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Guerre civile en Syrie
Bat a répondu à un(e) sujet de maminowski dans Politique etrangère / Relations internationales
En fait, je pense qu'on parle de deux choses différentes en même temps sans pouvoir les distinguer, ce qui embrouille un peu. J'essaie de clarifier. Personnellement, je pense qu'en-dehors d'un conflit ouvert, il n'y a aucune raison d'ouvrir le feu sur un appareil civil ou militaire en raison d'une simple violation d'espace aérien. Sur ce plan, je suis donc opposé à l'action turque: on l'a dit et redit, il y avait d'autres manières de manifester à la Russie le problème, comme escorter l'appareil, introduire une protestation diplomatique, ou simplement un lock sans tir. La difficulté, c'est que même en pensant ça, je ne peux souscrire aux explications des membres qui trouvent dans le droit matière à blâmer la Turquie. Pour eux, l'infraction n'étant pas clairement établie, ou n'étant pas si grave, n'aurait dû rien entraîner du tout, et c'est le droit qui le dirait. Sauf qu'on peut opposer deux autres arguments: d'une part, c'est faux (si j'ai bien suivi les échanges des pages précédentes, un appareil qui viole l'espace aérien peut apparemment être abattu sans plus de formalités). D'autre part, on avance plus ou moins indirectement l'idée que comme c'est un avion de combat, il jouirait d'une sorte d'immunité (délivrée par qui?) qui ne rendrait pas applicable le droit commun (entendons ici: appliqué aux civils). Intellectuellement, c'est peu satisfaisant. e qui m'amène à deux réflexions, de portée différente. 1. Pourquoi les Turcs ont-ils tiré? pourquoi ont-il tiré pour si peu? pourquoi les Russes les ont-ils ignorés jusqu'à ce qu'ils se sentent autorisés à tirer? Pourquoi les Russes volent-ils sans radio ou sans radio branchées sur les fréquences internationales? etc. Le droit ne répond à aucune de ces questions: les Turcs avaient d'autres instruments à leur disposition pour atteindre les objectifs qu'ils annoncent être les leurs, et les Russes aussi. Face à ces contradictions, ma position consiste à dire que le droit est un élément parmi d'autres, et qu'à vouloir ne lire cet incident que dans les termes du droit, comme certains le font ici, on passe en réalité à côté de toute l'affaire: ni Russes, ni Turcs n'ont agi en fonction du droit, mais par contre il est manifeste qu'ils instrumentalisent le droit pour se justifier a posteriori devant la communauté internationale (les Turcs en prétendant n'avoir fait qu'appliquer une règle, un peu comme un PV automatique, les Russes en prétendant n'avoir rien fait et en fournissant des explications complètement vaseuses). Le droit dit une chose, peut-être, mais si on se limite à ça, on peut discuter encore 10 pages et on sera toujours au même point. Il faut, au moins, accepter que personne dans ceux qui brandissent le droit ou le réinterprètent à leur sauce de forumeur ne sonte n mesure ed dire quoi que ce soit de pertinent pour éclairer l'affaire. 2. Pour la même raison, le caractère armé ou non est un faux problème. Si on utilise l'argument du droit à la lettre, peu importe qu'il ait té en configuration lisse ou doté d'un missile nucléaire: il n'avait qu'à pas être là, point. Tout le monde sera d'accord pour dire que c'est grotesque: il y a une marge d'appréciation qui est indispensable. De mon point de vue, cette marge d'appréciation ne soit toutefois pas se contenter de considérer qu'un avion militaire peut faire ce qu'il veut pourvu que ça n'ait pas l'air "agressif" (sous entendu: OK, le Sukhoï survolait la Turquie mais comme il volait en ligne droite ça ne compte pas comme une vraie violation: c'est à peu près ce que certains ont dit). D'une part parce que la notion "d'agressif", si elle est codifiable, reste quand même assez floue car elle-même sujette à interprétation ("il s'est dirigé droit vers moi malgré mon avertissement, j'ai cru qu'il m'attaquait" vs "j'ai continué tout droit sans changer mon cap, c'est bien la preuve que je n'avais aucune intention mauvaise, sinon j'aurais fait des évasives"). D'autre part parce qu'alors, on pourrait utiliser le même argument pour justifier, par exemple, l'Airbus Iranair abattu par un destroyer US (en 88, je pense), mais aussi pour dire que les