nemo Posté(e) le 20 septembre Share Posté(e) le 20 septembre Il y a 7 heures, Ciders a dit : L'autarcie oui, tant que Washington paie les factures et fournit gratuitement les armes. Ça plus l'exploitation des terres palestiniennes (et des survivants), plus quelques contrats de ventes d'armes. Mais ça ne suffira peut-être pas. Une autarcie qui n'en est pas une donc. Mais on sait tous que les US seront les derniers soutient des israéliens. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Ciders Posté(e) le 20 septembre Share Posté(e) le 20 septembre il y a une heure, nemo a dit : Une autarcie qui n'en est pas une donc. Si le politique te le dit, c'est que c'est vrai. Non mais. Bon évidemment, s'ils font comme les Spartiates, ils seront obligés de se vendre aux Arabes Chinois Indiens Perses pour survivre mais bon, ça va, ça leur aura permis de battre Athènes et d'avoir une hégémonie de trente ans, ce n'est pas rien. 2 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
nemo Posté(e) le 20 septembre Share Posté(e) le 20 septembre Il y a 1 heure, Ciders a dit : Si le politique te le dit, c'est que c'est vrai. Non mais. Bon évidemment, s'ils font comme les Spartiates, ils seront obligés de se vendre aux Arabes Chinois Indiens Perses pour survivre mais bon, ça va, ça leur aura permis de battre Athènes et d'avoir une hégémonie de trente ans, ce n'est pas rien. tout va plus vite de nos jours. Et quand on voit l'évolution dans un sens (comparons avec 2006 par exemple) ça peut allez aussi vite voire plus vite dans l'autre. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
rendbo Posté(e) le 20 septembre Share Posté(e) le 20 septembre Les espagnols des fois... même un petit truc symbolique et rigolo on ne sait pas faire chez nous. Citation 2 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
loki Posté(e) le 21 septembre Auteur Share Posté(e) le 21 septembre Le 18/09/2025 à 14:59, loki a dit : Selon le site (pro-israélien) JINSA, il y a eu : - 57 missiles qui ont atteint les zones peuplées israéliennes (y compris pour des frappes sur des sites stratégiques, militaires ou ratées (zones vides)) - 201 missiles ont été interceptés par les systèmes Arrow (2 et surtout 3), Thaad, SM3 et de façon plus occasionnelles Fronde de David - 316 missiles auraient touchés des zones non peuplées sans tentative d'interceptions Les sites israéliens en tirent la conclusion que le taux d'interception est de l'ordre de 90% en considérant 57 frappes sur 574 missiles mais la méthodologie est douteuse car ils considèrent ainsi que la totalité des missiles visant les zones israéliennes non peuplées comme interceptés (sic) En fait le taux d'interception est de 78% si on prend les chiffres retraités (57/258) En taux brut, il est de 35% (201/574) Les iraniens revendiquent avoir franchi la défense israélienne avec un taux de réussite de 40% au début de la guerre porté à 90% lors des dernières frappes (des chiffres cohérents avec le taux brut observé). Ils revendiquent aussi avoir tiré beaucoup de missiles sur les bases aériennes et militaires israéliennes (probablement en grande partie des missiles Qadr S et H à tête "cluster"). L'université d'Oregon a fait un travail partiel sur lequel ils ont identifiés 5 bases ou sites militaires israéliens touchés à partir de photos satellites, un travail plus complet était annoncé mais n'est jamais sorti ....... Si on se base sur les taux de réussites des attaques True Promise 1 et 2, on a observé qu'environ 50% des missiles non interceptés atteignaient leurs cibles Si on se base sur l'attaque du camp Moshe Dayan ( https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Iranian_Airstrikes_on_the_Israeli_Military_Intelligence_School_during_Operation_True_Promise_III.png ), c'est 25% de coup au but (sur une cible faisant environ 900 x 300 m). On peut donc en déduire qu'outre les 57 missiles ayant franchi les défenses israéliennes et reconnues par les sources israéliennes, il y aurait entre 79 et 158 missiles (à charges unitaires mais plus vraisemblablement à charges "cluster" pour la majorité des missiles) qui auraient atteint des cibles militaires (ou similaires). Outre le nombre d'impacts sur ce type de cibles (systématiquement éludées par la censure), c'est le résultat des impacts qui est systématiquement occulté. Israël reconnait 7 soldats blessés (probablement la frappe touchante sur le site Kirya https://edition.cnn.com/2025/06/14/world/video/missile-strike-kirya-israel-military-digvid ) dans les frappes mais je n'y crois guère : - en moyenne chaque missile iranien qui a frappé les zones peuplées a tué 0.5 israéliens et en a blessé 60 - et donc la centaine de missiles (dont 6 définitivement identifiés) qui auraient atteint les sites militaires auraient fait 0 tués et 0 blessés (sic) Et cela malgré des vidéos (dont une montrant la destruction d'un site Arrow) ou des témoignages israéliens (notamment sur la chaîne 13 il me semble) de frappes "précises" sur des bases israéliennes..... Pour l'économie, sur les 5 grandes centrales électriques thermiques israéliennes et la raffinerie (une seconde était en maintenance) en service pendant la guerre, les iraniens en ont touché 3 (2 centrales et 1 raffinerie) ainsi qu'une centrale électrique secondaire à Haïfa. Enfin selon Haaretz, 1200 immeubles ont été endommagés (soit environ 30000 logements, ça représente 1% des logements israéliens au total) en Israël. Il est intéressant de noter qu'au vu des résultats de la frappe d'octobre, les israéliens estimaient la CEP des missiles iraniens à environ 800/900 m et en déduisaient à l'incapacité des missiles iraniens à frapper des sites stratégiques (centrales électriques ou bâtiments) ce qui s'est révélé inexact (si on prend un rayon moyen de dégâts de 200m par missiles, voir le reportage de France 24 et un taux de coups aux buts de 25% (taux observé sur le site de Moshe Dayan), on doit avoir une CEP moyenne d'environ 280m (dans les faits probablement très variable selon la génération du missile tiré). D'autres statistiques ( mais pas de source citée) : https://defencepk.com/forums/threads/iranian-missiles-news-and-discussions.57/page-104 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Wallaby Posté(e) lundi à 09:47 Share Posté(e) lundi à 09:47 https://www.rfi.fr/fr/moyen-orient/20250919-le-jeu-d-équilibriste-de-la-russie-dans-le-conflit-israélo-palestinien (19 septembre 2025) Le jeu d'équilibriste de la Russie dans le conflit israélo-palestinien Trois jours après le début de la guerre, des représentants du Hamas (organisation qui n’est pas considérée comme terroriste par Moscou) et de l’Iran entament une visite officielle en Russie. Cette visite n’est pas une première, d’autres ont eu lieu avant même 2006 et la victoire du Hamas dans la bande de Gaza. La Russie appelle alors à un cessez-le-feu, au retour d’un