avancer nos pions et de tortiller des fesses à la place sur la longueur des barbes. https://www.lefigaro.fr/international/le-nouveau-dirigeant-syrien-a-recu-un-appel-d-emmanuel-macron-qui-l-invite-en-france-selon-la-presidence-du-pays-20250205 Citation Le nouveau dirigeant syrien a reçu un appel d’Emmanuel Macron, qui l'invite en France, selon la présidence du pays Par Le Figaro avec AFP Publié le 5 février à 21h49, mis à jour le 5 février à 22h22 Le nouveau dirigeant syrien par intérim, Ahmad al-Chareh. - / AFP Ahmad al-Chareh a remercié Emmanuel Macron pour son appel et «pour le soutien de la France envers le peuple syrien au cours des quatorze dernières années», selon la présidence syrienne. Ahmad al-Chareh, qui menait la coalition de groupes armés islamistes sunnites qui a renversé l’ancien président Bachar al-Assad le 8 décembre, a été nommé la semaine dernière président par intérim pour la période de transition en Syrie. Le nouveau dirigeant «a reçu un appel téléphonique de son homologue français, M. Emmanuel Macron», qui l’a félicité pour sa «prise de fonction» comme président, selon la présidence. «Soutien de la France Emmanuel Macron a exprimé «son plein soutien à la phase de transition en Syrie» et a souligné «les efforts de son pays pour lever les sanctions contre la Syrie et ouvrir la voie à la croissance et à la reprise», selon cette même source. Ahmad al-Chareh a remercié Emmanuel Macron pour son appel et «pour le soutien de la France envers le peuple syrien au cours des quatorze dernières années», a ajouté la présidence qui précise que le dirigeant syrien a évoqué «les défis actuels, y compris les sanctions économiques imposées» à la Syrie. Depuis la chute de Bachar al-Assad, Damas a accueilli plusieurs délégations diplomatiques de haut rang, arabes et occidentales, venues rencontrer les nouvelles autorités syriennes. Début janvier, le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot et son homologue allemande Annalena Baerbock s’étaient rendus à Damas pour rencontrer Ahmad al-Chareh. Jean-Noël Barrot avait indiqué ensuite que certaines sanctions contre la Syrie «pourraient être levées rapidement». 1 1 1 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
rendbo Posté(e) le 6 février Share Posté(e) le 6 février Il y a 10 heures, olivier lsb a dit : Comme je le disais il y a quelques pages, on serait bien fou de ne pas avancer nos pions et de tortiller des fesses à la place sur la longueur des barbes. C'est pas la longueur de la barbe qui me fera tortiller, mais la place des femmes dans la société et la liberté religieuse... 1 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Ciders Posté(e) le 6 février Share Posté(e) le 6 février il y a 29 minutes, rendbo a dit : C'est pas la longueur de la barbe qui me fera tortiller, mais la place des femmes dans la société et la liberté religieuse... Ça tombe bien, aux États-Unis ils ne portent pas de barbes. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
olivier lsb Posté(e) le 7 février Share Posté(e) le 7 février Il y a 21 heures, rendbo a dit : C'est pas la longueur de la barbe qui me fera tortiller, mais la place des femmes dans la société et la liberté religieuse... Et ils se disent surement la même chose au sujet de nos politiques nationales. Et donc ? On va s'ignorer superbement pour des positions culturelles irréconciliables, dispensées pourtant dans le respect des souverainetés respectives ? 4 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
olivier lsb Posté(e) le 7 février Share Posté(e) le 7 février Interview de Wassim Nasr dans CTC (publication de Westpoint), au sujet de sa rencontre avec Al Chara et l'avenir politique de la Syrie. https://ctc.westpoint.edu/wp-content/uploads/2025/01/CTC-SENTINEL-012025.pdf 2 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
rendbo Posté(e) le 7 février Share Posté(e) le 7 février il y a 13 minutes, olivier lsb a dit : Et ils se disent surement la même chose au sujet de nos politiques nationales. Et donc ? On va s'ignorer superbement pour des positions culturelles irréconciliables, dispensées pourtant dans le respect des souverainetés respectives ? Je n'ai pas de problèmes à ce qu'on vive dans le monde réel et que l'on ait des relations avec un régime que je n'apprécie pas (un de plus ou de moins...). C'est juste que la France aime à se présenter avec tout son héritage culturel, humaniste et légal, et je vois une grosse différence entre discuter avec (ce qui est le minimum avec tout le monde), et soutenir (aveuglément) d'une façon ou d'une autre. J'aimerais juste que l'on ne franchisse pas le Rubicon sans savoir, de la précaution quoi. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Teenytoon Posté(e) le 7 février Share Posté(e) le 7 février Si on ne discute pas avec les pays où la femme n'est pas l'égal de l'homme ça va laisser peu de monde sur les bancs... A commencer par nous-mêmes ? Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
rendbo Posté(e) le 7 février Share Posté(e) le 7 février Il y a 3 heures, Teenytoon a dit : Si on ne discute pas avec les pays où la femme n'est pas l'égal de l'homme ça va laisser peu de monde sur les bancs... A commencer par nous-mêmes ? Qu'on doive tous s'améliorer, nous y compris, est une certitude, et ça ne me dérange pas qu'on laisse sur les bancs les pays qui considèrent une femme moins qu'un chien... Je ne pense pas que cela soit sain de laisser s'installer des groupements de pensées qui, sur une revendication communautariste à l'américaine, voudraient instaurer chez nous une "minorité" de la femme, ça ne va pas dans le sens de l'histoire telle que je le conçois. 2 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
olivier lsb Posté(e) le 7 février Share Posté(e) le 7 février Il y a 4 heures, rendbo a dit : Je n'ai pas de problèmes à ce qu'on vive dans le monde réel et que l'on ait des relations avec un régime que je n'apprécie pas (un de plus ou de moins...). C'est juste que la France aime à se présenter avec tout son héritage culturel, humaniste et légal, et je vois une grosse différence entre discuter avec (ce qui est le minimum avec tout le monde), et soutenir (aveuglément) d'une façon ou d'une autre. J'aimerais juste que l'on ne franchisse pas le Rubicon sans savoir, de la précaution quoi. J'entends ce point, mais je crois que cette page se tourne tout doucement depuis quelques années déjà. Post 2003 et contexte Irak, oui c'était en haut de l'agenda diplomatique. Aujourd'hui, tout le monde a pris acte la mort des valeurs et des idéologies, et le retour du rapport de force brut. Les contradictions et les cohérences, tout le monde semble désormais s'en foutre comme de sa première dent. On essaie de s'en tenir à quelques principes, mais je crois qu'on a mis en sourdine, depuis quelques temps déjà, la boite à moraline. Ironie de l'histoire, c'est justement sur la Syrie, les crimes d'Assad, les armes chimiques et le soutien politique à la rébellion, que je placerais un des derniers baroud d'Honneur de notre diplomatie en lien avec ces thématiques spécifiquement. Je crois qu'aujourd'hui, il serait très excessif de dire que nous sommes dans un soutien aveugle. Au contraire, je le trouve prudent, mesuré et avançant par étape sans précipitation. 3 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Teenytoon Posté(e) le 8 février Share Posté(e) le 8 février Il y a 13 heures, rendbo a dit : 'installer des groupements de pensées qui, sur une revendication communautariste à l'américaine, voudraient instaurer chez nous une "minorité" de la femme, Qui parle de ça ? Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
loki Posté(e) le 8 février Share Posté(e) le 8 février Au Liban, au moins sept personnes ont été blessées dans des combats entre les nouvelles forces armées syriennes et des clans chiites libanais à la frontière libano-syrienne. Les affrontements aux armes lourdes et légères ont éclaté ce jeudi 6 février et se sont poursuivis toute la journée de vendredi. L’objectif des forces de sécurité syriennes est de prendre le contrôle de six villages situés en Syrie, mais dont les habitants sont des Libanais, essentiellement de confessions chiites. Cette région, appelée le bassin de l’Oronte, est un carrefour pour la contrebande de toute sorte, contrôlée par de puissants clans familiaux libanais avec des complicités à l’intérieur de la Syrie.... https://www.msn.com/fr-fr/actualite/monde/violents-combats-à-la-frontière-libano-syrienne-entre-des-troupes-syriennes-et-des-clans-chiites-libanais/ar-AA1yBK2b?ocid=msedgdhp&pc=LCTS&cvid=6c5011e796664ada9d56b64151ad4cdb&ei=13 2 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