Turcs ne peuvent pas invoquer la défense de leur espace aérien pour trer sur un casseur étranger. C'est quand même contradictoire: pourquoi un avion en opérations de guerre, même contre un belligérant qui n'a rien à voir, serait-il plus protégé juridiquement qu'un liner dans son couloir aérien? Pour moi, c'est pourtant à ca que mènent les arguments légalistes pris au pied de la lettre. Enfin, pour les exemples que tu as cités, je ne les connais pas tous, mais ceux que je connais montrent précisément que ce n'est pas le droit qui a prévalu, même (et surtout) lorsqu'on n'a pas tiré. Par exemple, le MiG-23 sans pilote qui a traversé toute l'Europe pour se crasher en Belgique n'a pas été abattu non parce que cela aurait été illégal, mais me semble-t-il (à ce que j'avais entendu quelque temps après) parce que les SR espéraient récupérer des morceaux en bon état s'il tombait à court de carburant. D'autre part, droit ou pas, cela aurait pu énerver les Soviétiques, si susceptibles, même s'il n'y avait plus de pilote à bord. À nouveau, le droit dit une chose, mais il ne détermine pas tout: sur le coup, c'ets le souci de préserver la détente et une source de renseignement qui l'a emporté sur le respect du droit. -
Guerre civile en Syrie
Bat a répondu à un(e) sujet de maminowski dans Politique etrangère / Relations internationales
J'ai écrit trop vite, je voulais dire "potentiellement armé". Ce que je veux dire n'est pas que le Sukhoï, étant (peut-être) armé, présentait ici une menace pour la Turquie. Mais simplement de faire attention à l'argument strictement légaliste qui, poussé au bout de la logique que tu esquisse, reviendrait à justifier plus facilement le tir sur un liner civil que sur un avion de combat. -
Effectivement, c'est un bel exploit technique (avec un ralentissement très très spectaculaire! ce qu'à la NASA on appelle un "suicide burn": celui qui arrête la fusée pile au niveau du sol), mais qui ne préfigure en rien un lanceur spatial. S'il peut permettre à terme à des dizaines de fortunés de s'offrir le grand frisson du lancement, de la courbure de la terre et de la descente, ce truc est incapable de mettre quoi que ce soit en orbite, tout simplement parce qu'il n'est pas conçu pour. Pour y arriver, il faudrait (au choix) réduire la charge utile, augmenter et alourdir l'étage de propulsion, éventuellement ajouter un étage supplémentaire (pour faire la jonction entre le suborbital et l'orbite), etc. Avec au final un engin qui serait plus lourd, plus cher et moins réutilisable, ou au prix de coûts et sophistications supplémentaires. Enfin, c'est une étape, un début. On verra ce que réserve la suite. En attendant, good game à l'équipe!
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Guerre civile en Syrie
Bat a répondu à un(e) sujet de maminowski dans Politique etrangère / Relations internationales
Ce n'est quand même pas si simple: alors que la plupart des états ont développé des scénarii et procédures se donnant le droit d'abattre des appareils civils qui ne répondraient pas aux appels radio et qui poursuivraient leur route en cas d'interception (suite du 11 septembre 2001), avec quelques garde-fous certes, si on suit ta logique à la lettre, on ne pourrait par contre pas tirer sur un appareil militaire armé. Si je fais cette comparaison douteuse (mais vraie), c'est juste pour montrer que les paramètres qui entrent en jeu dans ce genre de situations dépassent de loin le caractère strictement légal, et qu'on (les pilotes, l'EM, l'autorité politique) ne réfléchit pas dans un contexte de crise comme on peut le faire ensuite en disséquant la chose pendant des jours sous divers angles. Non que j'excuse spécialement les Turcs —pour moi, c'est de leur part une provocation pour le moins imbécile, voire criminelle—, mais il ne faudrait pas que la débilité de l'acte masque les autres zones sombres du dossier, et notamment le fait qu'on a là le résultat de toute une série de négligences, de non-dits, de jeux de billard à X bandes, etc. Comme par exemple: pourquoi les équipages de Sukhoï n'ont pas répondu aux appels (l'argument des 2 radios des 2 appareils en panne est quand même un peu gros, où alors il faut une enquête sérieuse côté russe sur leur façon d'envoyer des équipages au casse-pipes)? pourquoi