règlement politique du conflit. Elle propose une résolution dans ce sens au Conseil de sécurité dès le 13 octobre 2023 – contre laquelle Washington met son veto - et entend jouer un rôle de médiateur entre les deux parties. « Les pays occidentaux et notamment les États-Unis répètent à l’envi qu’Israël a le droit à la légitime défense, alors qu’en tant que puissance occupante il ne jouit pas de ce droit, ainsi que le confirme l’avis consultatif de la Cour internationale de justice de l’ONU de 2004 » [1], déclare de son côté le représentant permanente de la Russie aux Nations unies, Vassili Nebenzia, le 26 octobre 2023. En février 2024, Vladimir Poutine invite aussi de nombreuses délégations d'organismes palestiniens, dont l'Autorité palestinienne, le Hamas et le Jihad islamique. Pour le Hamas, le soutien d’un membre du Conseil de sécurité de l’ONU est essentiel. Le vice-ministre russe des Affaires étrangères reçoit également, en janvier 2024, une délégation de Houthis. Parallèlement, le Kremlin se rapproche toujours un peu plus des « ennemis d’Israël », de l’Iran au Hezbollah libanais, mais aussi des Émirats et de l’Arabie saoudite. Il est alors l’un des rares acteurs à parler à tout le monde dans la région. « Mais ce pari d'un rôle stratégique sur lequel a capitalisé Moscou dans la région du Moyen-Orient - où la Russie avait repris pied en intervenant militairement fin septembre 2015 pour sauver alors le régime de Bachar el-Assad -, est largement perdu avec la chute de ce régime le 8 décembre 2024 ». À cet égard, d’aucun s’interroge sur l’énième visite du Hamas en février 2025 durant laquelle Moscou demande la libération de l’otage Alexandre Trupanov, qui sera libéré très peu de temps après. Car le président russe entend maintenir les liens non seulement avec Israël mais aussi avec la diaspora russe présente là-bas. Il considère même, à tort ou à raison, qu'elle constitue un relais d'influence russe en Israël. Aujourd’hui encore, trois vols quotidiens sont opérés entre Moscou et Tel-Aviv. La Russie compte en effet près de 30 millions de musulmans. Nombre d’entre eux se sont ainsi fait entendre fin octobre 2023 lorsqu’ils ont pris d’assaut le tarmac de l'aéroport de Makhatchkala, la capitale de la république russe à majorité musulmane du Daguestan après l'annonce de l'arrivée d'un vol en provenance d'Israël. « Les tueurs d'enfants n'ont pas leur place au Daguestan », pouvait-on lire sur certaines pancartes. Le président russe a annoncé en mars dernier que Moscou organiserait le premier sommet russo-arabe le 15 octobre prochain. Vladimir Poutine a officiellement invité les dirigeants de tous les États membres de la Ligue arabe à participer à l'événement. La Syrie d'Ahmed al-Charaa est invitée à ce sommet. [1] https://www.doc-du-juriste.com/droit-public-et-international/droit-international/commentaire-d-arret/cour-internationale-justice-9-juillet-2004-quoi-avis-consultatif-eclaire-conditions-invocation-droit-legitime-defense-attaque-armee-terroriste-regard-droit-international-680254.html Selon l'avis consultatif de la CIJ, à destination de tous les organes onusiens, le droit à la légitime défense est strictement limité à la réponse d'un « État contre un autre État » en cas de situation de défense face à une attaque armée de l'un sur l'autre. Par cette formule la CIJ conditionne ainsi le droit à la légitime défense tout d'abord à une attaque armée directe et immédiate en vertu de son interprétation de l'article 51 de la Charte des Nations unies, mais également, plus crucialement dans le contexte de la publication de cet article au fait que le droit à la légitime défense n'est pas applicable dans les situations de lutte contre le terrorisme national comme transnational qui se rapportent à des groupes non étatiques qui ne sont pas inclus dans les conditions de l'article 51. https://jurdi.fr/ressources/avis-consultatif-de-la-cij-concernant-le-mur-en-palestine/ Le 9 juillet 2004, la Cour internationale de Justice (CIJ) rend un avis consultatif sur les conséquences juridiques de la construction par Israël d’un mur dans les territoires palestiniens occupés, y compris Jérusalem-Est. La CIJ conclut que la construction de ce mur viole plusieurs principes du droit international, notamment en ce qui concerne le droit humanitaire et les droits de l’homme. Points clés de l’avis 1.Violation du droit international : La CIJ estime que la construction du mur constitue une violation du droit international, en particulier de la Quatrième Convention de Genève de 1949, qui interdit aux puissances occupantes de modifier la situation des territoires qu’elles occupent au détriment des populations locales. 2.Obstacles au droit à l’autodétermination : La construction du mur empêche le peuple palestinien d’exercer son droit à l’autodétermination, en fragmentant le territoire et en isolant des communautés palestiniennes les unes des autres. Cette situation risque de rendre toute solution de paix difficilement réalisable. 3.Obligations d’Israël : Israël est tenu de cesser la construction du mur, de démanteler les sections déjà construites dans les territoires occupés et de réparer les dommages causés aux Palestiniens. La CIJ souligne qu’Israël ne peut pas justifier la construction du mur pour des raisons de légitime défense, puisque cette défense s’applique entre États et que la menace perçue provient de territoires sous son propre contrôle. 1 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Wallaby Posté(e) mardi à 11:21 Share Posté(e) mardi à 11:21 https://www.lefigaro.fr/international/demarche-historique-rupture-avec-washington-dilemme-de-l-allemagne-la-reconnaissance-de-la-palestine-par-macron-vue-par-la-presse-internationale-20250923 Le New York Times souligne qu’en reconnaissant l’État de Palestine, «la France et d’autres alliés des États-Unis viennent d’officialiser une rupture avec Washington qui se profilait depuis des années». Le quotidien new-yorkais met l’accent sur l’isolement croissant d’Israël et des États-Unis sur cette question, quatre des cinq membres permanents du Conseil de sécurité reconnaissant désormais la Palestine. Même son de cloche du côté du Washington Post qui révèle l’ampleur des efforts américains pour faire échouer l’initiative française. À commencer par «le secrétaire d’État Marco Rubio qui a voulu tuer dans l’œuf l’initiative en envoyant en juin et ce mois-ci des télégrammes aux ambassades et consulats américains à travers le monde pour les dissuader de participer aux réunions organisées par la France et en dénonçant publiquement cette initiative comme un “cadeau fait au Hamas”». Malgré ces pressions, le Washington Post reconnaît qu’Emmanuel Macron a réussi son pari : réunir «un large rassemblement de dirigeants mondiaux et de hauts diplomates», incluant «les présidents du Brésil, de Turquie, d’Afrique du Sud et d’Indonésie» ainsi que «les premiers ministres d’Australie, du Canada, d’Espagne, de Belgique et d’Irlande ; les rois de Jordanie et de Monaco ; le secrétaire général de l’ONU ; et de nombreux autres dignitaires». Le journal cite également le sénateur démocrate Chris Van Hollen qui s’agace de la position américaine : «Les États-Unis sont complètement isolés, ce qui sape véritablement notre influence dans le monde.» 