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La France entérine la construction de son porte-avions de nouvelle génération (PA-NG)

Vincent Groizeleau - 21/12/2025

 

 

 

 

 

 

 

Vue du futur porte-avions de nouvelle génération (PA-NG) de la Marine nationale.

Le dossier de lancement en réalisation (DLR) du successeur du porte-avions Charles de Gaulle a été signé cette semaine lors d’un comité ministériel d’investissement. Emmanuel Macron vient de le confirmer ce dimanche 21 décembre lors d'un discours aux forces armées aux Émirats Arabes Unis. Il s’agissait de l’ultime étape avant la concrétisation de ce programme majeur pour la Marine nationale et les forces armées françaises. Le PA-NG, qui sera réalisé à Saint-Nazaire par les Chantiers de l’Atlantique et Naval Group, doit entrer en service en 2038. Il s’agira de l’un des plus grands bâtiments de guerre au monde et du plus imposant jamais réalisé en Europe.

« C’est maintenant ou jamais », avait confié à Mer et Marine, l’été dernier, le directeur du programme PA-NG à la Direction Générale de l’Armement (DGA). Au terme de plusieurs années d’études et d’âpres discussions ces derniers mois entre le ministère des Armées et les industriels sur le plan financier, un accord a été trouvé, permettant d’aboutir, dans le calendrier fixé, à la signature du DLR avant la fin de cette année. L’État entérine ainsi la construction du porte-avions de nouvelle génération (PA-NG), pour lequel une autorisation d’engagement de 10.2 milliards d’euros avait été inscrite dans le projet de loi de finances 2025. La maîtrise d’œuvre de ce programme est assurée par Naval Group et les Chantiers de l’Atlantique, qui ont pour l’occasion créé une société commune, MO Porte-Avions (65% NG, 35% CA), ainsi que TechnicAtome pour la partie liée aux chaufferies nucléaires. 

Quatre ans d’études et de premiers achats de grands équipements déjà notifiées en 2024

Plusieurs milliards d’euros ont déjà été engagés dans ce programme, qui a débuté avec les études préliminaires visant à explorer toutes les options possibles - même les plus disruptives – quant à la succession du Charles de Gaulle. Puis, quand Emmanuel Marcon a choisi en décembre 2020 la solution d’un nouveau porte-avions à propulsion nucléaire, les études d’avant-projet ont été notifiées, d’abord l’avant-projet sommaire (mars 2021 – avril 2023) puis l’avant-projet détaillé (avril 2023 – juillet 2025). Parallèlement, certaines commandes critiques ont été effectuées, sans attendre la signature du DLR. Il s’agit des contrats pour les équipements à longs délais d’approvisionnement, qu’il fallait anticiper afin qu’ils soient disponibles au moment souhaité pour permettre une mise en service du PA-NG en 2038. Ainsi, dès avril 2024, le Commissariat à l’Énergie Atomique (CEA) et la DGA ont notifié à TechnicAtome la réalisation des principaux composants des deux chaufferies nucléaires du type K22 qui équiperont le bâtiment. 

Un navire à construire à Saint-Nazaire et de nouvelles infrastructures portuaires à édifier à Toulon

Maintenant que le DLR est signé, la commande du bâtiment en lui-même est entérinée et irréversible, ce qui autorise sa mise en chantier et la commande de grands équipements, comme les catapultes électromagnétiques EMALS et les brins d’arrêt AAG qui vont être fournis par le groupe américain General Atomics. Le DLR déclenche aussi les importants travaux d’adaptation des infrastructures de la base navale de Toulon, dans laquelle un nouveau pôle industrialo-portuaire comprenant une vaste cale sèche de plus de 360 mètres de long, ainsi que de nouveaux quais, ateliers et bâtiments va être édifié pour accueillir le PA-NG. Les travaux doivent débuter en 2026 en vue d’une livraison pour 2035. 