olivier lsb Posté(e) le 8 février Share Posté(e) le 8 février Rétrospective historique sur le pouvoir politique en Syrie, depuis le partie Bass jusqu'à la chute d'Assad. https://www.lemonde.fr/international/article/2025/02/04/du-panarabisme-au-nationalisme-syrien-la-lente-ascension-d-hafez-al-assad_6530533_3210.html Citation La lente ascension d’Hafez Al-Assad, du panarabisme au nationalisme syrien Par Christophe Ayad Publié le 04 février 2025 à 06h00, modifié le 05 février 2025 à 18h42 Histoire« La saga des Al-Assad » (1/4). Né d’un grand mouvement modernisateur et socialiste, le parti Baas est devenu l’instrument de la prise de pouvoir d’un clan qui a régné sur la Syrie de 1970 à 2024. A qui la faute ? A qui la paternité de la naissance d’une des dictatures les plus implacables de l’histoire moderne ? Quel a été le moteur des Al-Assad, père puis fils, qui ont régné sur la Syrie de 1970 à décembre 2024, avant de chuter de manière précipitée : la revanche des alaouites, la paranoïa militaire ou l’intransigeance baassiste ? C’est bien le baassisme qui a été à l’origine de tout : avant même d’embrasser la carrière des armes, avant de constituer une caste alaouite autour de lui, Hafez Al-Assad a été un baassiste convaincu. Sur le papier, rien ne vouait cette idéologie à la postérité totalitaire qu’elle a connue en Syrie comme en Irak, où elle est arrivée au pouvoir dans les années 1960, pour régner dans les années 1970-1980, avant de se dissoudre dans le culte de la personnalité et la prédation, à partir des années 1990 et 2000. Comme le raconte le journaliste spécialiste du Proche-Orient Xavier Baron, dans Histoire de la Syrie. De 1918 à nos jours (Tallandier, 2014, réédité en janvier, 432 pages, 11 euros), « à l’origine du Baas se trouvent trois Syriens : un père spirituel, Zaki Al-Arsouzi, et deux fondateurs, Michel Aflak, chrétien grec-orthodoxe né à Damas, en 1910, et Salah Eddine Bitar, sunnite né en 1912, également à Damas. Zaki Al-Arsouzi est un Alaouite né à Lattaquié, en 1901, mais qui a passé son enfance à Alexandrette ». Les trois hommes ont étudié à la Sorbonne, à Paris, où Aflak et Bitar se sont liés d’amitié, au début des années 1930. Comme le Vietnamien Ho Chi Minh ou le Cambodgien Pol Pot, leur séjour dans la capitale française a été déterminant dans leur formation intellectuelle. Mais qu’est-ce donc que le baassisme ? Tout comme les Frères musulmans, les idéologues du baassisme partent du constat de la décadence du monde arabe, occupé par les puissances européennes au sortir de la première guerre mondiale. Mais, pour eux, la « renaissance » (baas ou baath en arabe translittéré) passe par la formation d’une seule nation arabe, unie par la langue, la culture et une forme de laïcité, du moins un rapport culturel plus que confessionnel à la religion dominante, en l’occurrence l’islam. Cette dernière caractéristique avait tout pour séduire les minorités confessionnelles (chrétiens, druzes chiites, alaouites, etc.), en butte à l’écrasante majorité musulmane sunnite. Tâches subalternes Le baassisme prône la libération nationale, l’unité et le socialisme. Pour lui, le nationalisme arabe révolutionnaire passe avant la lutte des classes. Appliquée par des régimes militaires autoritaires, cette volonté d’unanimisme social et national a viré au totalitarisme. La date de naissance effective du parti en Syrie remonte à 1939, mais il ne sera officiel qu’après l’indépendance, en 1946. Le mouvement, qui tient son premier congrès l’année suivante, connaît deux échelons : l’un national, qui englobe tout le monde arabe, et l’autre régional, qui désigne les branches nationales, dont la Syrie. Hafez Al-Assad y adhère dès les années 1950, à la sortie du lycée. Ce grand échalas au front démesuré est né à Qardaha, dans la montagne alaouite, en 1930. Ses jeunes années sont marquées par le mandat français et la difficile lutte pour accéder à l’indépendance, finalement accordée le 3 juin 1944, mais véritablement effective en avril 1946, après un dernier baroud français, qui a consisté à bombarder le centre de Damas à l’artillerie lourde fin mai 1945. Paradoxalement, il appartient à cette génération de jeunes Alaouites ayant profité du mandat français pour intégrer la carrière des armes, voie la plus rapide pour l’ascension sociale de la communauté la plus pauvre et la plus méprisée de Syrie, à commencer par la majorité sunnite, qui ne voit qu’une hérésie dans ce chiisme militant. Jeune officier, Hafez Al-Assad observe avec gourmandise la suite de coups d’Etat émailler la vie politique syrienne, dès la naissance de la jeune République arabe. Au trio des fondateurs du baassisme va succéder un autre trio, formé de militaires : Mohamed Omrane, le plus âgé, né en 1920, Salah Jadid, né en 1926, et, enfin, le plus jeune, Hafez Al-Assad. Ils sont tous trois Alaouites et ambitieux, marqués par la défaite de l’armée syrienne face à Israël, en 1948. Tous trois, aussi, sont relativement réfractaires à l’union entre la Syrie et l’Egypte, décrétée sous la pression des foules, après la nationalisation du canal de Suez, en 1956, et l’équipée militaire franco-britannico-israélienne mise en échec par l’intervention conjointe des grandes puissances américaine et soviétique. Cette victoire politique avait propulsé le leader panarabe égyptien Gamal Abdel Nasser vers des sommets de popularité. Dans la foulée de la proclamation de la République arabe unie (RAU), en 1958, des officiers baassistes sont envoyés en Egypte, pour être surveillés de plus près. Hafez Al-Assad en fait partie. On leur confie des tâches subalternes. Le trio Omrane-Jadid-Assad s’ennuie et complote avec d’autres, dans le plus grand secret, en vue d’une sécession. En 1961, la RAU est dissoute, la voie est libre pour prendre le pouvoir. C’est chose faite le 8 mars 1963. Des automitrailleuses prennent le contrôle des carrefours stratégiques de Damas pour mener le dixième coup d’Etat depuis l’indépendance. Les militaires appellent les dirigeants du parti Baas à former un gouvernement. L’état d’urgence est immédiatement instauré. Il ne sera plus levé avant 2011… Un mois plus tôt, jour pour jour, le parti Baas s’était emparé du pouvoir à Bagdad, en Irak. « Une nouvelle ère s’annonce. En quelques semaines, le régime parlementaire est relégué dans un passé qui semble révolu en Syrie, écrit le chercheur Matthieu Rey dans Histoire de la Syrie. XIXe-XXIe siècle (Fayard, 2018). Les officiers ne quittent plus le pouvoir, sans que le rythme des coups d’Etat décroisse. Un âge nouveau advient, comme dans la plupart des pays de la région. (…). L’heure est à la révolution, selon les termes des acteurs qui chantent les vertus de la thawra (“révolution”). » L’ère des militaires à moustache Certes, des civils occupent les postes de pouvoir officiels, mais en coulisse, c’est un triumvirat de militaires, formé d’Omrane, Jadid et Al-Assad, qui décide de tout. Dès l’été 1963, un coup d’Etat dans le coup d’Etat permet d’éliminer les officiers nassériens qui ont participé à la prise de pouvoir du Baas. Les combats dans les rues font des dizaines de morts. Dans cette nouvelle Syrie, l’usage de la violence en politique n’est plus un tabou. Autre nouveauté : les luttes politiques recouvrent bien souvent des conflits confessionnels. Le nouveau président de la République, Amine Hafez, un général sunnite en poste à partir de 1964, est vite en butte au trio alaouite qui contrôle les forces armées. Il s’appuie sur les dirigeants historiques du parti Baas, Aflak et Bitar, mais a du mal à contenir le zèle révolutionnaire de la branche régionale tenue par Jadid et Al-Assad. En janvier 1966, le premier ministre, Salah Eddine Bitar, soutenu par le président Hafez, tente de renvoyer les militaires dans leurs casernes mais le 23 février, l’aile dure du parti prend le pouvoir par les armes. Amine Hafez, mais aussi Michel Aflak et Salah Eddine Bitar, pourtant les fondateurs du Baas, sont emprisonnés. S’ouvre l’ère des militaires à moustache. « Ce fut la fin du Baas. A sa place, autre chose a été bâti. Un néo-Baas est né, et le Baas a été mis à mort », déplore Bitar, cité par Xavier Baron. Les écrits de Michel Aflak sont interdits dans les librairies de Damas. Les pères fondateurs se réfugient à Bagdad, en Irak, où règne aussi le parti Baas. « Il s’agit désormais d’établir qui est le plus qualifié pour orienter le baassisme, les néobaassistes de Damas ou les baassistes orthodoxes de Bagdad (…). Ainsi naît une rivalité implacable entre les frères ennemis baassistes, conflit d’autant plus total qu’il ravive tout un contentieux historique et culturel dont les racines remontent à la lutte entre les Omeyyades et les Abbassides » durant le premier siècle de l’islam, entre le VIIe et le VIIIe siècle de l’ère chrétienne, résume Xavier Baron. Ce nouveau coup de force, réalisé pour le compte du duo Jadid - Al-Assad par l’officier druze Salim Hatoum, ouvre la porte à une phase révolutionnaire « à la chinoise », qui voit la périphérie et les marges prendre leur revanche sur les centres urbains. Ce que le journaliste et essayiste libanais Edouard Saab résume dans la formule de « révolution dans la rancœur ». Les