3 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Wallaby Posté(e) mercredi à 12:09 Share Posté(e) mercredi à 12:09 https://shs.cairn.info/revue-politique-africaine-2024-3-page-193?lang=fr (19 juin - 19 décembre 2024) Penser les qualifications des violences en Palestine et Israël depuis l’Afrique Apartheid, colonisation, occupation, guerre, génocide, futuricide. La question de la qualification des violences en Israël et en Palestine est au cœur de polémiques et de tensions extrêmement fortes, particulièrement exacerbées depuis le 7 octobre 2023. Certains des termes employés et des réalités qu’ils recouvrent, en particulier « apartheid », « colonisation » et « génocide », ont en effet une histoire particulièrement chargée en Afrique. Le continent [africain] a connu deux génocides internationalement reconnus comme tels, celui des Herero et des Nama en Namibie au début du xxe siècle (officiellement reconnu par le gouvernement allemand en 2021), et celui des Tutsi au Rwanda en 1994. Notre objectif est de questionner l’usage de ces différents termes dans les contextes israéliens et palestiniens, de revenir sur leur fondement politique et épistémologique, et sur les modalités de leur circulation internationale. Nous proposons pour cela une série de rencontres avec des universitaires travaillant en Israël, en Palestine et dans différents pays africains afin de réfléchir à ces enjeux de qualification [1]. La lutte anti-apartheid, portée par le Congrès national africain (ANC) mais aussi, notamment, par le Parti communiste sud-africain, a mobilisé des réseaux de plus en plus larges, et créé des liens avec de nombreux mouvements de libération à travers le monde, y compris l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). La cause a également été consacrée par le droit international, lorsque l’Assemblée générale des Nations unies a adopté la « Convention internationale des Nations unies de 1973 sur l’élimination et la répression du crime d’apartheid ». Quand bien même il n’y aurait pas d’équivalence, en quoi l’apartheid, tel qu’il a été institué et mis en pratique en Afrique du Sud, aide à penser ce qui se passe dans la région qui nous intéresse ? Et, si c’est le cas, qu’aide-t-il à penser plus particulièrement ? La situation des populations palestiniennes dans les territoires occupés ? Ou les différences de traitement entre différents types de citoyens et citoyennes en Israël ? Crée-t-il, au contraire, des angles morts ? En retour, le détour par Israël et la Palestine aide-t-il à mieux penser les spécificités de l’histoire de l’Afrique du Sud ou à repérer des similarités qui permettraient de mieux la caractériser ? Raphaël Botiveau : Une des lois emblématiques de cette époque est le Native Land Act de 1913, qui restreint la propriété foncière des populations noires autochtones à des réserves ne couvrant que 7 % du territoire de la nouvelle Union (une surface portée à 13 % en 1936). L’Union sud-africaine figurera à ce titre, en novembre 1947, parmi les 33 États membres de l’Assemblée générale des Nations unies (n’en comptant alors que 56, principalement européens) qui adopteront la résolution 181 prévoyant le partage de la Palestine en deux États, l’un juif, l’autre arabe. Il est ici intéressant de remarquer que c’est dans le contexte historique du colonialisme et de l’impérialisme britannique que se sont respectivement développés les nationalismes juif sioniste et afrikaner. Londres favorisa ainsi l’établissement de Juifs européens en Palestine avant de s’y opposer et de se heurter politiquement et militairement aux forces sionistes. En Afrique du Sud, c’est la violence extrême de la répression des Boers durant la guerre de 1899-1902 qui créa les conditions du développement du mouvement nationaliste afrikaner et du régime d’apartheid. Ainsi, outre la référence biblique qui fait des Juifs et des Afrikaners des peuples élus liés à Dieu par un pacte leur promettant une terre, sionistes et nationalistes boers se sont forgé un récit national assez proche, qui met en avant leur lutte héroïque contre l’Empire britannique avec comme effet induit de minimiser l’existence et la spoliation des indigènes de Palestine et d’Afrique du Sud. Il est également nécessaire de rappeler que, si le régime d’apartheid et l’État d’Israël développeront une coopération notamment militaire pour faire face à des ennemis communs durant la guerre froide (mouvements anticoloniaux, bloc soviétique…), leurs affinités idéologiques n’étaient pas évidentes au départ. Un certain nombre de dirigeants du Parti national, en Afrique du Sud, s’étaient ainsi rapprochés de l’Allemagne nazie par antisémitisme ou pour lutter contre les Britanniques dans les années 1930 et durant la Deuxième Guerre mondiale. Les premiers dirigeants d’Israël, quant à eux, étaient empreints d’idéologie socialiste et proches du bloc de l’Est, l’Union soviétique ayant voté pour la résolution 181 et fourni des armes aux organisations militaires sionistes. Le projet plus global des architectes de l’apartheid se fondait enfin sur la fiction idéologique – assise sur l’Ancien Testament – d’un agencement harmonieux du monde où chaque race occuperait la juste place qui lui revient : le « développement séparé » prévoyait l’accès à l’indépendance de bantoustans (« États des Bantous ») sur 13 % de l’Afrique du Sud, un sacrifice jugé nécessaire par le régime d’apartheid pour préserver la nation afrikaner et la domination blanche. De 1976 à 1981, quatre bantoustans (Transkei, Bophuthatswana, Venda et Ciskei) accédèrent ainsi à une autre forme d’indépendance coloniale qui, contrairement à celle de 1910, ne fut pas reconnue internationalement. L’objectif pour Pretoria était d’établir l’essentiel des Noirs du pays dans ces États sans souveraineté, administrés par des dirigeants fantoches et garantissant à l’économie sud-africaine une vaste réserve de main-d’œuvre. Sara Dezalay : La CIJ avait été saisie pour avis en 1950 afin de répondre à la question suivante : l’Afrique du Sud, détentrice d’un mandat sur ce territoire [de Sud-Ouest Africain, aujourd'hui Namibie] en vertu du Pacte de la Société des Nations, devait-elle transformer ce mandat en un système de territoire sous tutelle, tel que prévu par la Charte de l’ONU ? Dans son avis de 1950, la Cour entérinait le refus de l’Afrique du Sud d’opérer cette transformation, tout en spécifiant son obligation d’accepter un contrôle