Une volonté politique indispensable

Décision politique majeure, la commande d’un nouveau porte-avions est un évènement qui n’était pas intervenu en France depuis quasiment 40 ans. C’était en février 1986, lorsque le président François Mitterrand et le premier ministre Laurent Fabius autorisèrent la construction du Charles de Gaulle. Lancer un tel programme nécessite en effet des ressources financières importantes, ainsi que des capacités industrielles et technologiques très rares, mais aussi une indispensable volonté politique. Ce qui a cette fois été le cas grâce à la détermination d’Emmanuel Macron et de Sébastien Lecornu, seul un tel tandem étant probablement, aujourd’hui, en mesure de faire aboutir ce projet dans un contexte budgétaire extrêmement compliqué. 

Préserver à long terme un outil politique et militaire unique

Cette décision va permettre à la France de demeurer dans la cour des plus grandes puissances navales, à une époque où la mer redevient un enjeu stratégique majeur à l’échelle mondiale (pour la sécurité des approvisionnements du pays comme celle d’infrastructures critiques tels les câbles de télécommunication et l’accès à de précieuses ressources naturelles). La construction du PA-NG va assurer jusqu’en 2080 la pérennité du groupe aéronaval français, outil militaire et diplomatique de premier plan dont uniquement une poignée de nations disposent dans le monde. À ce jour, seuls les États-Unis et la France ont des porte-avions nucléaires à catapultes, un club très restreint que la Chine a entrepris de rejoindre dans les années qui viennent. Et même si, à ce stade, aucun autre pays n’a les capacités technologiques et opérationnelles pour atteindre ce niveau, bien d’autres s’équipent de porte-avions ou porte-aéronefs moins complexes, à propulsion conventionnelle et tremplins par exemple, afin de développer une puissance aéronavale. C’est le cas du Royaume-Uni, de l’Inde, de la Turquie et du Japon. Une tendance ne va faire que s’accentuer avec le développement des drones embarqués. 

Le porte-avions, un outil toujours pertinent

80 ans après la fin de la seconde guerre mondiale, qui a consacré sa domination sur les mers au détriment des anciens cuirassés, le porte-avions, loin d’être devenu obsolète comme certains voudraient le faire croire, demeure un outil des plus pertinents, qui évolue avec son temps. Base aérienne mobile capable de franchir 1000 km par jour et de profiter de la liberté de naviguer dans les eaux internationales pour évoluer partout dans le monde et se positionner au plus près d’une zone crise, il offre une capacité de projection rapide à la fois unique et souveraine, ne nécessitant aucune autorisation de survol d’espace aériens étrangers pour rejoindre un théâtre d’opération. Au moment où la situation géostratégique se dégrade rapidement, que le droit international est bafoué par les plus grandes puissances et que les velléités d’expansion territoriales s’accroissent, le groupe aéronaval est par exemple un outil indispensable pour protéger les territoires ultramarins et dissuader de potentielles agressions. 

 

 

© Naval Group / Chantiers De L'atlantique / Technicatome

Vue d'un UCAV catapulté depuis le PA-NG. 

 

Drones embarqués 

Si rien n’est invulnérable, sa mobilité lui offre aussi une protection contre des attaques adverses, à la différence de bases aériennes terrestres aux positions fixes et connues de l’adversaire. Sachant que le porte-avions est bien entendu solidement défendu par sa chasse embarquée, des frégates de défense aérienne et de lutte anti-sous-marine, ainsi qu’un ou deux sous-marins nucléaires d’attaque, en plus de ses propres moyens d’autodéfense. Qui plus est, s’il est conçu pour la mise en œuvre d’avions pilotés, il sera amené, dans les années qui viennent, à embarquer de plus en plus de drones, qu’il s’agisse d’engins de surveillance comme d’appareils de combat, jusqu’à des drones furtifs de type UCAV (unmanned combat air vehicles) presqu’aussi massifs que les avions, qu’ils précèderont pour détecter et neutraliser les défenses ennemies. Des capacités qui verront le jour avec le standard F5 du Rafale, comprenant le développement d’UCAV qui embarqueront sur le PA-NG, nativement conçu pour des opérations de haute intensité conduites en réseau, avec des plateformes interconnectées s’appuyant sur des systèmes intelligents permettant de démultiplier les capacités de surveillance et les effets militaires. 