nationalisations et la réforme agraire s’accélèrent et, tout en mécontentant la bourgeoisie commerçante, assurent au régime le soutien des petits paysans, grands bénéficiaires du partage des terres. La réalisation du barrage de Tabqa sur l’Euphrate, à partir de 1965, avec l’aide de l’Union soviétique, symbolise l’ère de progrès que prétendent ouvrir les nouveaux maîtres du pays. Guerre feutrée Parallèlement, c’est à cette époque qu’émergent les différentes officines de renseignement (moukhabarat) qui prendront une place déterminante dans la vie quotidienne des Syriens lors des décennies suivantes. Une nouvelle épreuve de force permet l’élimination de la composante druze de la révolution néobaassiste : le colonel Hatoum, estimant les représentants de sa communauté mal récompensés, prend en otage Salah Jadid, dans le fief druze de Souweïda, en septembre 1966. Le ministre de la défense, Hafez Al-Assad, ne cède pas à l’ultimatum et envoie les chars encercler Souweïda. Hatoum plie et prend la fuite en Jordanie. Les Alaouites sont désormais seuls maîtres du jeu et une guerre feutrée va s’installer entre Salah Jadid et Hafez Al-Assad. Le premier s’appuie sur l’aile civile du Baas et As-Saïqa, la force milicienne palestinienne mise sur pied par Damas. Il prône une gauchisation du régime et estime que la victoire contre Israël passe par un approfondissement de la révolution. Le second s’appuie sur l’armée et représente une aile plus droitière ; il milite pour une pause dans les réformes. La rivalité entre les deux hommes est attisée par le contexte régional. En 1967, les alarmes syriennes sur une guerre imminente, que serait prêt à lancer Israël, poussent l’Egyptien Nasser à une escalade qui débouche sur la désastreuse guerre des Six-Jours. Entre les 5 et 10 juin, l’Egypte perd le Sinaï et Gaza, la Jordanie Jérusalem et la Cisjordanie. Quant à la Syrie, elle perd le plateau du Golan, réputé imprenable : les unités d’élite, au lieu de combattre, ont été gardées à Damas pour protéger le pouvoir. Durement mis en cause en tant que ministre de la défense, Hafez Al-Assad s’accroche. Mais il est mis en minorité à deux reprises par des congrès du Baas, en 1968 et 1969. Une nouvelle crise régionale lui donne l’occasion de se rétablir de manière spectaculaire. En 1970, lors des affrontements de Septembre noir, entre l’Organisation de libération de la Palestine de Yasser Arafat et l’armée jordanienne, Salah Jadid envoie une colonne blindée soutenir les fedayins palestiniens. Hafez Al-Assad, lui, refuse toute couverture aérienne. Les tanks syriens doivent piteusement rebrousser chemin. Le grand Gamal Abdel Nasser meurt quelques jours plus tard, laissant un grand vide à la tête du mouvement panarabe. Le moment est venu pour Hafez Al-Assad de se débarrasser du dernier obstacle. Mis en minorité une nouvelle fois et relevé de ses fonctions, ainsi que son compagnon d’études, le chef d’état-major Moustapha Tlass (sunnite), il réagit en faisant arrêter ses ennemis, le 13 novembre 1970. Trois jours plus tard, la radio annonce qu’une nouvelle direction du Baas a été mise en place pour mettre fin au « terrorisme intellectuel » et à la « dictature » de l’aile civile du parti, incarnée par Salah Jadid. Le lendemain, Hafez Al-Assad s’envole pour Le Caire, où il veut faire reconnaître son pouvoir par le successeur de Nasser, Anouar El-Sadate. Le 12 mars 1971, il est élu président de la République, avec 99,2 % des voix. Pour la première fois de son histoire, la Syrie a un président alaouite. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
olivier lsb Posté(e) le 8 février Share Posté(e) le 8 février Rétrospective historique sur le pouvoir politique en Syrie, depuis le partie Bass jusqu'à la chute d'Assad. https://www.lemonde.fr/international/article/2025/02/04/du-panarabisme-au-nationalisme-syrien-la-lente-ascension-d-hafez-al-assad_6530533_3210.html Citation La lente ascension d’Hafez Al-Assad, du panarabisme au nationalisme syrien Par Christophe Ayad Publié le 04 février 2025 à 06h00, modifié le 05 février 2025 à 18h42 Histoire« La saga des Al-Assad » (1/4). Né d’un grand mouvement modernisateur et socialiste, le parti Baas est devenu l’instrument de la prise de pouvoir d’un clan qui a régné sur la Syrie de 1970 à 2024. A qui la faute ? A qui la paternité de la naissance d’une des dictatures les plus implacables de l’histoire moderne ? Quel a été le moteur des Al-Assad, père puis fils, qui ont régné sur la Syrie de 1970 à décembre 2024, avant de chuter de manière précipitée : la revanche des alaouites, la paranoïa militaire ou l’intransigeance baassiste ? C’est bien le baassisme qui a été à l’origine de tout : avant même d’embrasser la carrière des armes, avant de constituer une caste alaouite autour de lui, Hafez Al-Assad a été un baassiste convaincu. Sur le papier, rien ne vouait cette idéologie à la postérité totalitaire qu’elle a connue en Syrie comme en Irak, où elle est arrivée au pouvoir dans les années 1960, pour régner dans les années 1970-1980, avant de se dissoudre dans le culte de la personnalité et la prédation, à partir des années 1990 et 2000. Comme le raconte le journaliste spécialiste du Proche-Orient Xavier Baron, dans Histoire de la Syrie. De 1918 à nos jours (Tallandier, 2014, réédité en janvier, 432 pages, 11 euros), « à l’origine du Baas se trouvent trois Syriens : un père spirituel, Zaki Al-Arsouzi, et deux fondateurs, Michel Aflak, chrétien grec-orthodoxe né à Damas, en 1910, et Salah Eddine Bitar, sunnite né en 1912, également à Damas. Zaki Al-Arsouzi est un Alaouite né à Lattaquié, en 1901, mais qui a passé son enfance à Alexandrette ». Les trois hommes ont étudié à la Sorbonne, à Paris, où Aflak et Bitar se sont liés d’amitié, au début des années 1930. Comme le Vietnamien Ho Chi Minh ou le Cambodgien Pol Pot, leur séjour dans la capitale française a été déterminant dans leur formation intellectuelle. Mais qu’est-ce donc que le baassisme ? Tout comme les Frères musulmans, les idéologues du baassisme partent du constat de la décadence du monde arabe, occupé par les puissances européennes au sortir de la première guerre mondiale. Mais, pour eux, la « renaissance » (baas ou baath en arabe translittéré) passe par la formation d’une seule nation arabe, unie par la langue, la culture et une forme de laïcité, du moins un rapport culturel plus que confessionnel à la religion dominante, en l’occurrence l’islam. Cette dernière caractéristique avait tout pour séduire les minorités confessionnelles (chrétiens, druzes chiites, alaouites, etc.), en butte à l’écrasante majorité musulmane sunnite. Tâches subalternes Le baassisme prône la libération nationale, l’unité et le socialisme. Pour lui, le nationalisme arabe révolutionnaire passe avant la lutte des classes. Appliquée par des régimes militaires autoritaires, cette volonté d’unanimisme social et national a viré au totalitarisme. La date de naissance effective du parti en Syrie remonte à 1939, mais il ne sera officiel qu’après l’indépendance, en 1946. Le mouvement, qui tient son premier congrès l’année suivante, connaît deux échelons : l’un national, qui englobe tout le monde arabe, et l’autre régional, qui désigne les branches nationales, dont la Syrie. Hafez Al-Assad y adhère dès les années 1950, à la sortie du lycée. Ce grand échalas au front démesuré est né à Qardaha, dans la montagne alaouite, en 1930. Ses jeunes années sont marquées par le mandat français et la difficile lutte pour accéder à l’indépendance, finalement accordée le 3 juin 1944, mais véritablement effective en avril 1946, après un dernier baroud français, qui a consisté à bombarder le centre de Damas à l’artillerie lourde fin mai 1945. Paradoxalement, il appartient à cette génération de jeunes Alaouites ayant profité du mandat français pour intégrer la carrière des armes, voie la plus rapide pour l’ascension sociale de la communauté la plus pauvre et la plus méprisée de Syrie, à commencer par la majorité sunnite, qui ne voit qu’une hérésie dans ce chiisme militant. Jeune officier, Hafez Al-Assad observe avec gourmandise la suite de coups d’Etat émailler la vie politique syrienne, dès la naissance de la jeune République arabe. Au trio des fondateurs du baassisme va succéder un autre trio, formé de militaires : Mohamed Omrane, le plus âgé, né en 1920, Salah Jadid, né en 1926, et, enfin, le plus jeune, Hafez Al-Assad. Ils sont tous trois Alaouites et ambitieux, marqués par la défaite de l’armée syrienne face à Israël, en 1948. Tous trois, aussi, sont relativement réfractaires à l’union entre la Syrie et l’Egypte, décrétée sous la pression des foules, après la nationalisation du canal de Suez, en 1956, et l’équipée militaire franco-britannico-israélienne mise en échec par l’intervention conjointe des grandes puissances américaine et soviétique. Cette victoire politique avait propulsé le leader panarabe égyptien Gamal Abdel Nasser vers des