international, ce que refusa le gouvernement sud-africain, malgré de multiples résolutions de l’Assemblée générale et du Comité de décolonisation de l’ONU. En 1960, la Cour fut cette fois saisie par l’Éthiopie et le Liberia, dans le cadre d’une affaire contentieuse, pour juger de la légalité du maintien du mandat de l’Afrique du Sud sur le Sud-Ouest africain, ainsi que de l’ensemble de la politique d’apartheid aux termes du droit international. La Cour commença par se déclarer compétente sur le fond et rejeta finalement la requête en 1966 au prétexte que l’Éthiopie et le Liberia n’avaient pas d’intérêt à agir dans ce cas. Dès 1962, l’Assemblée générale avait adopté la résolution 1761, qui dénonçait la politique d’apartheid, appelait à un embargo sur la vente d’armes vers l’Afrique du Sud et portait création d’un Comité spécial sur l’apartheid. Le Comité fut boudé par la majorité des États du Nord – tout particulièrement le Royaume-Uni en tant que principal exportateur d’armes vers l’Afrique du Sud. Mais la résolution 1761, bien que non contraignante comme toutes les résolutions de l’Assemblée générale, fut mobilisée par l’Anti-Apartheid Movement. En 1970 – sous la présidence du Burundi et à la faveur de l’abstention du Royaume-Uni – le Conseil de sécurité adopta deux résolutions : la première qualifiait pour la première fois d’illégale l’occupation continue par l’Afrique du Sud du Sud-Ouest africain, tandis que la seconde sollicitait un avis consultatif de la CIJ sur les conséquences juridiques de la présence sud-africaine en Namibie. Adopté en 1971, l’avis consultatif de la CIJ entérina l’illégalité de l’occupation de la Namibie. Surtout, dans ce même avis consultatif, la CIJ se prononça également sur le terme d’« apartheid », qu’elle définit, au-delà du cadre des politiques de « développement séparé » pratiquées par l’Afrique du Sud, comme « [l]e fait d’établir et d’imposer […] des distinctions, exclusions, restrictions et limitations qui sont uniquement fondées sur la race, la couleur, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique et qui constituent un déni des droits fondamentaux de la personne humaine [5] ». En 1973, le terme d’apartheid devint ainsi l’objet d’une convention adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies, au statut hybride, car elle contient un volet pénal – incluant la toute première définition conventionnelle de l’apartheid comme crime contre l’humanité – et un volet plus classique de protection des droits humains. Et si ce texte reste intimement lié au régime sud-africain, certains des 129 rapports soumis au Groupe des trois entre 1978 et 1993 (année du dernier examen) ont mentionné des cas d’apartheid au-delà de la situation en Afrique du Sud. Par exemple, la Biélorussie, Cuba, l’Irak, le Qatar, la Syrie et les Émirats arabes unis avaient souligné que les politiques et les pratiques d’Israël à l’encontre du peuple palestinien entraient dans le champ d’application de la Convention [6]. Il est tout à fait symbolique, à ce titre, que le gouvernement sud-africain ait décidé de signer la Convention en mai 2024 : cela dénote sans doute une volonté de la régénérer au-delà du cas de l’Afrique du Sud – sachant qu’hormis l’article 7 du Traité de Rome portant création de la Cour pénale internationale (CPI), qui liste et définit le crime d’apartheid en tant que crime contre l’humanité, l’apartheid, en tant que catégorie juridique, est défini uniquement dans la Convention [7]. L’avis consultatif du 20 juillet 2024, dans lequel la CIJ a qualifié d’« illicite » l’occupation israélienne et a rappelé le « droit à l’autodétermination » sans condition des Palestiniens, est certes non contraignant, mais il doit être lu à l’aune du rapport de force au sein de la Cour et du rapport de celle-ci aux États membres de l’ONU. La Cour n’utilise pas explicitement, dans cet avis, le terme d’apartheid. Elle évoque une politique de « discrimination systémique ». Selon certains commentateurs, cette « ambiguïté sur l’apartheid est probablement délibérée, afin de permettre au plus grand nombre de juges possible de se joindre à la majorité [8] ». La CIJ a été saisie pour un avis consultatif par l’Assemblée générale de l’ONU en 2022 sur la légalité de l’occupation de territoire palestiniens depuis 1967 : cela a donné lieu à l’avis consultatif rendu le 20 juillet 2024 évoqué précédemment. En substance, cet avis consultatif réitère l’avis rendu par la Cour en 2004, connu sous le nom « Le mur », dans lequel elle estimait que les politiques de colonisation d’Israël violaient l’interdiction, prévue par le droit humanitaire international, de transférer des populations civiles de la puissance occupante vers un territoire occupé. Mais, dans son avis de 2024, la Cour est allée plus loin : elle y souligne que les pratiques d’Israël équivalent à une annexion de vastes parties du Territoire palestinien occupé [9]. Raphaël Botiveau : Nelson Mandela et ses pairs prirent initialement pour modèle les actions militaires des organisations sionistes contre les Britanniques. Le lien entre les deux luttes se fit concrètement via des individus comme Arthur Goldreich, sud-africain juif qui, marqué par l’antisémitisme et la position pronazie de bien des Afrikaners, rejoignit la Palestine et s’engagea dans le Palmach, milice sioniste, avant de rentrer en Afrique du Sud et d’intégrer la branche armée de l’ANC au début des années 1960. Lorsqu’après sa libération en 1990 et alors qu’il poursuivait son « Freedom Tour » aux États-Unis, Nelson Mandela fut par exemple encouragé à renier son soutien à Yasser Arafat, considéré comme un terroriste par ses interlocuteurs étatsuniens, le futur président sud-africain n’eut de cesse de rappeler qu’Arafat était et demeurait un « camarade de lutte », aux côtés d’ailleurs de Fidel Castro ou du Colonel Khadafi. À l’instar de l’Intifada palestinienne, qui débuta en décembre 1987 dans le camp de Jabaliyeh, tout partit en Afrique du Sud, durant cette décennie, des townships du triangle du Vaal en septembre 1984. [Un] dernier point amène cependant à nuancer le rapprochement entre les deux situations. En Afrique du Sud, l’essentiel des victimes de cette période – jusqu’à 20 000 morts recensés – fut le résultat d’une quasi-guerre civile entre organisations noires, encouragée et entretenue par le régime d’apartheid. En Palestine et bien que la création du Hamas, en 1987, fût encouragée par Israël pour diviser le mouvement national palestinien, la concurrence entre organisations palestiniennes rivales resta beaucoup plus limitée. J’avais souvent été frappé, dans plusieurs pays arabes, chez des personnes exprimant leur soutien à la cause palestinienne, par une certaine distance vis-à-vis de la situation vécue dans les territoires occupés. En Afrique du Sud, j’ai a contrario été étonné de rencontrer