Un programme qui permettra de développer de nouvelles technologies

Ainsi, la France n’a pas seulement décidé de construire un nouveau porte-avions pour conserver, au-delà de 2038, un groupe aéronaval tel qu’on le connait aujourd’hui avec le Charles de Gaulle. Le programme PA-NG a aussi vocation à répondre à ces enjeux déterminants de la guerre du futur, en intégrant de nombreuses innovations et avec une forte évolutivité permettant d’ajouter les technologies qui apparaitront au fil du temps. L’une des principales avancées du PA-NG sera le développement d’un système de combat data-centré aboutissant à une véritable rupture technologique en matière de numérisation des systèmes, de guerre en réseau mais aussi d’acquisition et d'exploitation rapides de multiples données permettant d’acquérir une supériorité informationnelle, indispensable à la supériorité opérationnelle. Des progrès qui bénéficieront à toute la flotte et à l’ensemble des forces armées françaises. 

Pérenniser des compétences souveraines pour une activité qui concernera tout l’Hexagone

Permettant par ailleurs de pérenniser des compétences critiques chez nombre d’industriels français, de la filière nucléaire (le PA-NG va permettre de renouveler la quasi-totalité des compétences françaises en matière de conception et de fabrication de chaufferies embarquées et de propulsion nucléaire), à l’aviation de combat embarquée, ce programme va mobiliser, en plus de Naval Group, des Chantiers de l’Atlantique et de TechnicAtome, la plupart des grands groupes nationaux de défense, à commencer par Dassault Aviation, Thales, MBDA et Safran. Saint-Nazaire, où les premières tôles du bâtiment doivent être découpées en 2031, sera l’épicentre de ce projet hors-normes. Mais en réalité toutes les régions de l’Hexagone vont être concernées par l’activité générée par le futur porte-avions français, pour lequel 90% des développements et achats sont réalisés en France. Auprès de grands industriels, mais aussi d’une multitude d’autres entreprises. En tout, 500 fournisseurs vont être impliqués, dont environ 80% de PME. Le PA-NG va générer jusqu’à 5000 emplois. 

Un gabarit nettement supérieur à celui du Charles de Gaulle

D’une longueur de 310 mètres pour une largeur maximale de plus de 85 mètres au niveau du pont d’envol (39 mètres à la flottaison), le PA-NG affichera un déplacement de 78 000 tonnes à pleine charge. Un gabarit nettement plus important que celui du Charles de Gaulle, qui mesure 261 mètres de long pour 64 maximum de large (31 à la flottaison) et présente un déplacement de 42.500 tpc. D’une taille proche de celle des porte-avions américains, à l’image des dernières unités de la classe Gerald R. Ford (333 mètres, 100.000 tpc), le futur porte-avions français a été dimensionné pour accroître les capacités militaires dans une perspective de combats de haute intensité, avec un nombre de mouvements aériens plus important, conduits par de futurs aéronefs plus lourds et plus armés. Ce qui nécessite des installations aéronautiques plus grandes, mais aussi des soutes à munitions et des réserves de carburéacteurs plus volumineuses. L’accroissement de la taille par rapport au Charles de Gaulle tient aussi au fait que, contrairement à son aîné, le PA-NG pourra simultanément mener des manœuvres d’appontage et de cataputage. Enfin, le gabarit supérieur est lié au choix de la propulsion nucléaire, qui offre au porte-avions une autonomie bien plus importante qu’un bâtiment dotés de moteurs classiques. À cet effet, le futur porte-avions sera doté de deux nouvelles chaufferies du type K22, dont la puissance thermique unitaire sera de 220 MW, contre 150 MW pour les K15 du Charles de Gaulle. Ce qui permettra de propulser les 78.000 tonnes du bâtiment jusqu’à 27 nœuds. Cela, avec une nouvelle architecture basée sur une propulsion nucléaire- électrique (la vapeur produite par les chaufferies fera tourner des groupes turbo-alternateurs qui génèreront de l’énergie pour des usines électriques alimentant l’ensemble du navire). Le bâtiment sera équipé de trois hélices actionnées par autant de lignes trois lignes d’arbres reliées chacune à un moteur électrique de propulsion. 