les appareils russes passent-ils régulièrement dans l'espace aérien turc en niant ensuite? pourquoi la Russie ne tient-elle pas compte des avertissements (par voie diplomatique) de la Turquie? Je suis d'accord que les Turcs n'auraient jamais dû tirer, mais s'ils l'ont fait c'est qu'ils ont une série de raisons de le faire, et que les Russes se sont comportés aussi d'une manière telle qu'ils leur en ont donné le prétexte (comme p.ex ne pas répondre ou ne pas s'identifier: rien qu'en disant qui ils sont et disant où ils allaient, la Turquie n'aurait plus eu son prétexte). Les Turcs ont été très bourrins sur ce cas, c'est un fait, ils ont une attitude pour le moins ambigüe en Syrie, c'en est un autre. Mais il serait très naïf de laisser croire que le droit est très clair, que les Turcs sont juste des sauvages à la gâchette facile qui tirent pour un oui pour un non et que les comportements russes (ou américains, français...) seraient sans équivoques et arrières-pensées génératrices de tensions et dangers. Une crise, ça se joue à plusieurs. L'incident est en fait plus gênant par ce qu'il révèle au grand jour du foutoir général qu'est devenue la Syrie qu'en raison de la nature de l'incident lui-même. -
Guerre civile en Syrie
Bat a répondu à un(e) sujet de maminowski dans Politique etrangère / Relations internationales
L'un n'empêche pas l'autre! -
Guerre civile en Syrie
Bat a répondu à un(e) sujet de maminowski dans Politique etrangère / Relations internationales
Bon, la nuit a passé, la 3° guerre mondiale n'a (encore?) pas éclaté, Erdogan n'a pas entraîné la France dans un conflit nucléaire avec la Russie, ouf. Je me permets donc de revenir aux questions que je posais hier après-midi, au-delà du cas spécifique du Sukhoï abattu hier, parce que cela m'intéresse et, tout naïf que je sois sur ces questions, ça m'a l'air une des dimensions importantes dans des incidents de ce type et je m'étonne que le sujet n'ait pas été abordé (du moins, je ne le l'ai pas vu en reparcourant rapidement les 15 dernières pages). Est-ce que quelqu'un "du milieu" (type AdlA, contrôle aérien ou même naviguant civil, p.ex) serait en mesure d'apporter quelques éclaircissements à ce sujet: Dans le cas du Sukhoï russe, je note qu'apparemment les autorités russes auraient dit que les radios de l'avion étaient en panne (c'est une info confirmée, ou une rumeur?), ce qui est une autre façon de (ne pas) répondre, mais si on fait abstraction de ça, un avion se voie notifier par un pays voisin avec lequel il n'est pas en guerre que s'il poursuit tel cap ou passe telle limite, on tire, le pilote est supposé faire quoi? -
Guerre civile en Syrie
Bat a répondu à un(e) sujet de maminowski dans Politique etrangère / Relations internationales
Il faudrait savoir ce qu'on veut. Quand ils interviennent, ils sont irresponsables, boutefeu, arrogants et impérialistes. Quand ils ne font rien, c'est une honte, ils sont irresponsables, qu'est-ce qu'ils attendent, ah mais ça ne va pas. La politique américaine est, certes, blâmable sous bien des plans, mais comme je le dis: il faut aussi arrêter avec les fantasmes, qui n'ont pour intérêt que renforcer les préjugés de ceux qui en avaient. Objectivement, du point de vue US, la Syrie n'est pas un gros problème. L'EIIL en Irak, oui, ça l'était (l'est), mais la Syrie, franchement... Ils laissent les gens plus impliqués se démerder et ils contrôlent vaguement et comme ils peuvent de loin. Exactement comme le ferait à peu près n'importe quel pays sans intérêt direct dans un conflit, superpuissance ou pas. -
Guerre civile en Syrie
Bat a répondu à un(e) sujet de maminowski dans Politique etrangère / Relations internationales
Je pense que l'expression de Henri, qui explique le comportement Américain par une "volonté que ça dure", est erronée. À mon sens, les Américains ne veulent pas que la guerre se poursuive, mais font face à deux problèmes: d'une part, sortant de deux guerres longues, coûteuses et impopulaires, ils n'ont aucune envie de s'impliquer sur le terrain pour régler le problème. D'autre part, toutes les autres alternatives crédibles à la guerre qui se dessinent, comme par exemple relancer Bachar-el-Assad pour un tour, sont à leurs yeux problématiques pour plein de raisons. Bref, faute de plan crédible et de volonté fait que ça dure. C'est très différent. C'est du fantasme pur que de croire que les USA n'ont qu'à claquer des doigts pour déclencher une guerre (en-dehors de celles où ils attaquent eux-mêmes, bien sûr!), ou pour y mettre fin. Ils ont du poids, c'est sûr, mais pas absolu, et dans cette affaire syrienne, il n'y a pas qu'eux. -