des personnes qui semblaient, comme par expérience, savoir de quoi elles parlaient en évoquant ce que vivaient les Palestiniens. Sbeih Sbeih : En ce qui concerne la lutte menée par les Palestiniens, la catégorie apartheid a été progressivement appropriée à partir des années 1989-1990. Au début, cet usage s’est limité aux réseaux plaidant pour la non-violence, comme c’était le cas du prêtre Naïm Ateek (de l’Église épiscopalienne) qui a fondé le Centre de théologie de la libération Sabeel à Jérusalem et à Nazareth en 1989-1990. Il était en relation directe avec l’archevêque anglican Desmond Tutu. Mais c’est au début des années 2000, avec le déclenchement de la deuxième Intifada, la construction du Mur d’annexion et de séparation, et surtout après la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance de Durban en 2001, que son usage s’impose d’une manière plus évidente. Cette manière de cadrer les choses a permis de visibiliser la cause auprès de l’Occident, tout en invisibilisant des éléments fondamentaux de la situation politique historique et contemporaine. Elle a participé – sur la base, en passant, d’une représentation erronée de ce qu’a été la lutte de l’ANC – de la décrédibilisation de la lutte armée, et du passage à une lutte dans le cadre de ce que je nomme « la Palestine des bailleurs de fonds [13] ». Cette transformation a eu des effets sur la sélection sociale des militants, dont on attend qu’ils parlent l’anglais, maîtrisent le droit, etc., ce en quoi on peut parler d’une évolution à la fois élitiste et professionnelle. Avec ce cadrage, les revendications ne sont plus nationalistes, mais formatées à partir de ce qui est acceptable juridiquement et paraît faire sens pour l’international. On n’est plus dans un face-à-face avec l’occupant (action directe populaire) : on passe par le droit international (action indirecte portée par des « professionnels »), et on passe de l’arabe à l’anglais, ce qui invisibilise une partie de la réalité de ce face-à-face et décrédibilise les autres formes de lutte et profils de militants. L’objectif consiste désormais à convaincre que les Palestiniens « méritent » un État et à convaincre la « communauté internationale » de la justesse de la cause. Cela va de pair avec un décalage entre ce qui est revendiqué et la réalité vécue des Palestiniens. Par exemple, on parle d’une revendication d’indépendance politique et économique alors que, dans les faits, la colonisation s’accélère et la dépendance économique est redoublée, non seulement vis-à-vis d’Israël, mais aussi des bailleurs de fonds. Cette évolution – dans laquelle s’inscrit cette importation singulière de la notion d’apartheid – n’est pas consensuelle parmi les Palestiniens. Tal Dor : L’utilisation de la catégorie d’apartheid permet de comprendre les injustices que le monde occidental et eurocentré ne veut pas comprendre. Ceci étant dit, cela nous enferme également dans des représentations. L’effet majeur est que ce cadrage permet de ne pas mettre en question le sionisme politique, et donc la Nakba (terme qui désigne les déplacements forcés, et l’expulsion de centaines de milliers de Palestiniens après l’occupation coloniale de leur terre en 1948), dans une grille d’analyse du colonialisme du peuplement. En outre, à mon sens, la catégorie, comme elle est souvent employée en France aujourd’hui par exemple, amène à appeler à une solution qui pourrait elle-même être comprise comme un apartheid dans un sens littéral de « séparation » : celle des deux États. Bien avant la création de l’État d’Israël et alors que le mouvement d’installation de Juifs en Palestine s’accélérait pendant les premières décennies du xxe siècle, des leaders palestiniens ont appelé à un État démocratique [14]. En comprenant le caractère colonial du projet euro-sioniste de créer un État juif en Palestine, la population palestinienne et leur leadership reconnaissaient la présence juive en Palestine et son lien à la terre, tout en refusant la séparation entre Juifs, musulmans et chrétiens palestiniens. L’occultation du colonialisme de peuplement, en tant qu’aspect central du sionisme, joue un rôle central, pas seulement dans la formation de la conscience et dans l’être du sujet sioniste (comme Juif israélien), mais aussi dans la conscience collective et individuelle occidentale. Le sionisme et donc l’État d’Israël sont perçus comme un projet démocratique de construction d’une nation par une société multiculturelle de migrants. L’utilisation du terme « apartheid », reconnu comme violent et injuste dans le cadre sud-africain, dévoile les profondes injustices du régime israélien mais il ne décolonise pas le savoir sur la Palestine. Car cela nous enferme dans l’idée que ce n’est qu’un problème de régime et que la solution (euro-atlantique) de deux États va amener à la fin de cette violence. Dès 2004, le sociologue palestinien Raef Zreik avait ainsi montré les limites du terme « apartheid », et notamment le fait que le cadre territorial qu’il induisait était celui de l’occupation de 1967, plutôt que celui de 1948, ce qui supposait d’oublier les réfugiés, soit plus du tiers de la population palestinienne [15]. Le mot [d'« apartheid »] est alors entré d’abord dans le vocabulaire des militants israéliens de la gauche radicale [16] qui militaient aux côtés des Palestiniens contre sa construction. Plus tard, l’organisation israélienne B’Tselem, les ONG internationales Human Rights Watch et Amnesty International ont institutionnalisé, d’une certaine manière, le terme avec leurs rapports internationalement reconnus (2021 et 2022) [17]. Ce qui a d’abord été considéré comme une appellation controversée, même inaudible, s’est aujourd’hui largement répandu dans la société israélienne. On peut faire le parallèle avec l’histoire de la Nakba. Des historiens palestiniens (et arabes) ont parlé de la catastrophe et du nettoyage ethnique depuis la création de l’État d’Israël. Or c’est seulement lorsque des historiens israéliens – ce qu’on appelle « les nouveaux historiens » – ont dévoilé les archives militaires israéliennes à partir des années 1980 et ont travaillé sur cette question qu’elle a été entendue et reconnue (partiellement). Raphaël Botiveau : Ceci étant dit, il me semble que le paradigme colonial reste plus approprié que la notion d’apartheid pour saisir la situation palestinienne. En Afrique du Sud même, d’ailleurs, durant la lutte contre l’apartheid, le mouvement de libération porté par l’ANC théorisait d’abord la situation sud-africaine comme un « colonialisme d’un type spécial » (colonialism of a special type), l’apartheid ne représentant qu’un ultime avatar. La plainte portée par l’Afrique du Sud devant la Cour internationale de justice en décembre 2023, qui vise à faire condamner Israël pour génocide, est ici d’une grande portée politique. Et le