2000 marins et au moins 40 aéronefs

Armé par 2000 militaires (1200 membres d’équipage, 500 personnels du groupe aérien embarqué, 200 spécialistes et un état-major de 100 personnes), le PA-NG pourra embarquer au moins 40 appareils, ses installations ayant été dimensionnées pour accueillir 36 aéronefs de combat (Rafale, NGF, UCAV), deux à trois avions de guet aérien E-2D Advanced Hawkeye, 5 à 6 hélicoptères et une dizaine de drones légers à voilure fixe ou tournante. Doté d’un pont d’envol de plus de 17.000 m² (contre 12.000 m² pour le Charles de Gaulle), le bâtiment disposera d’une piste oblique avec trois brins d’arrêt et une barrière de récupération d’urgence, ainsi que trois rails de catapultes (deux axiaux à l’avant et un sur la piste oblique). 

 

 

© Naval Group / Chantiers De L'atlantique / Technicatome

Le PA-NG. 

 

Une construction et de premiers essais qui s’étaleront de 2031 à 2035

Alors que les composants de ses chaufferies nucléaires sont déjà en cours de production, leur assemblage ainsi que la réalisation de l’appareil moteur allant être menés par le site Naval Group de Nantes-Indret, la découpe des premières tôles du bâtiment est prévue en 2031 à Saint-Nazaire. Les Chantiers de l’Atlantique, rôdés à la production de très grands paquebots, devraient assembler la coque en une douzaine de mois, avant de consacrer environ deux ans à son achèvement à flot, qui se déroulera au bassin C entre 2033 et 2034. Le porte-avions débutera ses essais en mer avec des diesels générateurs d’appoint, qui alimenteront sa propulsion électrique. Les réacteurs des chaufferies ne seront en effet chargés en combustible nucléaire qu’une fois le porte-avions arrivé à Toulon, ce qui est prévu en 2035. Il y poursuivra alors ses essais, la mise au point de son système de combat et la qualification des différents systèmes, ainsi que tous les aspects liés à l’aviation embarquée, en vue d’une mise en service prévue début 2038. 

 

 

© Bernard Biger - Chantiers De L'atlantique

Le site des Chantiers de l'Atlantique. 

 

La question de la permanence du groupe aéronaval

Normalement, le PA-NG doit, à cette date, remplacer le Charles de Gaulle. Toutefois, une étude va être conduite quant à la question de la permanence du groupe aéronaval français, perdue depuis que la France ne compte plus deux porte-avions, comme c’était le cas avec les anciens Clemenceau (1961-1997) et Foch (1963-2000). Il s’agit notamment de plancher sur la construction d’un second PA-NG, ou d’une solution complémentaire, par exemple des porte-drones ou éventuellement une alternative basée sur un porte-avions à propulsion conventionnelle ou doté de nouveaux réacteurs nucléaires modulaires (SMR). Dans le même temps, alors que la Marine nationale devra entre 2035 et 2038 disposer de deux équipages pour armer son actuel et son nouveau porte-avions, la possibilité de prolonger le Charles de Gaulle, en service depuis 2001, est envisagée. Cette option dépend de l’état de ses chaufferies nucléaires, qui seront minutieusement inspectées lors de son prochain (et normalement dernier) arrêt technique majeur, en 2027-2028. Un chantier au cours duquel les cœurs seront rechargés en combustible nucléaire (ces rechargements interviennent tous les 10 ans, à l’occasion des ATM). Sachant que cet arrêt technique comprendra aussi une importante modernisation du système de combat du bâtiment, qui va être doté du nouveau radar à panneaux fixes et antenne active Sea Fire, si ses réacteurs peuvent être techniquement prolongés, il serait intéressant d’effectuer un ultime rechargement en 2038 pour disposer du Charles de Gaulle 5 à 10 ans de plus. Le temps de réaliser une plateforme supplémentaire… 

Voir notre dossier complet sur le programme PA-NG

© Un article de la rédaction de Mer et Marine. Reproduction interdite sans consentement du ou des auteurs.