sommets de popularité. Dans la foulée de la proclamation de la République arabe unie (RAU), en 1958, des officiers baassistes sont envoyés en Egypte, pour être surveillés de plus près. Hafez Al-Assad en fait partie. On leur confie des tâches subalternes. Le trio Omrane-Jadid-Assad s’ennuie et complote avec d’autres, dans le plus grand secret, en vue d’une sécession. En 1961, la RAU est dissoute, la voie est libre pour prendre le pouvoir. C’est chose faite le 8 mars 1963. Des automitrailleuses prennent le contrôle des carrefours stratégiques de Damas pour mener le dixième coup d’Etat depuis l’indépendance. Les militaires appellent les dirigeants du parti Baas à former un gouvernement. L’état d’urgence est immédiatement instauré. Il ne sera plus levé avant 2011… Un mois plus tôt, jour pour jour, le parti Baas s’était emparé du pouvoir à Bagdad, en Irak. « Une nouvelle ère s’annonce. En quelques semaines, le régime parlementaire est relégué dans un passé qui semble révolu en Syrie, écrit le chercheur Matthieu Rey dans Histoire de la Syrie. XIXe-XXIe siècle (Fayard, 2018). Les officiers ne quittent plus le pouvoir, sans que le rythme des coups d’Etat décroisse. Un âge nouveau advient, comme dans la plupart des pays de la région. (…). L’heure est à la révolution, selon les termes des acteurs qui chantent les vertus de la thawra (“révolution”). » L’ère des militaires à moustache Certes, des civils occupent les postes de pouvoir officiels, mais en coulisse, c’est un triumvirat de militaires, formé d’Omrane, Jadid et Al-Assad, qui décide de tout. Dès l’été 1963, un coup d’Etat dans le coup d’Etat permet d’éliminer les officiers nassériens qui ont participé à la prise de pouvoir du Baas. Les combats dans les rues font des dizaines de morts. Dans cette nouvelle Syrie, l’usage de la violence en politique n’est plus un tabou. Autre nouveauté : les luttes politiques recouvrent bien souvent des conflits confessionnels. Le nouveau président de la République, Amine Hafez, un général sunnite en poste à partir de 1964, est vite en butte au trio alaouite qui contrôle les forces armées. Il s’appuie sur les dirigeants historiques du parti Baas, Aflak et Bitar, mais a du mal à contenir le zèle révolutionnaire de la branche régionale tenue par Jadid et Al-Assad. En janvier 1966, le premier ministre, Salah Eddine Bitar, soutenu par le président Hafez, tente de renvoyer les militaires dans leurs casernes mais le 23 février, l’aile dure du parti prend le pouvoir par les armes. Amine Hafez, mais aussi Michel Aflak et Salah Eddine Bitar, pourtant les fondateurs du Baas, sont emprisonnés. S’ouvre l’ère des militaires à moustache. « Ce fut la fin du Baas. A sa place, autre chose a été bâti. Un néo-Baas est né, et le Baas a été mis à mort », déplore Bitar, cité par Xavier Baron. Les écrits de Michel Aflak sont interdits dans les librairies de Damas. Les pères fondateurs se réfugient à Bagdad, en Irak, où règne aussi le parti Baas. « Il s’agit désormais d’établir qui est le plus qualifié pour orienter le baassisme, les néobaassistes de Damas ou les baassistes orthodoxes de Bagdad (…). Ainsi naît une rivalité implacable entre les frères ennemis baassistes, conflit d’autant plus total qu’il ravive tout un contentieux historique et culturel dont les racines remontent à la lutte entre les Omeyyades et les Abbassides » durant le premier siècle de l’islam, entre le VIIe et le VIIIe siècle de l’ère chrétienne, résume Xavier Baron. Ce nouveau coup de force, réalisé pour le compte du duo Jadid - Al-Assad par l’officier druze Salim Hatoum, ouvre la porte à une phase révolutionnaire « à la chinoise », qui voit la périphérie et les marges prendre leur revanche sur les centres urbains. Ce que le journaliste et essayiste libanais Edouard Saab résume dans la formule de « révolution dans la rancœur ». Les nationalisations et la réforme agraire s’accélèrent et, tout en mécontentant la bourgeoisie commerçante, assurent au régime le soutien des petits paysans, grands bénéficiaires du partage des terres. La réalisation du barrage de Tabqa sur l’Euphrate, à partir de 1965, avec l’aide de l’Union soviétique, symbolise l’ère de progrès que prétendent ouvrir les nouveaux maîtres du pays. Guerre feutrée Parallèlement, c’est à cette époque qu’émergent les différentes officines de renseignement (moukhabarat) qui prendront une place déterminante dans la vie quotidienne des Syriens lors des décennies suivantes. Une nouvelle épreuve de force permet l’élimination de la composante druze de la révolution néobaassiste : le colonel Hatoum, estimant les représentants de sa communauté mal récompensés, prend en otage Salah Jadid, dans le fief druze de Souweïda, en septembre 1966. Le ministre de la défense, Hafez Al-Assad, ne cède pas à l’ultimatum et envoie les chars encercler Souweïda. Hatoum plie et prend la fuite en Jordanie. Les Alaouites sont désormais seuls maîtres du jeu et une guerre feutrée va s’installer entre Salah Jadid et Hafez Al-Assad. Le premier s’appuie sur l’aile civile du Baas et As-Saïqa, la force milicienne palestinienne mise sur pied par Damas. Il prône une gauchisation du régime et estime que la victoire contre Israël passe par un approfondissement de la révolution. Le second s’appuie sur l’armée et représente une aile plus droitière ; il milite pour une pause dans les réformes. La rivalité entre les deux hommes est attisée par le contexte régional. En 1967, les alarmes syriennes sur une guerre imminente, que serait prêt à lancer Israël, poussent l’Egyptien Nasser à une escalade qui débouche sur la désastreuse guerre des Six-Jours. Entre les 5 et 10 juin, l’Egypte perd le Sinaï et Gaza, la Jordanie Jérusalem et la Cisjordanie. Quant à la Syrie, elle perd le plateau du Golan, réputé imprenable : les unités d’élite, au lieu de combattre, ont été gardées à Damas pour protéger le pouvoir. Durement mis en cause en tant que ministre de la défense, Hafez Al-Assad s’accroche. Mais il est mis en minorité à deux reprises par des congrès du Baas, en 1968 et 1969. Une nouvelle crise régionale lui donne l’occasion de se rétablir de manière spectaculaire. En 1970, lors des affrontements de Septembre noir, entre l’Organisation de libération de la Palestine de Yasser Arafat et l’armée jordanienne, Salah Jadid envoie une colonne blindée soutenir les fedayins palestiniens. Hafez Al-Assad, lui, refuse toute couverture aérienne. Les tanks syriens doivent piteusement rebrousser chemin. Le grand Gamal Abdel Nasser meurt quelques jours plus tard, laissant un grand vide à la tête du mouvement panarabe. Le moment est venu pour Hafez Al-Assad de se débarrasser du dernier obstacle. Mis en minorité une nouvelle fois et relevé de ses fonctions, ainsi que son compagnon d’études, le chef d’état-major Moustapha Tlass (sunnite), il réagit en faisant arrêter ses ennemis, le 13 novembre 1970. Trois jours plus tard, la radio annonce qu’une nouvelle direction du Baas a été mise en place pour mettre fin au « terrorisme intellectuel » et à la « dictature » de l’aile civile du parti, incarnée par Salah Jadid. Le lendemain, Hafez Al-Assad s’envole pour Le Caire, où il veut faire reconnaître son pouvoir par le successeur de Nasser, Anouar El-Sadate. Le 12 mars 1971, il est élu président de la République, avec 99,2 % des voix. Pour la première fois de son histoire, la Syrie a un président alaouite. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
olivier lsb Posté(e) le 8 février Share Posté(e) le 8 février Rétrospective historique sur le pouvoir politique en Syrie, depuis le partie Bass jusqu'à la chute d'Assad. https://www.lemonde.fr/international/article/2025/02/04/du-panarabisme-au-nationalisme-syrien-la-lente-ascension-d-hafez-al-assad_6530533_3210.html Citation La lente ascension d’Hafez Al-Assad, du panarabisme au nationalisme syrien Par Christophe Ayad Publié le 04 février 2025 à 06h00, modifié le 05 février 2025 à 18h42 Histoire« La saga des Al-Assad » (1/4). Né d’un grand mouvement modernisateur et socialiste, le parti Baas est devenu l’instrument de la prise de pouvoir d’un clan qui a régné sur la Syrie de 1970 à 2024. A qui la faute ? A qui la paternité de la naissance d’une des dictatures les plus implacables de l’histoire moderne ? Quel a été le moteur des Al-Assad, père puis fils, qui ont régné sur la Syrie de 1970 à décembre 2024, avant de chuter de manière précipitée : la revanche des alaouites, la paranoïa militaire ou l’intransigeance baassiste ? C’est bien le baassisme qui a été à l’origine de tout : avant même d’embrasser la carrière des armes, avant de constituer une caste alaouite autour de lui, Hafez Al-Assad a été un baassiste convaincu. Sur le papier, rien ne vouait cette idéologie à la postérité totalitaire qu’elle a connue en Syrie comme en Irak, où elle est arrivée au pouvoir dans les années 1960, pour régner dans les années 1970-1980, avant de se dissoudre dans le culte de la personnalité et la