gouvernement israélien, qui fait peu de cas du droit international en général et de la CIJ en particulier (quand bien même Israël est l’un des rares États créés en vertu d’une résolution de l’Assemblée générale des Nations unies), a cette fois bien perçu le danger. Il y a d’abord le poids symbolique de l’action sud-africaine en justice. Si c’était l’Égypte ou un autre régime militaire voisin d’Israël qui portait l’affaire, il ne s’agirait que d’un nouveau coup d’épée dans l’eau. Or l’Afrique du Sud est dotée du « crédit » qui lui donne la légitimité morale et politique nécessaire pour soutenir une telle accusation. Les dirigeants sud-africains d’aujourd’hui sont les héritiers de ceux d’hier. Ses détracteurs diront que le Président Ramaphosa incarne la faillite de l’ANC, les inégalités persistantes, le massacre de Marikana (qui avait vu, en août 2012, la police sud-africaine assassiner 34 grévistes dans les mines de platine) ; il n’en reste pas moins qu’il était négociateur en chef de l’ANC au début des années 1990 et que la position qu’il incarne aujourd’hui sur la Palestine est conforme à celle que portait hier son mentor Nelson Mandela. De plus, si l’action sud-africaine tend à porter un nouveau coup diplomatique à Israël, elle porte aussi atteinte à sa légitimité en tant qu’État prétendument plus moral que les autres du fait de l’héritage de la Shoah qu’il revendique : Israël redevient un État justiciable comme les autres. Mais si l’on pense à nouveau à la question déjà mentionnée du « droit à l’autodétermination », le gouvernement sud-africain porte aussi un coup à l’idéologie et au projet politique sioniste dans certains de leurs fondements. Car si la solution à deux États continue d’être officiellement privilégiée comme horizon par les États-Unis, l’Union européenne et l’Afrique du Sud, le modèle de résolution d’un conflit colonial dont l’exemple sud-africain est porteur est d’abord celui de la mise en œuvre, sur un territoire donné, parmi des populations descendantes de colons et de colonisés étroitement imbriquées, d’une autodétermination matérialisée par le principe du « One man, one vote », du refus de la bantoustanisation et de la construction d’une identité nationale commune. Les réactions violentes que provoquent aujourd’hui les défenseurs de la solution à un seul État – Rima Hassan en France par exemple – sont peut-être à la hauteur du danger que perçoivent désormais les dirigeants israéliens et leurs soutiens, pour qui la solution à un seul État représenterait la fin du sionisme. Un tel danger est incarné par l’Afrique du Sud post-1994 et sa mobilisation en faveur du droit à l’autodétermination des Palestiniens. Tal Dor : Le terme de colonisation – et plus précisément, de colonisation de peuplement – renvoie à une réalité bien présente. Des militants anti-apartheid ont pu parler d’une Afrique du Sud unie à la fin de l’apartheid, en clamant « on est tous sud-africains ». Ce n’est pas le cas en Palestine et dans l’État d’Israël, où continue de se poser la question du colonialisme de peuplement, qui est au cœur de la situation. Sbeih Sbeih : On peut rappeler que ce moment charnière commun à l’Afrique du Sud et à Israël, 1948, correspond à une période importante de la décolonisation britannique (l’Inde est devenue indépendante en 1947, et la Birmanie et Ceylan en 1948) : ce sont tous des territoires qui ont à voir avec l’impérialisme britannique et sa décolonisation. Tal Dor : Le terme Nakba est un outil de vérité et de résistance épistémique fondamental. Les travaux de Walid Khalidi nous montrent qu’entre décembre 1947 et janvier 1949, 400 villages palestiniens ont été totalement vidés de leurs habitants et la plupart de la population arabe a été expulsée de onze villes [19]. Pendant cette période, des forces paramilitaires sionistes (comme le Palmah), puis l’armée israélienne ont mené des opérations armées contre une population non armée dans sa majorité. En 1949, plus de 80 % des terres (16,6 millions de dounams) détenues par l’État d’Israël appartenaient aux 750 000 Palestiniens devenus réfugiés. Peu de Juif·ves israélien·nes tâchaient de comprendre ce qui s’était passé pour la population palestinienne qui habitait, travaillait et était propriétaire de la terre. De plus, le savoir officiel israélien nie la Nakba et interdit sa commémoration. En 2011, l’amendement 40 à la loi de base budgétaire, connu sous le nom de « loi Nakba », a ainsi été adopté par le parlement israélien. Il autorise le ministre des Finances à retirer les fonds publics de toute institution ou organisme qui commémore « le jour de l’indépendance d’Israël ou le jour où l’État a été établi comme jour de deuil », ou qui nie l’existence d’Israël en tant qu’« État juif et démocratique [22] ». Dans les espaces éducatifs formels et informels, les enfants juifs israéliens apprennent que la terre était vide et à ne connaître ni les faits historiques, ni les objectifs sionistes derrière la destruction. En 2002, lors d’un entretien à la radio française Radio Orient, à une époque où le mot Nakba était méconnu en hébreu et dans la société israélienne, l’historien Ilan Pappé, qui donnait déjà des cours sur la question à l’université de Haïfa dans l’État d’Israël – cours à cause desquels il a dû quitter son poste et le pays –, a dit : « À mon avis, nombreux sont les Israéliens qui commettraient une nouvelle Nakba sans aucune hésitation. » Dix ans plus tard, en décembre 2022, le militant et journaliste Meron Rappaport a écrit que le gouvernement élu un mois plus tôt, dont des membres défendent explicitement une « Suprématie juive », pouvait être « un gouvernement de Nakba ». Alors que, jusqu’à début octobre 2023, la majorité des Israéliens niaient la Nakba et que seule la minorité d’extrême droite la revendiquait, le mot s’est davantage répandu dans la sphère publique après le 7 octobre, notamment sous la forme d’un appel à une « deuxième Nakba » ou encore à une « Nakba de Gaza » lancé par des figures politiques et publiques, comme par exemple le ministre de l’Agriculture Avi Dichter en novembre 2023. Jusqu’en 2001, le terme n’était quasiment pas utilisé en hébreu [23], même par les militants antisionistes. Certains l’ont découvert très tardivement, ce qui a pu produire des vrais chocs personnels, avec l’impression qu’on leur avait menti, ou en tout cas qu’on avait occulté une part fondamentale de la vérité. Ces militants sont, comme toute la société israélienne, pris dans une socialisation qui a supprimé certains éléments de la mémoire et de l’histoire nationales [24]. L’expression actuelle d’« on-going Nakba », déjà utilisé par Joseph Massad en 2008 [25] et plus récemment par l’avocat palestinien Rabea Eghbariah [26], est cependant intéressante : elle nous permet de comprendre la guerre génocidaire actuellement menée à Gaza dans le contexte de ce