 

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La France entérine la construction de son porte-avions de nouvelle génération (PA-NG)
Vue du futur porte-avions de nouvelle génération (PA-NG) de la Marine nationale.
Le dossier de lancement en réalisation (DLR) du successeur du porte-avions Charles de Gaulle a été signé cette semaine lors d’un comité ministériel d’investissement. Emmanuel Macron vient de le confirmer ce dimanche 21 décembre lors d'un discours aux forces armées aux Émirats Arabes Unis. Il s’agissait de l’ultime étape avant la concrétisation de ce programme majeur pour la Marine nationale et les forces armées françaises. Le PA-NG, qui sera réalisé à Saint-Nazaire par les Chantiers de l’Atlantique et Naval Group, doit entrer en service en 2038. Il s’agira de l’un des plus grands bâtiments de guerre au monde et du plus imposant jamais réalisé en Europe.

« C’est maintenant ou jamais », avait confié à Mer et Marine, l’été dernier, le directeur du programme PA-NG à la Direction Générale de l’Armement (DGA). Au terme de plusieurs années d’études et d’âpres discussions ces derniers mois entre le ministère des Armées et les industriels sur le plan financier, un accord a été trouvé, permettant d’aboutir, dans le calendrier fixé, à la signature du DLR avant la fin de cette année. L’État entérine ainsi la construction du porte-avions de nouvelle génération (PA-NG), pour lequel une autorisation d’engagement de 10.2 milliards d’euros avait été inscrite dans le projet de loi de finances 2025. La maîtrise d’œuvre de ce programme est assurée par Naval Group et les Chantiers de l’Atlantique, qui ont pour l’occasion créé une société commune, MO Porte-Avions (65% NG, 35% CA), ainsi que TechnicAtome pour la partie liée aux chaufferies nucléaires.

Quatre ans d’études et de premiers achats de grands équipements déjà notifiées en 2024

Plusieurs milliards d’euros ont déjà été engagés dans ce programme, qui a débuté avec les études préliminaires visant à explorer toutes les options possibles - même les plus disruptives – quant à la succession du Charles de Gaulle. Puis, quand Emmanuel Marcon a choisi en décembre 2020 la solution d’un nouveau porte-avions à propulsion nucléaire, les études d’avant-projet ont été notifiées, d’abord l’avant-projet sommaire (mars 2021 – avril 2023) puis l’avant-projet détaillé (avril 2023 – juillet 2025). Parallèlement, certaines commandes critiques ont été effectuées, sans attendre la signature du DLR. Il s’agit des contrats pour les équipements à longs délais d’approvisionnement, qu’il fallait anticiper afin qu’ils soient disponibles au moment souhaité pour permettre une mise en service du PA-NG en 2038. Ainsi, dès avril 2024, le Commissariat à l’Énergie Atomique (CEA) et la DGA ont notifié à TechnicAtome la réalisation des principaux composants des deux chaufferies nucléaires du type K22 qui équiperont le bâtiment.

Un navire à construire à Saint-Nazaire et de nouvelles infrastructures portuaires à édifier à Toulon

Maintenant que le DLR est signé, la commande du bâtiment en lui-même est entérinée et irréversible, ce qui autorise sa mise en chantier et la commande de grands équipements, comme les catapultes électromagnétiques EMALS et les brins d’arrêt AAG qui vont être fournis par le groupe américain General Atomics. Le DLR déclenche aussi les importants travaux d’adaptation des infrastructures de la base navale de Toulon, dans laquelle un nouveau pôle industrialo-portuaire comprenant une vaste cale sèche de plus de 360 mètres de long, ainsi que de nouveaux quais, ateliers et bâtiments va être édifié pour accueillir le PA-NG. Les travaux doivent débuter en 2026 en vue d’une livraison pour 2035.