prédation, à partir des années 1990 et 2000. Comme le raconte le journaliste spécialiste du Proche-Orient Xavier Baron, dans Histoire de la Syrie. De 1918 à nos jours (Tallandier, 2014, réédité en janvier, 432 pages, 11 euros), « à l’origine du Baas se trouvent trois Syriens : un père spirituel, Zaki Al-Arsouzi, et deux fondateurs, Michel Aflak, chrétien grec-orthodoxe né à Damas, en 1910, et Salah Eddine Bitar, sunnite né en 1912, également à Damas. Zaki Al-Arsouzi est un Alaouite né à Lattaquié, en 1901, mais qui a passé son enfance à Alexandrette ». Les trois hommes ont étudié à la Sorbonne, à Paris, où Aflak et Bitar se sont liés d’amitié, au début des années 1930. Comme le Vietnamien Ho Chi Minh ou le Cambodgien Pol Pot, leur séjour dans la capitale française a été déterminant dans leur formation intellectuelle. Mais qu’est-ce donc que le baassisme ? Tout comme les Frères musulmans, les idéologues du baassisme partent du constat de la décadence du monde arabe, occupé par les puissances européennes au sortir de la première guerre mondiale. Mais, pour eux, la « renaissance » (baas ou baath en arabe translittéré) passe par la formation d’une seule nation arabe, unie par la langue, la culture et une forme de laïcité, du moins un rapport culturel plus que confessionnel à la religion dominante, en l’occurrence l’islam. Cette dernière caractéristique avait tout pour séduire les minorités confessionnelles (chrétiens, druzes chiites, alaouites, etc.), en butte à l’écrasante majorité musulmane sunnite. Tâches subalternes Le baassisme prône la libération nationale, l’unité et le socialisme. Pour lui, le nationalisme arabe révolutionnaire passe avant la lutte des classes. Appliquée par des régimes militaires autoritaires, cette volonté d’unanimisme social et national a viré au totalitarisme. La date de naissance effective du parti en Syrie remonte à 1939, mais il ne sera officiel qu’après l’indépendance, en 1946. Le mouvement, qui tient son premier congrès l’année suivante, connaît deux échelons : l’un national, qui englobe tout le monde arabe, et l’autre régional, qui désigne les branches nationales, dont la Syrie. Hafez Al-Assad y adhère dès les années 1950, à la sortie du lycée. Ce grand échalas au front démesuré est né à Qardaha, dans la montagne alaouite, en 1930. Ses jeunes années sont marquées par le mandat français et la difficile lutte pour accéder à l’indépendance, finalement accordée le 3 juin 1944, mais véritablement effective en avril 1946, après un dernier baroud français, qui a consisté à bombarder le centre de Damas à l’artillerie lourde fin mai 1945. Paradoxalement, il appartient à cette génération de jeunes Alaouites ayant profité du mandat français pour intégrer la carrière des armes, voie la plus rapide pour l’ascension sociale de la communauté la plus pauvre et la plus méprisée de Syrie, à commencer par la majorité sunnite, qui ne voit qu’une hérésie dans ce chiisme militant. Jeune officier, Hafez Al-Assad observe avec gourmandise la suite de coups d’Etat émailler la vie politique syrienne, dès la naissance de la jeune République arabe. Au trio des fondateurs du baassisme va succéder un autre trio, formé de militaires : Mohamed Omrane, le plus âgé, né en 1920, Salah Jadid, né en 1926, et, enfin, le plus jeune, Hafez Al-Assad. Ils sont tous trois Alaouites et ambitieux, marqués par la défaite de l’armée syrienne face à Israël, en 1948. Tous trois, aussi, sont relativement réfractaires à l’union entre la Syrie et l’Egypte, décrétée sous la pression des foules, après la nationalisation du canal de Suez, en 1956, et l’équipée militaire franco-britannico-israélienne mise en échec par l’intervention conjointe des grandes puissances américaine et soviétique. Cette victoire politique avait propulsé le leader panarabe égyptien Gamal Abdel Nasser vers des sommets de popularité. Dans la foulée de la proclamation de la République arabe unie (RAU), en 1958, des officiers baassistes sont envoyés en Egypte, pour être surveillés de plus près. Hafez Al-Assad en fait partie. On leur confie des tâches subalternes. Le trio Omrane-Jadid-Assad s’ennuie et complote avec d’autres, dans le plus grand secret, en vue d’une sécession. En 1961, la RAU est dissoute, la voie est libre pour prendre le pouvoir. C’est chose faite le 8 mars 1963. Des automitrailleuses prennent le contrôle des carrefours stratégiques de Damas pour mener le dixième coup d’Etat depuis l’indépendance. Les militaires appellent les dirigeants du parti Baas à former un gouvernement. L’état d’urgence est immédiatement instauré. Il ne sera plus levé avant 2011… Un mois plus tôt, jour pour jour, le parti Baas s’était emparé du pouvoir à Bagdad, en Irak. « Une nouvelle ère s’annonce. En quelques semaines, le régime parlementaire est relégué dans un passé qui semble révolu en Syrie, écrit le chercheur Matthieu Rey dans Histoire de la Syrie. XIXe-XXIe siècle (Fayard, 2018). Les officiers ne quittent plus le pouvoir, sans que le rythme des coups d’Etat décroisse. Un âge nouveau advient, comme dans la plupart des pays de la région. (…). L’heure est à la révolution, selon les termes des acteurs qui chantent les vertus de la thawra (“révolution”). » L’ère des militaires à moustache Certes, des civils occupent les postes de pouvoir officiels, mais en coulisse, c’est un triumvirat de militaires, formé d’Omrane, Jadid et Al-Assad, qui décide de tout. Dès l’été 1963, un coup d’Etat dans le coup d’Etat permet d’éliminer les officiers nassériens qui ont participé à la prise de pouvoir du Baas. Les combats dans les rues font des dizaines de morts. Dans cette nouvelle Syrie, l’usage de la violence en politique n’est plus un tabou. Autre nouveauté : les luttes politiques recouvrent bien souvent des conflits confessionnels. Le nouveau président de la République, Amine Hafez, un général sunnite en poste à partir de 1964, est vite en butte au trio alaouite qui contrôle les forces armées. Il s’appuie sur les dirigeants historiques du parti Baas, Aflak et Bitar, mais a du mal à contenir le zèle révolutionnaire de la branche régionale tenue par Jadid et Al-Assad. En janvier 1966, le premier ministre, Salah Eddine Bitar, soutenu par le président Hafez, tente de renvoyer les militaires dans leurs casernes mais le 23 février, l’aile dure du parti prend le pouvoir par les armes. Amine Hafez, mais aussi Michel Aflak et Salah Eddine Bitar, pourtant les fondateurs du Baas, sont emprisonnés. S’ouvre l’ère des militaires à moustache. « Ce fut la fin du Baas. A sa place, autre chose a été bâti. Un néo-Baas est né, et le Baas a été mis à mort », déplore Bitar, cité par Xavier Baron. Les écrits de Michel Aflak sont interdits dans les librairies de Damas. Les pères fondateurs se réfugient à Bagdad, en Irak, où règne aussi le parti Baas. « Il s’agit désormais d’établir qui est le plus qualifié pour orienter le baassisme, les néobaassistes de Damas ou les baassistes orthodoxes de Bagdad (…). Ainsi naît une rivalité implacable entre les frères ennemis baassistes, conflit d’autant plus total qu’il ravive tout un contentieux historique et culturel dont les racines remontent à la lutte entre les Omeyyades et les Abbassides » durant le premier siècle de l’islam, entre le VIIe et le VIIIe siècle de l’ère chrétienne, résume Xavier Baron. Ce nouveau coup de force, réalisé pour le compte du duo Jadid - Al-Assad par l’officier druze Salim Hatoum, ouvre la porte à une phase révolutionnaire « à la chinoise », qui voit la périphérie et les marges prendre leur revanche sur les centres urbains. Ce que le journaliste et essayiste libanais Edouard Saab résume dans la formule de « révolution dans la rancœur ». Les nationalisations et la réforme agraire s’accélèrent et, tout en mécontentant la bourgeoisie commerçante, assurent au régime le soutien des petits paysans, grands bénéficiaires du partage des terres. La réalisation du barrage de Tabqa sur l’Euphrate, à partir de 1965, avec l’aide de l’Union soviétique, symbolise l’ère de progrès que prétendent ouvrir les nouveaux maîtres du pays. Guerre feutrée Parallèlement, c’est à cette époque qu’émergent les différentes officines de renseignement (moukhabarat) qui prendront une place déterminante dans la vie quotidienne des Syriens lors des décennies suivantes. Une nouvelle épreuve de force permet l’élimination de la composante druze de la révolution néobaassiste : le colonel Hatoum, estimant les représentants de sa communauté mal récompensés, prend en otage Salah Jadid, dans le fief druze de Souweïda, en septembre 1966. Le ministre de la défense, Hafez Al-Assad, ne cède pas à l’ultimatum et envoie les chars encercler Souweïda. Hatoum plie et prend la fuite en Jordanie. Les Alaouites sont désormais seuls maîtres du jeu et une guerre feutrée va s’installer entre Salah Jadid et Hafez Al-Assad. Le premier s’appuie sur l’aile civile du Baas et As-Saïqa, la force milicienne palestinienne mise sur pied