que l’historien Rashid Khalidi nomme « The Hundred Years’ War on Palestine [27] ». Sbeih Sbeih : De manière plus générale, l’idée de supériorité raciale est à l’origine de toute justification du colonialisme mis en œuvre en Palestine depuis un siècle. Maxime Rodinson l’explique bien quand il démontre comment le mouvement sioniste voulait à tout prix inscrire son projet dans l’esprit colonial-impérialiste européen de l’époque selon lequel on a le droit de conquérir tout territoire en dehors de l’Europe [28]. Dans le cas palestinien, la religion (à travers les notions de « peuple élu » et de « terre promise ») a été instrumentalisée pour alimenter l’idée de cette supériorité de race/nation, ce qui a permis de justifier d’abord la colonisation de peuplement et de remplacement, puisqu’il s’agit d’une terre habitée et non pas « sans peuple », comme c’est souvent présenté par une formule des premiers sionistes : « Une terre sans peuple pour un peuple sans terre. » Pour en revenir à la question de l’apartheid qui nous occupe aujourd’hui, l’institutionnalisation de la séparation par des lois et l’instauration d’une géographie coloniale classent les Palestiniens en fonction de cette supériorité. Les ruptures géographiques imposées entre Palestiniens, entre ceux qui vivent en Palestine occupée en 1948, ou encore entre ceux qui vivent en Cisjordanie (zone A, B, C…) ou encore à Gaza (le plus grand camp de réfugiés dans le monde dès les années 1950, puis la prison à ciel ouvert sous siège depuis 2005-2006, et finalement le génocide actuel), sont institutionnalisées par plusieurs méthodes de catégorisation : carte d’identité et plaques d’immatriculation de couleurs différentes…, mais aussi des lois militaires, y compris pour les Codes de la route, sans oublier le statut des réfugiés qui varie en fonction du lieu de résidence. Tout cela évoque en effet l’apartheid et son fondement éminemment racial. On ne doit pas oublier que les réalités désignées sous ce terme d’apartheid ne concernent qu’une partie des Palestiniens – à l’exclusion des réfugiés – alors que la colonisation les concerne tous. Pourquoi parler d’« apartheid » en Palestine ou en Israël alors que le terme de « colonisation » fonctionne pour qualifier une situation plus globale ? L’apartheid permet de penser la situation des Palestiniens qui ont pu rester en Israël après 1948, ou celle de ceux qui résident dans les territoires occupés après 1967. Alors que la colonisation permet de penser à la fois la situation de ces derniers, comme colonisés (non pas comme une minorité opprimée dans un « État des droits », mais comme des indigènes colonisés), mais aussi celle des Palestiniens qui ont été chassés de chez eux par la violence ou contraints de fuir après la création de l’État d’Israël, dont il faut rappeler qu’ils étaient alors la majorité. C’est uniquement après la Nakba en 1948, c’est-à-dire l’exode forcé et le déracinement d’environ 750 000 Palestiniens, la destruction d’environ 500 villages et l’expropriation de leur propriété, que la situation a été modifiée sur le terrain [31]. C’est dans ce sens que l’on parle d’un peuple de réfugiés [32], dont la cause principale est de retourner dans leurs villages et villes d’origine dont ils avaient été chassés. En bref, c’est la condition de colonisé qui unit tous les Palestiniens quel que soit leur lieu de résidence. Et c’est un groupe issu de ce mouvement de colonisation, un « groupe étranger », se considérant comme supérieur et doté d’une force militaire, technologique et économique, et souvent soutenu par les puissances internationales, qui domine et exploite par la force ce groupe indigène. Ce sont les éléments qu’évoque Balandier pour définir une « situation coloniale ». Autrement dit, afin de se prémunir contre le « sens commun savant » et les catégories d’analyse et de perception qui en découlent, il est indispensable de se référer à l’ordre colonial instauré en Palestine depuis un siècle pour pouvoir, d’abord, décrire et saisir la réalité palestinienne et, ensuite, repérer les mécanismes de domination qui découlent de cet ordre – tels que l’apartheid, le génocide, l’annexion, etc. – et permettent à ce dernier de se reproduire et de se consolider. En résumé, il ne faut pas séparer les conséquences de l’ordre structurel qui les a fait surgir et réduire l’analyse uniquement à elles, c’est-à-dire à une situation d’apartheid, tout en la considérant comme la racine de la réalité et du problème palestiniens. Cela revient à faire de l’ombre au colonialisme de peuplement et de remplacement, et à décontextualiser, voire à neutraliser, l’effet structurel de l’ordre colonial qui est à l’origine de la réalité sociale et politique de tous les Palestiniens. 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gianks Posté(e) mercredi à 13:28 Share Posté(e) mercredi à 13:28 https://www.ilfattoquotidiano.it/2025/09/24/attacco-alla-flotilla-crosetto-ho-inviato-una-fregata-della-marina-militare-in-soccorso-degli-italiani/8137414/ Suite aux attaques répétées pendant la nuit sur Global Sumud Flotilla par des drones d'origine « inconnue », le ministre italien de la Défense a autorisé l'intervention immédiate de la frégate FREMM Fasan de la MMI, opérant au nord de la Crète, pour assister les citoyens italiens à bord des navires du convoi. 1 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Wallaby Posté(e) mercredi à 14:10 Share Posté(e) mercredi à 14:10 La déclaration d'Avi Dichter dans son contexte : https://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2018/07/19/israel-etat-nation-juif-les-dessous-d-une-loi-controversee_5333745_3218.html (19 juillet 2018) La nouvelle Loi fondamentale, un tournant dans l’histoire israélienne De nombreux articles sont critiqués, tels que l’institution de Jérusalem comme capitale du pays ou l’attribution d’un « statut spécial » à la langue arabe. Par Piotr Smolar (Jérusalem, correspondant) Il était environ 3 heures du matin, jeudi 19 juillet, lorsque l’un des projets de loi les plus symboliques et controversés depuis dix ans en Israël a été adopté. Par 62 voix contre 55, les députés de la Knesset ont donné la force d’une Loi fondamentale — le plus haut degré possible, en l’absence de Constitution — à un texte définissant Israël comme le « foyer national du peuple juif » et précisant ses attributs. Le premier ministre, Benyamin Nétanyahou, a estimé qu’il s’agissait d’un « moment charnière » dans l’histoire du pays. En revanche, Ayman Odeh, le chef de file des députés de la Liste arabe unie, a exprimé l’émoi de la minorité arabe, qui représente 20 % de la population. Le texte, a-t-il dit, consacre « la suprématie juive, nous disant que nous serons toujours des citoyens de seconde classe ». Hymne, calendrier, fêtes… : une partie consensuelle La loi comporte un certain nombre d’articles qui ne