Une volonté politique indispensable

Décision politique majeure, la commande d’un nouveau porte-avions est un évènement qui n’était pas intervenu en France depuis quasiment 40 ans. C’était en février 1986, lorsque le président François Mitterrand et le premier ministre Laurent Fabius autorisèrent la construction du Charles de Gaulle. Lancer un tel programme nécessite en effet des ressources financières importantes, ainsi que des capacités industrielles et technologiques très rares, mais aussi une indispensable volonté politique. Ce qui a cette fois été le cas grâce à la détermination d’Emmanuel Macron et de Sébastien Lecornu, seul un tel tandem étant probablement, aujourd’hui, en mesure de faire aboutir ce projet dans un contexte budgétaire extrêmement compliqué.

Préserver à long terme un outil politique et militaire unique

Cette décision va permettre à la France de demeurer dans la cour des plus grandes puissances navales, à une époque où la mer redevient un enjeu stratégique majeur à l’échelle mondiale (pour la sécurité des approvisionnements du pays comme celle d’infrastructures critiques tels les câbles de télécommunication et l’accès à de précieuses ressources naturelles). La construction du PA-NG va assurer jusqu’en 2080 la pérennité du groupe aéronaval français, outil militaire et diplomatique de premier plan dont uniquement une poignée de nations disposent dans le monde. À ce jour, seuls les États-Unis et la France ont des porte-avions nucléaires à catapultes, un club très restreint que la Chine a entrepris de rejoindre dans les années qui viennent. Et même si, à ce stade, aucun autre pays n’a les capacités technologiques et opérationnelles pour atteindre ce niveau, bien d’autres s’équipent de porte-avions ou porte-aéronefs moins complexes, à propulsion conventionnelle et tremplins par exemple, afin de développer une puissance aéronavale. C’est le cas du Royaume-Uni, de l’Inde, de la Turquie et du Japon. Une tendance ne va faire que s’accentuer avec le développement des drones embarqués.

Le porte-avions, un outil toujours pertinent

80 ans après la fin de la seconde guerre mondiale, qui a consacré sa domination sur les mers au détriment des anciens cuirassés, le porte-avions, loin d’être devenu obsolète comme certains voudraient le faire croire, demeure un outil des plus pertinents, qui évolue avec son temps. Base aérienne mobile capable de franchir 1000 km par jour et de profiter de la liberté de naviguer dans les eaux internationales pour évoluer partout dans le monde et se positionner au plus près d’une zone crise, il offre une capacité de projection rapide à la fois unique et souveraine, ne nécessitant aucune autorisation de survol d’espace aériens étrangers pour rejoindre un théâtre d’opération. Au moment où la situation géostratégique se dégrade rapidement, que le droit international est bafoué par les plus grandes puissances et que les velléités d’expansion territoriales s’accroissent, le groupe aéronaval est par exemple un outil indispensable pour protéger les territoires ultramarins et dissuader de potentielles agressions.

Drones embarqués 

Si rien n’est invulnérable, sa mobilité lui offre aussi une protection contre des attaques adverses, à la différence de bases aériennes terrestres aux positions fixes et connues de l’adversaire. Sachant que le porte-avions est bien entendu solidement défendu par sa chasse embarquée, des frégates de défense aérienne et de lutte anti-sous-marine, ainsi qu’un ou deux sous-marins nucléaires d’attaque, en plus de ses propres moyens d’autodéfense. Qui plus est, s’il est conçu pour la mise en œuvre d’avions pilotés, il sera amené, dans les années qui viennent, à embarquer de plus en plus de drones, qu’il s’agisse d’engins de surveillance comme d’appareils de combat, jusqu’à des drones furtifs de type UCAV (unmanned combat air vehicles) presqu’aussi massifs que les avions, qu’ils précèderont pour détecter et neutraliser les défenses ennemies. Des capacités qui verront le jour avec le standard F5 du Rafale, comprenant le développement d’UCAV qui embarqueront sur le PA-NG, nativement conçu pour des opérations de haute intensité conduites en réseau, avec des plateformes interconnectées s’appuyant sur des systèmes intelligents permettant de démultiplier les capacités de surveillance et les effets militaires.