par Damas. Il prône une gauchisation du régime et estime que la victoire contre Israël passe par un approfondissement de la révolution. Le second s’appuie sur l’armée et représente une aile plus droitière ; il milite pour une pause dans les réformes. La rivalité entre les deux hommes est attisée par le contexte régional. En 1967, les alarmes syriennes sur une guerre imminente, que serait prêt à lancer Israël, poussent l’Egyptien Nasser à une escalade qui débouche sur la désastreuse guerre des Six-Jours. Entre les 5 et 10 juin, l’Egypte perd le Sinaï et Gaza, la Jordanie Jérusalem et la Cisjordanie. Quant à la Syrie, elle perd le plateau du Golan, réputé imprenable : les unités d’élite, au lieu de combattre, ont été gardées à Damas pour protéger le pouvoir. Durement mis en cause en tant que ministre de la défense, Hafez Al-Assad s’accroche. Mais il est mis en minorité à deux reprises par des congrès du Baas, en 1968 et 1969. Une nouvelle crise régionale lui donne l’occasion de se rétablir de manière spectaculaire. En 1970, lors des affrontements de Septembre noir, entre l’Organisation de libération de la Palestine de Yasser Arafat et l’armée jordanienne, Salah Jadid envoie une colonne blindée soutenir les fedayins palestiniens. Hafez Al-Assad, lui, refuse toute couverture aérienne. Les tanks syriens doivent piteusement rebrousser chemin. Le grand Gamal Abdel Nasser meurt quelques jours plus tard, laissant un grand vide à la tête du mouvement panarabe. Le moment est venu pour Hafez Al-Assad de se débarrasser du dernier obstacle. Mis en minorité une nouvelle fois et relevé de ses fonctions, ainsi que son compagnon d’études, le chef d’état-major Moustapha Tlass (sunnite), il réagit en faisant arrêter ses ennemis, le 13 novembre 1970. Trois jours plus tard, la radio annonce qu’une nouvelle direction du Baas a été mise en place pour mettre fin au « terrorisme intellectuel » et à la « dictature » de l’aile civile du parti, incarnée par Salah Jadid. Le lendemain, Hafez Al-Assad s’envole pour Le Caire, où il veut faire reconnaître son pouvoir par le successeur de Nasser, Anouar El-Sadate. Le 12 mars 1971, il est élu président de la République, avec 99,2 % des voix. Pour la première fois de son histoire, la Syrie a un président alaouite. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Patrick Posté(e) le 8 février Share Posté(e) le 8 février (modifié) Le 05/02/2025 à 18:11, Banzinou a dit : Pourquoi ai-je le sentiment qu'au-delà de l'énorme claque dans les dents faite à la russie, ce qui est certes très amusant, ça reste une mauvaise idée de s'impliquer là-bas de cette façon et surtout aussi tôt? Il y a 23 heures, rendbo a dit : Qu'on doive tous s'améliorer, nous y compris, est une certitude, et ça ne me dérange pas qu'on laisse sur les bancs les pays qui considèrent une femme moins qu'un chien... Je ne pense pas que cela soit sain de laisser s'installer des groupements de pensées qui, sur une revendication communautariste à l'américaine, voudraient instaurer chez nous une "minorité" de la femme, ça ne va pas dans le sens de l'histoire telle que je le conçois. Je t'invite donc à considérer les évolutions du statut de la femme chez l'ex-protecteur de la Syrie depuis quelques années, qui ne vont pas dans ton sens non plus... Modifié le 8 février par Patrick Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
fraisedesbois Posté(e) le 8 février Share Posté(e) le 8 février Il y a 1 heure, Patrick a dit : Pourquoi ai-je le sentiment qu'au-delà de l'énorme claque dans les dents faite à la russie, ce qui est certes très amusant, ça reste une mauvaise idée de s'impliquer là-bas de cette façon et surtout aussi tôt? (…) En fait, l’accord: fait suite à un accord signé en octobre 2024 entre le gouvernement syrien désormais renversé dirigé par Assad et la société française, dans lequel CMA CGM a obtenu un contrat de 30 ans. Le gouvernement syrien a renégocié son contrat avec le géant maritime français CMA-CGM ! [cit]: Lors d'une récente réunion entre l'Autorité générale des postes frontières terrestres et maritimes et CMA CGM, les deux parties - représentées par Qutaiba Badawi pour la Syrie et Joseph Dakkak pour la société française - ont convenu de régler les obligations financières en suspens et d'établir un nouveau cadre opérationnel. Cela fait suite à un accord signé en octobre 2024 entre le gouvernement syrien désormais renversé dirigé par Assad et la société française, dans lequel CMA CGM a obtenu un contrat de 30 ans, selon des sources qui nous ont parlé. Les nouvelles autorités syriennes et CMA CGM ont cherché à éliminer une clause qui aurait accordé à l'Iran une part des revenus du port. Avec @KShaar_Advisory , nous avons été les premiers à en rendre compte en Syrie en chiffres ( tinyurl.com/ydx8xueh ). Pour donner un peu de contexte, le port de Lattaquié sert de principale porte d'entrée maritime de la Syrie et a longtemps été un point de discorde. L'Iran avait auparavant cherché à prendre le contrôle du terminal international à conteneurs de Lattaquié (LICT) pour étendre sa présence en Méditerranée et sécuriser les bénéfices de son soutien au régime Assad. Cependant, malgré les liens étroits d'Assad avec l'Iran, le gouvernement syrien a toujours choisi de conserver la direction de CMA CGM. Cette décision a été influencée par : • Inquiétudes concernant d’éventuelles frappes aériennes israéliennes ciblant des opérations liées à l’Iran dans le port. • Le risque d’une escalade des sanctions occidentales si l’Iran prenait le contrôle. • La capacité de CMA CGM à opérer sous sanctions et à maintenir des liens commerciaux malgré le conflit. À l'époque, des documents divulgués suggèrent que même si l'Iran n'a pas obtenu le contrôle direct, il se pourrait qu'il ait obtenu une part des revenus du port dans le cadre de la stratégie de remboursement de la dette syrienne - quelque chose que les deux parties (la Syrie et la CMA-CGM) ont sûrement cherché à effacer lors de leurs négociations d'aujourd'hui. Malgré une baisse de 75 % de l'activité portuaire de Lattaquié depuis 2009, le pari de CMA-CGM en Syrie est judicieux. Les liens étroits de l'entreprise avec le gouvernement français et les origines de la famille Saadé à Lattaquié ont peut-être contribué à son intérêt soutenu tout au long du conflit, malgré les risques sécuritaires et économiques. Alors que la Syrie entre dans une nouvelle phase politique après la chute du régime Assad le 8 décembre 2024, le renouvellement du contrat de CMA CGM constitue une étape stratégique majeure. L'entreprise est bien positionnée pour bénéficier de la réintégration de la Syrie dans le commerce mondial et de sa reprise économique. Soyons clairs, la présence de CMA CGM à Lattaquié n’est PAS nouvelle. CMA CGM a commencé à exploiter le terminal international à conteneurs de Lattaquié (LICT) en 2009 dans le cadre d'un accord de joint-venture (contrat renouvelé trois fois depuis). Au départ, la société française détenait une participation minoritaire, mais en 2019, elle a obtenu une participation de 99 % lorsque le régime Assad a renouvelé le contrat pour cinq ans. En octobre 2024, le contrat a été à nouveau prolongé, permettant à CMA CGM de continuer à gérer le port malgré les sanctions occidentales, la concurrence iranienne et l’instabilité régionale. (Ce n’est pas non plus le résultat du retrait de la Russie de Syrie, comme j’ai pu le voir suggéré ailleurs… Au fait, la Russie opère à Tartous.) [/cit] 1 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Patrick Posté(e) le 8 février Share Posté(e) le 8 février il y a 29 minutes, fraisedesbois a dit : En fait, l’accord: fait suite à un accord signé en octobre 2024 entre le gouvernement syrien désormais renversé dirigé par Assad et la société française, dans lequel CMA CGM a obtenu un contrat de 30 ans. Le gouvernement syrien a renégocié son contrat avec le géant maritime français CMA-CGM ! [cit]: Lors d'une récente réunion entre l'Autorité générale des postes frontières terrestres et maritimes et CMA CGM, les deux parties - représentées par Qutaiba Badawi pour la Syrie et Joseph Dakkak pour la société française - ont convenu de régler les obligations financières en suspens et d'établir un nouveau cadre opérationnel. Cela fait suite à un accord signé en octobre 2024 entre le gouvernement syrien désormais renversé dirigé par Assad et la société française, dans lequel CMA CGM a obtenu un contrat de 30 ans, selon des sources qui nous ont parlé. Les nouvelles autorités syriennes et CMA CGM ont cherché à éliminer une clause qui aurait accordé à l'Iran une part des revenus du port. Et bien bravo aux gens derrière ce coup de génie, c'est du grand art. Réussir à revenir en Syrie sous assad déjà. Avec une clause compliquée à assumer, et que nous devions déjà être parmi les seuls à être prêts à signer, because Iran, le tout sans se faire attraper par la patrouille Américaine. Ensuite réussir