suscitent pas de polémique, ne faisant que reprendre des formulations ou des faits établis. Elle accorde uniquement aux juifs le droit à l’autodétermination dans l’Etat d’Israël, « foyer national du peuple juif ». Elle rappelle les symboles nationaux : l’hymne (Hatikvah), le drapeau, l’emblème d’Etat qu’est la menorah à sept branches avec les branches d’olivier, ou encore le calendrier hébraïque. Elle fixe les jours de fêtes d’Etat, comme celle de l’indépendance ou la journée du souvenir en mémoire des disparus pendant les guerres ou lors de l’Holocauste. En outre, le texte rappelle les liens entre Israël et la diaspora juive dans le monde. L’Etat doit s’assurer de « la sécurité des membres du peuple juif en danger ou en captivité en raison de leur judaïté ou de leur citoyenneté ». Il doit aussi veiller à « renforcer les affinités » entre l’Etat et la diaspora et préserver l’héritage culturel, historique et religieux du peuple juif parmi cette diaspora. Jérusalem, langue arabe… : les dispositions contestées La loi définit Jerusalem comme « capitale complète et unie » d’Israël. Dans les faits, tous les Israéliens considèrent naturellement Jérusalem comme leur capitale, où se concentrent les lieux de pouvoir comme la résidence du premier ministre, la Knesset et la plupart des administrations centrales. Mais selon le consensus international en vigueur depuis des décennies, le statut de Jérusalem — où se trouvent notamment les lieux saints des trois grands monothéismes — ne devra être tranché qu’au terme de négociations finales de paix entre Israéliens et Palestiniens. Une Loi fondamentale est plus difficile à modifier à la Knesset qu’une loi classique, elle demande à être remplacée par une autre. La droite, par cet article, s’inscrit dans la continuité de la reconnaissance unilatérale historique de Jérusalem comme capitale par les Etats-Unis, en décembre 2017. Ce fait accompli connaît ainsi un prolongement législatif. Or, dans les différents plans de paix étudiés par les deux parties depuis les accords d’Oslo (1993), l’hypothèse d’une capitale pour deux Etats était retenue. Un autre point très sensible pour la minorité arabe israélienne et pour les défenseurs des droits de l’homme concerne le statut de la langue arabe, qui est dégradé. Elle n’est plus dorénavant langue d’Etat, au même titre que l’hébreu, mais se voit promettre un vague « statut spécial ». Enfin, la nouvelle Loi fondamentale se penche sur « le développement des communautés juives », considérées comme « valeur nationale ». Elle affirme que l’Etat « agira pour encourager et promouvoir leur établissement et leur consolidation ». La formulation initiale de cet article prévoyait la possibilité d’établir des communautés uniquement réservées aux juifs. Elle avait provoqué de vives critiques de la part du procureur général, Avichaï Mandelblit, de nombreux autres juristes s’émouvant de l’institutionnalisation de la discrimination contre les Arabes. Le président Réouven Rivlin, dans une démarche rare, avait même pris la plume pour alerter les députés. « Regardez la société israélienne et demandez-vous : au nom de la vision sioniste, sommes-nous prêts à soutenir la discrimination et l’exclusion d’hommes et de femmes sur la base de leur origine ethnique ? » Une inégalité entre citoyens ancrée dans la loi ? Le mot « démocratie » est absent de la Loi fondamentale. Mais c’est surtout l’inégalité entre citoyens qui est fustigée par ses critiques. Un seul député du Likoud, Benny Begin, a exprimé de vives réserves et s’est abstenu au moment du vote. « Un patriotisme qui n’est pas associé aux droits de l’homme dégénère en nationalisme », a-t-il averti. Le leadeur travailliste à la Knesset, Isaac Herzog, a pris la parole devant les députés pour s’émouvoir du déséquilibre que le texte introduisait entre citoyens juifs et non juifs : « Nous sommes très attristés du fait que le principe d’égalité, qui a représenté un acquis inestimable dans la défense de la bonne réputation d’Israël, a disparu de cette loi. » Le député du Likoud qui a porté le texte, Avi Dichter, s’est pour sa part adressé aux députés arabes, selon un compte rendu du site Ynet : « Vous n’étiez pas là avant nous et vous ne serez pas ici après nous. » Le contraste est fort avec la déclaration d’indépendance de 1948, proclamant « la fondation de l’Etat juif dans le pays d’Israël », qui était bien plus ouverte dans ses formulations. Il y était notamment écrit ceci, au sujet de l’égalité des droits entre tous ses citoyens : « L’Etat d’Israël sera ouvert à l’immigration des juifs de tous les pays où ils sont dispersés ; il développera le pays au bénéfice de tous ses habitants ; il sera fondé sur les principes de liberté, de justice et de paix enseignés par les prophètes d’Israël ; il assurera une complète égalité de droits sociaux et politiques à tous ses citoyens, sans distinction de croyance, de race ou de sexe ; il garantira la pleine liberté de conscience, de culte, d’éducation et de culture ; il assurera la sauvegarde et l’inviolabilité des lieux saints et des sanctuaires de toutes les religions et respectera les principes de la charte des Nations unies. » Les magistrats de la Cour suprême auront à présent l’immense responsabilité d’interpréter, au cas par cas, dans les affaires de discrimination collectives ou individuelles, les articles controversés de cette Loi fondamentale. 1 Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
Wallaby Posté(e) hier à 16:33 Share Posté(e) hier à 16:33 https://www.thenational.scot/news/25496262.edinburgh-becomes-first-city-scotland-boycott-israel/ (25 septembre 2025) Édimbourg est devenue la première ville d'Écosse à boycotter Israël. Jeudi, les conseillers municipaux ont voté en faveur d'une motion qui rapproche la capitale de la mise en œuvre du boycott, du désinvestissement et des sanctions (BDS) contre Israël, en opposition au génocide en cours à Gaza. La motion, présentée par le conseiller municipal écologiste écossais Ben Parker, exprimait sa solidarité avec les Palestiniens et appelait le gouvernement écossais à confirmer les mesures qu'il compte prendre pour garantir que les autorités locales puissent adopter légalement des politiques BDS. Cette décision fait suite au vote du Parlement écossais en faveur d'un boycott immédiat d'Israël et des entreprises complices des opérations militaires israéliennes et de l'occupation de la Palestine. Commentant l'adoption de la motion, soutenue par le SNP et le Parti travailliste écossais, le conseiller Parker a déclaré : « Aujourd'hui, le conseil a pris une mesure visant à garantir qu'aucun fonds public ne soit utilisé pour soutenir le régime génocidaire du gouvernement israélien en Palestine. Lien vers le commentaire Partager sur d’autres sites More sharing options...
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