Un programme qui permettra de développer de nouvelles technologies

Ainsi, la France n’a pas seulement décidé de construire un nouveau porte-avions pour conserver, au-delà de 2038, un groupe aéronaval tel qu’on le connait aujourd’hui avec le Charles de Gaulle. Le programme PA-NG a aussi vocation à répondre à ces enjeux déterminants de la guerre du futur, en intégrant de nombreuses innovations et avec une forte évolutivité permettant d’ajouter les technologies qui apparaitront au fil du temps. L’une des principales avancées du PA-NG sera le développement d’un système de combat data-centré aboutissant à une véritable rupture technologique en matière de numérisation des systèmes, de guerre en réseau mais aussi d’acquisition et d'exploitation rapides de multiples données permettant d’acquérir une supériorité informationnelle, indispensable à la supériorité opérationnelle. Des progrès qui bénéficieront à toute la flotte et à l’ensemble des forces armées françaises.

Pérenniser des compétences souveraines pour une activité qui concernera tout l’Hexagone

Permettant par ailleurs de pérenniser des compétences critiques chez nombre d’industriels français, de la filière nucléaire (le PA-NG va permettre de renouveler la quasi-totalité des compétences françaises en matière de conception et de fabrication de chaufferies embarquées et de propulsion nucléaire), à l’aviation de combat embarquée, ce programme va mobiliser, en plus de Naval Group, des Chantiers de l’Atlantique et de TechnicAtome, la plupart des grands groupes nationaux de défense, à commencer par Dassault Aviation, Thales, MBDA et Safran. Saint-Nazaire, où les premières tôles du bâtiment doivent être découpées en 2031, sera l’épicentre de ce projet hors-normes. Mais en réalité toutes les régions de l’Hexagone vont être concernées par l’activité générée par le futur porte-avions français, pour lequel 90% des développements et achats sont réalisés en France. Auprès de grands industriels, mais aussi d’une multitude d’autres entreprises. En tout, 500 fournisseurs vont être impliqués, dont environ 80% de PME. Le PA-NG va générer jusqu’à 5000 emplois.

Un gabarit nettement supérieur à celui du Charles de Gaulle

D’une longueur de 310 mètres pour une largeur maximale de plus de 85 mètres au niveau du pont d’envol (39 mètres à la flottaison), le PA-NG affichera un déplacement de 78 000 tonnes à pleine charge. Un gabarit nettement plus important que celui du Charles de Gaulle, qui mesure 261 mètres de long pour 64 maximum de large (31 à la flottaison) et présente un déplacement de 42.500 tpc. D’une taille proche de celle des porte-avions américains, à l’image des dernières unités de la classe Gerald R. Ford (333 mètres, 100.000 tpc), le futur porte-avions français a été dimensionné pour accroître les capacités militaires dans une perspective de combats de haute intensité, avec un nombre de mouvements aériens plus important, conduits par de futurs aéronefs plus lourds et plus armés. Ce qui nécessite des installations aéronautiques plus grandes, mais aussi des soutes à munitions et des réserves de carburéacteurs plus volumineuses. L’accroissement de la taille par rapport au Charles de Gaulle tient aussi au fait que, contrairement à son aîné, le PA-NG pourra simultanément mener des manœuvres d’appontage et de cataputage. Enfin, le gabarit supérieur est lié au choix de la propulsion nucléaire, qui offre au porte-avions une autonomie bien plus importante qu’un bâtiment dotés de moteurs classiques. À cet effet, le futur porte-avions sera doté de deux nouvelles chaufferies du type K22, dont la puissance thermique unitaire sera de 220 MW, contre 150 MW pour les K15 du Charles de Gaulle. Ce qui permettra de propulser les 78.000 tonnes du bâtiment jusqu’à 27 nœuds. Cela, avec une nouvelle architecture basée sur une propulsion nucléaire- électrique (la vapeur produite par les chaufferies fera tourner des groupes turbo-alternateurs qui génèreront de l’énergie pour des usines électriques alimentant l’ensemble du navire). Le bâtiment sera équipé de trois hélices actionnées par autant de lignes trois lignes d’arbres reliées chacune à un moteur électrique de propulsion. 