Guerre civile en Syrie
Bat a répondu à un(e) sujet de maminowski dans Politique etrangère / Relations internationales
En gros, certains ici se disputent sur l'avertissement turc aux pilotes russes. Les uns disent "la Turquie a tiré après violation de la frontière alors qu'ils avaient averti", les autres disent "les avertissements n'ont aucune portée sachant qu'alors l'avion russe était (encore) en Syrie". OK? Question purement technique/juridique, pas la peine de refaire 10 pages de supputations. Admettons l'hypothèse la plus vraisemblable d'avertissement encore en Syrie, shoot en Turquie. Quelle est la portée juridique d'un avertissement de type "je vous vois, vous vous dirigez droit sur la frontière, préavis: si vous passez la frontière, je tire"? Autrement dit, l'avertissement doit-il obligatoirement avoir lieu après la violation, ou cela a-t-il du sens de le faire avant? Question corollaire: dans quelle mesure un avertissement de ce type est-il contraignant pour un équipage? Question subsidiaire: on ne sait pas ce qu'il en est dans le cas présent, mais "ceux qui savent" ici, quel type de consignes ont les équipages s'ils se voient adressé un tel avertissement? Faire demi-tour? Répondre en s'identifiant et établir le contact? Ignorer et continuer tout droit? Je me pose ces questions sachant qu'il me semble qu'il y a des précédents d'avertissements hors d'un espace interdit, non suivis de tir, généralement car l'avertissement a été pris en compte par le pilote. Même si le Russe était dans son droit, n'est-ce pas une imprudence/une erreur/une faute de la part du pilote russe de ne pas avoir répondu (par exemple en n'annonçant pas son intention)? -
Guerre civile en Syrie
Bat a répondu à un(e) sujet de maminowski dans Politique etrangère / Relations internationales
Voire qu'il a refusé de répondre aux demandes de vérifications et a dû être abattu alors qu'il s'échappait... C'est, effectivement, prévisible au niveau des arguments, quoiqu'il se soit passé exactement. -
Guerre civile en Syrie
Bat a répondu à un(e) sujet de maminowski dans Politique etrangère / Relations internationales
Ceci pourrait donner une clé d'explication: http://www.todayszaman.com/diplomacy_assad-expands-military-operation-to-turkmen-villages_404890.html L'appareil a été abattu dans une zone frontalière dans laquelle se déroule depuis plusieurs jour une offensive loyaliste soutenue par la Russie, que la Turquie veut faire suspendre: -
Guerre civile en Syrie
Bat a répondu à un(e) sujet de maminowski dans Politique etrangère / Relations internationales
N'exagérons rien: on n'a aucune information officielle et on fait déjà le procès de ce que les médias... n'ont pas dit. Alors que les médias russes crient à l'avion russe abattu, nos médias restent assez circonspects en parlant, pour l'heure (regardé il y 5 min), "d'appareil non identifié" ou "de nationalité non précisée". Personnellement, je pense plutôt à un éventuel vieux conflit turco-syrien sur le passage exact de la frontière et la délimitation de l'espace aérien, zone floue dans laquelle les Russes auraient eu le malheur (ou la volonté) de passer trop régulièrement avec leurs appareils. C'est, en effet, apparemment toujours dans la même zone (si on exclut le Phantom abattu, au-dessus de la mer) qu'ont lieu les incidents (avec les loyalistes il y a 3 ans, déjà) sur plusieurs centaines de km de frontière commune. Il y avait des conflits frontaliers turco-syriens non résolus avant la guerre? (J'ai cherché mais pas trouvé.) EDIT - Depuis 2 minutes, iTélé dit que l'avion abattu est russe. -
Guerre civile en Syrie
Bat a répondu à un(e) sujet de maminowski dans Politique etrangère / Relations internationales