à ne pas se faire chasser par les islamistes rien qu'en virant la clause favorisant cet Iran, probablement pour le plus grand réconfort de bon nombre de gens de par le monde... Alors soit on savait déjà qu'assad allait se faire dégager auquel cas c'est d'un cynisme fou et d'une violence froide assez rare, soit on a su s'adapter à la nouvelle réalité sans perdre ni la face ni de temps, et en se faisant respecter au passage. Quelle que soit la raison, je trouve la manœuvre absolument remarquable dans le sens qu'elle tranche radicalement avec ce à quoi notre diplomatie économique nous a habitués jusqu'ici. Mais on ne me fera pas non plus perdre de vue que ça correspond clairement à une façon d'évincer la russie d'un de ses prés carrés, avec des résultats finalement, tout considérés, bien plus dévastateurs pour les russes, que notre évincement de plusieurs pays d'Afrique ne l'a été pour nous... Du grand art. 3 1 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Ciders Posté(e) le 8 février Share Posté(e) le 8 février il y a une heure, Patrick a dit : Et bien bravo aux gens derrière ce coup de génie, c'est du grand art. Réussir à revenir en Syrie sous assad déjà. Avec une clause compliquée à assumer, et que nous devions déjà être parmi les seuls à être prêts à signer, because Iran, le tout sans se faire attraper par la patrouille Américaine. Ensuite réussir à ne pas se faire chasser par les islamistes rien qu'en virant la clause favorisant cet Iran, probablement pour le plus grand réconfort de bon nombre de gens de par le monde... Alors soit on savait déjà qu'assad allait se faire dégager auquel cas c'est d'un cynisme fou et d'une violence froide assez rare, soit on a su s'adapter à la nouvelle réalité sans perdre ni la face ni de temps, et en se faisant respecter au passage. Quelle que soit la raison, je trouve la manœuvre absolument remarquable dans le sens qu'elle tranche radicalement avec ce à quoi notre diplomatie économique nous a habitués jusqu'ici. Mais on ne me fera pas non plus perdre de vue que ça correspond clairement à une façon d'évincer la russie d'un de ses prés carrés, avec des résultats finalement, tout considérés, bien plus dévastateurs pour les russes, que notre évincement de plusieurs pays d'Afrique ne l'a été pour nous... Du grand art. Ne pas négliger que la famille Saadé a des attaches dans le coin, et pas qu'au Liban. On peut envisager qu'ils connaissent suffisamment la région, même en temps normal, pour rencontrer les bonnes personnes. Pour le reste, oui. Un bel accord qui arrange tout le monde (sauf peut-être le port de Beyrouth). 1 2 1 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
C’est un message populaire. Joab Posté(e) le 9 février C’est un message populaire. Share Posté(e) le 9 février On 2/8/2025 at 3:38 PM, Ciders said: Ne pas négliger que la famille Saadé a des attaches dans le coin, et pas qu'au Liban. On peut envisager qu'ils connaissent suffisamment la région, même en temps normal, pour rencontrer les bonnes personnes. Pour le reste, oui. Un bel accord qui arrange tout le monde (sauf peut-être le port de Beyrouth). La famille Saadé est originaire de Syrie, de Lattaquié plus précisément. Ils font partie des nombreuses familles chrétiennes orthodoxes syriennes aisées qui se sont installées au Liban quand la Syrie devenait de plus en plus socialistes. 1 2 3 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Polybe Posté(e) le 9 février Share Posté(e) le 9 février Le 08/02/2025 à 11:48, Patrick a dit : Pourquoi ai-je le sentiment qu'au-delà de l'énorme claque dans les dents faite à la russie, ce qui est certes très amusant, ça reste une mauvaise idée de s'impliquer là-bas de cette façon et surtout aussi tôt? Je t'invite donc à considérer les évolutions du statut de la femme chez l'ex-protecteur de la Syrie depuis quelques années, qui ne vont pas dans ton sens non plus... Qu'un groupe franco-libanais arrive premier ne devrait pas nous étonner...difficile d'avoir un meilleur carnet d'adresse que la famille Saadé dans la région ! Merde, grillé par @Ciders ! ^^ 2 1 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
olivier lsb Posté(e) le 9 février Share Posté(e) le 9 février Partie 2: l'Etat de barbarie. Le régime mis en place par le dirigeant après son coup d’Etat du 13 novembre 1970 n’a eu qu’un seul objectif : sa perpétuation, à n’importe quel prix. Reportage et rétrospective historique sur le pouvoir politique en Syrie, depuis le partie Bass jusqu'à la chute d'Assad. https://www.lemonde.fr/international/article/2025/02/05/la-saga-des-al-assad-2-4-retour-sur-la-naissance-d-un-etat-de-barbarie_6532290_3210.html Citation La Syrie d’Hafez Al-Assad, un « Etat de barbarie » Par Christophe Ayad et Gilles Paris Publié le 05 février 2025 à 06h00, modifié hier à 17h48 Histoire« La saga des Al-Assad » (2/4) . Le régime mis en place par le dirigeant après son coup d’Etat du 13 novembre 1970 n’a eu qu’un seul objectif : sa perpétuation, à n’importe quel prix. Hiver 1986, à Beyrouth. Un homme émacié agonise dans une cellule sommaire de la banlieue sud où il est retenu en otage. Malade d’un cancer, il ne survivra pas à ses conditions de captivité. Il s’appelle Michel Seurat, il est sociologue et arabisant. Il a 38 ans. Ses ravisseurs se cachent sous l’appellation « Jihad islamique ». Il s’agit en fait d’un prête-nom du Hezbollah, une milice chiite libanaise pro-iranienne protégée par la Syrie, formée en 1982 et officiellement née en 1985. Marie Seurat, l’épouse de l’orientaliste Michel Seurat, à Beyrouth, au Liban, le 21 novembre 1985. BERNARD BISSON / SYGMA VIA GETTY IMAGES Michel Seurat a été enlevé dans le cadre d’un chantage politico-financier entre la France et l’Iran. Mais ses geôliers sont particulièrement durs avec lui. Est-ce à la demande des dirigeants syriens, qui entretiennent des liens étroits avec le Hezbollah ? C’est fort possible, car ce jeune chercheur est celui qui a, le premier, compris la nature profonde du régime mis en place par Hafez Al-Assad (1930-2000) à partir de 1970. Il a inventé une formule qui fait mouche, dans un article pour la revue Esprit devenu le titre d’un recueil du même nom publié par la suite : Syrie. L’Etat de barbarie (PUF, 2012). Ce n’est pas prendre le pouvoir qui est le plus compliqué dans la Syrie postindépendance, c’est le conserver. Pour cela, Hafez Al-Assad va mettre en place un pouvoir absolument redoutable et machiavélique, aussi brutal que sophistiqué. Mais, avant d’y parvenir, il a fallu qu’il affermisse son assise. Délation et surveillance Aussitôt après le coup d’Etat du 13 novembre 1970 contre son ex-compère du parti Baas, Salah Jadid (1926-1993), Hafez Al-Assad lance un « mouvement correctif » qui marque une pause dans la révolution. Le Baas abandonne la ligne quasi communiste de Jadid et sa doctrine d’exportation de la révolution. Copiée de l’infléchissement donné par l’Egyptien Anouar El-Sadate (1918-1981) au nassérisme, la nouvelle doctrine d’Al-Assad met l’accent sur le nationalisme syrien, la guerre contre Israël et le nécessaire développement de l’armée grâce à l’aide soviétique. Salah Jadid est enfermé à la prison de Mazzeh, à Damas. Il mourra à l’hôpital Tichrine, en 1993, après vingt-trois ans de captivité. Des mesures de libéralisation économique visent à recueillir le soutien de la bourgeoisie commerçante urbaine, durement frappée par les nationalisations. Afin d’élargir la base de son pouvoir et de donner une illusion de pluralisme, un Front national progressiste, dont le Baas reste l’élément central, est formé en 1972 afin de rallier les communistes et autres nationalistes arabes. La Constitution de mars 1973 consacre, dans son article 8, la prééminence du parti Baas, « dirigeant de la société et de l’Etat ». C’est cet article et la permanence de l’état d’urgence que les manifestants du printemps 2011 contesteront en tout premier lieu. Le parti Baas, symbole d’une ère honnie, sera tout simplement interdit par les tombeurs de la dynastie Al-Assad, le 29 janvier. Mais, sous des apparences d’apaisement et d’élargissement des libertés publiques, se met en place un système sophistiqué de délation et de surveillance. Ceux qui menacent le régime sont impitoyablement arrêtés ou assassinés, comme Mohamed Omrane, né en 1920, l’ancien compagnon de route alaouite, qui est tué au Liban, en 1972, probablement parce qu’il envisageait de revenir en Syrie. Les milices et services de renseignement, tenus par des fidèles, montent en puissance, en particulier les renseignements de l’armée de l’air − le corps d’origine de Hafez Al-Assad −, les Brigades de défense dirigées par le frère cadet du président, Rifaat Al-Assad, ou encore les Forces spéciales du général alaouite Ali Haydar (1932-2022). Le ministère de la défense est tenu par un sunnite, l’inamovible Moustapha Tlass, ami de promotion de Hafez Al-Assad à l’académie militaire. Le secrétaire général du