2000 marins et au moins 40 aéronefs

Armé par 2000 militaires (1200 membres d’équipage, 500 personnels du groupe aérien embarqué, 200 spécialistes et un état-major de 100 personnes), le PA-NG pourra embarquer au moins 40 appareils, ses installations ayant été dimensionnées pour accueillir 36 aéronefs de combat (Rafale, NGF, UCAV), deux à trois avions de guet aérien E-2D Advanced Hawkeye, 5 à 6 hélicoptères et une dizaine de drones légers à voilure fixe ou tournante. Doté d’un pont d’envol de plus de 17.000 m² (contre 12.000 m² pour le Charles de Gaulle), le bâtiment disposera d’une piste oblique avec trois brins d’arrêt et une barrière de récupération d’urgence, ainsi que trois rails de catapultes (deux axiaux à l’avant et un sur la piste oblique). 

Une construction et de premiers essais qui s’étaleront de 2031 à 2035

Alors que les composants de ses chaufferies nucléaires sont déjà en cours de production, leur assemblage ainsi que la réalisation de l’appareil moteur allant être menés par le site Naval Group de Nantes-Indret, la découpe des premières tôles du bâtiment est prévue en 2031 à Saint-Nazaire. Les Chantiers de l’Atlantique, rôdés à la production de très grands paquebots, devraient assembler la coque en une douzaine de mois, avant de consacrer environ deux ans à son achèvement à flot, qui se déroulera au bassin C entre 2033 et 2034. Le porte-avions débutera ses essais en mer avec des diesels générateurs d’appoint, qui alimenteront sa propulsion électrique. Les réacteurs des chaufferies ne seront en effet chargés en combustible nucléaire qu’une fois le porte-avions arrivé à Toulon, ce qui est prévu en 2035. Il y poursuivra alors ses essais, la mise au point de son système de combat et la qualification des différents systèmes, ainsi que tous les aspects liés à l’aviation embarquée, en vue d’une mise en service prévue début 2038.

La question de la permanence du groupe aéronaval

Normalement, le PA-NG doit, à cette date, remplacer le Charles de Gaulle. Toutefois, une étude va être conduite quant à la question de la permanence du groupe aéronaval français, perdue depuis que la France ne compte plus deux porte-avions, comme c’était le cas avec les anciens Clemenceau (1961-1997) et Foch (1963-2000). Il s’agit notamment de plancher sur la construction d’un second PA-NG, ou d’une solution complémentaire, par exemple des porte-drones ou éventuellement une alternative basée sur un porte-avions à propulsion conventionnelle ou doté de nouveaux réacteurs nucléaires modulaires (SMR). Dans le même temps, alors que la Marine nationale devra entre 2035 et 2038 disposer de deux équipages pour armer son actuel et son nouveau porte-avions, la possibilité de prolonger le Charles de Gaulle, en service depuis 2001, est envisagée. Cette option dépend de l’état de ses chaufferies nucléaires, qui seront minutieusement inspectées lors de son prochain (et normalement dernier) arrêt technique majeur, en 2027-2028. Un chantier au cours duquel les cœurs seront rechargés en combustible nucléaire (ces rechargements interviennent tous les 10 ans, à l’occasion des ATM). Sachant que cet arrêt technique comprendra aussi une importante modernisation du système de combat du bâtiment, qui va être doté du nouveau radar à panneaux fixes et antenne active Sea Fire, si ses réacteurs peuvent être techniquement prolongés, il serait intéressant d’effectuer un ultime rechargement en 2038 pour disposer du Charles de Gaulle 5 à 10 ans de plus. Le temps de réaliser une plateforme supplémentaire… 

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