"Pourquoi", je ne sais pas, mais c'est un fait que la Turquie se plaint de violations répétées de son espace arien depuis plusieurs mois, et de manière plus récurrente depuis plusieurs semaines (début de l'engagement russe). Ce n'est donc pas un cas isolé. Elle a régulièrement menacé qu'elle abattrait les appareils pris en flagrant délit et, me semble-t-il, l'a déjà fait avec des hélicoptères syriens. Les turcs disent ce matin qu'un drone a violé sa frontière, entraînant le décollage de chasseurs d'alerte qui ont shooté le Su arrivant derrière. La Russie affirme pouvoir prouver que l'appareil, qu'elle n'a pas dit être à elle me semble-t-il (du moins officiellement), n'avait à aucun moment violé l'espace aérien turc. -
terrorisme Daesh
Bat a répondu à un(e) sujet de Philippe Top-Force dans Politique etrangère / Relations internationales
Article complet: http://www.lalibre.be/actu/international/la-chine-s-engage-elle-aussi-contre-daech-564f71303570ca6ff90ca782 -
Vu qu'il y a au moins 3 4 nouvelles pages (!) depuis ma dernière intervention, je ne vais pas répondre point par point en arrivant en retard comme les cavaliers d'Offenbach, surtout que c'est un peu HS, mais quand on parle de délinquance, homicides, etc., il faut garder en tête quelques choses que pointent tous les chercheurs qui travaillent sur ces questions: Il ne faut pas confondre nombre d'homicides et taux d'homicides: en 150 ans, le nombre d'homicides par an est resté globalement stable (autour de 1000, jusqu'à ces 30 dernières années où ça a baissé autour de 800), mais dans le même temps la population française a doublé. Le taux d'homicide/100.000 habitants a donc chuté considérablement. (C'est un des dadas de l'histoire quantitative de la violence à la mode dans les années 1970.)Pour Tonton Flingueur, il faut savoir que sur l'après-guerre, la diminution n'est pas continue. La période que tu évoques (années 70 et guerre des gangs) correspond en effet à un pic, qui chute après 1980 (en gros: pic avec la première vague de chômage de masse). Mais comme le dit Tancrède (je pense), l'essentiel des homicides ne s'explique par ces seuls règlements de compte: on se tue surtout (dans 80% des cas environ) entre époux, amants, parents et enfants, entre voisins. Cette tendance de fond est en baisse, et s'explique, selon les spécialistes, par la "pacification des mœurs".Là-dessus, je suis donc d'accord avec Tancrède: il ne faut pas transformer la corrélation en causalité. Ce n'est pas parce que la baisse de la violence correspond à des politiques moins répressives que ce sont celles-ci qui font baisser la délinquance. On est dans un mécanisme complexe. Mais dans ce cadre, on note quand même (recherches statistiques comme recherches qualitatives) que la plus grande sévérité des peines a peu d'influence sur la commission des actes: le délinquant visé pense toujours qu'il ne sera pas pris, qu'il est plus malin que la police, qu'il est une exception, qu'il s'en sortira, etc.Si les homicides diminuent, la délinquance explose: oui et non. Sujet récurrent, serpent de mer! Les chercheurs qui travaillent là-dessus sont toutefois d'accord sur deux choses. D'une part, cette hausse est surtout visible dans les statistiques de police, pas de justice: ces statistiques de police mesurent l'activité des forces de police et non la délinquance (en clair, si la police a pour instruction d'arrêter les dealers de shit, la catégorie "trafic de drogue" va augmenter alors que celle "vols à la roulotte", p.ex, baissera, parce que les policiers ne peuvent pas faire les 2 en même temps; pourtant ni l'un ni l'autre n'a globalement monté/baissé: c'est juste leur enregistrement qui change). D'autre part, la définition des délits change avec le temps. Il est difficile de comparer clairement les choses dans le temps long, simplement parce que ce qui n'était pas un délit/crime hier peut le devenir (p.ex la répression des incivilités), ou peut être nouveau du fait des évolutions sociales et technique (comme l'avait dit Morano: on pratiquait très peu le vol de téléphone portable il y a 30 ans).Attention à ne pas confondre mesures d'exception suspendant totalement ou partiellement la légalité (type état de siège, état d'urgence, suspension de l'habeas corpus, etc.) et politique répressive dans le cadre de la légalité (typiquement: la "tolérance zéro" mise en œuvre notamment par Rudy Giuliani). On serre la vis, mais (en principe) sans s'affranchir des principes du droit. Sur le plan de la démocratie, c'est très différent!