comité central du Parti communiste, Leonid Brejnev (à gauche), rencontre la délégation syrienne, présidée par Hafez Al-Assad (à droite), à Moscou, le 19 février 1971. AFP Mais il manque, pour pérenniser le pouvoir de Hafez Al-Assad, une victoire militaire contre Israël. En octobre 1973, c’est chose faite : alors que les troupes égyptiennes prennent pied au Sinaï, l’armée syrienne affronte son ennemie israélienne sur le plateau du Golan. Les lignes de défense israéliennes ploient dangereusement avant que les tanks de l’Etat hébreu ne reprennent le dessus au terme de la plus grande bataille de chars depuis 1945. Mais Kuneitra a été brièvement reprise et l’honneur de la Syrie est lavé, malgré la percée israélienne vers Damas, stoppée par la menace d’intervenir de l’Union soviétique. Cette défaite honorable, qui conforte tant Al-Assad qu’El-Sadate, ouvre la porte à des négociations entre l’Egypte et Israël. Mais la Syrie, elle, refuse tout processus de paix et cherche à s’imposer comme la cheffe de file du front du refus. Stratégie vaine au Liban A peine Hafez Al-Assad a-t-il surmonté la fatalité des putschs à répétition que les épreuves s’enchaînent, tant à l’extérieur qu’à l’intérieur du pays. Aux portes de la Syrie, la guerre civile éclate au Liban en avril 1975. Le dossier est complexe du fait de la mosaïque confessionnelle libanaise, composée de chrétiens, de sunnites et de chiites, et du poids pris par l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), qui y a trouvé refuge après son éviction de Jordanie lors des événements de Septembre noir, en 1970. Il est aussi particulièrement sensible pour Damas parce que les nationalistes syriens les plus radicaux ont toujours considéré que le pays du Cèdre, vu comme une création artificielle, appartient, selon eux, à une Grande Syrie morcelée par les empires coloniaux. L’armée syrienne intervient, dès 1976, dans la guerre civile libanaise, qui oppose un camp « palestino-progressiste », dont Hafez Al-Assad est idéologiquement proche, aux phalangistes chrétiens. Pourtant, il s’agit de soutenir ces derniers, en mauvaise posture. Damas justifie ce paradoxe en assurant officiellement vouloir éviter l’enkystement d’un conflit qui fragilise l’unité arabe et qui sert les intérêts israéliens en détournant l’OLP de sa mission première. La Syrie s’inquiète aussi de la radicalisation des clivages communautaires, dont elle redoute la reproduction sur son territoire. En juin 1982, le rapprochement entre le camp chrétien et Israël montre pourtant la vanité de la stratégie syrienne. Lors de l’invasion du pays du Cèdre par l’armée israélienne, les troupes syriennes n’ont d’autre choix qu’un repli piteux. L’année suivante, la tentative de Hafez Al-Assad de mettre sous tutelle l’OLP débouche sur un affrontement sanglant qui ternit l’image du président syrien. A l’usure, ce dernier finit par rétablir son influence au Liban en parvenant, notamment, à faire échouer un rapprochement entre Israël et le président chrétien libanais Amine Gemayel, mais au prix d’une débauche d’énergie. Les forces syriennes entrent dans Beyrouth, le 25 février 1987. KARA / SIPA A l’intérieur de la Syrie émerge une opposition qui menace la survie même du régime. Il s’agit du défi lancé par l’aile militaire de l’organisation des Frères musulmans, à la jonction d’une frustration sociale née de l’immobilisme économique et d’un ressentiment d’ordre communautaire face à la place prise par les alaouites au sein de l’appareil d’Etat, dans le sillage du président. L’insurrection islamiste, qui débute avec l’assassinat de dizaines de cadets alaouites à l’académie militaire d’Alep, le 16 juin 1979, survient entre la Révolution islamique iranienne, en février, et la brève prise, en novembre, de la grande mosquée de La Mecque par un commando d’islamistes fondamentalistes sunnites. L’affront d’Alep pousse le régime à dénoncer un « complot impérialiste », Damas ayant condamné les accords de Camp David conclus près d’un an plus tôt entre le président égyptien, Anouar El-Sadate, et le premier ministre nationaliste israélien, Menahem Begin (1913-1992), qui brisent l’unité arabe face à Israël. La direction syrienne met également en cause, non sans raison, le jeu du grand rival baassiste irakien et des services jordaniens, accusés de soutenir en sous-main les islamistes syriens. Représailles massives contre les Frères musulmans Les attentats et les assassinats de cadres du régime se multiplient. Un attentat manqué contre Hafez Al-Assad, le 26 juin 1980, qui donne la mesure des capacités d’infiltration des Frères musulmans dans l’appareil sécuritaire, est suivi de représailles sanglantes dans la prison de Palmyre, où des centaines de prisonniers politiques (entre 500 et 1 000 selon les estimations), majoritairement islamistes, sont massacrés par des membres des Brigades de défense de Rifaat Al-Assad. Le vote d’une loi rend la simple appartenance aux Frères musulmans passible de la peine de mort. Les violences, pourtant, ne baissent pas en intensité. Les Frères musulmans se dotent d’une direction unifiée et l’insurrection s’appuie sur la détermination de plusieurs milliers de jeunes Syriens, majoritairement citadins et diplômés, qui se considèrent comme laissés-pour-compte du régime baassiste. En novembre 1981, un attentat à la bombe ravage un quartier de Damas. Trois mois plus tard, à Hama, la même politique de représailles massives conduite par le régime, cette fois-ci à l’échelle d’une ville, se déchaîne après une opération armée des Frères musulmans, le 3 février, qui y multiplient les assassinats de responsables du Baas tout en appelant au soulèvement du pays tout entier. Les principales forces militaires du régime sont alors mobilisées, les Brigades de défense, les Forces spéciales et les Brigades de combat. Dix jours après le début de l’insurrection, le régime reprend le contrôle de Hama, ou plutôt de ses ruines. Les bombardements et la reconquête des quartiers, maison par maison, propice à d’effroyables exactions, ont fait entre 10 000 et 40 000 morts, selon les estimations. Le pari des Frères musulmans, noyé dans le sang, est perdu. Aucune autre ville ne s’est soulevée. La répression a payé. Menacé par son frère La brusque hospitalisation de Hafez Al-Assad, le 13 novembre 1983, à la suite de problèmes cardiaques, provoque une onde de choc et une crise de régime, du fait de son omnipotence au sein du pouvoir. La menace vient cette fois-ci de son entourage le plus proche, en l’occurrence de son frère Rifaat, l’homme des basses œuvres répressives, mis en cause pour sa corruption notoire lors du 7e congrès du Baas, en décembre 1979. Comme l’écrit Caroline Donati dans son ouvrage L’Exception syrienne (La Découverte), publié en 2009, « la “crise de succession” révèle les faiblesses d’un régime bâti sur des hommes et non des institutions ». Elle met en effet en scène des forces militaires affiliées à des chefs de guerre, rangés dans deux camps séparés uniquement par leurs ambitions, qui déploient, en février 1984, leurs forces respectives à Damas dans un rapport de force inédit. La crise tourne cependant à l’avantage du président, qui parvient à conserver le soutien de caciques chargés des services de sécurité les plus stratégiques, dont les Forces spéciales dirigées par Ali Haydar, issu d’une grande famille alaouite, les Haddadin, mais aussi des figures sunnites du Baas, Abdel Halim Khaddam (1932-2002), et le chef d’état-major de l’armée régulière, Hikmat Al-Shihabi (1931-2013). Le président syrien Hafez Al-Assad (à droite) avec son frère Rifaat (à gauche), lors d’une cérémonie militaire, à Damas, en 1984. AFP PHOTO / HO La crise est dénouée pacifiquement. Rifaat Al-Assad est promu, le 11 mars 1984, vice-président aux côtés de deux loyalistes, dont Abdel Halim Khaddam. Ce poste, qui l’oblige à abandonner la tête des Brigades de défense, s’avère une coquille vide. Rifaat Al-Assad est poussé progressivement vers un exil durable en Europe, pendant que certains des officiers qui l’avaient suivi sont réaffectés à d’autres unités ou exfiltrés vers l’Union soviétique, et des cadres du Baas qui comptaient parmi ses proches sont marginalisés. La série d’épreuves affrontées par Hafez Al-Assad le pousse plus que jamais à asseoir son pouvoir sur un appareil de sécurité qui a fait ses preuves pendant l’insurrection islamiste, un appareil composé de services assez nombreux – on en a compté jusqu’à dix-sept – pour qu’ils puissent éventuellement se surveiller les uns les autres et se neutraliser. L’épisode Rifaat Al-Assad pousse également le maître de Damas à mettre en place les éléments d’une succession dont il choisit la nature dynastique en mettant sur les rangs son propre fils, Bassel, cavalier émérite, militaire de carrière et grand amateur de voitures de sport. 1 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
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