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Ce sont les travaux en histoire du droit et de la justice, en sociologie, en criminologie dont je parlais. (Désolé, je me suis emmêlé les pinceau dans les paragraphes, on dirait effectivement que ce sont deux choses différentes.) Ils montrent, en très résumé, que les mesures les plus sévères et/ou violentes ne sont pas les plus efficaces pour lutter contre le crime et la violence au sein de la société. La violence en France aujourd'hui, mesurée par exemple par le nombre d'homicides, est nettement inférieure à ce qu'elle était 35 ans plus tôt alors qu'on avait une législation nettement plus répressive (p.ex, en 40 ans, on est passés de 3 homicides pour 100.000 habitants/an à un seul, ce qui invalide totalement l'idée de caractère dissuasif de la peine de mort, par exemple; des travaux plus récents sur la récidive montrent que la sévérité des peines est globalement sans effet sur la récidive). Si on s'intéresse plus spécifiquement aux situations exceptionnelles comme les guerres (et non la délinquance ou violence "ordinaires"), nombre de travaux (en histoire notamment) montrent les limites des logiques répressives (type lois d'exception, internements, déportations, voire exécutions). Si elles peuvent temporairement donner l'impression que la situation est "sous contrôle" en maintenant le couvercle, elles sont en réalité de peu d'efficacité sur l'éradication des causes de la violence (terroriste ou guérilla). On notera que c'est globalement la même chose pour les épurations post-conflits: si une épuration sévère s'explique/se comprend, son caractère brutal et/ou sous loi d'exception ne règle pas grand chose en-dehors de contenter la foule qui demande des têtes. Si la France ou la Belgique ont pu évoluer vers un apaisement social sur la collaboration, c'est essentiellement lorsque de sévère et sous procédures d'exception, elle est passée à une justice plus normale. On peut y ajouter des constats plus contemporains où l'on constate que les régimes qui ne sont pas les plus respectueux du droit de la défense ou des droits de l'homme ne sont pas pour autant immunisés contre la violence et le terrorisme (Russie, Chine, p.ex). Dans un certain nombre de cas, c'est même contreproductif (pensons aux Ouïgours en Chine, que la répression pousse vers la violence). Le seul vrai exemple où on peut dire que ça a totalement marché est peut-être la Corée du Nord, mais objectivement, je pense que pas grand monde n'a envie de vivre en Corée du Nord, même si c'est un état qui aurait supposément éradiqué tout risque terroriste. Pour parler des exemples et contre-exemples cités dans l'échange qui s'est poursuivi pendant que j'écrivais ce qui précède, quelques observations: Internement des partisans pro-nazis en Angleterre durant la guerre (jusque 1943 pour la majorité d'entre eux, en fait): si la démocratie britannique a survécu à la guerre, l'internement s'est quand même fait par un renoncement à son principe premier, à savoir l'habeas corpus, qui a été suspendu pour permettre l'internement. La démocratie a survécu, mais elle a été suspendue.Internement des Américains d'origine japonaise: cela a été permis par contournement des règles démocratiques. Un décret présidentiel a permis aux commandants militaires de décréter des zones d'exclusion au sein desquelles ces citoyens ont été internés par l'armée. Cela s'apparente plus à "l'état de siège" en France qu'à "l'état d'urgence" actuel. On notera que les internés ont obtenu (30 ans après) des réparations après que leur internement ait été déclaré illégale et fondé sur des préjugés racistes.Etat d'urgence durant la guerre d'Algérie: il est intéressant de noter que l'état d'urgence tel qu'il a été redéfini alors (et qui est toujours en vigueur aujourd'hui) visait avant tout à donner le pouvoir aux civils (par méfiance envers les militaires dont une partie de la hiérarchie désapprouvait la politique qui menait à l'indépendance), pour empêcher de décréter l'état de siège qui, lui, aurait totalement suspendu la démocratie. Il faut aussi noter que les violences politiques (surtout en métropole) se sont poursuivies malgré l'état d'urgence. Il est en fait plus utile pour assurer la réponse de l'état aux attaques qu'à leur empêchement.
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L'idée que la bonne vieille méthode un peu brutale qui s'affranchit partiellement des principes du droit marcherait mieux pour protéger les populations est largement battue en brèche par la réalité. En complément de la bienvenue réaction de Wallaby, on notera que la plupart des travaux scientifiques (en histoire de la justice et du droit, en sociologie, en criminologie) montrent que "ce qu'on a toujours fait" (avant l'état de droit moderne) apparaît globalement comme peu efficace. Nos sociétés européennes sont dans l'ensemble beaucoup moins violentes qu'il y a 100, 200 ou 300 ans, alors qu'on a supprimé la peine de mort, la perpétuité réelle (sauf pour quelques rares cas), le bagne, et qu'on a augmenté les droits de la défense, développé les peines alternatives et libérations conditionnelles, etc. C'est d'ailleurs probablement pour ça qu'on est si choqués quand il y a un acte de violence, et a fortiori un attentat abominable comme ceux du 13 janvier qui en un seul jour font autant de victimes que deux années d'homicides sur toute la grande région parisienne. Au niveau du terrorisme, qui est une délinquance très spécifique, les mesures d'exception ont, dans l'histoire, plutôt tendance (avec nuances, selon les contextes et ampleur du phénomène) à renforcer la détermination des terroristes et à renforcer leurs soutiens.
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terrorisme Daesh
Bat a répondu à un(e) sujet de Philippe Top-Force dans Politique etrangère / Relations internationales
Sur "des objectifs terroristes". C'est la blague qui circule dans certains milieux pour le moment: —Qu'est-ce qu'un objectif terroriste? —C'est là où tombe une bombe russe. (Pour ceux qui ne comprendraient pas: c'est raconté par ceux qui disent que les bombardements russes ne feraient pas dans la dentelle, leurs porte-paroles rebaptisant alors "objectif" tout poi,t d'impact, recréant a posteriori la précision qui manquerait aux frappes. Je ne dis pas que c'est vrai, mais ça circule.) -
terrorisme Daesh
Bat a répondu à un(e) sujet de Philippe Top-Force dans Politique etrangère / Relations internationales
Je suis en grande partie d'accord avec toi (notamment sur le côté contreproductif de bombardements, surtout indiscriminés), y compris sur la traduction concrètes de ces idées. À mon avis, une doctrine comme celle de McCrystal est surtout intéressante dans la mesure où elle indique ce qu'il ne faut surtout pas faire peut-être plus que ce qu'il faut faire. Par exemple, penser qu'on va libérer l'hinterland sunnite avec les Kurdes épaulés par les aviations coalisées —comme je l'ai lu récemment— est un rêve totalement déconnecté de la réalité: outre que les Kurdes n'en ont probablement ni les moyens ni l'envie (ils se battent essentiellement dans le cadre d'une lutte d'indépendance), et ne seront de toute façon pas accueillis en libérateurs (plus ils s'éloigneront du Kurdistan, plus ils soulèveront une opposition). Dans cette perspective, l'axe Moscou-Washington-Paris-Téhéran-Damas, s'il peut assurément peser militairement sur le terrain, va jouer comme aimant à jihadistes puissance dix, sur place ou dans les pays impliqués. Et, malheureusement, je crains qu'une posture sécuritaire en interne jouera le même rôle si on s'affranchit des principes de l'état de droit (avec des lois et procédures spéciales, etc.), car cela signalera à des candidats jihadistes —pour la plupart nés et éduqués chez nous, donc connaissant ces valeurs— que le complot mondial pré-apocalyptique qu'ils fantasment est réel. La preuve: les états sont prêts à tout pour les combattre, y compris renier tous leurs principes. Ça légitime leur action (au moins à leurs yeux), ça renforce leur prestige (malgré l'Univers entier contre eux ils font face, grâce à Dieu), et ça confirme qu'ils doivent aller toujours plus loin puisqu'il n'y aura plus de limites dans la riposte (donc: rien à perdre et réalisation de l'apocalypse). Bref, tout indique que sans un processus politique sérieux et large, on n'arrivera à rien. Sauf que, comme tu le dis indirectement, c'est pas simple. Comme disent nos cousins québécois, on n'est pas rendus... -
Je m'inscris en faux: ça fait plusieurs semaines que différents médias généralistes mentionnent, à la marge et souvent via l'interview de spécialistes, l'usage de telles substances. Je l'avais par exemple noté sur France Inter il y a 10-15 jours. Un peu avant, je me rappelle d'un sujet sur le trafic de substances pharmaceutiques à destination des jihadistes en Syrie et en Irak. Après les attentats, cela a été évoqué dans l'un ou l'autre direct. Notamment en parlant du caractère méthodique et calme des tueurs, un invité disait (je ne sais plus sur quelle chaîne): "on ne sait pas encore si c'est le produit d'un entraînement rigoureux ou un effet de l'usage de Captagon. Les analyses toxicologiques nous le diront sans doute" (je cite de mémoire). EDIT: en fait, on en parle même depuis bien plus longtemps: Mai 2015: http://www.lexpress.fr/actualite/monde/proche-moyen-orient/le-captagon-la-drogue-qui-fait-oublier-la-peur-au-djihadistes-de-l-ei_1682589.htmlMai 2015: http://info.arte.tv/fr/la-drogue-de-daechJuin 2015: http://www.bfmtv.com/international/syrie-le-captagon-la-drogue-des-jihadistes-891893.htmlJuillet 2015: http://www.francetvinfo.fr/sante/drogue-addictions/captagon-la-drogue-des-combattants-de-daesh_981815.html
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Juste. Un Admin pour migrer les posts concernés?
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Stanley McCrystal avait théorisé cela, du temps de l'Irak, dans sa doctrine de contre-insurrection. Ça tenait en deux idées fortes: priver le poisson de l'eau dans laquelle il évolue, et cesser d'alimenter son récit. Il me semble que ces principes peuvent guider la lutte contre l'EIIL. Le premier volet, c'est ce que propose g4ally: il faut "détacher" les tribus sunnites qui ont fait allégeance à l'EIIL en leur offrant de véritables perspectives, un intérêt à le faire. Pour l'heure, tant qu'elles pensent moins risqué le fait d'être sous domination de l'EIIL que des milices sunnites ou kurde est un vrai problème. Même en imaginant que les Kurdes aidés par les occidentaux, par exemple, puissent reprendre une bonne partie du terrain aujourd'hui contrôlé par l'EIIL, cela ne résoudra pa sle problème, ou très temporairement: l'instabilité demeurera et nombre de tribus sunnites se rallieront au premier groupe sunnite qui proposera de faire la guerre à ce qui sera considéré comme un occupant. Le second volet, c'est comprendre la rhétorique et la logique jihadiste, et la manière dont elle mobilise sur place ou en occident. Ils sont en gros dans une posture consistant à présenter le sunnisme comme le seul vrai islam et, surtout, comme menacé par le monde entier auxquels ils parviennent à résister grâce à l'aide de Dieu. Plus l'EIIL peut montrer qu'il —lui, métonymie du sunnisme et plus globalement du "vrai" Islam— est victime d'une vaste persécution ourdie par le monde entier contre les aspiaryions légitimes des sunnites, plus in parvient à convaincre les populations sunnites de la justesse de son récit, donc de sa légitimité. Et sur ce plan-là on est plutôt mal barré car tout "prouve", aux yeux des jihadistes, que leur lecture est la bonne: tout le monde est ligué contre eux: les chiites, Bachar el-Assad, l'Iran et la Russie d'une part, les Occidentaux et les Kurdes de l'autre. Bref, tous leurs pires ennemis dans l'imaginaire collectif local. Une grande coalition qui alignerait Occidentaux, Russie, Iran et gouvernementaux ne ferait que renforcer cette idée de vaste complot international monté dans le seul but de combattre les légitimes aspirations sunnites. Sans embarquer dedans le Qatar, l'Arabie saoudite ou les EAU à une place primordiale, ça ne passera jamais. Sauf qu'on en est loin car ces mêmes pays ont une opinion qui soutient les jihadistes, et sont par ailleurs engagés sur d'autres front contre les chiites et l'Iran. C'est, en gros, l'idée développée ici, dont j'ai repris quelques idées: http://www.revuenouvelle.be/Protege-comment-lutter-efficacement-contre-Daesh
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Les énormités et clichés du cinéma et séries télévisées
Bat a répondu à un(e) sujet de Kiriyama dans Livres, magazines, multimédia, liens et documentation
Dans le genre "n'importe quoi ou presque", j'ai récemment découvert ce chef-d'œuvre du genre de 1984. Très eighties et très série B, mais c'est marrant à regarder avec le recul. Red Dawn, John Milius, 1984. -
J'ai raccourci car la suite nous entraînerait HS, je pense. Si tu as confiance que des lois d'exception ne déraperont pas, moi pas: dans l'histoire, elles ont généralement dérapé, et pas que sous Vichy. Une loi contextuelle de nature à limiter les droits de la défense ou à attenter sans jugement à la liberté de certains, au départ pour de bonnes raisons, finit toujours par être étendue, peut-à-petit. J'ai cité le cas du fichier ADN, mais on pourrait citer les écoutes téléphoniques, le délit d'association de malfaiteurs, la définition du "terrorisme", les garde-à-vue prolongées, etc. Le principe de précaution veut qu'on s'abstienne de faire n'importe quoi en la matière sans réfléchir à ces risques, donc. Par contre, je suis d'accord avec toi quant aux postures grandiloquentes: c'est du théâtre un peu ridicule et un peu vain, encore que le symbolisme puisse être utile. Mais ce n'est pas parce que je trouve que les postures ne suffisent pas ou ne servent à rien que je pense automatiquement que s'affranchir des principes élémentaires du droit est une bonne chose, au contraire.
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Je paraphraserais Churchill qui aurait dit durant la guerre: "alors (s'il fallait renoncer aux fondements de notre démocratie pour gagner), à quoi bon nous battre?" Si la défense de nos valeurs ne peut se faire qu'au prix du renoncement à nos valeurs les plus fondamentales, à mes yeux, ça n'en vaut pas la peine.